Ma sélection de séries, cru 2014

Ma sélection de séries, cru 2014

Ma sélection de séries, cru 2014

Comme vous l’avez compris, je dévore les séries télévisuelles — généralement américaines.

Voici un petit florilège de celles qui sortent vraiment du lot selon moi cette saison.

Game of Thrones, l’indétrônable ?

La série déjà culte est pour moi un abîme de sentiments paradoxaux entremêlés.

Du côté pile, le soin porté à la réalisation, aux décors, aux costumes, à la lumière, aux ambiances, aux personnages complexes, variés et vraiment incarnés par des acteurs époustouflants ne peut que me séduire. Comme tout le monde, je suis admiratif et conquis par la mise en images de Westeros, de Braavos et des terres orientales. Je n’ai pas le souvenir qu’une série télévisée, même avec les budgets actuels, ait un jour avant celle-ci aussi bien rendu l’ambiance d’un monde médiéval plus ou moins fantastique, avec autant de réalisme et de soin du détail. La profusion de couleurs et la richesse du monde sont un point essentiel pour moi dans un projet d’une telle ampleur.

Mais, du côté face, je ne puis m’empêcher d’enrager devant les intrigues gâchées reprises trop directement de l’écriture des livres de G.R.R. Martin, qui, entre nous soit dit (mais vous pouvez le claironner sur tous les toits quand même si vous le voulez, je ne nierai pas), écrit comme un pied. Si certains d’entre vous ont déjà lu les livres dont je parle (soit une série pléthorique en livres de poche, soit des pavés indigestes en plusieurs « intégrales »), ils comprendront ce qui me gêne, voire m’irrite, dans cette écriture synoptique à peine travaillée, aux épisodes hachés sans véritable logique dramatique, et surtout sans véritable but en tête.

Les « beautiful death » qui font tant parler sur les réseaux sociaux ne font pour moi que masquer l’incapacité de Martin à assumer une ligne directrice claire sur le plan de sa narration. Il semble en effet s’attacher à des personnages en particulier, qu’il montre clairement comme des héros, puis, sans autre raison que son envie de choquer, il les fait sortir du récit brutalement sans leur donner la véritable mesure de leur potentiel. Je pense à Robb Stark, par exemple et aux loups blancs des enfants Stark dont il escamote complètement le rôle pourtant très clairement affiché par lui au début de la saga.

On me rétorquera « oui, mais c’est plus réaliste, dans la vie, des gens prometteurs sont souvent fauchés par injustice, cynisme ou cruauté avant d’avoir réalisé ce qu’ils voulaient ».
Oui.
Cet argument peut porter une ou deux fois.
Pas à chaque fois.

D’autant qu’il y a quand même une exception à la règle : le personnage de Denaerys.
C’est vrai, elle ne partait pas bien dans la vie : utilisée par son frère comme monnaie d’échange pour un mariage politique à une brute barbare afin de consolider une alliance qui aurait permis de reconquérir le Trône de Fer, elle voit ce frère mourir sous ses yeux tué par son mari, auquel elle finit par s’attacher, mais qui est lui-même tué, puis elle perd son enfant en couches après avoir survécu in extremis à un empoisonnement elle-même.
Mais à partir du moment où elle devient la Mère des Dragons, plus rien ne lui arrive vraiment de fâcheux, surtout quand on compare avec le destin des autres personnages qui en ont bavé tout autant voire plus qu’elle…
Et pourquoi ?
L’injustice, encore ?

Je pourrais débattre encore bien longtemps de ce qui me paraît une hérésie narrative, mais le fait est que les livres sont écrits ainsi, et ça n’y changerait rien. Martin a d’ailleurs ses fans inconditionnels, et c’est tant mieux.

On pourrait imaginer que les scénaristes de la série puissent s’écarter de ce schéma préétabli. C’est ce qu’ils font parfois en rendant un peu de vie à ces intrigues corsetées, mais hélas seulement dans des détails. Des détails importants, comme le fait qu’Arya Stark se retrouve prisonnière de Tywin Lannister en personne et non d’un vassal, ce qui amène à plusieurs scènes extrêmement intéressantes. Ou des scènes avec les Marcheurs Blancs que l’on ne voit même pas dans les livres.
Mais hélas, tout ceci est bien trop marginal dans le flot de l’intrigue principale, respectée à la lettre (et jusqu’à l’issue du duel judiciaire de la saison 4)…

Au final, il faut bien l’avouer, Game of Thrones, malgré ses défauts, reste encore pour moi l’une des meilleures séries de 2014… mais seulement sur la dernière marche du podium, car à force de trop insister sur les côtés tranchants du métal, le Trône de Fer s’est pour moi émoussé.

