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J’ai dix ans… et si tu m’ crois pas…

J’ai dix ans… et si tu m’ crois pas…

J’ai dix ans… et si tu m’ crois pas…

Je ne sacrifie plus aux billets de blog des bilans annuels depuis plusieurs années. Je ne suis pas un adepte des anniversaires de blog non plus. Pourtant, dans cet article, je vais tenter de recenser tout ce que la tenue de cet espace sur la Toile a changé dans ma vie. Parce que oui, créer un site, s’astreindre à écrire des articles de blog régulièrement, à l’entretenir, s’exposer sur internet, ça peut changer des choses. Et au départ, c’est même pour ça que je me suis lancé.

J’ai dix ans.

Et alors ?

Dix ans que je suis un Serpent à Plume

À sa naissance, ce site était essentiellement un blog. Je ne savais pas très bien ce que j’allais y publier, si ce n’était des billets qui auraient été un peu comme les feuillets d’un carnet de bord, d’un journal de voyage, à la manière des explorateurs du XIXe siècle et du début du XXe. Je savais seulement que je devais écrire. Je venais de traverser six longues années de désert d’écriture, après avoir réussi à (mal) publier mon premier roman et à produire, réaliser, monter, un moyen-métrage.

Après ces six années où ma vie personnelle avait connu divers bouleversements, je me sentais à nouveau suffisamment solide pour laisser émerger cette envie chevillée au corps, ce besoin viscéral de jouer avec les mots. Mais j’avais besoin d’une excuse, d’un prétexte, pour cela. J’avais besoin d’un alibi.

Ouvrir un blog, écrire à propos de mes lectures, de mes découvertes artistiques, de mon regard sur certaines œuvres, me semblait la parfaite justification à mon installation sur ce morceau d’internet.

D’emblée, pourtant, il m’a semblé évident d’assumer une double nature. Celle du Serpent à Plume.

Parce que j’avais déjà conscience depuis longtemps que mes centres d’intérêt se situaient dans deux grands domaines, que d’aucuns considèrent comme peu compatibles et qui pourtant ont réussi à se nourrir l’un l’autre : le domaine scientifique et du soin, et le domaine de l’écriture et de l’art du conteur en général.

Dix scipline d’écriture

Et pour écrire, j’ai écrit. C’était le premier objectif de d’écaille & de plume, et il a été atteint assez vite. J’ai commencé par deux articles par mois, puis même lorsque j’ai ralenti le rythme à un par mois, je n’ai jamais vraiment lâché. Cette discipline a, comme je l’avais prévu, débouché sur d’autres écrits. J’ai compris que cette dynamique, qui me prenait du temps, c’est vrai, me permettait de prendre des habitudes, des réflexes, et que cela finirait par m’entraîner à entamer à nouveau des écrits longs. J’ai donc, depuis dix ans, deux romans supplémentaires à mon actif, voire un troisième si l’on compte la série de podfiction des Consultations extraordinaires, dont le volume de signes couchés par écrit est comparable à ce que l’on attend en général d’un écrit long, et l’intrigue n’a rien à envier à mes autres travaux romanesques.

Cette discipline m’a aussi amené à apprivoiser des outils qui m’avaient intimidé auparavant, comme Scrivener, et donc à augmenter ma productivité d’écriture. J’en ai même fait toute une série de tutoriels, parfois techniques, sur comment s’en servir, puis comment concrètement fabriquer un fichier de livre, destiné à être imprimé ou à être publié sous forme électronique, voire audio.

J’ai ressenti un vrai plaisir à retrouver les sensations de graver un univers dans les octets d’un ordinateur.

J’ai mobilisé tout ce que j’avais appris jusque là dans des domaines connexes, comme l’interprétation d’un rôle au théâtre ou dans un jeu de rôle, les mécanismes de narration du cinéma, mes lectures, les centaines de films que j’avais ingurgités pendant mon enfance et mon adolescence.

Écrire est devenu une deuxième nature, exactement comme j’en avais le projet en ouvrant d’écaille & de plume.

Et rien que pour ça, cette expérience est une réussite totale.

Dix mentions publique

Ouvrir et tenir un blog, c’est s’exposer.

Ça peut paraître évident de l’énoncer aussi simplement que ça, mais c’est loin d’être aussi facile qu’on le pense, même pour quelqu’un qui a l’habitude de la scène. Dans un rôle, le comédien se dilue, et ce que vous voyez devant vous lors d’une pièce de théâtre, ce n’est pas un être humain, c’est un personnage qui se glisse dans les traits d’un être humain. Donc ce n’est pas vraiment moi. Sur d’écaille & de plume, ce que j’écris et publie, même lorsqu’il s’agit d’un tutoriel technique sur Scrivener, c’est bien moi. Et quand il s’agit d’un coup de gueule contre une réforme imbécile du système de santé, c’est plus encore moi.

Parce que j’ai choisi d’écrire sous ma véritable identité et non sous un pseudonyme, d’assumer qui je suis, je m’expose cent fois plus.

Parce que je suis médecin, c’est une exposition plus délicate encore.

Et lorsque j’étais encore dans un cabinet libéral, ça pouvait donner lieu à une confusion qui aurait pu être dangereuse. C’est pourquoi j’ai toujours gardé une ligne de conduite simple, mais stricte : lorsque je publie ici quelque chose qui a trait au soin, c’est toujours selon le point de vue du citoyen, jamais pour décrire une technique ou un traitement, jamais pour expliquer une maladie. Parfois, ce fut pour expliquer la distance nécessaire avec des procédés dont nous devons rester critiques.

Étonnamment (ou pas), alors que le réflexe de «googliser» tout le monde est assez universel, seuls cinq patients durant mon exercice libéral ont découvert ma double vie (et me l’ont dit, peut-être y en a-t-il eu beaucoup plus qui ne me l’ont pas déclaré).

J’ai même été interviewé (par ma propre sœur, d’accord) à propos d’un de mes romans.

Pour quelqu’un d’assez timide au départ, cette exposition n’a pas toujours été simple à gérer.

Mais avec le recul, je trouve que j’ai plutôt bien géré la chose.

Je commence à réellement prendre plaisir à expliquer ce que j’écris, pourquoi je l’écris.

Bientôt, si ça se trouve, vous pourrez me rencontrer dans un salon littéraire1

Dix-lué dans l’Océan Virtuel

C’est tout le paradoxe de notre époque.

On ouvre un blog pour s’exposer au regard des autres… mais ces autres peinent à nous trouver parmi les milliards d’autres sites qui peuplent la Toile infinie (ou presque).

Après la brève envolée des deux années Covid19 (2020 et 2021 ont porté d’écaille & de plume vers des «sommets» de visibilité qu’il n’avait jamais atteints, avec 8 700 pages affichées par an à chaque fois), mon nid virtuel est retombé dans l’ombre qui était la sienne depuis le début. La faute à je ne sais pas vraiment quoi.

Pas à mon absence des réseaux dyssociaux, en tous les cas, car mon départ d’Instagram et de ce qui s’appelait encore Twitter à l’époque n’a eu aucun effet sur la fréquentation du site, qui est restée confidentielle même lorsque j’étais un membre actif de cette économie de l’attention aux effets délétères.

Je ne publie pas sur une ligne éditoriale bien précise (je me revendique éclectique et guidé par ma seule envie), et à chaque fois que j’ai essayé de me tenir à des contraintes de publication, je n’ai pas vraiment tenu. C’est en effet l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire pour attirer des lecteurs et des lectrices.

J’écris des articles en général assez longs, ce qui est également, lit-on souvent, un gage d’éviter le succès.

Je ne publie plus très régulièrement, ce qui achève de me classer parmi les «petits blogs un peu bizarres».

Et puis il est vrai que je ne suis pas vraiment présent ou assidu hors-ligne.

Pourtant, j’ai rencontré pendant ces dix années en ligne plusieurs personnes qui semblent trouver l’endroit, si ce n’est son propriétaire, intéressant. Et c’est finalement ce que je retiens. Peu importent les chiffres, de toute façon je ne pense pas qu’ils soient si importants que cela à prendre en compte, puisque je milite par exemple pour arrêter de noter tout et n’importe quoi.

J’ai installé une page de liens vers les sites et les blogs que j’apprécie via un flux RSS sur ce site, mais aussi une catégorie entière d’articles sur mes découvertes, histoire de prolonger un réseau d’affinités qui me tient à cœur, en partie pour ressusciter les anciens webrings.

J’ai noué quelques relations virtuelles, et montré comment, à mon avis, il était possible de retrouver un internet plus apaisé, en se servant des mêmes flux RSS pour s’affranchir des réseaux dyssociaux. Même si bien sûr je n’ai pu, à moi tout seul, inverser la tendance qui veut que tout le monde ou presque utilise ces damnés pièges attentionnels.

Dix articles-phares et dix articles qui résument d’écaille & de plume

En dix ans, certains de mes articles ont eu plus de succès que les autres, et constituent sans doute ce qui attire mon lectorat. Voici lesquels.

Parce que d’écaille & de plume a commencé comme ça : en faisant des liens entre des œuvres différentes sur un même thème. Celui-ci en particulier semble beaucoup plaire. Sans doute que la vague bit-lit y est pour quelque chose.

Pourquoi on se contrefiche souvent de savoir si vous avez une fracture de l’orteil et autres considérations sur l’opportunité des examens médicaux complémentaires

Pourquoi on se contrefiche souvent de savoir si vous avez une fracture de l’orteil et autres considérations sur l’opportunité des examens médicaux complémentaires

Je suis très étonné de voir que cet article pourtant un peu technique et surtout à rebrousse-poil des demandes fréquentes des patients soit le deuxième plus populaire du blog. Peut-être que sa lecture fait réfléchir. On n’est d’ailleurs pas obligé d’être d’accord avec moi. Il suffit de bien vouloir prendre en considération les arguments que j’y développe.

Le rôliste en moi jubile, parce que ma proposition dans cet article n’est pas autre chose que donner un grand coup de pied dans la façon dont les scénarios de jeu de rôle sont écrits. Et apparemment, ça parle à certaines personnes. Bien que je n’aie encore pas vu de tentative d’écrire de scénario selon la méthode que je propose…

Les articles qui proposent des tutoriels sont souvent populaires sur le net. Et c’est donc légitimement que celui-ci fait partie de mes best-read. La fonction de compilation du logiciel d’écriture Scrivener est tellement complexe et intimidante que ma tentative d’en expliciter les bases ne peut qu’attirer le regard… et les clics.

J’en parle plus bas car cet article est l’un des jalons importants du blog, mais je suis là encore assez étonné de voir qu’il figure dans les cinq plus lus depuis l’ouverture.

Il a été rare jusqu’à présent que je chronique un jeu de rôle. Mais avec Les Lames du Cardinal, c’est bien plutôt un univers entier qui est passé sous mes Fourches caudines. Et je suis heureux que cela soit beaucoup lu.

Plus encore que tous mes autres articles sur le jeu de rôle, celui-ci est ma fierté. Il formalise une façon de mener des parties comme des épisodes d’une série, en se focalisant sur beaucoup d’aspects matériels.

Là encore, un tutoriel, sur la façon de concevoir un livre. Je crois bien que cela sert à beaucoup de réalisauteurs et réalisautrices.

Au commencement d’écaille & de plume, il y avait ces liens que je faisais entre plusieurs œuvres qui traitaient le même thème. Et celui-ci était le premier. Les films que j’y analyse valent d’ailleurs le coup d’être visionnés.

Troisième tutoriel dans les dix articles les plus lus sur d’écaille & de plume, là encore pour tenter de démystifier et de simplifier la création d’un livre, électronique cette fois-ci.

Pourtant, je retiendrai plutôt les articles qui ont, selon moi, jalonné l’histoire d’écaille & de plume par leur importance pour moi, qui ont marqué mon évolution. En voici la liste.

Cet article m’a permis de poser ma discipline d’écriture, à travers mes lectures comme à travers ma propre expérimentation des divers conseils trouvés en ligne ou ailleurs, prodigués par toutes sortes de créateurs. Premier sur ma liste, il est fondateur.

Deuxième article sur la création, qui présente mon obsession de mélanger les genres et les techniques de narration en profitant de ce que d’autres arts ont infusé comme habitudes au «public». C’est probablement le plus «technique d’écriture» de mes articles.

Avec celui-ci, j’ai eu envie de tordre le cou à une idée préconçue et à clamer que je ne m’y conformais pas. Pour la petite histoire, il me valut l’honneur d’être contacté par une journaliste connue pour un projet de reportage, durant la pandémie, qui ne vit pas le jour, et par deux étudiantes en journalisme pour une interview sous forme de podcast.

Prélude à ma décision de quitter mon cabinet libéral, j’avais dans cet article en forme de manifeste essayé d’exposer ce qui pour moi faisait l’acte de soigner, un peu à rebours des injonctions actuelles.

Lorsque j’ai décidé de fermer mon cabinet de médecine générale en libéral, j’ai accepté de tourner une page de ma vie, définitivement. Je devais dire «adieu» à beaucoup de choses qui ont été importantes pour moi.

Dans l’époque qui est la nôtre, plutôt sombre, j’ai envie de semer des graines de lumière. Cet article parle de séries qui font la même chose.

Parfois, il y a des moments de doutes quand on tient un blog. Ce fut pendant l’un de ces moments que j’ai décidé d’écrire une petite histoire qui expliquerait comment je me sentais en l’extériorisant façon «examen clinique médical».

Après mon manifeste de 2014, j’ai voulu affirmer ce qu’était devenue, pour moi, l’autoédition. Quelque chose de plus, en tous les cas, que quelqu’un qui publie seul un livre.

Dans ma série de révoltes contre les travers de notre société (ou du moins ce que je perçois comme des travers), cet article est central. La manie du chiffre et de la notation pourrit bien des choses, et j’explique pourquoi. J’explique même comment on pourrait remplacer ça.

Enfin, la remise au goût du jour de la «vieille» technologie des flux RSS est un autre de mes chevaux de bataille. Et dans cet article j’explique pourquoi mais surtout comment, nous pouvons suivre les gens que nous avons envie sans dépendre des algorithmes.

Dix alogues

Parmi les tournants pris par d’écaille & de plume, il y en a un qui a plus d’importance que les autres : mon investissement dans la lettre d’écaille & de plume, ma newsletter quadriannuelle. En l’absence de réseaux dyssociaux, et en mon absence physique sur des salons de littérature ou de dédicace, elle a été le vecteur d’une véritable relation avec plusieurs de mes lecteurs et lectrices. À travers elle, j’ai pu recruter des silhouettes sonores pour le dernier épisode des Consultations extraordinaires.

C’est donc par elle que je vais réellement fêter cet anniversaire, pas comme les autres tout au long de cette année 2024.

Pour découvrir comment, une seule solution : s’y abonner…

Pour comprendre pourquoi cette newsletter…

Et si tu m’crois pas, hey… t’ar ta gueule à la récré

Je ne sais pas pour combien de temps encore d’écaille & de plume existera. À l’heure où j’écris ces lignes, j’espère que ce sera pour au moins dix années de plus. Mon objectif est de continuer à l’alimenter très longtemps, à y rêver et à y créer au moins autant.

Et si tu m’crois pas…


  1. Bon, cela dit, je pense que vous avez encore un peu de temps devant vous.  ↩︎

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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Ma vie numérique sans les réseaux dyssociaux

Ma vie numérique sans les réseaux dyssociaux

Ma vie numérique sans les réseaux dyssociaux

En 2023, le principal canal d’accès à internet n’est plus vraiment l’internet originel, celui des moteurs de recherche, mais ce que l’on nomme abusivement les réseaux sociaux. Si l’on n’a pas un compte sur l’une ou l’autre de ces plateformes, on passe pour un attardé numérique, un geek à l’ancienne, un boomer, voire, pire, pour un déconnecté. Et si l’on est un artiste, c’est encore pire.

En effet, tout passe désormais par ces canaux de communication.

Les festivals annoncent leurs événements sur Facebook ou Twitter, et n’ont même plus leur site internet à jour (comme le salon des littératures de l’imaginaire toulousain Imagina’Livre).

Les artistes montrent leurs créations sur Instagram.

Les vidéastes et les vulgarisateurs postent sur YouTube.

Et je ne parle même pas des sites d’actualité ou des politiques, qui ne postent presque plus que sur Twitter.

Et le commun des mortels, qui n’osa jamais ouvrir un blog dans les années 2000 parce que «c’était compliqué» (objectivement, ça pouvait l’être), se retrouve aujourd’hui à avoir des profils à la fois sur Snapchat, TikTok et tous les autres, de façon à lui aussi accéder à la parole, même si c’est pour être noyé dans un flot massif de données.

On pourrait croire que l’internet tout entier se résume à ça : un (pas si) joyeux méli-mélo de «contenus» (mot qui ne veut rien dire) exposés sur des plateformes qui mâchent le travail de recherche et l’orientent en même temps dans le sens de leurs intérêts financiers ou politiques, voire philosophiques.

Pourtant, le «vieil» internet n’a pas disparu. Il est toujours là, parce qu’il reste tout de même la fondation essentielle de ce chaotique soi-disant internet social. D’une part parce que les plateformes ont toutes des limitations, ne serait-ce que techniques, qui brident ce que l’on peut y publier (nombre de caractères, notamment). D’autre part parce que, finalement, ces plateformes ne sont utilisées que pour faire caisse de résonance, et propulser plus loin ce que l’on crée ou réfléchit vraiment ailleurs.

Et de cela, je crois que tout le monde en est plus ou moins conscient.

Ces outils ne sont que des tremplins, pas des lieux où l’on peut trouver des informations pérennes. Votre tweet d’il y a deux heures est déjà submergé par des milliards d’autres, voire enterré par l’algorithme qui ne l’aura même pas montré à vos followers (parce que non, l’algorithme de Twitter ne vous montre pas tous les tweets des gens que vous suivez). Par contre, votre billet de blog, lui, est bien au chaud sur votre site, et une simple recherche peut le faire remonter facilement.

Pourtant, tout le monde fait comme si. Comme si c’était vraiment intéressant. Comme si on découvrait vraiment des gens différents qu’on n’aurait pas connus ailleurs ni autrement. Comme si tout n’était pas dicté par un algorithme dans le but de nous piéger dans une boucle de publicités ininterrompues.

Pire, nombre de créatrices et de créateurs font aussi semblant de croire. Croire que se soumettre aux injonctions de ces réseaux leur apportera une visibilité. Croire qu’ils et elles pourront se démarquer parmi une myriade d’autres. Croire qu’ils et elles peuvent plier l’algorithme pour cela, voire jouer plus intelligemment que lui.

Tout le monde fait comme si on n’avait pas le choix. Comme si on devait utiliser ces outils et se soumettre à leurs lois.

Il est temps de se réveiller.

Vous avez le choix. Vous l’avez toujours eu.

L’autre voie n’est même pas plus difficile. Et elle est plus libre.

Laissez-moi vous en montrer le chemin.

Affiche du film Spartacus de 1960 par Stanley Kubrick

Refuser les réseaux dyssociaux

À l’heure où j’écris ces lignes, Twitter ne s’est pas encore effondré, hélas. Mais je ne désespère pas de voir un nombre assez grand d’êtres humains se rendre compte de la nocivité de cet outil pour eux-mêmes et pour l’Humanité entière, puis, partant de là, de la nocivité de tous les réseaux dits «sociaux».

Mais, au fait, pourquoi refuser de les utiliser est si important ?

Réseaux «sociaux», réseaux «commerciaux», réseaux «dits sociaux», réseaux «dyssociaux»

Tel est l’enchaînement de mon opinion sur ces plateformes, au fil des années.

Au début, ces réseaux se sont présentés comme «sociaux» car leur propos était de mettre les gens en relation, de créer de la discussion, du partage, de vous permettre de faire société, de rencontrer de nouvelles personnes, comme dans la rue, dans un café, dans une soirée, dans une salle de cinéma. Ils étaient les héritiers des forums qui s’étaient multipliés comme des petits pains. Mais là où chaque forum avait sa thématique bien précise, et où donc il fallait s’inscrire sur une bonne centaine d’entre eux si vous aviez des passions un tant soit peu variées, avec Facebook ou Twitter, on vous promettait une seule grande place de rencontre où vous pouviez créer vous-même vos sujets de discussion. Au début, les promesses ont été tenues.

Mais rapidement, la réalité économique s’est rappelée aux concepteurs de ces outils. Maintenir des serveurs et payer des salariés pour développer le code, le maintenir, cela coûte cher, sans parler du fait que dégager des bénéfices était quand même à la base de tout. Ben oui, l’objectif de Zuckerberg comme de Jack Dorsey, au départ, c’est bien de faire de l’argent, pas d’éliminer la faim dans le monde. Il a donc bien fallu vendre quelque chose. Et comme la condition même de l’existence de ces outils était dans le nombre de leurs utilisateurs, il n’était pas question de les faire payer pour y accéder. Il a donc fallu trouver autre chose, qui est vite devenu évident : la publicité. Les utilisateurs ne paieraient donc pas avec leur argent, mais avec leur exposition à la publicité. À partir de là, ils n’ont plus du tout mérité leur nom. Les réseaux sont devenus «commerciaux».

Le besoin d’argent étant ce qu’il est, la publicité devint de plus en plus importante. Les algorithmes furent donc essentiels pour s’assurer que vous puissiez voir le plus de publicités ciblées sur vos centres d’intérêt. On commença donc à modifier la façon dont vous pouviez interagir avec les autres utilisateurs. Comme si, dans un café, on vous empêchait de voir certaines personnes ou de suivre certaines conversations, remplacées par des messages publicitaires. Je me demande d’ailleurs si vous resteriez dans un tel endroit plus de 10 minutes, s’il existait physiquement. J’ai mon idée sur la réponse, et par contre aucune piste pour comprendre pourquoi au contraire vous restez sur les réseaux… qui sont dès lors devenus une caricature de société. Des réseaux dont le nom était la négation même de ce qu’ils prétendaient être. Des réseaux «dits sociaux (mais qui sont tout sauf sociaux)».

Enfin, la massification des profils laisse aussi le champ libre aux trolls, qui ont presque toujours existé sur internet, mais qui trouvent dans ces réseaux un tout nouveau terrain de jeux encore plus grand, encore plus fertile que les forums d’antan. D’autant qu’à la différence de leurs aînés, les réseaux ne peuvent pas se gérer avec un ou deux «modos» mais bien avec des centaines de modérateurs exposés à des mots, des images, des vidéos pénibles sur le plan psychologique, et qui doivent supprimer à la chaîne des propos racistes, des menaces de mort, des images pédopornographiques ou violentes. Mais hélas leur travail, aussi important soit-il, ne suffit pas. Et le complotisme, le prosélytisme, l’ignorance, la désinformation, la manipulation, le harcèlement, la haine, les insultes se multiplient. Le café du commerce que l’on rêvait se transforme en une arène de combats de rue où tous les coups ou presque sont permis. Et les réseaux sont devenus «dyssociaux», de la racine «dys» (du grec : malformation, mauvais, erroné) car ils ne produisent plus qu’une socialisation malformée, déformée, perturbée et perturbatrice.

Les personnes exposées expriment souvent un stress, voire une anxiété, le FOMO pour l’anglais fear of missing out, ou peur de manquer. Manquer le prochain tweet, manquer l’information vitale, ne plus être en contact avec ses «amis» (eh, les gars, mes véritables amis, je connais aussi leur numéro de téléphone ou leur mail, je ne les perds donc pas si je quitte Facebook, quant aux autres, si je n’ai pas au moins ces deux autres moyens de les contacter, c’est qu’ils ne sont pas aussi importants que cela).

Je ne parle même pas des créateurs et des créatrices, qui vivent très souvent une pression à publier sur ces réseaux, de peur d’y devenir «invisibles». Mais spoiler : vous êtes forcément invisibles parmi des millions d’autres utilisateurs puisque l’algorithme est opaque par définition et décide de presque tout.

Tout cela est assez bien résumé dans un petit bouquin qui certes manque de détailler suffisamment mais est quand même assez bien écrit : La civilisation du poisson rouge, de Bruno Patino.

Vous comprendrez en le lisant pourquoi les ingénieurs de la tech interdisent à leurs propres enfants d’utiliser ces outils sur lesquels ils travaillent pourtant… L’auteur est journaliste, spécialiste des questions numériques. Il décortique les mécanismes qui ont conduit à l’émergence du web 2.0, à l’hégémonie des plateformes comme Facebook ou Twitter. Et surtout, il explique les choix qui ont été faits dans leurs fonctionnements. C’est glaçant, mais je trouve deux critiques à faire. D’abord, je trouve que c’est plus un manifeste qu’une étude précise. Il m’a manqué d’aller plus en profondeur. J’aurais aimé voir présentés les mécanismes neurophysiologiques, les bases scientifiques qui les corroborent, plus que juste citées en sources bibliographiques. Mais sans doute en attendais-je un peu trop. Ensuite, la dernière partie, qui est censée proposer des pistes pour agir, pour retrouver à la fois une citoyenneté et une liberté dans les usages du web, me semble beaucoup trop timorée par rapport à tout ce que l’auteur présente avant. J’ai l’impression que pendant les trois quarts du bouquin, Bruno Patino nous brosse une fin du monde apocalyptique, pour nous dire dans le dernier quart de simplement repeindre les murs de la maison… J’exagère un peu, c’est vrai, à dessein. Mais l’idée est là. Je suis resté sur ma faim. J’aurais attendu une réelle proposition «politique» (dans le sens «vie de la cité»), comme par exemple interdire le principe du like ou le défilement infini, comme aussi de placer l’ensemble des réseaux dysociaux sous tutelle d’une entité transnationale de type ONU. Ce ne sont que des idées jetées là sans réelle réflexion, mais justement, il aurait été à mon sens beaucoup plus percutant d’exposer ce genre d’idées plus en profondeur.

Si vous décidez de le lire, je serai curieux de savoir quel est votre sentiment dessus.

Et peut-être alors que vous prendrez la décision salutaire de franchir vous-mêmes le pas.

Peut-être que vous aussi, comme moi, vous vous affranchirez des réseaux dyssociaux.

Mais comment le faire proprement ?

Couverture du livre La civilisation du poisson rouge par Bruno Patino aux Livre de poche.

Récupérer ses données

La masse des données que possèdent ces réseaux sur vous est proprement stupéfiante.

Pour vous donner un exemple, dans mon cas précis, les données que Twitter avait sur moi, pour la période entre 2014 et 2019, année où j’ai quitté le réseau, pesaient plus de 8 Go (huit giga-octets !) en sachant que je n’ai jamais été un très gros utilisateur. Huit giga-octets, c’est l’équivalent approximatif de trois cent trente-trois mille six cents pages de texte (333 600, oui, vous lisez bien).

Cette masse de données est la mine d’or sur laquelle le réseau fait de l’argent. En la revendant, de manière à ce que vous soyez la cible de publicités taillées sur mesure pour vous.

Une mine d’or que vous avez tout intérêt à reprendre pour éviter qu’elle ne finisse entre les mains de pirates informatiques. Car ces données permettent, quand elles sont bien exploitées, de créer un profil de nous-mêmes, révélant beaucoup de choses que vous ne soupçonnez même pas.

Grâce aux lois européennes, nous sommes, sur notre continent, privilégiés : nous avons le droit de demander une archive de l’intégralité des données qu’un réseau possède sur nous, mais aussi d’exiger ensuite sa destruction, afin d’en devenir les seuls détenteurs.

Tous les réseaux sont donc obligés légalement de vous permettre de télécharger une archive des données vous concernant. Elle contiendra tout ce que vous y avez publié, vos contacts, la liste de vos abonnements et de vos followers, vos commentaires, vos likes et vos favoris, et j’en passe. La procédure change en fonction du réseau, mais elle est globalement simple.

Pour vous aider, vous pouvez aller sur cette page du site de la CNIL (Commission nationale internet et libertés) qui vous expliquera en détail la procédure.

Préparer la suite

Une fois vos données récupérées, je vous engage à d’ores et déjà préparer la suite, c’est-à-dire à construire un petit système personnel qui vous permettra de suivre les personnes ou les entités avec qui vous désirez toujours pouvoir interagir.

En gros, faites une liste de toutes ces entités et personnes, et déterminez qui est vraiment important et qui ne l’est pas à vos yeux. Ensuite, pour celles que vous avez sélectionnées, regardez quels sont leurs autres canaux de diffusion et en priorité l’adresse URL de leur site internet. Par exemple, au hasard, https://decaille-deplume.fr.

Commencez à regarder les différentes stratégies par lesquelles vous allez remplacer lesdits réseaux, et que je vous suggère plus loin. Prenez le temps de les tester et de sélectionner celles que vous allez adopter (celles qui vous conviennent le plus).

Pour toutes les personnes physiques qui n’ont pas de site ou de blog (et il y en a une écrasante majorité), voyez si vous pouvez les contacter par un autre biais, en général une adresse mail, ou un forum/Discord dans vos fréquentations communes.

Si vous ne pouvez pas, c’est que soit vous n’êtes pas si proches que cela, soit vous n’avez pas tant d’intérêts communs, et posez-vous la question de ce que vous retirez vraiment de cette interaction. Parce que partir du réseau signifiera en faire le deuil.

Le faire savoir

Bien évidemment, expliquez à vos followers et à ceux que vous suivez vous-mêmes que vous allez partir, et pourquoi. D’abord pour leur expliquer où vous retrouver, c’est quand même un minimum. Ensuite parce que votre acte aura une portée symbolique et politique forte.

De mon point de vue, si vous avez décidé de franchir le pas, vous serez un exemple. Ce sera grâce à la répétition des ruptures que les réseaux perdront leur influence sur nos vies. Il est donc fondamental que vous donniez le plus d’impact à votre propre exemple. C’est en cela que quitter un réseau dyssocial est politique. Vous affirmez une certaine vision du monde. Affirmez-la avec fierté.

Je vous conseille de publier un message expliquant votre décision et indiquant la date de suppression de votre compte, ainsi que les endroits où l’on pourra vous retrouver.

Effacer son compte

Lorsque tout ce qui précède est fait, lorsque le moment fatidique est arrivé (la date que vous avez vous-même fixée), il ne vous reste plus qu’à appuyer sur le bouton rouge.

Il se peut que vous ressentiez une certaine angoisse à cette idée, ou bien seulement au moment de cliquer sur le lien de suppression de votre compte. C’est parfaitement normal. Vous rompez avec de vieilles habitudes (et le cerveau adore les habitudes, donc il déteste quand on lui en enlève une), vous faites un deuil.

De façon pratique, là encore chaque réseau possède sa démarche spécifique, mais c’est en général simple. D’ailleurs, cette fois, il ne faut pas trop compter sur la CNIL pour vous aider, car la page qu’elle dédie à cette question est quand même très light

Certains réseaux essaient de vous retenir par un dernier argument : si vous «changez d’avis», ils gardent votre compte un certain temps (je crois que c’est 1 à 2 mois) pour que vous puissiez le retrouver intact en un seul clic. Je trouve cela assez fallacieux et pour tout dire très pervers. Ils essaient de vous faire replonger comme un toxicomane à qui on fait miroiter un dernier fix… et si vous avez vu Trainspotting, vous savez ce qu’il en est des soi-disant «derniers fix».

Ma vision des choses est qu’il vaut mieux partir sans se retourner, comme dans la vie.

Cela veut dire supprimer l’application de votre téléphone, de votre ordinateur, supprimer les adresses mail de contact du réseau, supprimer les favoris de votre navigateur internet, bref, ne plus du tout garder de liens avec aucun réseau.

Oui, mais si on usurpe mon compte ?

J’ai vu passer des argumentaires de personnes qui disaient en substance :

Je garde mon compte pour ne pas qu’il soit «squatté» et que quelqu’un se fasse passer pour moi.

Oui, mais non.

D’abord si vous avez bien fait le boulot, tous vos contacts actuels savent que vous quittez les réseaux dyssociaux et pourquoi. Ils savent même où vous retrouver. Quant aux nouveaux, qui vont vous chercher, si vous avez bien fait le boulot que je vous conseille plus loin, ils devraient vous trouver là où vous êtes vraiment et où vous affichez que vous refusez d’être sur un réseau dyssocial.

Par contre, c’est une belle excuse pour éviter d’avoir à rompre vraiment. Cela démontre que vous n’avez pas encore trouvé la force de le faire. Ce n’est pas grave. Mais vous n’êtes pas encore libre, je pense.

L’algorithme, cette bête curieuse

J’en parle beaucoup, et sans doute qu’en me lisant, vous commencez à croire que je lui en veux, à ce pauvre algorithme.

Et bien pas vraiment, parce qu’il ne fait que suivre sa nature, en fait.

Pour bien comprendre ce que je reproche aux algorithmes, il suffit de savoir ce que c’est vraiment, de nos jours.

Au départ, un algorithme est un ensemble d’étapes logiques effectuées par un ordinateur à qui l’on dit :

Si tu trouves le mot casserole dans un tweet, alors tu vas le montrer aux gens qui ont précédemment parlé de casseroles dans une conversation.

Mais ça, c’était avant. Avant la révolution des données massives et des capacités de calcul titanesques qui rendent possible la manipulation presque simultanée de milliards de paramètres par nos ordinateurs. Avant surtout l’invention du deep learning, cette programmation qui permet à un algorithme de fixer seul les conditions logiques que j’énonce plus haut en fonction de ce qu’il repère comme similitudes, différences, comparaisons logiques dans une masse de données que nous, pauvres Humains, ne pouvons même pas appréhender.

Car depuis cette avancée technologique majeure, les règles qui dirigent les algorithmes ne sont plus fixées par des êtres humains, mais par l’algorithme lui-même qui découvre des corrélations statistiques bizarres. Par exemple, il pourrait découvrir que la majorité des gens qui portent des mocassins parlent de casseroles dans leurs tweets. Il ne sait pas pourquoi. Il ne sait pas comment. Mais il l’a remarqué. Donc il va décider seul de montrer tous les tweets qui parlent des casseroles aux gens qui portent des mocassins. Là, je vous parle d’un exemple simple à comprendre, mais il faut bien saisir que cette opération, il l’effectue seul, sans l’exposer aux humains, et même s’il le faisait, comme il le fait avec des milliards de paramètres intriqués, notre esprit ne peut pas, par nature, le comprendre.

Les spécialistes appellent cela l’effet «boîte noire» : on sait ce qui entre dans l’algorithme (à peu près, c’est-à-dire les giga-octets de données qu’on a sur un utilisateur de Twitter, multiplié par trois cents millions d’utilisateurs de la plateforme), on découvre ce qui en sort (votre flux de tweets qui est pollué par des publicités pour des casseroles), mais on ne sait pas ce qui s’est passé entre les deux. Personne. Pas même les concepteurs de l’algorithme.

Ce qui implique une chose assez terrifiante : on laisse la responsabilité à la machine, sans possibilité de contrôle.

Et tout le monde s’en fout.

Tableau La boîte de Pandore par Edward Burne Jones.

Mais si je pars, le quitte mon réseau professionnel

Reste que l’une des plus grandes réussites des réseaux dyssociaux, de leur point de vue, est de s’être rendus indispensables pour beaucoup de métiers. Ils sont devenus incontournables comme faisceaux de communication, de mise en relation.

C’est indéniable.

Et je suis mal placé pour vous prouver le contraire, puisque j’exerce une profession qui par nature n’est pas liée à une visibilité ou à une publicité, à une communication publique.

Cependant, encore une fois, je me permets de trouver l’argument un peu biaisé. Respectueusement, car je ne me permettrais pas de juger de la pertinence d’un tel choix pour vous, individuellement.

C’est juste que, collectivement, je trouve ça assez dingue.

Car cela montre la dépendance que la société s’est créée et à laquelle elle décide de rester soumise.

Car cet argument revient à dire :

Puisque tout le monde y est et que je veux faire partie de la société, je dois y rester.

Tout le monde le fait, alors je suis obligé de le faire.

Je suis le seul à être choqué de cela ?

Ou bien vous voyez aussi le problème ?

Si personne ne prend la décision d’arrêter, alors rien ne se passera.

On me rétorquera qu’un individu seul ne peut pas faire changer un système. Je m’inscris en faux. Si on croit vraiment cet argument, alors autant laisser la Terre brûler sous l’effet de serre parce qu’on ne peut pas seul arrêter le changement climatique et la perte de biodiversité, donc on va continuer à brûler l’Amazonie avec toutes ses conséquences, puisque notre voix unique ne sert à rien…

Là encore, vous avez le choix. Tout choix implique un renoncement à ce que l’on choisit de ne pas faire. Donc, oui, peut-être que vous allez laisser derrière vous une partie de réseau professionnel. Ou pas. Là encore, il existe d’autres moyens de faire cela. Forcément différents. Qui ne ressembleront pas à une gigantesque discussion de machine à café. Mais ce n’est pas une fatalité. C’est un choix.

Et encore une fois je crois qu’on peut très bien assumer de faire le choix de rester, en connaissance de cause. Je ne juge pas. C’est un choix qui est aussi respectable que les autres. Mais ce n’est pas le mien, et je trouve juste que l’argument de la masse n’est pas valable.

Pourquoi un autre réseau n’est pas forcément une bonne idée

En ces temps troublés où l’oiseau bleu bat de l’aile, voire est alourdi par le plomb que ladite aile a pris dans les plumes qui restent, beaucoup de personnes se sont tournées vers des réseaux dits «décentralisés», Mastodon en tête.

On pourrait penser (et j’étais dans ce cas-là aussi, j’ai eu un compte Mastodon en 2019 avant de quitter Twitter) que le paradigme des réseaux «libres» est suffisamment différent pour tout changer.

Et c’est vrai que c’est tentant :

  • Pas d’algorithme et pas de publicité, donc un flux de publications des comptes que vous suivez s’en trouvant non censurés ou déplacés, mais gardés par ordre chronologique.
  • Pas de défilement infini, ce tueur d’attention qui vous garde prisonnier du flux jusqu’à ce que mort s’ensuive.
  • Moins de monde (pour le moment) donc peu ou pas de trolls, donc une ambiance beaucoup plus tolérante et ouverte à la discussion.

Mais :

  • Moins de monde (pour le moment) donc pas forcément les gens que vous quittez ailleurs.
  • Moins de monde mais pas forcément de façon définitive, donc peut-être un jour le retour des trolls, des complotistes et autres haineux. Je suis d’accord, tant qu’ils ne sont pas là, ce n’est pas un véritable argument, sauf si on le met en relation avec le point suivant.
  • Une architecture décentralisée donc une modération très dépendante de l’instance à laquelle vous choisissez de vous affilier au départ, et ensuite il est très difficile d’en changer sans changer de compte. À moins de monter votre propre instance, mais cela demande des connaissances techniques qui ne sont pas à la portée de tout le monde. Il reste plus simple, en 2023, d’ouvrir son propre blog que son instance Mastodon personnelle.
  • Le reproche principal : une limite de caractères dans les messages, même si elle est plus lâche que sur Twitter. Par nature, la limite de caractère bride surtout l’expression complexe et la pensée. Elle ne permet pas des discussions structurées et construites. C’est l’un des péchés originels des réseaux dyssociaux. Sauf pour publier des haikus, condenser la pensée en quelques mots est forcément un appauvrissement de l’esprit et de la discussion.

Pour moi, les avantages sont indéniables, mais les inconvénients me laissent sceptique sur l’utilité du microblogging dit «décentralisé» comparé à l’ouverture d’un simple blog sur wordpress.com, où vous n’avez même pas de connaissance technique à avoir et où vous restez maître de tout, y compris de la longueur de vos divagations.

Bien évidemment, cela n’est que mon avis personnel, vous êtes libre de (et encouragé à) en avoir un différent.

Les sites internet et les blogs

De mon point de vue, si vous avez quelque chose à dire d’intéressant au monde entier, il n’existe pas meilleur outil, ni plus libre, qu’un blog ou un site internet. Même si vous n’hébergez pas vous-même la chose, il est possible de trouver un prestataire qui le fera pour vous en vous en laissant la propriété. Vous aurez la maîtrise complète de l’outil. Vos données vous appartiennent totalement. Vous contrôlez qui est autorisé à entrer, à écrire, à commenter. Vous contrôlez la longueur de vos écrits, les images que vous postez. Tout vous appartient. Personne ne peut fermer votre blog ou votre site du jour au lendemain, si ce n’est la justice, qui le fait selon des règles précises et connues de tous à l’avance, et qui surtout ne changent pas du jour au lendemain parce qu’un milliardaire s’est levé du mauvais pied un matin à l’autre bout du monde.

La maintenance de l’outil est simple, éprouvée par plus de 20 ans de technologies qui évoluent en permanence. Des technologies qui sont open-source, libres, accessibles, robustes, fiables.

Vous n’avez pas forcément besoin de publicité pour que tout cela tienne debout, et même, pour environ le même prix qu’un badge bleu sur Twitter, vous offrez à vos visiteurs comme à vous-même une expérience d’internet libérée des sollicitations commerciales et totalement indépendante.

Bref, tout le contraire des plateformes propriétaires commerciales et dévoreuses de temps de cerveau disponible de leurs «captifs» que je n’ose même plus appeler utilisateurs.

Si vous avez envie, vous pouvez même apprendre deux langages informatiques très simples, le HTML et le CSS, pour peaufiner l’esthétique de votre demeure numérique. En allant un peu plus loin, avec du PHP ou du JavaScript, vous pouvez même customiser le moteur et vous créer votre Faucon Millénium à vous, avec ses compartiments secrets, ses pièces uniques.

Le point central est là : vous reprenez le contrôle de ce que vous publiez sur internet.

J’ai donc centré mon utilisation d’internet sur les blogs et les sites. Je publie moi-même ici, chez moi. Et je ne suis abonné à personne qui n’ait son propre site. Une autrice que l’on m’a conseillée n’a qu’un profil Facebook ? Eh bien, tant pis, je ne la suivrai pas. Je fais mon choix, même si cela veut dire renoncer à certaines choses.

La SEO

Oui, mais comment faire pour que mon blog soit visible ? Avec un réseau dyssocial, au moins, c’est facile.

Tu parles d’une arnaque !

Ce serait plus facile de sortir du lot dans un océan de trois cent mille comptes Twitter sans aucun moteur de recherche que sur la Toile où justement les outils puissants que sont Qwant, Ecosia, DuckDuckGo et autres, sans même parler des plus évidents que je n’ai pas cités parce qu’ils sont biaisés, permettent de retrouver une aiguille dans une botte de foin virtuelle ?

Je n’y crois absolument pas.

Les algorithmes des réseaux dyssociaux censés nous proposer des comptes selon nos centres d’intérêt sont plus opaques et ne permettent pas de faire des requêtes avancées. Et il est impossible de faire en sorte que notre profil exploite plus intelligemment le fonctionnement dudit algorithme.

Par contre, la Search Engine Optimization, elle, permet à votre site d’obtenir un peu plus de visibilité sans forcément publier des images de chatons (même si les chats sont une espèce supérieure, on est d’accord là-dessus). Alors oui, c’est compliqué, oui, c’est à la limite de l’éthique parfois, oui, j’ai personnellement une réticence à l’utiliser. Mais ça reste beaucoup plus efficace et beaucoup plus respectueux des visiteurs qu’un algorithme dont on ne sait rien contrôlé par on ne sait qui.

Les commentaires

Oui, mais les réseaux dyssociaux permettent de discuter plus facilement !

Faux !

Vous appelez «discuter» un échange de 300 caractères au maximum ? Vous appelez «discuter» un lieu où vos échanges tendent à se résumer à des punchlines ?

Le fait même d’avoir une limite de caractères dans les écrits implique de ne pas prendre le temps, mais d’aller au but le plus rapidement possible. Cela oblige à être percutant, donc réducteur. Cela amène à utiliser l’ironie très souvent, à rester simple, voire simpliste. Et tant pis pour les nuances, qui demandent plus de caractères…

Au contraire, dans les commentaires des blogs et des sites, il n’y a pas de limites de caractères.

Vous pouvez vous exprimer librement et seule la personne propriétaire du site peut censurer, selon des règles affichées. Vous ne devriez pas être insultée ou harcelé, parce que le propriétaire en serait responsable.

Je discute donc en premier lieu sur les blogs des gens qui m’intéressent, et si je le fais parfois ailleurs (via des newsletters, sur des serveurs Discord), c’est toujours dans un second temps, quand l’échange a vocation à être plus restreint en diffusion, ou bien privé.

Je considère que si ce que j’ai à dire est intéressant, cela vaut le coup de le publier sur un commentaire de blog, pour y servir à d’autres. Si ce n’est pas intéressant, je ne fais pas de commentaire du tout. J’aime bien l’idée de ne pas parler à tort et à travers. J’essaie donc d’apporter quelque chose à la discussion, d’être constructif, toujours. Si ce que j’ai à dire est intéressant mais plus restreint, ou bien privé, je le fais via un serveur Discord ou en réponse à une newsletter.

Les bookmarks

Une des grandes supériorités des sites et des blogs à l’ancienne sur les réseaux dyssociaux est la possibilité de marquer une page pour la retrouver plus tard, pour servir de référence.

Nous sommes d’accord sur le fait qu’un post Facebook est rarement si mémorable ou utile à l’Humanité qu’on doive absolument y retourner plus tard. Un article de blog, par contre, c’est possible. Une page d’un site passionnant, c’est possible aussi.

Mais outre l’intérêt discutable d’un tweet, on pourrait quand même avoir envie de garder une trace de ce qui s’y dit. Par exemple, les threads de Twitter, ces séries de tweets qui sont apparues pour contourner tant bien que mal la limitation de caractère et développer des démonstrations entières, sont parfois de très bonnes références (je pense à ceux écrits en leur temps par des confrères neurologues). Et aucun moyen de les conserver si les auteurs de ces threads ne les mettent pas ailleurs (sur un site dédié par exemple). Alors, cette démonstration passionnante se perd.

Sans doute que, comme moi, vous vous êtes retrouvés après trente ans de maraude sur les océans d’internet, avec des centaines de bookmarks que vous ne regardiez jamais, et dont probablement une grande partie était devenue obsolète car les sites avaient fermé, ou avaient changé d’adresse. Peut-être même que vos propres bookmarks sont dispersés entre tous vos navigateurs, votre téléphone et votre ordinateur, bref, je parie que c’est devenu un capharnaüm inextricable.

Comment je le sais ?

C’était pareil pour moi, avant.

Jusqu’à ce que je trouve un outil (raindrop.io) qui permette à la fois de centraliser mes bookmarks en les partageant sur tous mes navigateurs et tous mes appareils, et de les classer non plus suivant des dossiers, sous-dossiers, sous-sous-dossiers… mais suivant des étiquettes organisées selon une syntaxe simple.

Je me suis demandé ce qu’était pour moi un site ou une page valant le coup d’être mise dans mes bookmarks. La réponse a été : une référence, une entité de référence, un tutoriel, ou un outil, sur un sujet donné.

Alors pour m’y retrouver, j’ai déjà supprimé tous les bookmarks qui n’étaient pas des références, des entités, des outils, des tutoriels. J’ai effacé plus des deux tiers de mes vieux bookmarks

Puis j’ai collé à chacun de ceux qui restaient une étiquette selon le principe suivant : le type de ressource (#référence, #outil, #entité ou #tutoriel) puis le ou les sujets (exemple au hasard #narration, #jeu de rôle, #bookmaking, etc.).