Da Vinci’s Demons Saison 2, l’outsider ?

J’ai découvert l’année dernière une série sans grande prétention, mais qui met l’accent elle aussi sur une ambiance « à costumes ».

Le pitch de départ m’avait déjà accroché : les jeunes années du génial maestro à la cour de Florence sous le règne de Lorenzo Le Magnifique, le plus flamboyant des Médicis.

La saison 1 nous entraîne dans une intrigue où la politique des cités états italiennes se mêle à une lutte ésotérique pour retrouver une relique mystique appelée The Book of Leaves (le Livre des Feuilles sonne moins bien en français, non ?). Des sociétés secrètes (les Fils de Mithras), une mise en abîme par des visions du futur et du passé qui assaillent Da Vinci, une certaine intelligence dans la façon de mener les intrigues et de montrer le génie du Maître (avec des gestes le rapprochant des tics autistiques, notamment), des personnages hauts en couleur, tout cela m’avait donc ferré.

La saison 2 est aussi bien menée, et cette ambiance se prolonge encore, rappelant par certains côtés celle qui a bercé mon enfance à la lecture des Pardaillan de Zevaco, avec les codes actuels des séries américaines.
La réalisation, sans être fabuleuse, est très honnête, les acteurs sont convaincants, l’univers assez fouillé et pour peu que l’on accroche au thème, l’intrigue est intéressante.

En conclusion, une série devant laquelle on passe de très bons moments, même si l’on pourrait attendre un petit peu plus de flamboyance.

Penny Dreadful, la Révélation ?

Après la mode assez déprimante des séries de vampires ou de loups-garous aux prises avec des états d’âmes adolescents dignes des navets les plus insipides (Vampire Diairies et autres Teen Wolf), je commençais à désespérer de voir un jour quelque chose de regardable dans le genre fantastique/horrifique à tendance gothique.
Jusqu’au choc que fut Penny Dreadful.

La série, produite par Showtime qui avait déjà commis Dexter, est l’une des rares à ne pas avoir dû passer par la case Pilote pour être commandée par la chaîne. C’est déjà un exploit.

Les cinq premiers épisodes de la saison inaugurale sont tout simplement exceptionnels.

Le pitch : dans le Londres victorien, une jeune femme aux pouvoirs médiumniques très puissants (Eva Green) et un riche Lord, célèbre explorateur dont le rêve est de remonter les sources du Nil (Timothy Dalton), s’adjoignent les services d’un tireur d’élite américain hanté par son passé de tueur (Josh Hartnett) pour traquer une créature maléfique.

Vous n’aurez pas manqué de remarquer les noms des acteurs principaux. Et vous n’avez pas rêvé. Trois pointures. Un jeu soigné.

Mais c’est dans le traitement d’une trame manifestement assez classique et dans le jeu sur les codes du genre (Mina Harker, Abraham Van Helsing, Viktor Frankenstein, Dorian Gray… ça vous dit quelque chose ? Eh bien ils sont tous dans la série…) que l’on assiste à quelque chose de vraiment fouillé et original. Les images sont dignes là encore d’un véritable film, la réalisation est sans faille, et l’univers est violent et réaliste à la fois. L’époque victorienne est retranscrite avec ce je-ne-sais-quoi de familier et de suranné qui fait immédiatement penser à Bram Stocker, Mary Shelley et même Conan Doyle.
D’ailleurs, la créature fait bigrement penser à Dracula, et le jeune Fenton prisonnier du trio de conjurés ressemble à Renfield, le notaire fou du Comte Vlad, en plus jeune.

La touche gothique est soulignée par le spiritisme, l’égyptomanie, le spleen existentiel de Dorian Gray, les transgressions du Dr Frankenstein, les états d’âme de sa créature qui fait également penser au Fantôme de l’Opéra.
Bref, on plonge avec délectation dans cet univers à la fois familier et déroutant.

Pour moi, clairement, c’est la série-révélation de 2014.