Exemple : la page du site https://openclassrooms.com/fr/courses/4929676-redigez-des-ecrits-professionnels?archived-source=1617396, un cours sur le langage LATEX pour mettre en page des livres et autres documents de façon professionnelle est référencé dans mes bookmarks raindrop comme #référence #bookmaking #code.

Pour le retrouver, il suffit de demander au moteur de recherche de raindrop les bookmarks qui correspondent à une référence sur le bookmaking et le code…

Capture d'écran de mes propres bookmarks dans raindrop.io

Les flux RSS

Et pour suivre la publication de nouveaux articles sur un site, pour remplacer ma liste d’abonnements, j’utilise les flux RSS.

Je vous ai déjà montré comment cette technologie permettait de ne rien manquer des sites et des blogs qui vous intéressent, et comment vous tenir informés des commentaires postés sur ces mêmes sites et blogs.

Cela recrée un mini-réseau de connaissances, et vous permet de suivre des conversations.

Sur mon agrégateur de flux RSS, j’organise mes abonnements par thème, par catégories. Je peux faire des recherches dessus, je peux archiver des articles ou des commentaires (vous avez déjà essayé d’archiver un tweet ou un post Instagram ? C’est impossible), retrouver facilement l’un d’entre eux.

Je peux aussi suivre des chaînes YouTube, et j’ai récemment découvert que les flux RSS de YouTube ne comportent aucune publicité (sauf celles qui sont incluses dans la vidéo par les créateurs eux-mêmes). Ce qui fait que regarder une vidéo YouTube via mon agrégateur RSS me libère aussi de cette source-là de pollution.

Capture d'écran de quelques uns des flux RSS auxquels je suis abonné, dans le logiciel Reeder.

Les podcasts

Je m’étonne toujours que les podcasts soient si populaires et les flux RSS si méconnus, car la diffusion des podcasts est basée sur la technologie RSS. Encore un paradoxe de la vie numérique.

Bref, les podcasts sont une autre façon d’utiliser internet sans réseau dyssocial.

Là encore, pas besoin de Twitter ou Facebook pour suivre mes émissions préférées, un agrégateur de podcast comme Apple Podcast, ou Soundcloud, ou même un flux RSS tout bête suffit. Et la technologie est simple et robuste que vous ne manquerez aucune émission. Il n’y aura aucun filtre algorithmique entre vous et la publication des épisodes qui vous intéressent. Il y a même des moteurs de recherche pour trouver vos émissions. Ou des recommandations, comme celles que je fais moi-même.

Un homme lisant un texte dans un vieux micro.

Les newsletters et infolettres

Je ne sais pas pour vous, mais moi j’aime recevoir du courrier. Du vrai, en papier. Je ne parle bien sûr pas des missives officielles bien trop nombreuses émanant des différents organismes administratifs, mais des véritables lettres, celles qui viennent de personnes avec qui on a envie d’échanger une correspondance.

C’est sans doute une expérience que les plus jeunes d’entre nous n’imaginent même pas, car internet et plus encore les réseaux dyssociaux ont révolutionné le rapport que nous avions avec le temps des échanges.

Alors qu’actuellement nous pouvons envoyer instantanément un message à des millions de gens, et en recevoir aussi rapidement, il y a trente ans, nous devions écrire (à la main ou avec un ordinateur) sur une feuille de papier que nous devions envoyer par la poste. Ce message mettait entre un et trois jours avant de parvenir à son destinataire. Plus longtemps encore s’il habitait à l’étranger. Et si nous voulions répondre, alors il fallait écrire, mettre dans une enveloppe, aller poster la lettre, et attendre que notre correspondant la reçoive, selon un délai variable, avant de nous répondre à son tour. Et ce jusqu’à ce qu’un des deux se désengage du processus.

C’était tellement précieux, tellement complexe d’envoyer un message, que nous avions tendance à écrire des choses longues, qui valaient la peine de prendre ce temps, de faire cet effort.

On pourrait croire que cela n’existe plus.

On aurait tort.

Les newsletters (ou infolettres, comme disent les Québécois), comme ma propre lettre d’écaille & de plume, sont les héritières de cette pratique ancestrale. Elles permettent de correspondre à l’ancienne, en développant sa pensée. D’un autre côté, contrairement à un article de blog, ou à un post Facebook, ou à un tweet, elles ne sont pas destinées au public, si l’on peut dire. C’est une correspondance semi-privée. Elle est envoyée à une audience qui s’est inscrite pour cela. Mais seulement à elle.

Et si certaines personnes gardent une archive de leurs propres newsletters pour que les nouveaux inscrits puissent s’y référer, je suis plutôt partisan de l’inverse. On prend le train en marche, si je puis dire, et ce n’est pas grave. C’est un peu comme dans la vie. Si vous m’avez connu il y a dix ans, vous connaissez mon évolution, mais si vous venez juste de me rencontrer, eh bien vous faîtes avec la personne que je suis actuellement. Et c’est d’ailleurs peut-être plus facile pour vous, parce que parfois, concilier la personne que j’étais il y a dix ans et celle que je suis maintenant…

Bref, pour moi, une newsletter est un lien plus personnel. Si vous désirez garder ou archiver les lettres d’écaille & de plume que je vous envoie, vous en avez parfaitement le droit. Vous pourrez ainsi en relire certaines (si elles en valent la peine à vos yeux) dans quelques années, comme nous le faisions avec de vieilles missives en papier. Ou pas. Mais si vous venez de me rejoindre, vous ne recevrez pas les lettres que j’ai envoyées il y a un an ou deux ans.

Dans mon esprit une lettre est vivante, et elle évolue donc. En partie grâce à vous, d’ailleurs.

Un site ou un blog est conçu pour rester, pour laisser une empreinte plus durable.

Les deux sont complémentaires.

Et donc, je m’inscris aux newsletters dans le même esprit. Je réponds parfois, et les conversations peuvent s’étirer dans l’espace d’un mail, parfois très long, comme dans le temps, parfois sur plusieurs semaines. Parfois, je prends le temps avant de répondre. Le temps de mûrir ce que j’ai envie de dire, d’écrire. Le temps de la réflexion sur ce que j’ai lu.

Je ne suis plus pressé ni par un algorithme qui enfouit un tweet sous des milliers d’autres en quelques secondes, ni par une urgence à répondre sur l’instant.

Tableau d'ambiance victorienne  représentant deux jeunes femmes en train de lire une lettre, probablement galante.

Les serveurs Discord

Et si je veux avoir une discussion non plus seulement à deux mais avec une communauté ?

Il y a les serveurs Discord pour cela.

Héritiers des vieux forums des années 1990 et 2000, ces espaces ont un mode de fonctionnement hybride entre le réseau et la newsletter. D’abord ils sont communautaires, même s’ils appartiennent à une personne ou une organisation, qui sont responsables de sa modération, de son organisation.

Un serveur Discord est en effet organisé en salons dédiés à des sujets bien précis, des thématiques, parfois des règles différentes, et parfois des droits d’accès séparés. Un même serveur peut ainsi accueillir un salon général ouvert à tous (tous ceux qui ont reçu le lien d’invitation du serveur), un salon qui cause de jeu de rôle ouvert à tous également, mais aussi un salon réservé aux correspondants qui reçoivent une newsletter, et un autre salon où seuls les mécènes Patreon sont autorisés à entrer.

Là encore, le ou la propriétaire (vous) est maître en ses lieux. Vous ne dépendez pas d’un algorithme ou d’une plateforme. Pas plus que les invités du serveur.

Le plus intéressant reste que l’accès à un serveur se fait par invitation. Si vous ne possédez pas le lien, alors vous ne pourrez jamais trouver le serveur. De même, vous pouvez doser finement les droits et les accès de chaque catégorie d’utilisateurs invités, voire de chaque utilisateur lui-même, comme sur un site ou un forum.

L’installation d’un serveur Discord est assez simple, et elle est gratuite…

Tableau Le salon de la princesse Mathilde

Les comptes Patreon

Vous désirez avoir une relation plus privilégiée avec un créateur ou une créatrice ? Vous voulez l’aider et faire connaître son travail ? Oubliez les retweets et autres likes. Donnez-lui les moyens de continuer et de déployer son art. Devenez son mécène via Patreon.

Je cite cette plateforme en particulier car l’alternative française subventionne le complotisme, quant à celle qui promet de financer par de la publicité que vous accepteriez de regarder, je trouve que c’est une perversion pure et simple du principe du micromécénat lui-même.

En donnant sur Patreon, vous agissez contre la publicité et vous aidez directement la personne ou l’organisation que vous voulez soutenir, en ayant des contreparties exclusives.

En ouvrant votre propre page, vous vous assurez l’indépendance de cette même publicité tout en fédérant autour de vous les personnes les plus motivées.

Bien choisir c’est choisir parcimonieusement

Tout cela est bien beau, mais peut tout de même vous mener à une situation de saturation comparable à celle des réseaux dyssociaux. Si vous n’y prenez garde, en effet, vous risquez de crouler sous les bookmarks, les flux RSS, les podcasts non lus, les newsletters non ouvertes qui s’accumulent dans votre boîte mail, et des dizaines de conversations sur Discord que vous ne pourrez plus suivre.

Mon conseil est donc de choisir très parcimonieusement vos abonnements.

  • Ne gardez dans vos bookmarks que les sites qui soit vous paraissent mériter une deuxième vision un peu plus tard, soit qui sont pour vous des références importantes.
  • Ne commentez que si vous pensez avoir quelque chose de véritablement utile à apporter à la conversation ou à l’article.
  • Ne vous abonnez au flux RSS que des sites ou des podcasts qui vous paraissent mériter l’effort de les suivre, de les lire ou écouter régulièrement.
  • Ne donnez votre adresse mail à une newsletter que si vous pensez que vous aurez le temps d’en lire les missives.
  • N’entrez dans un serveur Discord qu’en étant prête ou prêt à y participer régulièrement.
  • Et surtout, ne gardez rien qui ne vous soit plus utile ou qui n’éveille plus votre intérêt.

Dans le cas des newsletters ou des serveurs Discord, la politesse voudrait que vous expliquiez votre démarche à la personne qui en est l’expéditrice ou la propriétaire. Mais je sais que ce n’est pas dans les us et coutumes de l’internet, ni même de la vie réelle.

Dans tous les cas, sachez rester minimalistes et souvenez-vous que peu d’abonnements de grande qualité sont plus importants que de trop nombreux abonnements qui vous encombreront.

Au besoin, pour vous aider à choisir, vous pouvez utiliser la méthode des cercles concentriques.

Conclusion : pour un internet et une vie numérique apaisées

Ma vie relationnelle numérique est organisée en cercles concentriques selon la proximité et l’intérêt que suscitent les rencontres que je fais.

  • Premier cercle : les trouvailles, la boussole
    • Navigateur internet
    • Moteur de recherche
    • Bookmarks
  • Deuxième cercle : les références
    • Flux RSS
    • Podcasts
    • Commentaires par flux RSS
  • Troisième cercle : les «amitiés virtuelles»
    • Newsletters
    • Communautés Discord
    • Patreon

Tout ce que je trouve sur internet, au cours de mes voyages dans les océans virtuels, commence par arriver dans mon navigateur, à la périphérie du premier cercle. Si ce que j’y trouve éveille ma curiosité, je garde le site dans mes bookmarks avec l’étiquette #à revoir. Dans un deuxième temps, quand j’ai parcouru le site, je décide si je lui trouve toujours autant d’intérêt.

Si c’est le cas, alors, dans le cas où le site peut me servir de référence ou d’outil, de tutoriel, je le garde dans mes bookmarks avec l’étiquette adéquate. Si le site publie régulièrement sur un sujet qui est important pour moi, il franchit le deuxième cercle et je peux en plus m’abonner à son flux RSS, voire commenter et dans ce cas m’abonner au flux RSS des commentaires de l’article ou du site en entier pour suivre la conversation qui va peut-être s’amorcer.

Au fil des articles reçus par le flux RSS, je décide si certains valent la peine de les garder en bookmarks, voire de commenter.

Lorsqu’un site suscite vraiment de ma part des commentaires réguliers, ou que ses articles me plaisent, alors je lui fais franchir le troisième cercle, et je m’abonne à la newsletter, voire au serveur Discord, ou bien aux deux.

Enfin, lorsque le travail de quelqu’un m’interpelle vraiment, je peux devenir son mécène.

J’imagine que vous avez un système similaire, si ce n’est exactement le même, car il est simplement basé sur le modèle de ce qui se passe dans la vie réelle. Lorsque nous rencontrons quelqu’un, à moins d’un coup de foudre qui fait directement franchir un ou deux cercles, nous laissons la personne dans le premier, le temps de tester la relation. Puis peu à peu, la personne peut changer de cercle. Parfois, même, passer d’un cercle plus proche à un cercle plus éloigné.

Il reste que, comme dans la vie, nos compétences relationnelles sont inégales, et ont tendance à changer avec l’âge. On espère qu’elles s’améliorent, mais ce n’est pas toujours le cas. Comme dans la vie réelle, il y a des personnes plus douées que d’autres. Comme dans la vie réelle, il est nécessaire d’acquérir un savoir-vivre.

Et ça, ça s’apprend. Ce sera peut-être l’objet d’un prochain article.

Quel cercle ?

Si vous utilisez un autre principe, je suis curieux de connaître lequel. Vous pouvez en parler dans les commentaires… si d’écaille & de plume est dans votre deuxième cercle, bien sûr 😜.

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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De l’importance du vocabulaire sur la pensée, partie 1 : Je ne publie pas des contenus

De l’importance du vocabulaire sur la pensée, partie 1 : Je ne publie pas des contenus

De l’importance du vocabulaire sur la pensée, partie 1 : Je ne publie pas des contenus

Je suis un vieux con.

C’est du moins l’impression que j’ai de plus en plus souvent lorsque je ressens ce mélange de colère désabusée et de nostalgie irritée à la lecture du vocabulaire de l’Internet des années 2020.

Je dois être au minimum dépassé. Voire réac’.

Je pense être quelqu’un de résolument humaniste et progressiste sur le plan social.

Mais, que voulez-vous, entendre certains mots à propos de ce que l’on peut rendre public sur la Toile, sur ce que l’on crée, sur les raisons pour lesquelles il est légitime de le faire… tout ça me rend chafouin.

Non, décidément, je dois être un vieux con.

Comment expliquer autrement le fait que mes poils se hérissent à la lecture ou l’écoute de certains mots, de certaines expressions ?

C’est que, comme écrivain, comme individu, comme soignant, je suis persuadé que les mots ont un pouvoir. Un énorme pouvoir. Celui d’influencer la pensée de celui ou celle qui les utilise. Chaque mot a la capacité de modeler le raisonnement, de faire naître une certaine vision du monde, ou du moins de diriger l’attention des locuteurs qui l’utilisent ou l’entendent dans une direction bien particulière. Avec des mots, les écrivains, les poètes, les journalistes, les politiques, les séducteurs influencent leurs publics, aussi divers puissent-ils être.

Utiliser un mot plutôt qu’un autre est donc un choix, conscient ou pas, qui vise à produire un effet bien spécifique. Ainsi, vous n’aurez pas pu manquer que ma première phrase n’est pas anodine.

Plus encore, les mots sont les briques de la conceptualisation, donc de notre façon de percevoir ce qui nous entoure. Si je dis «une personne», mon interlocutrice et moi allons immédiatement visualiser un être humain un peu neutre, flou. Si j’écris «un individu», la connotation péjorative aura déjà fait naître une image beaucoup moins agréable et très orientée.

Jusque là, la raison de mon agacement ne vous a peut-être pas encore sauté aux yeux.

La voici donc dans toute sa crudité : je suis agacé au plus haut point par le jargon qui s’est développé sur Internet ces dernières années avec l’essor des réseaux dysociaux mais surtout de l’ère des influenceurs, youtubeurs et autres community managers. Ce jargon qui contamine peu à peu toutes les personnes qui publient et créent sur la Toile. Ce jargon qui réduit tout ce qui se passe en ligne à une transaction commerciale.

Et ce qui m’irrite encore plus, c’est que personne n’à l’air de s’en soucier.

Tout le monde s’en fout, pour paraphraser le titre d’une chaîne YouTube que j’aime beaucoup malgré ses défauts, dont le moindre n’est pas d’être sur YouTube, justement.

Eh bien pas moi. Et dans cette petite série, je voudrais exposer mon propre vocabulaire de substitution, pour résister à ce formatage.

Si vous ressentez la même chose que moi, peut-être que vous utiliserez les mêmes mots que moi et que nous pourrons proposer une autre façon d’envisager internet. Mais ne vous faites pas trop d’illusions.

Le destin fait rarement plaisir aux vieux cons.

Le contenu

Aujourd’hui, il ne faut plus dire qu’on sort une vidéo. On n’a plus le droit de penser que l’on publie un article ou qu’on a édité un podcast. Non. Aujourd’hui, dans les années 2020, on publie forcément des contenus.

C’est vrai, c’est pratique.

Un contenu, ça englobe tout ce qu’on peut balancer sur la Toile.

Un article sur les 10 manières de coiffer les franges des chihuahuas comme une vidéo de conseils sur la meilleure façon de réussir la pâte à crêpes, un long cours écrit sur l’origine des barrages en Chine ancienne, ou un petit délire musical parodiant Thriller de Michael Jackson avec des paroles en javanais.

Oui, c’est pratique.

Mais surtout pour peu à peu vous faire intégrer que tout ceci n’est pas le plus important, finalement. Que tout ceci est interchangeable, standardisé. Que l’essentiel est ailleurs. Dans l’intention cachée derrière cette publication. Ou dans le contenant, dont on ne parle jamais, bizarrement, alors qu’il est un implicite constamment présent lorsqu’on parle de contenu, comme l’ombre l’est quand on parle de lumière.

Le nom générique et neutre : un appauvrissement du vocabulaire, donc de la pensée

Finalement, tout se vaut.

La vidéo qui aura pris des jours de tournage, des heures de montage et de postproduction afin d’expliciter une notion ardue d’un côté, et le texte de 150 mots pondu à l’arrache pour plus ou moins présenter un concept dispensable de l’autre. Ben oui, tout se vaut, puisque ces deux objets, qui n’ont rien à voir l’un avec l’autre, sont tous les deux des contenus

Or, la diversité de ce qui est publié sur la Toile est presque infinie.

Vouloir réduire cette infinité est non seulement impossible, mais surtout une entreprise d’appauvrissement.

La richesse du vocabulaire induit la richesse de la conceptualisation.

La pauvreté du vocabulaire induit un appauvrissement de cette même conceptualisation. Elle abaisse notre capacité à appréhender la diversité, les nuances. Elle induit des raisonnements simplistes, elle réduit notre capacité à comprendre les subtilités du monde. Elle provoque chez nous des comportements binaires : l’accord sans distance ou l’opposition sans discussion possible. Elle fait naître les trolls.

C’est une des raisons pour lesquelles je refuse d’abaisser le niveau de langage de mes écrits pour les rendre plus «accessibles». Ce n’est pas à moi d’abaisser mon vocabulaire, c’est au lecteur, à la lectrice, de faire l’effort de découvrir de nouveaux mots, de nouvelles expressions, de nouvelles images, d’enrichir son propre lexique de métaphores, de sensations, de liens, comme je fais l’effort de mon côté de proposer ce que je sais faire de mieux.

L’art ne vise pas au consensus, il vise à enrichir la complexité du monde, à l’enrichir d’une vision singulière, donc distinctive, donc irréductible à quoi que ce soit d’autre.

Tout ne peut donc pas être regroupé sous un même vocable interchangeable.

Un contenu, finalement, c’est quoi ? Un salmigondis informe, vague, composé d’ingrédients totalement indiscernables les uns des autres. Parce qu’il ne faut pas oublier ce que veut dire le mot.

Un contenu, c’est tout ce qu’on veut qui peut être contenu dans un récipient. Dans un contenant.

Le contenant

Il n’est pas anodin que le mot contenu ait d’abord été utilisé sur les réseaux dysociaux.

Se présentant comme de puissants vecteurs de diffusion permettant de mettre en relation des créateurs et leurs publics, les plateformes comme YouTube ou Facebook s’efforcent de nous convaincre que le plus important pour elles est ce que nous leur confions.

Arrêtons d’être naïfs.

Le plus important pour YouTube, c’est YouTube et ses profits. Peu lui importe que ces profits soient générés par de la publicité sur votre vidéo ou sur celle de votre voisin. Pour YouTube, toutes les vidéos se valent et sont interchangeables dans leur potentiel de rapporter de l’argent. Votre création est un contenu. Mais ce qui importe à YouTube, c’est que le contenant tire son épingle du jeu.

Peu importe si votre bouteille contient de l’eau ou du lait. L’important c’est que vous avez d’un côté une bouteille d’eau et de l’autre une bouteille de lait. Le seul point commun, ce n’est pas le contenu, c’est bien la bouteille. Et finalement si c’est le seul point commun, c’est bien la seule chose qui ait de l’importance. Comme un alcoolique sera indifférent au contenu de cette bouteille pourvu qu’il y ait de l’alcool et ne distinguera pas un grand cru d’une piquette de supermarché.

La logique du Maître adoptée par l’Esclave

Que YouTube utilise le mot contenu est dans sa logique. C’est compréhensible. Et quelque part, c’est même sain parce que c’est une façon d’afficher la couleur. Une sorte de sincérité involontaire qui proclame bien haut :

Je veux faire du fric sur ce que tu vas publier via ma plateforme, et c’est en gros tout ce qui m’intéresse.

Il est plus difficile de comprendre que les créateurs eux-mêmes se soient approprié le terme et l’utilisent sans véritablement mesurer son impact.

Les mots que nous utilisons reflètent la façon dont nous voyons le monde, dont nous interagissons avec lui. Plus important encore, ils conditionnent nos actes et nos relations avec les autres.

Il n’est pas neutre de parler de contenus au lieu d’œuvres, ou simplement de créations. C’est un choix beaucoup plus politique et beaucoup plus important que nous le croyons. Sans tomber dans le politiquement correct, faire attention aux mots que nous utilisons, c’est éviter de nous soumettre à des idées qui sont contraires à nos propres intérêts, c’est aussi éviter de nous soumettre volontairement au pouvoir que les plateformes ont sur nous.

Car les mots sont le pouvoir, comme le savent tous ceux et toutes celles dont le métier est d’influencer les autres, quel qu’en soit le but.

On peut user de ce pouvoir pour aider ceux et celles qui en sont l’objet, comme le font les psychologues et les soignants en général. On peut le faire pour donner à rêver, à réfléchir ou à s’évader comme c’est le cas pour les artistes, écrivaines et chanteuses, les acteurs. On peut le faire pour vendre des biens matériels ou des idées, comme les publicitaires et les politiciennes.

Adopter le langage des plateformes, c’est se soumettre à l’influence de leur façon de voir le monde, et ce monde-là est fait pour elles, pas pour nous. Adopter leur langage, c’est donc nous emprisonner volontairement, nous aliéner, nous enchaîner à leur futur plus ou moins dystopique.

Ce que je choisis de nommer

Je décide donc de nommer ce que je libère sur la Toile, ce que je partage, ce que je confie, ce que j’offre. Ou ce que je vends.

Je décide que ce sont des articles, ce sont des podcasts, des vidéos, des poèmes, des nouvelles.

Je choisis de nommer tout ceci mes créations.

J’en suis le démiurge. J’accepte que mes créations puissent s’émanciper. De moi comme des canaux qui les transportent.

Je choisis de considérer que mes créations puissent se suffire à elles-mêmes sans dépendre de la façon dont je les diffuse, du carton qui les contiendrait ou du biais par lequel elles pourraient atteindre leur public. Cela implique le refus des DRM, des verrous numériques. Cela signifie aussi que les exclusivités ne doivent répondre qu’à un seul but : le lien privilégié avec le public de ces mêmes créations.

Je ne suis pas, heureusement, le seul à penser cela, mais pourtant, cette lucidité est encore trop peu partagée sur Internet.

Vous aussi, osez faire naître des créations

Et parlez-en comme telles.

Elles sont plus importantes que le vague sac numérique qui les porte vers votre public.

Car ce qui est vraiment essentiel réside dans ce que vous avez créé.

Le proverbe le dit bien :

Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse.

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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Ce qui va me manquer

Ce qui va me manquer

Ce qui va me manquer

Le trente mai au soir, un lundi, lorsque je refermerai pour la dernière fois la porte, il restera entre ces quatre murs comme les ombres nostalgiques de tant de souvenirs, de tant de larmes, de tant de rires, de tant de confidences, de tant de douleur, de tant d’espoirs, de tant de dénouements.

Tout cela sera si fort que les vapeurs invisibles mais tenaces que cela aura fait naître se seront imprégnées dans les peintures, le sol, le plafond, les dalles lumineuses qui l’éclairent, et que, sans doute, des images irréelles, seulement visibles de quelques personnes, resteront, évanescentes, dans la buée des petits matins d’hiver ou la rosée de printemps, pour se montrer à travers les vitres comme des reflets fantomatiques.

J’aime à croire que les événements laissent des traces chez les personnes qui les vivent, mais aussi, de façon plus surprenante et subtile, sur l’ambiance d’un lieu.

J’aime à croire que ce qui restera sur place, ce soir-là, alors que je partirai définitivement, sera bienveillant et souriant.

Lorsque je refermerai pour la dernière fois la porte, je laisserai tant de choses qui me manqueront…

Je laisserai les nourrissons et leurs sourires spontanés, leurs gestes saccadés et mal coordonnés, leurs éclats de rire et leur caractère déjà trempé pour la plupart. Ma vieille toise en bois ne prendra plus l’aune de leur vitesse de croissance, et le mètre ruban dont je les coiffais après avoir vainement et naïvement tenté de leur faire croire que c’était “le bandeau de Rambo” en montrant sur ma propre tête que cela ne faisait pas mal, ce mètre ruban sera enroulé une bonne fois pour toutes.

Je ne verrai plus les lueurs inquiètes mais malgré tout confiantes dans les yeux de leurs parents à qui j’apprenais les rudiments de l’hypnose infantile pour leur permettre de passer l’épreuve des premières vaccinations et effacer ces souvenirs douloureux de leur mémoire encore si jeune.

Je laisserai les enfants plus âgés avec qui je pouvais déjà discuter un peu pour négocier un examen, un soin, un vaccin, une auscultation. Je laisserai les paroles affirmées et la tendre naïveté des pensées de cet âge, quand ils ou elles me racontaient leurs vacances chez leurs grands-parents, combien ils étaient fiers de leur t-shirt spiderman, ou avec quelle passion elles attendaient leur fête d’anniversaire.

Je laisserai cette phrase si attendrissante de la fillette qui, à la question de savoir en quoi elle voulait me transformer avec sa baguette magique, répondit tout de go “en beau !”, provoquant tout à la fois mon éclat de rire et une excuse gênée de sa mère bredouillant “elle veut dire en prince charmant”.

Mes cinq petits tampons, insigne marque de courage et emblèmes de fierté accordés à celles et ceux qui restaient courageux, sages, ou qui surmontaient la consultation, seront orphelins eux aussi. La princesse ira-t-elle consoler le dragon ou le chevalier ? Ou bien sera-ce le nounours qui prendra la girafe dans ses bras pour en sécher les larmes ? À moins que ce ne soit le singe, cette petite figurine qui aida un jour une jeune fille de 5 ans à vaincre, plusieurs semaines d’affilée, des angoisses qui l’empêchaient de dormir.

Je laisserai Laure, Maëlle, Antoine, Théo, Tom, Miya, Axelle, Marly, Yohan, Jade, Thaïs, Lilou, Zoé, les jumeaux Louis et Gabriel, ou encore Lise, parmi tant d’autres encore.

Je laisserai aussi tous ceux et toutes celles qui ont grandi, et qui, devenues adultes, sont restées mes patientes ou mes patients.

Celles-là, ceux-là, je les ai parfois vus depuis qu’ils sont sortis de la maternité. Ils ont maintenant plus de 12 ans. Ce sont des adolescents et je vais laisser en arrière leurs interrogations et leurs angoisses, leurs espoirs et leurs découvertes, leurs rébellions et leur méfiance des adultes, leurs touchantes marques de confiance si chèrement gagnées.

Je les laisserai sur leur chemin, en espérant avoir, à un moment ou un autre, pu les aider à ce qu’il soit vraiment le leur, à ce qu’il soit, sinon plus doux, du moins plus enrichissant, et qu’ils soient mieux armés pour le parcourir.

Lorsque je lâcherai la poignée, il restera toujours, derrière, dans le bureau de consultation, les moments forts que j’ai eu l’honneur de vivre avec ceux qui n’étaient plus vraiment des enfants, et qui pourtant ont accepté de faire confiance à la partie d’eux-mêmes qui règne sur l’enfance comme sur la créativité pour explorer en hypnose thérapeutique une autre façon de regarder leurs différents problèmes.

Avec elles, avec eux, j’embarquais moi aussi dans des voyages hypnotiques où je les accompagnais dans un changement souvent si minime qu’il aurait presque pu passer inaperçu, mais si essentiel qu’il a totalement modifié leur regard sur des douleurs chroniques, des blocages psychologiques, des souffrances relationnelles, des symptômes encombrants.

J’ai assisté et j’ai parfois pu guider des prises de conscience qui ont révolutionné leur quotidien.

Quand je détournerai la tête, ce dernier soir-là, ce sera pour laisser d’évaporer les petits moments d’émotion partagée, les larmes qui montaient aux yeux des deux côtés du bureau, les mains qui se serrent l’une et l’autre dans une expression de réconfort face à une grave nouvelle, le geste simple d’une paume qui se pose sur un bras ou une épaule.

Comme un souffle fragile, les exercices de respiration qui régulaient des crises d’angoisse s’évanouiront.

Comme s’envoleront les rires et les sourires, les jeux de mots dont je suis parfois un peu trop coutumier mais qui étaient appréciés de certains et de certaines.

Dans ce lieu étonnant où l’on pouvait constater un revers de traitement, ou une défaite amère face à la maladie, on pouvait aussi savourer et célébrer ensemble de petites victoires et de grandes réussites. Pour chacune et chacun, nous cherchions, ensemble, sans relâche à apaiser, à soulager.

Lorsque la clef tournera une ultime fois dans la serrure, je laisserai aussi un lieu que j’avais peu à peu investi, et qui, malgré l’absence de tableaux que je n’avais jamais pris le temps d’accrocher, commençait à ressembler un peu à ce que je voulais y mettre, au moins dans son atmosphère. Un endroit que j’avais voulu façonner comme un havre pour celles et ceux qui avaient besoin d’y trouver un peu de paix et d’écoute dans ce monde si dur. Moi le premier.

J’y étais maître à bord, et cela aussi je devrai le laisser derrière moi.

Cette liberté que promet en théorie l’exercice libéral, et dont j’ai si peu profité, finalement. Parce que les contraintes administratives, parce que les contraintes financières, parce que la pression des patients. Mais aussi, en étant totalement honnête, parce que ma peur, parce que mes injonctions intérieures, parce que ma rigidité mentale.

Mais je quitterai aussi une amie avec laquelle j’avais eu ce projet. Ce projet de travailler ensemble, avec la même vision, la même volonté, en gardant chacun notre propre façon de faire, nos différences, nos personnalités bien distinctes, nos styles intacts. Nous nous connaissions depuis longtemps avant de nous associer. J’avais dit, dans une autre vie : “jamais je ne m’installerai avec un ami ou une amie, jamais je ne mélangerai l’amitié et le travail”. Une fois de plus, l’univers ou l’ironie de l’existence m’ont amené à renier cette interdiction idiote, et pour mon plus grand bonheur. Travailler avec une amie a été pour moi un vrai plaisir.

Les discussions autour de la table de notre salle de repos, les exaspérations partagées, les rires et les sourires se sont mélangés aux conseils professionnels, aux avis précieux, aux galères surmontées ensemble.

Nous avons même entrepris une réanimation d’urgence dans mon cabinet de consultation, l’une massant pendant que l’autre insufflait, puis inversement, à tour de rôle, jusqu’à ce que les pompiers puis le SAMU n’arrivent.

Cela forge.

Cela aussi, je devrai le quitter, même si l’amitié reste.

Mais lorsque la porte se fermera, je ne laisserai pas vraiment tout cela derrière moi.

Car en même temps qu’une dernière fois l’air à l’intérieur sera brassé par le mouvement, tous ces souvenirs, toutes ces émotions, toutes ces larmes et tous ces rires, comme des volutes de fumée invisibles, prendront leur envol.

Car si tout cela a existé, cela a aussi existé en moi.

Tout cela m’a changé, m’a grandi, m’a bousculé.

Le trente mai au soir, un lundi, lorsque je refermerai pour la dernière fois la porte, j’emporterai tout cela avec moi.

Et je tâcherai d’en rester digne.

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Abolir le privilège de créer

Abolir le privilège de créer

Abolir le privilège de créer

Question : Vous sentez-vous concerné par les difficultés rencontrées par des auteurs ?

Réponse : Je ne me sens pas touché en raison du corporatisme que cela représente. D’abord, il y a tellement d’autres secteurs dans la merde et qu’il faut mieux aider. En second, je pense que nous produisons trop. Certains écrivent sans avoir la nécessité vitale de le faire. À un moment donné, même si on est très brillant, on ne se renouvelle pas assez. Je n’ai pas envie de défendre tout ça, ce n’est pas prioritaire. Pouvoir créer est un privilège.
— Alain Damasio, revue Livres Hebdo, 02/04/2021.

La réplique a fait couler de l’encre dans le milieu littéraire (est-ce un pléonasme ?).

C’est qu’elle étonne et détone sur le plan politique et philosophique de la part d’un auteur par ailleurs très engagé.

J’admire les œuvres d’Alain Damasio.

Elles sont souvent des bijoux dont la forme est travaillée autant que le fond en une harmonie rarement atteinte en littérature.

Mais surtout, elles portent en elles une vision de l’être humain émancipatrice.

Alors, comment comprendre une déclaration aussi paradoxale avec cette posture habituelle ?

Car en substance, si les mots veulent bien dire ce qu’ils sont censés exprimer, Alain Damasio développe l’affirmation selon laquelle :

  1. Pour mériter d’écrire, il faut être brillant et se renouveler, mais aussi en avoir une nécessité vitale.
  2. Seuls certains peuvent mériter ce privilège qu’est la création.

En résumé : les êtres humains ne sont pas tous légitimes à prétendre au titre de créateur.

Personnellement, cette affirmation me hérisse le poil et me révolte.

L’industrie de la création

Bizarrement, alors qu’il se présente souvent comme un partisan de l’anticapitalisme, Alain Damasio légitime dans cette déclaration une vision de la création littéraire soumise à la loi du marché.

Pour lui, «nous produisons trop».

La phrase est vague, et pourtant elle fait écho à un argument qu’on lit de temps à autre pour expliquer que les auteurs gagnent mal leur vie : le nombre de livres produits chaque année serait tellement important qu’ils entreraient en concurrence les uns avec les autres, en plus d’être en concurrence avec les autres moyens d’expression que sont les films, les séries, les jeux vidéos, et le pouvoir d’achat des consommateurs de culture étant limité, chaque auteur ne percevrait qu’une portion infime de ce gâteau financier et ne pourrait donc pas en vivre décemment.

J’ai volontairement parlé de concurrence, de pouvoir d’achat et de consommateurs.

Dans cette simple phrase, Alain Damasio se soumet au paradigme capitaliste de l’industrie de la création.

Selon son raisonnement, si l’on avait moins de personnes qui se prétendaient autrices, les véritables créateurs ne se feraient pas concurrence, et gagneraient mieux leur vie.

Je ne suis pas d’accord.

Je défends quant à moi l’idée selon laquelle on mesure la valeur d’une société à la place qu’elle accorde (ou pas) à ceux et celles de ses membres qui sont en capacité d’apporter plus de beauté, de réflexion, de connaissance, de sagesse, au trésor commun de l’Humanité.

Et si une société facilite l’émergence en son sein de tels créateurs, alors elle a des chances de faire briller plus loin, plus longtemps et plus fortement le phare de l’intelligence dans l’univers.

Pour moi, il n’existe pas un stock fini de création possible dans une société, mais au contraire un potentiel infini. Et pour moi, plus il y a de créateurs et de créatrices actives dans la société, plus celle-ci devient riche d’idées, de concepts, de beauté, plus elle est digne d’être montrée en exemple.

Pour une bonne raison, qu’Alain Damasio cite pourtant dans sa malheureuse tirade :

La nécessité vitale de créer

Là encore, ces cinq mots sont assez flous et l’on ne sait pas exactement ce qu’Alain Damasio leur donne comme véritable signification.

Je vais donc expliquer ce qu’ils signifient pour moi.

D’abord, de façon intime, c’est un élan que je ressens physiquement, dans ma chair, dans mon sang, dans mes tripes. Donc dans mon esprit, car comme l’a récemment montré un autre Damasio, Antonio (aucun lien avec Alain, à ma connaissance, «ils sont fils uniques» comme dirait Serge Karamazov), dans son dernier ouvrage Sentir et savoir, l’émergence de la conscience chez les êtres vivants prend racine dans le corps lui-même. Ainsi, les sensations physiques qui chez moi expriment ce besoin d’exprimer mes sentiments, mes espoirs, mes révoltes, mes pensées, ma vision particulière du monde, font-elles naître une conscience que j’ose qualifier d’artistique, en plus de créatrice. J’ai expérimenté dans ma vie des périodes où ce besoin était réprimé, à cause de manque de temps, ou de confiance en moi, ou de préoccupations plus «immédiates». J’en ai ressenti une sensation physique de recroquevillement, de malaise, une sorte de nausée permanente qui chez moi naît dans mon abdomen et se prolonge jusque dans ma gorge. J’en ai ressenti des symptômes physiques aussi réels, nets et puissants que lorsque j’ai faim, ou soif, ou lorsque je suis pris d’une fièvre.

Ainsi, contrairement à la théorie de la pyramide de Maslow, qui postule que l’on ne peut commencer à atteindre les étages supérieurs que si les étages inférieurs sont bien stabilisés, je ressens plutôt que les étages supérieurs ont une influence sur les étages inférieurs. Du moins dans mon cas particulier.

Mais on pourrait imaginer que ce ne soit le cas que d’une minorité d’auteurs et d’autrices.

Je ne le pense pas.

Je suis même persuadé que ce besoin vital, cette nécessité, est consubstancielle à tous les êtres vivants doués de conscience, voire à tous les êtres vivants, voire à l’univers dans son ensemble.

Car qu’est-ce que la création ?

C’est l’apport au monde de quelque chose qui n’existait pas auparavant, au moins sous cette forme particulière, avec cet agencement particulier. C’est faire émerger une propriété nouvelle à partir d’éléments déjà présents. C’est augmenter les potentialités de nouvelle création à partir de ce que l’on vient juste de construire de nouveau.

C’est augmenter la palette d’actions possibles, l’enrichir d’une nouvelle option.

Que font les êtres humains, en permanence ? Ils créent de nouvelles relations entre eux, sociales. Ils créent de nouvelles idées, de nouvelles techniques, dans chaque domaine de leur vie, que ce soit dans la façon de fabriquer du pain ou dans la poésie, que ce soit dans le choix de leurs itinéraires routiers ou de leur déroulement de carrière.

Plus intéressant encore — et l’autre Damasio, encore lui, le montre beaucoup mieux que moi —, que font les êtres vivants aussi simples que des bactéries face à des conditions de vie qu’elles ne connaissaient pas auparavant ? Elles s’adaptent (et font donc preuve d’intelligence) et parfois font émerger de nouveaux mécanismes biologiques, de nouvelles façons d’utiliser des protéines déjà existantes, voire créent de nouvelles protéines. Elles créent. Par nécessité vitale. Et on peut aller plus loin en affirmant que si elles existent toujours, c’est justement parce que l’évolution naturelle les a sélectionnées par ce critère-là. Les bactéries ne peuvent exister que si elles obéissent à la loi de la nécessité vitale de créer.

Et si je pousse le raisonnement encore plus loin, je peux même étendre cette nécessité au fonctionnement de l’univers dans son ensemble. Pour qu’il puisse exister (et nous avec), il a fallu qu’il compose des quarks, puis des leptons à partir de ces quarks, puis des atomes à partir de ces leptons, puis des molécules à partir de ces atomes, puis des organismes vivants à partir de ces molécules. L’évolution de l’univers se fait avec toujours plus de complexité, toujours plus de création de potentialités. L’univers n’existe que parce qu’il répond lui aussi à cette nécessité vitale de créer.

Pourquoi donc seuls certains êtres humains y seraient-ils soumis, et pas les autres ?

Le privilège de créer

C’est la notion qui a le plus fait réagir dans la réplique d’Alain Damasio.

Créer est-il un privilège ?

Je crois que j’ai démontré que ce n’était pas le cas dans l’univers et dans notre biologie. Mais concentrons-nous sur le sens social que l’on peut trouver au concept.

Si créer est un privilège, alors il existe deux catégories d’êtres humains : ceux qui possèdent ce privilège, et ceux qui en sont privés. On peut accepter ce fait si l’on considère que c’est un don de la Nature, une qualité intrinsèque, génétique, sur laquelle on n’a pas de prise, un peu comme certaines personnes sont douées pour les langues, et d’autres pas, ou certaines personnes sont plus «câblées» pour comprendre les concepts complexes de la théorie quantique à boucle et d’autres pas.

Pourtant, nous sommes nombreux à penser que la création artistique est aussi une affaire de techniques que l’on peut apprendre, comme un artisan verrier peut suivre l’enseignement de son maître. Certes, selon que nous serons plus ou moins doués, nous pourrons mieux ou moins bien utiliser ces techniques et le résultat sera plus ou moins harmonieux, plus ou moins novateur, plus ou moins réussi. Mais chacune et chacun d’entre nous a les capacités pour apprendre.

Il existe donc une deuxième possibilité de considérer ce concept de privilège, c’est la notion de droit.

Il y aurait donc des personnes qui auraient le droit de créer, et d’autres à qui on dénierait ce droit.

Mais alors, qui décide ?

Qui a le pouvoir de déterminer si j’ai le droit, le privilège, de créer, ou si je ne l’ai pas ?

Y a-t-il quelque part un comité qui attribue ce droit ?

Ou bien est-ce le choix arbitraire d’un Souverain ?

Ou encore est-ce un droit d’origine divine, une Illumination venue d’En-Haut ?

Non, aucune de ces affirmations n’est réaliste, ou audible du simple point de vue éthique.

Créer n’est pas un privilège. Créer est dans la nature même des êtres humains.

D’ailleurs, en ce symbolique 4 août 2021, 232 ans après qu’une assemblée ait voté dans la nuit l’abolition des privilèges sociaux qui avaient cours en France depuis des siècles, l’abolition du privilège de créer me semble plus fondamentale que jamais.

Et je complète d’ailleurs en promulguant :

Une Déclaration universelle des droits de l’être humain et du créateur

Article premier

Tous les êtres humains naissent et demeurent libres et égaux devant le droit inaliénable de créer de nouvelles expériences artistiques.

Article deuxième

Ils sont tous doués de talents propres, différents pour chacune et chacun, et restent libres de les utiliser comme ils l’entendent afin d’exprimer leurs sentiments et leurs émotions comme bon leur semble.

Quant aux autres articles, je crois fermement qu’ils devraient comprendre le devoir pour la société et l’État qui en est l’émanation de veiller à ce que chacune et chacun puisse exercer ce droit fondamental, et donc apporter aide et assistance aux créateurs, aux artistes, aux autrices et aux auteurs, au même titre qu’il le fait pour d’autres secteurs d’activité humaine.

Dans une période où une pandémie met en danger nos corps, n’oublions pas que la santé n’est pas seulement une absence de maladie physique, mais bien aussi un état de complet bien-être, physique, mental et social, selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé.

La faculté de créer peut y contribuer.

Et s’il faut écouter un Damasio, préférons les travaux d’Antonio aux déclarations maladroites d’Alain.

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Modernité animiste ou animisme moderne ?

Modernité animiste ou animisme moderne ?

Modernité animiste ou animisme moderne ?

Il était une fois…

… Un petit garçon qui était si souvent plongé dans les récits de chevalerie et les légendes arthuriennes, dans les histoires d’intrépides navigateurs vikings et les mythes antiques de l’Égypte, de la Grèce et de Rome, qu’on le disait souvent «dans la lune». Il avait tellement l’impression de se trouver en permanence à la frontière entre deux mondes qu’il ne savait plus très bien lequel était le sien. Il était comme tous les petits garçons de son âge, insouciant et peu soigneux, déchirant régulièrement ses pantalons dans ses jeux avec les camarades de l’école. Comme les autres garçons de son âge, il pouvait grâce à son imagination transformer son double décimètre d’écolier en une épée fabuleuse capable de le désigner comme Souverain du Royaume de Logres ou même de trancher un rocher pour ouvrir un passage à une armée. Mais l’imagination de ce petit garçon-là allait plus loin. Déjà conscient que les Noms contiennent un pouvoir caché, il baptisa ce double décimètre «Excalibur» et investit ce simple outil de bois d’une véritable importance. Il en prit soin et ne dut se résoudre à le remplacer que lorsqu’il s’avéra impossible de lire les graduations d’une mesure. Le double décimètre suivant, même s’il fut de plastique comme l’époque le voulait (car ainsi était l’usage dans le milieu des années 1980), reçut à son tour le patronyme d’Excalibur, suivi d’un II par respect pour le précédent.

Le petit garçon grandit…

… Et une fois adulte, il portait toujours en lui ce sentiment de l’importance dans sa vie de certains objets, tout comme il sentait confusément que certaines choses autour de lui avaient une personnalité. Les lieux dégageaient parfois certaines ambiances, des animaux étaient selon lui bien plus proches de la conscience humaine que ses congénères semblaient bien l’admettre. Des arbres même lui inspiraient le respect ou parfois la crainte.

Il poursuivit, par tradition personnelle autant que par attachement réel, à nommer certains de ses outils. Le premier ordinateur qu’il put s’offrir avec ses propres deniers fut ainsi baptisé Barnabé.

Alors que, comme beaucoup de jeunes adultes, il prolongeait l’insouciance de sa vie d’adolescent sans vraiment se préoccuper du lendemain ou d’entretenir l’appartement où il vivait, il prenait soin de ces objets si particuliers qu’ils méritaient un Nom. Ainsi se succédèrent Barnabé, Aristote, Tezcatlipoca, Paracelse…

Et le monde, lui aussi, changea…

… Il se durcit, perdit son innocence.

Les lubies des années 1980 et la passion du plastique devinrent la normalité des années 1990 puis la modernité des années 2000. Les êtres humains crurent enfin réaliser l’âge d’or tant de fois rêvé. Mais, trompés par leur propre orgueil, ils ne faisaient que projeter dans la réalité les fantasmes suproductifs de leurs cauchemars en inondant le monde. En lieu et place de fraternité universelle, de communication sans frontière promise par la Toile, ils étendirent un Filet pour capter la totalité de la Terre dans une course à la nouveauté si effrénée qu’elle les déborda eux-mêmes.

Ils n’accordèrent plus aucune considération à ce qu’ils fabriquaient ni à ce qui vivait autour d’eux, ni plante, ni animal, ni même leurs propres congénères. Tout devenait à usage unique, tout devenait obsolète, tout devenait jetable.

Tout devenait remplaçable par tout. Tout devenait une nouveauté à posséder en premier.

Tout finissait en déchet.

Y compris leurs propres âmes, y compris leurs propres consciences.

L’Animisme

Cette petite fable n’a pas encore vraiment de fin.

Mais j’ai envie de décrire quelle pourrait être l’une de celles que j’imagine les plus belles.

Car alors que je vieillis et que j’apprends un peu plus à comprendre ma réalité, cette habitude un peu puérile de nommer certains de mes objets m’apparait de façon très surprenante à la fois comme d’une portée symbolique fondamentale et comme un acte politique au sens fort. Une façon de concevoir le monde qui se souvient d’anciennes valeurs pour transcender avec leur aide une utopie personnelle.

Dans les plus anciennes civilisations humaines, les premières spiritualités accordaient des caractéristiques conscientes à des forces naturelles, à des animaux, à des plantes. Elles les paraient de qualités parfois anthropiques, de caractères et de désirs. Elles cherchaient déjà à les maîtriser, c’est vrai. Mais elles leur accordaient aussi un statut d’indépendance, et pour tout dire, une existence distincte de l’Humanité. Elles reconnaissaient le statut éminemment vivant et surtout l’importance de cette existence propre. L’Humanité n’était qu’une parmi tant de formes de vie et non pas simplement l’aune de toute mesure, outrageusement gonflée d’une fierté mal placée.

Ces traditions existent encore dans certaines parties du monde, sous le nom d’animisme. Elles postulent que certaines forces naturelles et tout ce qui vit possède une âme, une conscience.

Je trouve que, si l’on détache l’animisme de sa connotation religieuse, il y a dans cette pensée une dimension profondément moderne.

L’Animisme de l’artisan

Notre monde est pollué de milliards de tonnes d’objets que nous fabriquons à la chaîne au plus bas coût possible pour en tirer le plus grand profit financier possible, sans plus vraiment faire cas de leur qualité ou de leur longévité, et encore moins des êtres humains qui produisent ces objets, de leur savoir-faire ou de leur bien-être. Un ustensile aussi quotidien qu’un rasoir est devenu jetable, alors qu’on se sert d’un rasoir assez souvent pour qu’un seul objet puisse remplir cette fonction. Même un rasoir est devenu interchangeable. Uniquement fonctionnel.

On aurait pu croire que s’attacher uniquement à la fonction d’un objet permettrait à l’être humain de devenir moins matérialiste. Erreur. C’est bien tout le contraire qui s’est produit.

Paradoxalement (et selon moi les paradoxes sont le fondement du monde), je me demande si investir — ou réinvestir — les objets d’une sorte d’attachement émotionnel ne nous permettrait pas de revenir à plus de raison.

Car après tout, si nous faisons comme le petit garçon que j’étais il y a peu, nous serons sans doute moins enclins à jeter un objet après une seule utilisation. Nous porterons plus d’attention à sa qualité, à la façon dont il a été fabriqué, donc peut-être aussi un peu plus au savoir-faire de celui, celle ou ceux qui l’ont créé ou réalisé, à leur bien-être au travail. Nous serons aussi plus attentifs à ce qu’il reste en bon état, à ce qu’il dure dans le temps. Nous arrêterons de nous projeter dans une consommation sans fin. Nous arrêterons de produire des milliards d’objets inutiles qui finiront leur vie au fond des océans.

De la même manière qu’on atteint plus rapidement la sensation de satiété lorsque l’on fait simplement attention à toutes les qualités de ce que l’on mange, nous prendrons pleinement conscience de ce que nous possédons. Et comme nous pouvons être enchantés par la vue des couleurs et de la présentation d’un plat avant même d’y goûter, comme nous pouvons être transportés à la seule odeur de cette friandise avant même de l’avoir en bouche, transportés par sa texture avant même d’en sentir le goût, alors nous prendrons conscience de la chance que nous avons de posséder un objet qui a été fabriqué parce que quelqu’un, quelque part dans le monde, a pris du temps, des efforts, pour le fabriquer. Nous prendrons conscience de la chance de posséder un objet dont nos ancêtres ne pouvaient pas même rêver tant il serait magique pour eux. Nous prendrons conscience de ce que cet objet signifie, et nous pourrons être reconnaissants de la somme de découvertes, de savoirs, de recherche, d’efforts, de temps, de ressources, nécessaires à sa seule existence.

J’aime à penser que cette façon de voir les choses, un peu influencée par certains côtés de la culture japonaise, peut infuser dans notre propre civilisation occidentale pour l’infléchir.

Même un objet aussi simple qu’un rasoir est la somme de telles choses. Et si nous n’en avions pas, comment serait notre vie ?

Nous ne sommes pas obligés de conférer une âme à cet objet. Ou à chacun de ceux que nous possédons.

Nous sommes cependant responsables de la façon dont nous les utilisons.

Et leur conférer une valeur émotionnelle peut nous aider à choisir plus sagement nos objets, à privilégier des objets de qualité, peut-être plus chers mais mieux réalisés, et à leur offrir une véritable deuxième ou troisième existence une fois que nous n’en avons plus besoin. Nous pouvons donner, vendre, recycler cet objet.

En somme, Nommer, conférer une âme, n’est que franchir un palier supplémentaire dans cette reconnaissance.

Le Droit de la Nature

D’ailleurs, Nommer, l’espèce humaine continue à le faire presque quotidiennement, pour prendre possession de ce qu’elle conquiert, même et surtout si cela ne lui appartient pas. Nous avons Nommé les fleuves, les montagnes, les océans, les forêts et les déserts.

Mais nous avons oublié que Nommer c’est amener à l’existence, c’est faire naître.

Faire naître implique à un moment où un autre que votre progéniture vous échappe. Elle finira par vivre une vie indépendante de la vôtre. Parce que telle est la nature des choses vivantes. Telle est la nature du monde.

Je trouve logique dans cette façon de voir les choses que ce que nous avons choisi de nommer — ou de renommer, puisque parfois sur certains continents, les colons ont remplacé les noms que les natifs avaient apposés — soit doté d’une personnalité juridique, comme quelques pays ont commencé à le reconnaître. Ainsi, un fleuve peut assigner un humain ou une compagnie humaine en justice. Au passage, nous avons déjà passé le pas et conféré une personnalité juridique à des entités aussi abstraites que des compagnies, des sociétés, des entreprises humaines. Qui est Total ? Qui est Facebook ? Sont-ce donc des entités vivantes, pour que nous leur reconnaissions une personnalité juridique ? Pourquoi alors ne pas reconnaître une personnalité juridique aux Pyrénées, qui sont une entité réelle, matérielle, refuge de milliers d’espèces vivantes ?

Dans ce cas, en considérant que les Pyrénées sont une entité juridique, il est aussi logique de reconnaître que leur porter atteinte c’est commettre au moins un délit. Mais lorsqu’on attente à la vie d’un humain, on parle de crime, alors pourquoi dénier à un être vivant (ou, dans le cas des Pyrénées, à un ensemble d’êtres vivants) la protection de la loi contre un crime ? Pourquoi ne pas étendre la notion de crime aux entités vivantes non humaines ? Aucun argument raisonnable ne peut justifier ce refus si l’on suit la logique jusqu’au bout. Aucun argument de bonne foi ne peut donc justifier le refus actuel de reconnaître dans la loi française le crime d’écocide.

Chacun sa place : gagner la nôtre ?

Si donc nous nous entendons pour reconnaître des droits aux choses et aux êtres vivants autour de nous, ne sommes-nous pas en train de réinventer une forme d’animisme ?

Un animisme moderne, qui aurait évolué vers une forme non religieuse.

C’est tout simplement remettre l’être humain à la place qui est la sienne. Nous sommes une espèce vivante parmi d’autres, et même si nous sommes encore la seule que nous connaissions qui soit sapiente, nous ne sommes peut-être pas la seule à être douée de conscience, semblerait-il d’après des études éthocomportementales récentes.

Il est alors fondamental de nous employer à retrouver la mesure de ce que nous sommes, afin de ne pas nous détruire nous-mêmes comme nous avons si bien commencé à le faire.

Dès lors, il me semble évident que douter simplement de notre qualité d’être conscient unique et tout-puissant implique de conférer une forme de conscience à d’autres. Pourquoi pas alors à nos propres créations ?

Et même si cela n’était qu’une convention non étayée dans les faits, je crois que ce serait éthique de notre part.

J’y vois même une élégance parfaite : en considérant nos créations comme dignes de respect, nous nous considérerions nous-mêmes comme dignes de ce même respect. Nous nous élèverions alors au rang que nous cherchons si fort à atteindre. Celui des Démiurges. Nous ferions même mieux que les divinités que nous avons vénérées pendant des millénaires. Car nous aurions en plus du pouvoir de modeler la réalité celui de la sagesse.

Si seulement cela pouvait être…

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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Être éclectique au XXIe siècle, ou comment prendre à rebrousse-poil tous les conseils marketing sur son blog

Être éclectique au XXIe siècle, ou comment prendre à rebrousse-poil tous les conseils marketing sur son blog

Être éclectique au XXIe siècle, ou comment prendre à rebrousse-poil tous les conseils marketing sur son blog

«Il est chouette, ton blog… je relaierais bien quelques articles. Dommage que des écrits sur le soin côtoient d’autres sur le jeu de rôle et encore d’autres sur la littérature. Ce mélange des genres ne fait pas vraiment sérieux.»

La remarque était bienveillante et, après en avoir discuté avec l’auteur, avait pour but de déplorer le peu de fréquentation de cet espace virtuel au regard de son intérêt, d’y trouver une explication, et de m’aider donc à conquérir un lectorat plus nombreux. Une bonne intention, donc.

Et c’est vrai. Ce blog n’a pas d’autre ligne éditoriale, comme on dit dans le journaliste ou les maisons d’édition, que mon bon plaisir et mon intérêt pour certains sujets, sans se soucier d’instaurer une thématique unique qui permettrait à coup sûr d’identifier à l’avance de quoi va traiter le prochain article. Il n’y a ici d’autre cohérence que cette multiplicité d’intérêts, justement. Cette curiosité pour des sujets variés.

Cela dit, en creusant bien, on pourrait certainement dénicher un fil rouge : cet espace traite la plupart du temps de ma passion pour les histoires, les contes, la fiction. Et parfois s’y invitent cependant des sujets sans aucun rapport. Sur mon métier, qui n’a pas vraiment de lien direct avec la fiction… quoique, comme dirait Raymond Devos… Les histoires des vies qui se succèdent dans mon cabinet médical pourraient parfois nourrir nouvelles, romans et séries… D’autres médecins d’ailleurs, ont entamé leur carrière littéraire par ce biais-là, tel Martin Winckler. Ce ne serait pas déshonorant pour moi. Sauf que je n’ai pas envie d’écrire sur mon métier, d’en faire un objet de fiction. Je peux m’en servir dans l’écriture de mes propres intrigues, pour leur instiller vraisemblance par exemple, ou parce que cela peut servir le récit (j’ai en tête l’une des explications cliniques des symptômes qui accompagnent l’exercice de la magie par l’un des héros de Rocfou, ou bien une scène d’accouchement en Égypte antique du deuxième millénaire avant Jésus-Christ dans Sur les genoux d’Isis, un roman qui verra peut-être le jour dans quelques années). Mais la médecine n’est pas mon sujet en tant que telle.

Et par conséquent, mon blog peut donner l’impression d’un joyeux capharnaüm.

Ce qui peut être l’une des explications, parmi une multitude d’autres, de son audience confidentielle (pour l’année 2019, en moyenne 458 visites mensuelles, soit un peu plus de 15 par jour) si l’on écoute les conseils avisés des gourous du blogging.

Car si vous avez déjà traîné vos guêtres du côté des sites spécialisés dans l’activité qui consiste à expliquer comment écrire des articles pour attirer le plus de lecteurs sur votre blog1, l’un des premiers conseils que vous allez lire sera celui-ci : trouvez votre niche, le sujet que les gens ont envie de lire, et tenez-vous-y, n’y dérogez surtout pas.

En gros, un blog doit aborder un thème et un seul (sous-entendu : pour avoir du succès).

Autant dire qu’en effet d’écaille & de plume dénote…

Sauf que.

Sauf que cette injonction de spécialisation me déplaît fortement. Elle est même aux antipodes de ce que je suis.

Aux antipodes de ce que j’aimerais voir devenir le monde.

Et c’est cette vision du monde et ce regard que j’aimerais partager avec vous dans cet article.

Le monde (du blog, mais pas que) tel qu’il est

Pour comprendre à quel point le modèle que j’ai envie de promouvoir sur ce site est éloigné du modèle dominant sur la Toile, il faut commencer par brosser le portrait de ce qu’est cette norme, justement. Laissez-moi donc vous faire découvrir les travers de la blogosphère, en précisant d’emblée qu’il existe, bien heureusement et bien évidemment, de nombreux blogs qui ne suivent pas cette tendance sur tous les points, même si Google et Google Analytics sont très (trop) largement répandus, hélas.

Il est aussi entendu que je vais parfois un peu pousser le trait, cela seulement pour montrer la logique sous-jacente.

La suprématie du moteur de recherche

Dans les années 2010, et depuis longtemps, trouver un site internet ou un blog pour la première fois passe dans 90 % des cas par une requête sur un moteur de recherche. Au hasard, et même s’il a maintenant des concurrents2 qui commencent à prendre de l’ampleur… Google.

Depuis des années, ce moteur a écrasé les alternatives, qui sont devenues marginales, jusqu’à imposer son propre modèle à l’ensemble du web, et en dicter de nombreuses caractéristiques actuelles. L’histoire des moteurs de recherche internet est déjà riche bien que jeune, et vous pourrez comprendre en lisant cet article ou même celui-ci, comment Google est arrivé là où il en est.

À la fin de l’histoire (du moins la fin jusqu’à maintenant), c’est donc Google qui domine. Les robots et autres crawlers ne sont certes pas son apanage, et le règne des algorithmes n’est pas seulement de son fait, mais c’est son algorithme qui détermine de fait la politique de visibilité de presque tous les sites existants.

Car le problème essentiel des sites internet, c’est la visibilité. Comment, en effet, trouver son public, son lectorat, alors qu’il existe des milliards de sites et de blogs ? Et pour l’internaute perdu dans la vaste étendue des océans numériques, comment trouver la perle rare ?

Nous avons déjà parlé des flux RSS et des webrings dans un précédent article. Il y eut aussi des annuaires web, des portails qui permettaient d’indexer les sites sur une base volontariste.

Mais ce sont bien les moteurs de recherche, avec leurs algorithmes et leurs robots, qui ont permis de faire avancer le recensement du web à une vitesse fulgurante.

Et la recherche a commencé à se faire à l’aide des fameux mots-clefs, ce que l’on appelle les métadonnées, des balises décrivant le sujet du site ou du blog, le sujet de l’article, son titre, son auteur, etc. Autant d’étiquettes qui permettent de détailler réellement le sujet dont il va être question. L’algorithme compare ces métadonnées avec la phrase de requête, et classe les résultats en fonction de la pertinence de chacun par rapport à la demande initiale de l’internaute.

Premier écueil : comment déterminer la pertinence d’un résultat ? Vous avez certainement comme moi été surpris de constater que le langage naturel n’est pas forcément bien compris par les moteurs de recherche, et qu’il fallait parfois chercher longtemps avant de trouver un site qui convienne à votre demande.

La deuxième question qui se posa ensuite fut la présentation des résultats trouvés par ces algorithmes. Sur des requêtes simples, des millions de résultats de pages internet peuvent facilement avoir été considérés comme pertinents par le moteur. Laquelle ou lesquelles de ces pages privilégier ? Celle qui est considérée comme «plus pertinente» ? On a vu que cela pouvait être hasardeux. Celle qui a le plus de popularité ? C’est le principe même de Google.

Et ce sont donc les sites qui sont considérés par les utilisateurs eux-mêmes comme pertinents qui sont mis en avant par Google. Mais comment ? Tout simplement en se basant sur le principe qu’un site aura plus de visites s’il répond à une demande. En somme, les plus gros sites, les plus populaires, remportent la mise et se voient présenter dans les dix premières places du listing des résultats de votre recherche.

Et ça marche. Je veux dire que cette méthode permet en effet dans de très nombreuses situations de trouver l’information que vous recherchez. Mais dans certains cas, cela peut quand même avoir quelques inconvénients, dont le principal est simple : plus vous aurez de visiteurs, plus vous aurez de chances d’en avoir.

La course à l’audience

Que les choses soient claires : écrire un blog et clamer ne pas vouloir être lu par la terre entière n’est pas une position tenable ni même simplement crédible. Nous voulons tous que notre blog affiche des millions de vues par jour. Ce n’est pas du narcissisme. C’est le même principe de partage que celui qui pousse un écrivain à publier ses écrits, un peintre à exposer ses toiles, un cinéaste à chercher à ce que son film soit distribué dans le plus de salles de cinéma possible.

C’est le propre d’un moyen d’expression que d’être destiné à un public. Le plus large possible.

Tendre vers toujours plus de visibilité et toujours plus de public est donc logique.

Le classement des résultats sur une recherche Google est tel que les dix premiers sont souvent les seuls visités réellement par les internautes à la recherche d’une information précise (je n’ai pas les chiffres sous la main). Et comme nous l’avons évoqué plus haut, Google donne une prime à ceux qui ont déjà beaucoup de visites. Cela entraîne mécaniquement une course à l’audience, les sites ayant le plus de fréquentation étant jugés plus pertinents, donc mieux exposés, et donc récoltant plus encore d’audience.

Ce qui semble intéressant si l’on recherche une recette de charlotte aux fraises : on va forcément la trouver. Mais on va trouver la recette la plus populaire. Peut-être celle qui statistiquement aura le plus de chance de plaire à ses convives. Mais peut-être va-t-on passer à côté d’une pure merveille gustative qui sera mal notée par Google…

Si l’on rajoute à cela la course aux likes et aux retweets venue des réseaux commerciaux, on comprendra que la mesure d’une audience d’un site est devenue le Graal, l’alpha et l’oméga, la pierre fondatrice du web des années 2010 (en attendant de voir ce que cela deviendra dans les années 2020 que nous venons d’aborder).

Mais puisque tout le monde va trouver la fameuse recette de charlotte aux fraises mise en avant par Google sur le premier résultat, la deuxième recette, celle qui est perdue dans les tréfonds du classement, n’aura que peu de chance d’être même essayée. Et tout le monde fera la charlotte aux fraises de la même manière, sans chercher à aller plus loin.

Alors pour éviter cela, bien sûr, il existe des moyens d’influencer l’algorithme de Google, de jouer avec lui, de le tromper, parfois. Dans le but de faire plus d’audience. Et de participer à cette course à l’échalote (aux fraises ? Bon d’accord je sors).

La SEO

Oui, je dis bien la SEO et non le SEO, comme tous les gourous le répètent à l’envi.

Car que je sache, dans Search Engine Optimization, ou Optimisation pour les Moteurs de Recherche, le mot optimisation est bien féminin, en français…

Et maintenant que Maître Capello a glissé son grain de sel dans la conversation, mon exposé peut reprendre.

Il existe, disais-je plus haut, des moyens de ruser avec l’algorithme de Google.

Ces moyens sont regroupés dans la discipline marketing de la SEO.

Discipline complexe, elle vise à optimiser le placement du site dans les résultats de Google (puisque c’est le dominant) en jouant sur tous les paramètres connus de l’algorithme du moteur de recherche. Je dis bien connus, car l’algorithme est le secret le mieux gardé de l’entreprise, donc personne n’a de certitude… même si.

Si vous avez parcouru la page mise en lien sur les explications de Google quant au fonctionnement de son moteur, vous avez pu voir que de nombreux paramètres peuvent influencer la façon dont il va présenter votre site. S’il est optimisé pour les appareils mobiles, il aura plus de chances d’être haut dans le classement que s’il ne l’est pas, par exemple.

Il y a donc toute une série de manipulations possibles à effectuer sur un blog ou un site pour «forcer la main» de Google et vous «propulser» plus haut dans la liste des sites recommandés par le moteur de recherche.

Des dizaines, voire des centaines d’articles vont vous expliquer comment optimiser votre site. Certaines de ces optimisations sont bienvenues (vitesse de chargement des pages, accessibilité, sécurité), mais d’autres m’ont toujours fait dresser les cheveux sur la tête (pour ne pas dire l’inverse, qui est carrément inconfortable).

On vous expliquera par exemple, entre autres conneries billevesées comment bien rédiger un titre, avec si possible le fameux «les x façons de savoir comment les articles de SEO vont faire ressembler le vôtre à un inventaire à la Prévert auquel on aurait retiré toute poésie». On vous expliquera aussi comment rédiger votre texte (non, pardon, votre contenu, pour parler comme il faut). Si possible en se contredisant : beaucoup vous diront qu’il faut privilégier les articles courts et écrire moins de 600 mots (autant dire que sur d’écaille & de plume je dois être classé comme bavard, voire verbeux par l’algorithme), mais environ le même nombre vous dira que finalement, plus de 2000 mots c’est mieux. Et qui a raison ? Personne ne le sait.

Et je ne mentionne même pas les conseils sur le vocabulaire à utiliser (pas trop compliqué, surtout)…

Au final, cela revient à changer votre façon d’écrire dans le but d’augmenter votre référencement.

Donc, pour aller au fond des choses : d’écrire dans le but d’avoir plus de visites, donc d’écrire ce que les gens ont envie de lire, et pas ce que vous avez envie d’écrire vous-même. D’écrire de façon standardisée.

Au temps pour la promotion de l’individualité et de l’originalité.

Google Analytics, comment transformer un blogueur en espion numérique

Google a donc créé Analytics, un code (javascript pour les geeks qui sont parmi nous) à insérer dans certaines parties de votre site pour créer des cookies (les fameux cookies) permettant de suivre à la trace le comportement de chacun des visiteurs de votre site. Dans les moindres détails.

Ce code, installé sur presque tous les sites, car fortement conseillé et poussé en avant comme étant un indispensable plus dans la gestion de votre vitrine numérique, espionne en réalité purement et simplement votre audience.

Grâce à lui, vous pouvez savoir (liste non exhaustive) : tout sur l’appareil qu’a utilisé un visiteur en particulier pour surfer sur votre site (marque, taille de l’écran, résolution de l’écran, navigateur internet utilisé), tout sur l’emplacement du visiteur lui-même (continent, pays, région, ville, adresse IP), tout sur le moyen utilisé par le visiteur pour arriver jusqu’à votre site (adresse du site qui l’a redirigé vers vous, requête complète utilisée sur le moteur de recherche, réseau social éventuel), tout sur le comportement qu’il a eu sur votre site (la première page consultée, les pages suivantes éventuelles et dans l’ordre, son temps de lecture de vos articles, le temps pendant lequel il est resté sur votre site, sur quels liens il aura cliqué, les sujets qui l’auront intéressé ou pas).

Il permet aussi de croiser toutes ces données entre elles et avec d’autres encore, pour trouver l’âge ou la tranche d’âge de chaque visiteur, son sexe, ses centres d’intérêt.

Tout cela vous abreuvera ensuite de statistiques sur votre lectorat, ses habitudes, les articles qui chez vous fonctionnent le mieux, etc.

Objectif affiché : vous permettre de mieux connaître vos visiteurs et d’adapter votre contenu à leurs besoins.

Ce qui est étonnant, c’est qu’Analytics ne choque personne. Tout le monde trouve normal de suivre à la trace les gestes de ses visiteurs… Et bien pas (plus, en fait) moi.

La mesure d’audience sert à quoi, au final ?

Dans le cas d’un petit site comme le mien, à me rassurer sur le fait d’être un peu lu. Et cela, une extension simple et non intrusive comme Jetpack de WordPress peut très bien le faire. Grâce à elle je sais à peu près quelle est mon audience, mais je ne la détaille pas comme un statisticien de chez BVA. Parce que ça ne me sert à rien. Je le sais, j’ai traîné sur les statistiques d’Analytics pendant de longues sessions… et je n’ai rien appris de concret sur ce que ça allait apporter à mon site de savoir quelle était la tranche d’âge de mes visiteurs. J’ai donc fermé mon compte Analytics et supprimé le code sur mon blog. Ce qui accessoirement a aussi libéré mon lectorat de cookies intrusifs…

Dans le cas d’un plus gros site, j’ai du mal à voir ce que cela apporte vraiment.

L’omniprésence de la publicité

Cependant, si beaucoup sont obnubilés par leur classement Google et par l’engagement de leurs visiteurs, c’est surtout parce qu’il y a un enjeu financier à la clef.

Le monde fonctionne grâce et malgré l’argent. Internet ne fait pas exception.

Je parle surtout du fait que créer, héberger, maintenir un site ou blog, sont des activités qui ont un coût. Pour rentabiliser ce coût, ou simplement pour l’amortir, on peut être tenté par la publicité, véritable cancer du net.

Plus votre site va être visité, plus la régie publicitaire va engranger de clics, plus vous serez payé. Vous rentabiliserez votre site.

Personnellement, je ne supporte plus la moindre publicité sur un site internet tant j’en ai été abreuvé durant des années, à grands coups de bannières clignotantes flashy, de boutons qui apparaissent sans crier gare, de fenêtres intempestives qui surgissent comme un diable de sa boîte.

Là encore, comme vos cookies publicitaires auront ciblé votre visiteur, on va lui proposer des publicités en rapport avec son historique de visites. Il est donc plus intéressant que vous ayez une niche bien déterminée, afin de pouvoir nouer des partenariats plus intéressants financièrement.

Il me semble plus sain de construire un véritable site vitrine, qui affiche ce que l’on vend, comme celui d’Aemarielle, par exemple, que je vous conseille de visiter.

Là, au moins, les choses sont claires et le visiteur n’est pas trahi.

La fragmentation du monde

L’un des paramètres les plus pervers mesurés par Google et consorts pour déterminer la pertinence d’un site conduit à considérer qu’il ne doit avoir qu’une thématique, ou du moins doit avoir une seule thématique principale. C’est en tous les cas le conseil que vous trouverez dans tous les articles traitant des «x règles à suivre pour faire de votre site un succès».

Comme le moteur de recherche tente de déterminer la pertinence de votre site, il va se fier à des recommandations. Celles des sites déjà reconnus comme spécialisés dans le domaine de la requête de l’internaute seront très fortement mises en valeur, comme vous avez pu le lire dans les liens précédents.

Ce qui est assez vertueux sur le principe d’un groupe de pairs. Les spécialistes du domaine vous recommandent, vous êtes donc utile et votre site pertinent.

Mais là encore c’est le chiffre qui pose problème. Car Google part du principe que plus vous avez de recommandations par des sites plus importants dans le domaine, et plus vous êtes pertinent. Il vous faut donc obtenir un grand nombre de recommandations par vos pairs. Et cela n’est atteignable que si vous publiez beaucoup d’articles dans le domaine en question.

Donc cela encourage de fait des sites monothématiques.

Okay.

C’est efficace, c’est vrai, pour trouver une information en particulier. Il faut reconnaître que ça marche. Sinon, nous n’utiliserions plus de moteurs de recherche.

Mais j’y vois juste un corollaire qui me déplaît.

Le web se transforme en une infinité de sites traitant chacun d’un sujet en particulier, et un seul si possible.

Comme si chaque domaine devait se traiter indépendamment de tout le reste.

En poussant le trait à fond, cela signifie que chaque domaine sur le net va creuser son sillon sans faire de lien avec d’autres sujets. Un comble quand on songe que le principe même du net, c’est le lien hypertexte !

Le système promu par Google nous incite de fait à voir le monde avec des œillères, en prenant chaque activité humaine isolément. Il pousse à se spécialiser de plus en plus.

Mais comment faire pour voir la globalité du monde ? Comment appréhender sa complexité croissante ?

En suivant la logique de cette façon de voir, l’internet, mais en fait et surtout le savoir humain, devient un kaléidoscope si inextricable que plus personne ne pourrait en dégager une vue d’ensemble. Sauf peut-être une machine. C’est peut-être le véritable but poursuivi, d’ailleurs, puisque je rappelle que Google est très impliqué dans les recherches sur l’intelligence artificielle et sur d’autres thématiques orientées vers le transhumanisme.

Une vision bornée de la vie

Au final, l’internet des années 2010 est orienté dans une direction qui promeut les statistiques de visite, la catégorisation des visiteurs, la spécialisation toujours plus grande, et partant de là une vision un peu bornée du monde et de la façon de l’envisager.

Une vision du monde où il n’est pas sérieux de présenter un article sur le jeu de rôle à côté d’un article sur l’évolution du système de santé en France.

Mais pourquoi cela ne serait-il pas sérieux ?

Deux réponses me viennent à l’esprit.

D’une part on peut considérer que le jeu de rôle est une activité qui n’est pas sérieuse. C’est vrai, quoi, ces grands enfants à peine responsables (au passage, les quadras qui jouent avec moi ont tous des métiers à responsabilité) qui jouent aux cow-boys et aux indiens… enfin, à l’Empire et la Rebellion… ou au Gondor et au Mordor… ils ne peuvent pas être sérieux, et on ne mélange pas du jeu à de la réflexion. Et bien j’ai envie de dire : perdu ! Le jeu est une façon de voir les choses sous un autre angle. De découvrir d’autres façons de faire. D’y réfléchir ensuite. Du moins cela peut l’être.

D’autre part ne sont considérées comme sérieuses par notre société que les personnes qui choisissent une voie sans jamais la quitter, et surtout sans jamais voir ailleurs. On prend pour postulat que maîtriser un sujet interdit forcément de s’intéresser en profondeur à d’autres.

Je soutiens le contraire.

Le monde (du blog, mais pas que) tel que je le conçois

L’exposé qui précède a peut-être été un peu long, mais il me semblait nécessaire pour montrer à quel point la spécialisation était non seulement ancrée dans nos représentations mentales, mais aussi encouragée par l’organisation actuelle des moteurs de recherche.

Or, à mon sens, les sites les plus intéressants ne sont pas forcément ceux qui creusent le même sillon depuis leur naissance (il y en a de très bien et très riches, cependant) mais bien ceux qui mettent en lien les divers domaines du savoir et des activités humaines, ou qui tentent de mettre en perspective leur thème de prédilection avec ces autres domaines. Tel Cosmo Orbüs par exemple, qui explore notre société à travers des productions artistiques et culturelles mais aussi une réflexion de fond sur le transhumanisme, nourrie parfois par des moyens surprenants (comme le jeu de rôle, au hasard).

Voilà donc maintenant venu le temps de présenter mon manifeste pour un éclectisme du XXIe siècle.

Une vision « holistique » de la vie

Il me semble évident que chaque être humain est potentiellement impliqué dans de nombreux domaines et de nombreuses activités. Nous avons tous plusieurs facettes. Nous pouvons être enfants de nos parents, parents de nos enfants. Nous pouvons être un conjoint, une amante, mais également une amie, une professionnelle d’un domaine, un passionné d’un autre domaine. Tout cela à la fois et en une seule personne. Nous pouvons être médecins et devoir bricoler une étagère. Nous pouvons être ingénieurs et aimer cuisiner. Nous pouvons être chaudronniers et passionnés de culture manga.

Nous sommes des êtres multiples, chacun et chacune d’entre nous.

Parce que la vie n’est pas une succession de spécialisations. Elle est une mise en lien de multiples sphères d’activité.

Plus encore, chaque sphère peut se nourrir des liens qu’elle fait avec les autres.

L’art de cuisiner peut parfaitement nourrir non seulement au sens propre, mais au sens figuré, les intuitions de l’ingénieur. L’archéologue qui aura quelques connaissances de cuisine pourra peut-être mieux imaginer dans son métier comment des vestiges épars peuvent s’imbriquer pour former les ruines d’un four à bois antique. L’acteur de cinéma qui veut incarner correctement un marin va sans doute s’intéresser à la navigation, à la vie en mer, et va peut-être nourrir son interprétation de ses propres expériences nautiques.

La vie est multiple. L’expérience de la vie est multiple.

Vivre c’est embrasser tout ce qu’il est possible d’apprendre, et le mettre en lien avec tout le reste.

Partant de là, il est naturel pour moi de considérer que le jeu de rôle sera aussi sérieux que la réflexion sur le système de soin en France. Les deux pouvant naturellement se compléter dans une vision de la vie qui sera globale.

L’authenticité

Rassurez-vous, je ne vais pas me lancer dans un grand discours au vocabulaire politico-marketing qui vanterait mes «valeurs».

Authenticité, pour moi ce n’est pas seulement un mot, ce sont des actes. Et aussi des écrits, dans le cas présent.

Assumer qui l’on est

Mon discours ici n’est pas calibré. Il n’est pas fabriqué. Il n’est pas feint.

Lorsque j’ai envie d’écrire quelque chose sur cet espace virtuel, comme lorsque j’écris un livre, j’y mets mes tripes.

Je fais bien sûr attention à ce que j’écris, afin de rester en permanence fidèle à ma ligne de conduite générale, à savoir le respect que tout un chacun mérite.

Et pourtant je ne cherche pas à plaire.

J’écris avant tout ce que j’ai envie d’écrire, et sur les sujets qui me touchent ou me font envie. Sur les sujets qui m’intéressent ou qui me passionnent. Sur ceux que je connais. Sur ceux que je découvre. Sur ceux vers lesquels je fais des liens, de véritables liens qui se transforment ici en liens hypertextes.

Ma pensée, comme la vôtre, fonctionne par analogies, par rapprochements d’idées entre elles. Des idées ou des concepts qui parfois n’ont qu’une lointaine parenté l’un avec l’autre, l’une avec l’autre.

Cet espace n’a d’autre dessein que de me ressembler, au moins un peu.

Il n’est pas un reflet exact, mais vise à une certaine fidélité en intention.

Et si ma pensée est éclectique, si elle fait des liens entre divers domaines qui n’ont a priori que peu de points communs, alors cet espace en sera sans doute à un moment l’expression.

Je ne me limite pas à une profession, à une passion, à une case, ou même à un formulaire avec plusieurs centaines de cases.

Je suis un être vivant et conscient, donc je cherche à embrasser toute l’étendue de ce que le monde veut bien m’offrir.

Je cherche à être moi.

Ici aussi.

Ce qui est « sérieux » et ce qui ne l’est pas…

Et donc ce qui est «sérieux», pour moi, c’est l’intention que l’on met dans le geste, autant que le geste lui-même.

L’enfer en est pavé, je le sais.

Mais l’intention c’est aussi ce qui colore le geste que l’on fait, comme le mot que l’on écrit ou prononce.

Dire bonjour et sourire (sourire vraiment, avec cette intention-là), c’est autre chose que dire bonjour et offrir un sourire calibré de vendeur calculant déjà combien on peut tirer du pigeon à qui l’on serre la main.

On peut donc discuter de sujets graves en étant soi-même manipulateur, donc pas sérieux.

On peut aborder des sujets qui paraissent futiles avec une intention réelle d’en faire émerger quelque chose de surprenant.

Toute la démarche artistique est là : faire émerger quelque chose de surprenant, de plus grand.

L’art est un jeu.

Parce que le jeu c’est sérieux.

C’est par le jeu que, nous tous, nous avons abordé le monde quand nous étions enfants.

C’est par le jeu que notre esprit parvient souvent à saisir ces paradoxes qui fondent notre vie.

C’est par le jeu que nous parvenons à bousculer nos certitudes et à comprendre l’autre.

Et si le jeu de rôle, c’était aussi sérieux, dans ce sens-là ?

Sans se prendre au sérieux.

Sans se croire arrivé à une compréhension totale.

Parce que la vie est mouvement perpétuel, et que nous avons tous, tout le temps, à nous adapter à ce mouvement.

Ce que nous avons cru éternel un jour est remis en cause quelque temps après, ce que nous avions cru mouvant peut soudainement se pérenniser.

Donc il n’est pas pour moi question de pontifier, d’édicter, de professer, de sentencer.

Il est question d’être moi.

Avec des contradictions, sans doute, que vous aurez peut-être déjà relevées.

Nous sommes tous contradictoires et paradoxaux. C’est la nature humaine. C’est peut-être même la nature de la vie.

Que ceux qui ne sont pas pétris de contradictions le clament, que je puisse dévoiler leur mensonge.

Et au passage, c’est certainement l’une des raisons qui m’ont fait quitter les réseaux prétendument sociaux. La proportion de gens qui s’y croient cohérents en permanence et s’en gargarisent à l’envi en rabaissant les autres a fini de m’en dégoûter.

Le refus de l’affiliation, du sponsoring, de la publicité

Premier acte de cette authenticité : refuser d’entrer dans le cercle pour moi vicieux de la monétisation de cet espace numérique.

Je maintiens son existence sur mes deniers propres, parce que j’en ai les moyens actuellement, et parce que je considère que c’est un plaisir que je m’offre. C’est aussi, soyons honnêtes jusqu’au bout, une façon pour moi de faire connaître ce que j’écris, ce que je produis, ce à quoi je tiens vraiment. Parfois d’ailleurs je l’utilise pour faire connaître des œuvres que j’écris mais aussi celles des autres. Toujours des œuvres qui m’ont vraiment touché.

Et c’est pourquoi ici il ne sera jamais question d’affiliation.

Si mon métier de médecin m’a appris quelque chose sur l’indépendance, c’est bien le refus des conflits d’intérêts. Il est pour moi évident qu’un tel conflit est inévitable si l’on entre dans le circuit des affiliations, sponsorings et autres partenariats. On est immanquablement confronté à des biais qui emprisonnent l’esprit et empoisonnent les écrits.

De la même façon, ici, il n’y aura jamais de publicité.

Je suis devenu allergique aux publicités, vraiment.

Je fuis les sites qui en affichent. Et ceux que je ne peux pas fuir, je les lis soit grâce au RSS, soit en activant un bloqueur.

Je me suis demandé si le mécénat numérique, type Patreon ou Tipeee, pouvait être une façon de pérenniser l’existence de ce site. Le mécénat me semble parfaitement respectable, car il est une démarche active et volontaire du mécène, pas un matraquage éhonté de publicités de la part de l’auteur du site, ni une activité un peu honteuse de demi-mondain aliénant sa liberté pour un peu d’argent (je suis volontairement caricatural).

Pour le moment je ne me sens pas légitime à proposer un mécénat, mais peut-être que cela changera un jour. Je vous explique plus longuement pourquoi ici, en même temps que je décris comment je désire remplacer le mécénat d’argent par un mécénat d’implication.

Dans l’intervalle, d’écaille & de plume restera financé uniquement par mes propres ressources, ce qui me semble être un gage d’indépendance et par là même d’authenticité.

La disparition des statistiques de comportement des utilisateurs

Deuxième corollaire, ce site n’utilise plus, et ce depuis un bon moment, aucune technologie capable de suivre le comportement de ses visiteurs.

J’ai supprimé mon compte Google Analytics, comme mon compte Google tout court, d’ailleurs, mais c’est une autre histoire.

Je ne dispose plus que de statistiques brutes de visites : nombre de visiteurs, de pages lues, sites référents et liens sur lesquels des visiteurs ont pu cliquer. Mais sans mettre en relation ces données entre elles, je ne sais donc pas qui est venu d’où pour cliquer où.

Je considère que ceux qui me font l’honneur de leur visite ont droit à leur intimité.

Je ne cherche pas à en savoir plus sur eux.

Libre à eux, par contre, d’entrer en contact avec moi s’ils le désirent. Ils ont pour cela la possibilité de me laisser un message via le formulaire de contact du site, ou même ma lettre d’information.

Un carnet de bord

Parce que depuis le début, ce site est conçu, pensé, maintenu, comme si c’était vraiment mon carnet de bord.

Une chose personnelle, laissée à disposition, cependant, de ceux qui le trouveraient par hasard sur la Toile.

Je navigue sur les flots numériques de l’internet, et sur les océans de l’existence en même temps.

Ceci est la transcription de mes voyages.


  1. Au passage, l’acte de coller à des règles de marketing dans l’écriture du texte pour attirer le chaland est pour moi la négation même de l’authenticité.  ↩
  2. Par exemple, Ecosia et Qwant commencent à faire partie des référents réguliers pour d’écaille & de plume.  ↩

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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Une Communauté d’écaille & de plume

Une Communauté d’écaille & de plume

Une Communauté d’écaille & de plume

Nous venons de quitter les années numérotées en 10 selon le vingt et unième siècle du calendrier grégorien du monde occidental.

Nous ouvrons une nouvelle période, un nouveau cycle commun.

J’espère qu’à vous tous et toutes, il offrira de vivre en bonne santé, ainsi que de nombreuses découvertes artistiques et d’émerveillements quotidiens.

Comme à chaque ouverture de cycle, nous définissons ou redéfinissons nos buts, nos désirs, nos contraintes.

Cette année, je cherche une nouvelle articulation entre ma vie professionnelle et ma vie artistique.

Une quête, périodique chez moi, qui trouve cette fois un écho dans la réflexion sur ce qui me pousse à écrire et à vouloir être lu, mais aussi sur les moyens d’y parvenir à notre époque, entre offre pléthorique, marketing omniprésent, réseaux dits sociaux surtout commerciaux, financement participatif et micromécénat, œuvres collaboratives, entre-aide et groupes de pairs.

Cela a fait naître deux articles que je vous livre l’un après l’autre.

Deux articles qui tournent autour d’un pivot : la création artistique est pour moi indissociable de l’idée de partage.

L’un parlera de ce que je veux partager sur ce blog et comment je veux le partager.

L’autre, celui que vous êtes en train de lire, traite de ma conception d’un mot que l’on entend très souvent sur le net, la communauté d’un artiste.

The Fellowship of Writing

Un mot pour les trouver, et dans la lumière les lier.

Librement adapté de J.R.R. Tolkien

Tout artiste crée pour exprimer quelque chose. Pour dire quelque chose du monde extérieur ou plus fréquemment de son monde personnel, voire de l’intersection des deux.

Je ne fais pas exception.

J’écris pour être lu, comme j’ai pu interpréter des personnages de théâtre ou réaliser des films pour être vu (au sens que ce terme a pris depuis la belle définition de James Cameron dans Avatar, c’est-à-dire vraiment compris).

J’ai des choses à dire, dont je ne suis pas d’ailleurs forcément toujours conscient avant de les écrire ou de les publier. Une œuvre artistique s’écrit parfois sans se révéler complètement à son auteur, même après quelques années. Mais c’est un autre débat.

Ce qui compte est là : ce que j’ai à dire n’est que chaos stérile s’il n’est pas reçu par quelqu’un, qui entendra, ressentira, comprendra, résonnera, raisonnera à partir de ce message. Comme une pierre jetée dans l’eau provoque des ondes concentriques qui toucheront le rivage au bout du chemin, mes mots sont là pour provoquer une réaction. Il n’est pas même besoin que cette réaction soit dirigée dans le même sens, qu’elle soit en accord complet avec le message. Elle peut parfois être à rebrousse-poil. Peu importe, si le message crée une réaction féconde.

Il s’ensuit naturellement que chaque artiste s’adresse à un public, à une audience.

Si le message qu’il clame parle à quelques personnes, cette audience peut commencer à s’intéresser à son travail, à regarder ses autres productions, à attendre les prochaines, à suivre son parcours, de plus ou moins près.

Peu à peu se constitue une communauté.

Un groupe de personnes qui partagent un intérêt commun, basé sur ce que l’artiste crée, sur ce qu’il ou elle exprime. Suivant la notoriété et la résonnance de l’artiste, la communauté peut être limitée à la contenance d’un local à vélo, ou s’étendre à des millions d’individus.

Pourtant, quel que soit le nombre, chaque membre de cette communauté a une fonction, comme dans la prestigieuse compagnie qui aide un certain Hobbit à porter un anneau maléfique jusque dans la fournaise où il fut jadis forgé. Le but est radicalement différent, mais à l’instar des Sam, Aragorn, Meriadoc ou Boromir, j’aime à croire que chacun et chacune d’entre nous peut jouer un rôle.

J’en vois quelques grandes catégories.

Les plus nombreux sont ceux qui sont touchés par l’œuvre, et qui continuent à suivre le travail de l’artiste. Ils forment la base de la communauté. Leur soutien est essentiel, car ils sont l’audience. Ils reçoivent l’œuvre, voire l’achètent.

Ensuite il y a les évangélistes, ceux qui font la promotion des œuvres de l’artiste qu’ils ont appréciées et contribuent à diffuser plus encore ses œuvres, à élargir le diamètre des ondes concentriques vers d’autres publics. On peut ranger les booktubeuses, les journalistes, les fans inconditionnels, dans cette catégorie. D’ailleurs, leur fonction est également de critiquer l’œuvre, de montrer ses forces et ses faiblesses.

Il y a les mécènes, qui sont prêts à soutenir l’artiste financièrement pour lui permettre d’aller au bout de ses réalisations en supportant les coûts de production en totalité ou en partie, voire en le dégageant de certaines contraintes matérielles pour lui offrir plus de temps à consacrer à son art. C’est le travail principal des producteurs de cinéma, des grandes institutions qui prennent des artistes “en résidence”. C’est une fonction qui se développe, nous le verrons plus loin, dans ce que l’on appelle le micromécénat, accessible à tout un chacun.

D’autres peuvent s’impliquer dans la correction des manuscrits, sur le versant orthographique ou plus profondément, sur le versant de ce que l’on nomme la “bêta-lecture” ou le travail éditorial, une critique en profondeur de la structure d’un récit, des personnages, de leur épaisseur psychologique, de ce qui fonctionne bien ou moins bien dans la narration, avant que l’œuvre ne soit terminée. C’est le travail également des éditeurs dans le monde littéraire.

Enfin, les plus impliqués peuvent co-créer. Il peut s’agir d’autres artistes qui partagent un même univers, ou qui nourrissent leurs créations d’une réflexion en commun. J’y range les illustrateurs qui font émerger les couvertures des livres, les compositeurs de bande originale, les cinéastes qui adaptent certaines œuvres, ceux qui s’inspirent d’une œuvre pour faire naître la leur, les auteurs de fan-fictions.

Je vous accorde que ces catégories sont un peu artificielles, mais elles m’ont servi dans ma réflexion.

Car tout cela a tout de même pour moi une application pratique.

Notre époque a ceci de fantastique qu’elle met à disposition de tous les moyens de créer. Que ce soit d’écrire, de peindre, de dessiner, de composer, de sculpter, il est plus facile de nos jours de se lancer dans une aventure artistique que lors des siècles qui ont précédé. Mais la médaille possède toujours un revers, et en l’occurrence, plus d’accessibilité signifie beaucoup plus d’offre. Et donc moins de visibilité. Tous les écrivains débutants sont noyés dans la masse des milliers, si ce n’est des dizaines de milliers, d’autres. Il est donc beaucoup plus facile d’avoir accès aux moyens de s’exprimer, mais beaucoup plus difficile de trouver un public, d’atteindre une audience.

Il est donc plus difficile encore de vivre de son art, c’est-à-dire de parvenir à ce que la société reconnaisse la valeur d’un artiste au point de lui offrir les moyens de mener une vie matérielle correcte. À côté des rares succès fulgurants, l’écrasante majorité des artistes doit composer soit avec des revenus très faibles (pour ne pas dire indigents) soit avec une autre activité professionnelle offrant une stabilité financière suffisante.

Il est de ce fait devenu impossible pour quelqu’un qui cherche à s’exprimer à travers une activité artistique de le faire sans penser un minimum à la façon dont il va atteindre son public.

J’ai essayé. J’ai bien vu que cela ne menait pas très loin.

Il est donc nécessaire de trouver une stratégie qui permette de trouver une audience, une communauté.

Vous trouverez sur la Toile de nombreux conseils sur ce qu’il est devenu classique d’appeler du marketing (même si ce terme me révulse). Parce que d’autres y ont pensé avant moi, bien entendu. Pourtant, je crois vraiment que, plus que tous les conseils du monde, le plus important est de trouver la façon de faire qui soit la plus en phase avec l’artiste que vous êtes. Cela veut dire trouver votre propre stratégie, à partir de vos forces et de vos faiblesses (nous en avons tous).

En guise d’illustration, et tout autant afin de la servir, car le partage en fait intimement partie, je vais exposer ici celle que j’ai choisi de suivre en ce début d’année 2020 après y avoir longuement réfléchi. Pour ce faire, je vous propose de passer en revue tous les moyens communément utilisés à notre époque et de voir ceux que je vais utiliser en les structurant sur le modèle précédent des rôles.

Vous pourrez trouver aussi un article très intéressant de Lizzie Crowdagger sur son blog (ça date de 2017 mais je trouve la réflexion globale encore valable début 2020) à propos de ce modèle de communauté et de ce qu’il implique dans la création artistique.

Les données initiales du problème

Pour que la stratégie de la communauté ait une cohérence, le plus efficace reste de la tailler sur mesure pour nous-mêmes, ce qui implique bien entendu de déterminer précisément ce que l’on veut mais aussi ce que l’on ne veut pas, ce que l’on peut investir et ce que l’on ne peut pas.

Cela équivaut à se regarder dans un miroir, et à discuter sérieusement avec son reflet dans la glace.

Dans mon cas, la donnée fondamentale est ma dualité de Serpent à Plume.

La plume est mon côté artistique, celui que j’aimerais développer un peu plus avec cette stratégie.

Le serpent, tout aussi important pour moi, reste mon métier de médecin, puisque je désire le conserver, tout au moins dans les années qui viennent, même si cela sera avec des changements.

D’abord, et ce n’est pas le moindre des points à prendre en considération, mon métier m’offre une relative aisance financière (j’ai dit relative, hein, je ne suis pas héritier d’une grande fortune) qu’il serait difficile d’égaler avec le revenu d’une activité artistique littéraire balbutiante. Sans être matérialiste, la vie n’est pas seulement faite d’art, d’amour et d’eau fraîche, mais également de quelques contingences matérielles et de menus plaisirs. Étant lucide sur le succès que mes œuvres peuvent potentiellement remporter, je ne pense pas que mon activité artistique pourra un jour suffire à assurer ma subsistance et celle de ma famille. Je pense au contraire que mon métier me donne la chance rare de ne pas dépendre des ventes de mes livres pour vivre. Il me dégage donc de la pression matérielle, et me laisse la capacité de prendre le temps de mûrir mes projets. Don à double tranchant puisqu’en contrepartie il me prend beaucoup de temps, ce qui bloque parfois vraiment mes envies et mes capacités à écrire comme je le souhaiterais.

C’est donc plus de temps que je manque, comme nous en avons déjà discuté à d’autres reprises. Et toutes les solutions pour développer ma communauté qui empiéteront sur mon temps de création de façon disproportionnée seront à écarter.

De plus, les règles de la déontologie médicale m’imposent de séparer nettement les deux facettes. Il n’est donc en aucune manière question de promouvoir l’une en me servant de l’autre, que ce soit mon exercice de médecin par ma qualité d’écrivain ou mes livres par ma fonction de médecin.

La contrainte fondamentale de tout cela est donc le temps. Il me sera donc primordial de réserver ce temps à ce qui sera pour moi source de plaisir, de création, d’échanges féconds. Et de refuser de perdre ce temps à faire ce que je ne sais et ne saurai jamais faire, sous prétexte de promouvoir ce que j’écris.

Communautés communément rencontrées chez les créatures autoéditées

Vous savez cependant que je préfère le néologisme maison réalisauteur (réalisautrice au féminin, je fais ce que je veux, c’est moi qui ai inventé le mot), mais passons sur cette entorse à ma propre règle.

Pour qui ose tenter l’aventure de se passer d’un éditeur pour produire ses livres, il existe plusieurs moyens pour se faire connaître et développer une communauté.

Un blog

D’abord, les auteurs ouvrent un blog. Ça tombe bien, d’écaille & de plume existe déjà et commence à avoir une petite histoire depuis 2014. C’est certain, il n’attire pas les foules, et vous comprendrez sans doute mieux pourquoi dans le prochain article où je détaille tout ce que j’ai décidé de faire ici et qui ne se fait soi-disant pas quand on veut développer son blog.

Les réseaux dits sociaux

Ensuite, ils sont presque tous sur les réseaux dits sociaux, dans une stratégie que la langue de Justin Bieber nomme le social marketing. Ils y communiquent en se créant une toile de followers qui parfois répercutent leurs paroles, ou interagissent avec eux directement. Ils peuvent y annoncer la sortie de leur prochain livre ou de leur dernier article de blog, y faire des concours pour faire gagner un exemplaire dédicacé, y discuter habitudes d’écritures, techniques avancées, ou parfois de la pluie et du beau temps, voire de leur vie en général. Il y a tout un monde de stratèges qui vous expliqueront comment vous servir des réseaux numériques pour parvenir à promouvoir votre activité et vous promouvoir vous. Nombre de publications concernant votre promotion par rapport au nombre total de vos publications (ratio de 1/6 si je me rappelle bien), comment tweeter, comment retweeter, comment suivre, comment liker, comment écrire…

Certains paient même des annonces publicitaires sur ces réseaux.

Ceci n’est pas pour moi. J’ai essayé. Longtemps.

Mais décidément, soit je suis un asocial, soit les réseaux portent mal leur nom.

Facebook assume presque désormais son vrai visage (jeu de mots ?), celui d’une entreprise dédiée à la collecte et la revente des données de ses clients, sans aucune éthique et sans aucune vergogne, à d’autres entreprises dont le but est la manipulation (hello Cambridge Analytica). On ne m’y a jamais vu. On ne m’y verra jamais.

Instagram, racheté par Facebook, suit presque la même trajectoire, avec une variante, tout de même. Le poids de la publicité y est proche du ratio terrifiant : un espace de réclame pour un post des gens que vous suivez. Et en prime, vos données sont désormais versées dans le grand entonnoir de Facebook. J’ai tenté l’expérience sur les insistances de ma sœur. J’ai bien aimé au début. J’avais même commencé à raconter une histoire en m’astreignant à illustrer avec des photographies, ce que j’appelais mon projet #storygram. Mais l’omniprésence de la publicité m’a dégoûté. Et je suis parti. On ne m’y verra plus.

Twitter. Il me faut reconnaître qu’il y a quelques années, j’adorais Twitter. Un espace où j’ai rencontré plusieurs personnes, des vraies. Mais depuis pratiquement deux ans, Twitter est devenu un lieu étrange. Car maintenant, sur Twitter, tout le monde pense que tout le monde l’insulte ou l’attaque, que tout le monde lui en veut. Un tweet banal et informatif vaut souvent à son auteur une volée de bois vert de gens qui s’arrogent le droit de s’élever en redresseurs de torts et qui sont en constante recherche de combats à mener, quitte à en dénicher là où il n’y en a pas. Twitter est devenu le règne de la colère et de l’instinct de défense, de l’agressivité, de la malveillance. De la paranoïa. Un terrain où des luttes réelles et légitimes (#meetoo) côtoient les pires trolls et les donneurs de leçon et où la propagande s’épanouit. J’ai quitté le réseau le 31 décembre. On ne m’y verra plus.

Il pourrait y avoir les réseaux libres décentralisés, comme Mastodon.

Mais j’ai pris conscience il y a peu d’une tare consubstantielle au concept des réseaux sociaux numériques : ils sont tous des pièges attentionnels (même si cela n’est pas encore démontré scientifiquement, on s’en rapproche peu à peu). Tout est fait dans leur fonctionnement, mais également dans leur interface et plus encore dans leur essence même, pour retenir le plus longtemps possible l’utilisateur, le forcer à scroller indéfiniment sans pouvoir s’en extirper.

En cela, ils participent tous, libres ou commerciaux, au même paradigme de la capture de notre cerveau. Ils nous asservissent. Au lieu d’une démarche active de recherche ou d’une lecture attentive d’un article de bonne taille, argumenté et documenté, le principe d’un réseau social repose sur le changement permanent, la distraction constante. On ne lit que des phrases lapidaires, des punchlines parfois très bien tournées ou senties, mais sans aucun argumentaire. On passe d’un titre accrocheur à un autre. D’un interlocuteur à un autre. Impossible dans ces conditions de se concentrer sur quoi que ce soit.

Impossible également de ne pas rester scotché sur l’écran, dans une posture de passivité extrême, car le flux ne s’interrompt jamais. Notre cerveau est conçu, dans un but de survie, pour capter tout changement dans notre environnement. De changement en changement, le flux de distractions ininterrompu des posts qui se succèdent à l’infini garde notre cerveau en perpétuelle alerte sans lui permettre de poser son attention. Nous devenons des créatures stimulées en permanence. Notre cerveau perd l’habitude de se concentrer.

Je ne sais pas vous, mais moi, quand j’en ai pris conscience, j’ai eu peur. Parce que je me suis rendu compte que cela vampirisait mon temps. La chose la plus précieuse dans ma vie, aspirée à jamais dans un vortex interdimensionnel.

Il est donc évident que pour atteindre une communauté sur les réseaux sociaux, il faut y investir du temps. Beaucoup de temps. Beaucoup trop de temps pour moi, qui n’en dispose déjà que de très peu pour écrire. Donc consumer le peu de temps que j’ai à faire la promotion de ce que je n’avais plus le temps d’écrire… c’était un peu marcher sur la tête…

Une newsletter

Beaucoup offrent sur leur site la possibilité de s’abonner à une lettre d’information, une newsletter, comme dirait Justin. Mais moins nombreux sont ceux et celles qui en envoient une réellement. Pourtant, dans certaines d’entre elles, on peut nouer une véritable communauté. On a le temps de s’étendre un peu plus sur un sujet. On peut recevoir des réponses qui s’adressent spécifiquement à soi, pas à la totalité de l’univers connecté.

Convaincu depuis près de neuf mois, j’ai commencé à envoyer la mienne.

Et je crois que cela a beaucoup de potentiel dans mon cas, comme vous allez pouvoir le lire dans la suite de cet article.

Les salons littéraires

Beaucoup de réalisauteurs et de réalisautrices mouillent leur chemise et sortent de leur bureau pour se rendre dans des salons de littérature. Il y a une multitude de salons de littérature, même dans le genre de l’imaginaire dont je fais partie. C’est pour beaucoup l’occasion de rencontrer des lecteurs et des lectrices en chair et en os, de nouer des contacts, voire de vendre quelques exemplaires. De l’avis général, c’est un gros investissement, mais tous ceux et toutes celles avec qui j’ai pu discuter disent que c’est une expérience qui peut être très agréable.

Je rêve depuis des années de me rendre dans certains, des festivals prestigieux, comme les Imaginales, par exemple.

J’ai commencé il y a deux ans à rendre visite au salon de l’Imagina’livres, qui se tient tout près de chez moi (et qui va même se tenir dans la ville où je travaille en 2020). J’ai pu, comme simple visiteur, faire la connaissance en chair et en os de certains, comme Olivier Saraja et Fred Marty.

Pour passer de l’autre côté du miroir, il me semble cependant qu’il me manque une chose : une bibliographie un peu plus étoffée. Je n’ai à mon actif à ce jour que deux romans, dont un publié de façon classique mais dans des conditions peu satisfaisantes sur le plan des relations éditoriales, malgré l’attachement que je porte à ce texte.

Aussi, je crois que je ne suis pas encore prêt pour cette stratégie qui, je pense, est une des plus fortes pour rencontrer son public et créer une communauté.

Cependant, je projette de m’y intéresser dès lors que Fée du Logis, mon projet actuel, aura enfin vu le jour.

Nous en reparlerons.

Les séances de dédicace

Dans le même esprit, les séances de dédicace dans des librairies ou des lieux plus étonnants pour de la littérature permettent de rencontrer directement son public. C’est une bonne alternative aux salons de littérature, si l’on parvient à convaincre un libraire ou le gérant de l’endroit. Cela demande une organisation, une entente, et quelques démarches qui me semblent indispensables, comme de rédiger et signer un contrat pour que les deux parties (l’auteur et l’organisateur) y trouvent leur compte et soient protégées en cas de problème.

Un gros effort, donc, notamment en investissant du temps.

Mais ce temps peut potentiellement être récompensé bien plus facilement qu’à travers un réseau social.

Les services presse et les booktubeuses

Le milieu de l’auto-édition a acquis une certaine visibilité grâce aux prescripteurs (souvent des prescriptrices, d’ailleurs, d’où le nom de booktubeuses, qui s’est imposé) qui se sont développés sur internet, souvent à partir de YouTube, mais parfois aussi simplement sur des blogs de chroniqueurs ou de chroniqueuses.

Pour être un réseau social comme un autre, avec sa dette attentionnelle, YouTube a un fonctionnement différent dans la mise en avant d’un livre, car c’est souvent l’équivalent d’un vlog, un blog sous forme vidéo. On peut y développer un propos plus construit et cohérent que sur Twitter.

Il suffit pour cela de parvenir à faire lire son bouquin par l’une de ces prescriptrices, en espérant que la chronique sera positive. Puis de s’armer de patience, car la liste d’attente est longue, très longue. C’est pour cela que je n’avais pas franchi le pas lors de la sortie du Choix des Anges.

Mais j’ai bien envie de tenter l’expérience. Et en plus du contact direct, il existe le site SimPlement, qui permet de multiplier facilement les mises en relation.

Le mécénat

Depuis quelques années, internet a permis le développement d’une forme de financement de projets qu’on appelle financement participatif, ou crowdfunding (littéralement financement par la foule). L’idée est de lancer une souscription auprès d’un public potentiellement intéressé par la réalisation d’un projet (littéraire par exemple). Chaque internaute qui soutient le projet paie donc une participation selon un montant prédéfini par le porteur de projet. En fonction du niveau de participation financière que l’internaute décide, il a en échange droit à acquérir le projet une fois finalisé (comme pour une souscription classique, on reçoit le livre une fois qu’il a été écrit), mais aussi à des bonus, dont le plus emblématique est son nom dans les remerciements de l’œuvre. On peut également proposer d’autres contreparties aux souscripteurs, plus originales : des textes inédits autour de l’œuvre, une amélioration du livre physique (signet de lecture, couverture avec verni sélectif).

Est ensuite apparu le micromécénat. Des internautes donnent une somme à un artiste, mais ce n’est pas pour financer un projet en particulier. C’est pour aider l’artiste lui-même, en considérant que l’argent récolté lui permettra de financer ses outils (un logiciel d’écriture, un correcteur orthographique, l’hébergement de son site web) ou de passer plus de temps à créer. Dans ce cas, les internautes donnent une plus petite somme, mais s’engagent à la donner chaque mois. Par exemple, 1$, 2$, 5$. Je parle en dollars américains car le premier site à lancer l’idée a bien évidemment été créé sur le sol américain. Il s’appelle Patreon. Depuis, un équivalent français a été lancé, très en vogue en ce moment, j’ai nommé Tipeee.

Ainsi, c’est bien un artiste qu’on finance, et plus simplement un de ses projets. On devient un véritable mécène.

En contrepartie, en plus des habituels remerciements, il est d’usage de donner accès à des avant-premières, ou à la possibilité de faire un chat vidéo, ou même de rencontrer l’auteur ou l’autrice.

Ce type de communauté a un défaut majeur : il faut déjà avoir une audience prête à soutenir l’artiste. Et mettre de l’argent, même 1$ par mois, alors que nous avons sans doute tous un budget où les abonnements, les charges fixes et autres ponctions récurrentes sont légion, ce n’est pas donné à tout le monde.

Le revenu ainsi dégagé par l’artiste permet peu de choses (quelques dizaines d’euros par mois, en moyenne, ça ne permet pas de vivre), même si bien sûr il y a des exceptions. Cela permet juste de faire face à des investissements basiques ou récurrents et, me direz-vous (et vous aurez raison) c’est déjà ça pour faciliter la vie.

J’y vois pour mon cas personnel trois inconvénients.

D’abord, prosaïquement, le revenu dégagé ne me permettrait pas de m’offrir ce dont j’ai le plus besoin : du temps. Le reste, je l’ai déjà : un ordinateur qui tient la route, un site internet et un hébergement qui va avec et que je paie sur mes propres deniers car je suis assez chanceux d’en avoir les moyens, un correcteur orthographique correct, un logiciel d’écriture fantastique déjà acheté, un logiciel de mise en page professionnelle sans abonnement même s’il est au top. Et des idées, même si parfois elles sont tordues. Il ne me faut pas grand-chose de plus.

Ensuite, étonnamment (ou pas), je ne me sens pas légitime pour demander à quiconque de donner même un seul euro par mois pour soutenir ma création, car les contreparties seraient très aléatoires. Je n’ai déjà pas assez de temps pour écrire ce que je voudrais écrire absolument, alors écrire des contreparties en plus, je ne sais pas quand je le ferais.

Enfin, et c’est sans doute le plus important, j’ai un problème philosophique avec le concept qui met encore une fois l’argent au centre de tout. Car ce système induit que seuls ceux qui vous donnent de l’argent, juste leur argent, peuvent accéder à ces contreparties. Mais qui a dit que l’argent était la seule contribution qui comptait ? Okay, je sais que vous avez quelques noms en tête. Moi aussi. Mais ces noms appartiennent à des écoles philosophiques qui ne me conviennent pas.

Pour moi – et encore une fois, c’est de mon cas personnel qu’il est question, pas de quelqu’un d’autre qui pourra faire des choix différents aussi respectables que les miens – ce n’est pas l’argent qui montre que l’on s’implique le plus.

J’ai plutôt envie de promouvoir une façon différente de participer. Donnez-moi un peu de temps, donnez-moi une voix pour porter mes écrits plus loin. En échange, sans doute y a-t-il des choses que vous pourriez recevoir.

À la limite, j’accepterais les dons d’argent pour ce qu’ils sont. Des dons. Sans contrepartie aucune, à part des remerciements (car ma maman m’a bien élevé et je sais qu’un merci fait toujours plaisir). Mais comme je le disais dans les prémices de ce petit tour d’horizon, ce n’est pas d’argent dont j’ai le plus besoin pour développer mon activité littéraire, alors que je peux parfaitement saisir l’intérêt de cette stratégie quand on se lance comme artiste à son compte sans avoir d’autre source de revenus pour assurer sa subsistance et celle de sa famille.

Les sites d’écriture par épisodes

Si l’on ne donne pas d’argent, que peut-on donner, alors ?

On peut donner de soi-même.

Et c’est le but des sites qui proposent de publier en avant-première à un rythme particulier des morceaux de vos écrits à un public inscrit qui en échange pourra soit vous faire de la promotion, soit vous proposer leurs retours et leurs critiques, soit les deux. Nombreux sont les auteurs et les autrices à avoir adopté les wattpad et autres.

Pour ma part, le bât blesse sur ma régularité d’écriture, d’abord. Je n’ai hélas pas un rythme qui me permet de prévoir que je vais sortir un chapitre toutes les semaines ou tous les mois.

Mais plus encore, je fais partie des gens un peu psychorigides qui ont besoin que leur œuvre soit cohérente. Et donc je ne peux pas présenter mes chapitres au fur et à mesure qu’ils s’écrivent. Parce que souvent ils changent de forme, de place, de taille, de contenu. Jusqu’à la relecture finale.

Il est donc bien entendu que ces sites sont souvent faits pour tester une première mouture d’un texte par exemple. Ou pour s’adapter au fur et à mesure.

Je n’aime pas cela. J’aime avoir mon texte fignolé au maximum avant de le faire lire à mes bêta-lecteurs et mes bêta-lectrices.

Publier ensuite le texte à la découpe, un peu comme des épisodes de série télévisée (dont je suis un grand amateur) une fois qu’il est terminé, je ne dis pas, ça peut se concevoir pour moi. Mais un livre n’est pas exactement une série télévisée. Chaque chapitre ne peut pas toujours correspondre à un épisode. Parfois un épisode correspond à un chapitre, parfois il correspond à un seul paragraphe, parfois il correspond à un livre entier.

Les médias artistiques ont chacun une grammaire narrative propre (ce n’est pas moi qui le dis). Et je crois que si l’on peut emprunter à la série télévisuelle certains codes pour les transposer dans la littérature (ainsi que l’inverse), ce n’est pas possible pour tout. Je n’oublie pas les feuilletons publiés au XIXe siècle par les Dumas et consorts, qui peuvent contredire mon propos. Je dis juste que ce n’est pas ainsi que j’aime actuellement écrire mes bouquins (parce que des scénarios de jeu de rôle, peut-être plus).

Les forums d’entraide entre auteurs

Et les bêta-lecteurs, on en parle, des bêta-lecteurs ?

Voilà justement un soutien important à un auteur.

Et c’est aussi ce que proposent certains forums d’entraide entre auteurs, comme CoCyclics.

La bêta-lecture, cette activité qui ne consiste pas à lire comme si l’on était un imbécile mais au contraire à lire très attentivement un texte avant sa publication en analysant la forme comme le fond pour aider l’auteur ou l’autrice à lui donner ensuite une plus grande cohérence et une plus grande portée, est finalement un début de travail éditorial.

C’est comme participer un peu à la mise au monde d’un enfant littéraire.

C’est aussi difficile : il faut parfois pousser l’auteur à aller plus loin, l’encourager, le contredire, le houspiller, le fouetter (ne faites jamais cela à une femme enceinte, non plus).

C’est aussi long.

C’est aussi émouvant au final.

Mais il faut toujours se rappeler que c’est l’auteur qui aura le dernier mot, même si une bonne collaboration devrait permettre au bêta-lecteur de faire entendre des arguments construits qui vont peut-être faire évoluer le point de vue de l’auteur sur certains points qu’il peut ne pas avoir assez travaillé ou pas avoir réussi à rendre dans son texte.

Participer à un tel forum d’échange me plairait beaucoup. Je me heurte cependant au même problème, celui du temps. Et de plus, j’aime bien connaître un peu avant les personnes qui vont me “bêta-lire” ou dont je vais moi-même devenir le bêta-lecteur. Histoire de partager un peu nos façons de voir.

Ptérophidie

Alors, c’est bien joli, mais finalement, après avoir vu ce que je ne voulais ou ne pouvais pas faire, vous devez vous demander (ou pas) ce que j’ai décidé.

L’image des cercles concentriques se rapprochant peu à peu de moi et de mon travail me semble être une bonne base pour déterminer ma stratégie. J’ai envie d’organiser ces cercles sur un échange qui ne soit pas déterminé par l’investissement financier seulement, mais surtout par une qualité d’échanges. La fondation essentielle en sera naturellement la lettre d’écaille & de plume, cette newsletter trimestrielle dans laquelle j’écris ce qui m’a inspiré, bouleversé ou préoccupé pendant la saison passée.

Ainsi, j’espère que chacun de mes correspondants aura peu à peu l’occasion, s’il désire le faire, d’entrer dans des cercles où il deviendra lecteur, évangéliste de plume, bêta-lecteur, ou pourquoi pas co-créateur. Mon idée de tribu de Ptérophidiens et Ptérophidiennes, néologisme hellénisant dont je suis assez fier, est née. Voici comment.

Le premier cercle : le théorème des ricochets

Être lu, c’est donc la base de tout.

Et je me dis que cela commence par une simple chose. Il suffit parfois d’avoir eu dans les mains un livre qui nous a touchés ou qui nous a surpris, pour découvrir un auteur. Parfois, c’est l’univers du livre lui-même qui peut rester en nous. Ou bien celui, plus large, des autres œuvres de l’auteur. Un peu comme des ricochets dans l’eau. Un galet va toucher une première fois la surface du liquide, puis rebondir et la toucher plus loin encore, puis une troisième et éventuellement une quatrième fois.

Le premier vecteur que je peux utiliser est donc le livre lui-même, comme s’il était mon galet. Et j’ai trois idées pour cela.

In Libris

À l’intérieur du livre lui-même, il est de tradition de citer la bibliographie de l’auteur, qui est souvent placée soit après la page de titre soit à la fin du livre. On peut aussi trouver souvent une courte biographie. Et parfois même un extrait ou le premier chapitre d’un autre livre du même auteur.

Depuis que Nathalie Bagadey, dans une de ses newsletters, a confié comment elle se servait de QR Codes pour faire sa promotion sur des affiches, l’idée a commencé à trotter dans ma tête de considérer que mes livres et mon site pouvaient dialoguer.

Avec un livre numérique, c’est facile, il suffit d’insérer un lien hypertexte qui mène vers le site.

Dans un livre papier, pourquoi ne pas utiliser un QR Code ?

Mais pour diriger vers quelle page du site ?

J’ai pensé à trois possibilités.

Tout d’abord, puisque ma bibliographie est pour le moment peu étoffée, chaque titre peut prendre une certaine place sur la page. Pourquoi donc ne pas insérer un lien ou un petit QR Code vers la page de présentation de chaque titre de ma bibliographie sur le site ? On pourrait y lire un extrait, par exemple, et éventuellement commander le livre.

Ensuite, si l’univers du livre a plu au lecteur, pourquoi ne pas diriger vers une série de bonus ou un making-of ? Une page présentant quelques secrets de l’univers, ou des fichiers à télécharger, comme les chronologies que je construis à chaque fois pour valider la cohérence temporelle de certains éléments d’une intrigue, avec parfois des événements qui ne sont pas même mentionnés dans le récit mais qui m’aident à poser mon univers. Mes notes et mes cartes heuristiques permettant de suivre le raisonnement de ma construction narrative, pour ceux qui aiment passer de l’autre côté du miroir.

Enfin, pour faire le lien avec la tribu Ptérophidienne, un lien vers une page d’inscription à la lettre d’écaille & de plume. Cela peut transporter un lecteur ou une lectrice dans le deuxième cercle.

J’ai même décidé d’utiliser le troisième sur une carte de visite et sur des marque-pages. Ces derniers seront aussi porteurs d’un QR Code de la première catégorie pour faire la promotion d’un titre en particulier.

In blogae

Sur le site, les quelques modestes fichiers que je propose au téléchargement sont groupés en deux catégories.

Il y a d’abord ceux que j’ai envie de partager avec tous les visiteurs, quels qu’ils soient. Ce sont beaucoup de mes créations pour des jeux de rôle, ou les extraits de mes livres.

Il y a ensuite ceux que je réserve aux abonnés de la lettre d’écaille & de plume. Sans autre contrepartie que de s’inscrire à cette lettre de diffusion, ceux qui acceptent d’être transportés dans le deuxième cercle entrent dans la tribu ptérophidienne. Et ils peuvent accéder aux fichiers plus “techniques”, comme mes réglages ou templates pour Scrivener, par exemple.

Les boîtes à livres

Nous avons parlé des services presse quelques paragraphes plus tôt. Sur le même principe, je pense disperser quelques exemplaires de mes livres dans des boîtes à livres, ces petites constructions qui fleurissent dans de nombreuses villes ou villages pour inciter les habitants à lire. Chacun peut y déposer des livres ou en emprunter, librement. Un bon moyen de toucher un public nouveau.

Il ne s’agit pas non plus d’inonder le marché, et je compte faire cela avec seulement deux ou trois exemplaires. Pas plus.

Le deuxième cercle : se parler dans le langage des Serpents

Pour que le premier cercle s’étoffe, les membres du deuxième vont certainement être de précieux alliés.

Tout d’abord, je compte envoyer quelques services presse à via un profil SimPlement. Et attendre de voir.

Ensuite, les membres de la tribu Ptérophidienne (notamment ceux qui ont souscrit à l’option Phœnix de la lettre d’écaille & de plume) seront l’objet de toutes mes attentions. Je ne compte pas les inonder de mails. J’ai envie d’avoir beaucoup de choses à leur raconter à chaque message. Un peu comme ces longues missives que nous nous envoyions par la poste dans les temps reculés où internet n’existait pas encore. On y racontait les faits marquants de notre vie quotidienne mais on pouvait également aborder des sujets de fond, des impressions, des coups de cœur. Je crois donc que je vais me cantonner pour le moment aux quatre lettres par an, envoyées à chaque fête celtique.

Je vais sans doute également garder la forme générale qu’elles ont prise jusqu’à présent, mais peut-être en y intégrant plus d’interactivité. L’objectif est d’instaurer un dialogue.

Comme dans toute société, cela pourra être marqué au fil du temps par des rites marquant l’entrée dans un nouveau cycle. Ainsi, mes plus anciens abonnés (je n’ose dire vieux), mes plus fidèles, mes plus actifs, recevront eux aussi des bonus.

Le troisième cercle : mes pairs & mes maîtres

Nous traînons tous un peu sur internet, et fatalement, nous tombons souvent sur les sites des uns et des autres. Et puisque je suis sorti volontairement des réseaux commerciaux que je considère comme des pièges, je vais avoir plus de temps pour écumer le reste de la Toile. Je vais donc étoffer sensiblement la section Chants d’Ailleurs de ce site, pour faire découvrir encore plus les autres univers, ceux de mes pairs et de mes maîtres.

Comme un complément à l’excellente initiative lancée par Aemarielle sur Facebook d’un groupe privé de Sorciers & Sorcières créatives, mais hors de quelque réseau social que ce soit.

Know then that it is the year 2020

Pour paraphraser le Dune de David Lynch, parce que cette nouvelle année est comme un “delicate time” pour moi.

Qu’elle soit surtout l’occasion, comme si nous pouvions nous aussi profiter des bienfaits du Spice Melange, d’étendre notre conscience.

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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Pourquoi je ne mets plus de note aux livres que je lis (ni aux séries et aux films, ni pour quoi que ce soit d’ailleurs)

Pourquoi je ne mets plus de note aux livres que je lis (ni aux séries et aux films, ni pour quoi que ce soit d’ailleurs)

Pourquoi je ne mets plus de note aux livres que je lis (ni aux séries et aux films, ni pour quoi que ce soit d’ailleurs)

Comme je le dis souvent, aimer écrire, c’est d’abord aimer lire. Je ne fais pas exception à cette règle-ci. Si je pouvais, je lirais plus encore que je ne puis le faire actuellement. Je rêve de retrouver le temps où je pouvais passer des journées entières plongé dans les pages d’un bon roman, ou des nuits, d’ailleurs…

Cependant, avec les années, l’expérience, l’âge, mais aussi avec la profusion de livres publiés chaque année, je crois que nous sommes tous confrontés à un paradoxe fondamental : il y a de plus en plus de bouquins à lire, mais sans doute devenons-nous plus difficiles (en tous les cas je deviens plus difficile). Car il y a de moins en moins d’ouvrages qui me transportent vraiment, ou simplement qui me font vraiment envie, et comme j’ai moins de temps pour lire, je suis parfois paralysé…

Comment choisir ?

On peut, comme moi, s’en tenir à son intuition. C’est parfois un bon indicateur. Pas toujours.

On peut, comme avant, choisir de faire confiance à une maison d’édition (par exemple, je suis assez fan des productions des Moutons électriques, ou de l’Atalante, comme de certains auteurs chez Bragelonne). Mais ça ne suffit pas non plus, car si l’on refuse de sortir des sentiers battus, on ne découvrira pas des auteurs qui ont fait un autre choix que ce circuit-là, comme l’ami Olivier Saraja.

Alors nous avons trouvé, poussés en cela par les grands acteurs de la distribution, mais aussi par une tendance de fond de la société, divers moyens pour nous aider à choisir, puisque ni la couverture ni la quatrième de couverture ne sont plus suffisantes pour nous guider vraiment, et parce que nous nous sommes éloignés de nos libraires. Ces derniers pourtant pouvaient apprendre à connaître nos goûts et devenir nos initiateurs vers une œuvre, un auteur, un genre. Eux aussi, cependant, sont pris dans le courant de cette lame de fond. L’abondance.

Pour pallier ce manque, nous nous sommes tournés vers des concentrateurs, des diffuseurs présents partout, comme Amazon. Puis vers des influenceurs, des blogueurs, des booktubeuses et des bookstagrammeuses. Enfin vers des réseaux sociaux, comme Goodreads, par exemple.

Ces systèmes ont un commun un postulat de base : la recommandation se fondera sur des avis argumentés et sur une note.

Les avis et critiques se multiplient donc, ce qui est une bonne chose. Encore faut-il qu’ils soient sincères et vraiment structurés. Ce n’est pas toujours le cas sur des sites comme Amazon, car les livres n’échappent pas au biais des avis «ouais c’est nul» ou «trop d’la balle», que nous avons tous croisés dans nos pérégrinations sur le site marchand.

Les notes se multiplient aussi.

Elles servent à construire une note globale à partir des avis des lecteurs/acheteurs sur Amazon, note globale qui entrera dans un algorithme censé cerner vos goûts et vous recommander d’autres œuvres similaires.

Elles servent à guider rapidement le lecteur potentiel sur les critiques construites des booktubeuses et des blogueurs littéraires. Ce sera la même chose, le même rôle, sur Goodreads ou Babelio.

C’est donc souvent une note qui va déterminer le «sex-appeal» du livre que vous convoitez. Et c’est cette note qui va influencer votre décision de l’acheter ou pas, de le lire ou pas.

Où est donc le problème, me demandera-t-on (ou pas) ?

Le problème, pour moi, a à voir avec l’idée de norme qui sous-tend tout notation chiffrée

Que l’on s’entende bien, je comprends l’intérêt des notes dans le cadre scolaire, pour nous aider à nous situer par rapport à l’acquisition de certains savoirs, de certaines compétences. Je suis un joueur de jeu de rôle, après tout, et la notation des caractéristiques et compétences de mes alter ego de papier ne me pose aucun problème philosophique. Que ce soit sur 5 dans les systèmes du World of Darkness (comme d’ailleurs les notations sur Amazon et consorts), sur 18 comme dans l’ancêtre D&D, ou sur 100 comme dans les jeux construits sur le Basic System de Chaosium, les notes attribuées aux capacités des personnages permettent de les situer dans une norme et de mesurer leurs aptitudes facilement.

J’ai par contre beaucoup de mal, et de plus en plus, à concevoir qu’une œuvre artistique ou culturelle puisse être notée, donc jugée en référence à une norme, fût-elle la norme du plaisir qu’elle procure.

Et j’aimerais m’en expliquer ici.

La notation, la note & l’algorithme

Une note n’est en effet jamais un chiffre isolé.

Si je dis que j’attribue 4 étoiles au dernier livre que j’ai lu, cela aura un sens différent si la note maximale possible est 5 ou 100. Le chiffre que j’attribue, ce nombre d’étoiles, est donc toujours contenu dans une échelle dont le minimum et le maximum sont connus par convention. Il est donc indissociable d’une référence.

Cette référence peut être très personnelle (je peux décider de noter sur 4, sur 5, sur 8, sur 10, sur 20, sur 100, cela ne changera que l’estimation que j’aurai de la valeur attribuée sur l’échelle choisie). Je peux aussi décider que 0 est la note la plus basse, ou bien que l’on pourra noter seulement à partir de 1, ou même que la note peut descendre à -1 ou -10.

Et pourtant, comme cette échelle est une référence, elle va devenir l’aune à laquelle je vais mesurer toutes les œuvres comparables. Tous les livres, toutes les séries par exemple. Et si elle me fournit un cadre reproductible, elle va devenir également une référence pour d’autres. Car lorsque je voudrai partager mon ressenti avec d’autres (comme sur Amazon par exemple), je vais devoir le faire en adoptant une référence. La mienne ou celle de mon interlocuteur. Dans les deux cas, la référence choisie fournit un cadre qu’il sera tentant de reproduire pour pouvoir bien se comprendre.

Je vais donc de fait créer une norme.

Ou m’y conformer si je choisis d’utiliser le système de notation d’Amazon en nombre d’étoiles sur 5, par exemple.

Norme naturelle contre norme culturelle

Depuis les deux articles sur le quantified self en médecine que j’ai commis sur ce blog, vous savez que je fais modérément confiance aux normes dans le domaine de la santé.

Dans celui des œuvres artistiques ou culturelles, je ne fais pas que m’en méfier : je les trouve vérolées dès le départ. Car il existe une grande différence entre les normes issues des systèmes de notation et celles issues de la mesure de la Nature : la possibilité de s’en écarter.

Dans la Nature, comme nous en avons discuté avec le quantified self, la norme est déterminée par la proportion d’individus dont la note se situe sur un nombre donné. La représentation de cette norme sur un graphique va donc être une courbe de Gauss, car un nombre non négligeable d’individus vont s’écarter naturellement de la note moyenne, parfois de façon forte, dans un sens ou dans l’autre. Il sera donc possible de trouver des individus exagérément grands ou exagérément petits par rapport à la norme. Il sera même possible de sortir des valeurs «normales» pour être considéré comme exceptionnel ou pathologique.

Dans un système de notation chiffrée des œuvres artistiques ou culturelles, on ne peut pas sortir des valeurs qui bornent l’échelle. On ne peut pas noter un livre que l’on trouve extraordinaire comme ayant 6 étoiles sur Amazon, ou descendre en flammes celui que l’on trouve vraiment trop mauvais en lui donnant une note de -3 étoiles.

Le défaut inhérent à toute échelle de notation fermée est donc celui-ci : toutes les œuvres sont notées selon un pied d’égalité par rapport à une attente standardisée, un barème en quelque sorte.

C’est ce qui me gêne profondément : les critères de notation.

Car tout cela sous-entend que l’on peut juger d’une œuvre suivant des critères précis, reproductibles, standardisés.

Le mythe de l’objectivité en matière artistique, un mythe totalement antinomique pour moi.

Objectivité de façade, subjectivité inavouée et non assumée

Soyons clairs.

Je suis un esprit scientifique, formé à la compréhension du monde à travers des faits reproductibles, et je pense fermement que c’est la meilleure façon que l’Humanité ait pu trouver pour expliquer le monde et le décrire, car cette vision permet de construire découverte après découverte des fondations solides pour apprendre comment fonctionne l’univers qui nous a fait naître.

Pourtant, si les lois de la Nature sont scientifiques, mathématiques, physiques, il reste à prouver que les «lois artistiques» aient une réelle existence. Malgré la création récente d’Intelligences Artificielles capables de pondre des textes longs (romans par exemple) ou des tableaux, avec un certain succès, il reste une chose que l’on ne maîtrise pas : l’appréciation individuelle des qualités intrinsèques d’une œuvre, par la résonnance unique qu’elle va créer chez la personne qui va la recevoir.

Une œuvre artistique ou culturelle c’est essentiellement un discours sur le monde, une façon de l’interpréter, non plus de façon objective et froide comme une théorie scientifique, mais au contraire en y mettant toute la subjectivité possible de l’auteur ou de l’autrice. Cette interprétation, cette vision unique du monde, est inscrite dans l’œuvre, parfois au corps défendant de son créateur, de par des événements de vie qui vont avoir façonné sa manière de considérer la vie, la mort, l’univers.

À l’autre bout de la chaîne, le lecteur ou la lectrice va percevoir ce message, et il va entrer en résonnance avec son propre parcours, ses propres attentes, ses propres désirs, craintes, traumatismes, espoirs, forces, faiblesses. Bref, avec toute une galaxie d’étoiles, et non pas seulement 5…

La tentative de noter une œuvre selon des critères bien définis ressemble donc pour moi à vouloir faire entrer un rond dans un carré, ou toute une galaxie dans une pierre précieuse. Même si cela peut vous rappeler le twist final d’un film montrant deux hommes en costume noir dont l’un est Will Smith, je crois qu’on y perd fatalement quelque chose.

Que se passe-t-il donc quand on impose à quelqu’un ou que l’on s’impose à soi-même de noter sur 5 ou sur 100 une œuvre ?

On s’oblige à renoncer à la complexité, à la nuance, à notre propre système de valeurs, pour faire coller notre ressenti, le transposer, dans un système de notation qui nous est plus ou moins étranger.

On va engager une estimation, une approximation, du résultat.

Peut-être que la réalisation du film était superbe, mais que le scénario était faible. Combien ça vaut ? Un 3 sur 5 ? Mais si pour moi un film c’est d’abord un scénario, est-ce que ça ne vaudrait pas plutôt 1 sur 5 ?

L’estimation, l’approximation, va se faire donc avec une réelle subjectivité.

Et l’on arrive au paradoxe ultime.

On construit un système de valeur censé être totalement objectif, à savoir une note chiffrée recoupée statistiquement par des algorithmes robustes que l’on juge représentatifs car dégageant des tendances grâce à la puissance du nombre de réponses.

Mais on le construit à travers une telle variété d’échelles individuelles totalement différentes et parfois opposées les unes aux autres, qu’on le base sur la plus grande des subjectivités.

En gros, on construit la Tour de Babel avec des moellons en guimauve.

Fatalement, l’édifice a quelques défauts…

Le plus grand est de nous faire prendre des vessies pour des lanternes : nous faire croire que l’objectivité est possible en matière artistique.

Je défends la thèse inverse : l’Art est une subjectivité qui rencontre une multitude d’autres subjectivités.

L’Art est pure subjectivité.

Pourquoi ne pas l’assumer ?

La réponse est simple : parce que tout le système de notation ne sert qu’à une chose. Vendre.

Le nerf de la guerre

Là encore, une petite mise au point s’impose.

Je trouve que diffuser une œuvre le plus largement possible est souhaitable, et donc la vendre, même contre rien, aussi – une œuvre gratuite se vend quand même, si, si, il faut convaincre l’autre de la lire ou la regarder, et ce n’est pas si facile même quand c’est gratuit, ou surtout quand c’est gratuit, d’ailleurs.

C’est non seulement souhaitable, mais c’est in fine le but réel de toute œuvre artistique ou culturelle.

Car si l’Art est pure subjectivité, l’Art est aussi pur partage.

Ce que chaque œuvre exprime est fait pour toucher l’autre. Pour que cette vision unique du monde soit vue par d’autres, qui l’adopteront, l’aimeront, la contempleront simplement, ou la rejetteront.

Et si l’artiste peut vivre décemment grâce à ce qu’il ou elle produit, c’est encore mieux. C’est la reconnaissance par la société de son travail, de son métier. Car créer est aussi un métier pour beaucoup. Un vrai métier.

Et comme tous les métiers, il doit permettre à celui qui l’exerce de vivre dignement.

Donc vendre son œuvre est un objectif noble.

C’est la manière dont la notation systématique et l’utilisation extensive des algorithmes ont transformé les moyens d’atteindre cet objectif qui me gêne.

Le système dont j’ai démontré plus haut l’incohérence (faire croire à une évaluation objective d’une œuvre sur des critères purement subjectifs par essence) n’a comme finalité que de vendre en essayant d’attirer le lecteur (ou le spectateur) par un biais que je rapprocherais volontiers du biais cognitif connu sous le nom d’effet de mode, ou du biais d’influence sociale. Il voudrait que plus la note est élevée, plus le nombre de personnes qui sont censées avoir donné une bonne note est élevé, et plus l’on va avoir tendance à penser que le livre (ou le produit) va nous convenir.

Alors qu’il n’en est rien.

La note est là pour nous influencer, puisque c’est ce que nous lui avions demandé.

Mais elle le fait avec de mauvais arguments.

Elle nous influence en nous trompant sur ce qu’elle représente.

Pour une autre façon de mettre une œuvre en avant : la diversité des points de vue

La note est donc, je crois, une mauvaise façon d’apprécier un livre, une série, un film, toute autre œuvre artistique ou culturelle. J’oserais même dire que la note est une mauvaise façon d’apprécier aussi les services ou les gens, mais tel n’est pas le propos ici, et je me limiterai pour cet article à conclure sur le sujet artistique seul.

Et cependant, nous en revenons au dilemme présenté en introduction : comment s’y retrouver parmi tous les titres existants et à venir, comment choisir notre prochain bouquin ?

J’ai bien une proposition à faire, qui n’est pas actuellement mise en œuvre, et qui pourtant aurait la possibilité de l’être.

Et je vais vous surprendre ou vous choquer après tout le discours qui précède : elle dépend de la puissance des algorithmes.

Mais bien sûr, ces algorithmes ne seraient pas basés sur une note attribuée subjectivement par les lecteurs ou les lectrices.

Si l’on revient au but recherché, c’est plus simple à comprendre.

Ce que je demande est de trouver des livres susceptibles de me plaire, avec une certaine incertitude également. Car parfois, un livre peut me toucher alors qu’au départ ce n’était pas gagné.

Je cherche des recommandations.

Celles que font pour moi Amazon, ou même l’algorithme de Goodreads ne me conviennent pas, car elles sont basées en partie sur les notes obtenues par les œuvres qui potentiellement pourraient entrer dans mes genres littéraires de prédilection.

Comment alors se passer des notes pour concevoir des recommandations de lecture plus justes ?

Se servir des avis structurés des lecteurs, des blogueurs, des booktubeuses, des bookstagrammeuses.

Chaque critique structurée n’est autre qu’un texte, que des algorithmes pourraient explorer, pour en extraire des adjectifs récurrents censés décrire une œuvre à travers les avis qu’elle recueille sur différents supports.

  • Par exemple, l’algorithme va chercher sur internet tous les avis construits sur Le Choix des Anges (il ne va pas en trouver beaucoup, c’est vrai). Il va en extraire une liste d’adjectifs avec un indice de récurrence pour chacun. Puis il va construire un profil évolutif du livre suivant les avis recueillis.
  • Lorsque je vais avoir lu un livre, j’indique simplement à l’algorithme si le livre a répondu à mes attentes ou pas. Dans les deux cas, je peux rédiger un avis structuré et écrit, qui viendra enrichir l’algorithme.
  • Et en se basant sur le profil du livre que je viens de terminer, il peut comparer avec sa base de données, et sortir une liste d’œuvres qui contiennent des adjectifs similaires.
  • Au fil de mes lectures, l’algorithme va apprendre ce qui a le plus de chance de me plaire et va donc affiner ses suggestions et recommandations.

Mais pour introduire un peu de variété et me permettre de découvrir quelques pépites qui lui échapperaient (au cas aussi où mes goûts changent), l’algorithme pourrait faire une pondération en fonction d’un indice que je fixerais dans mes préférences. Un indice baptisé «surprends-moi» noté, lui, par contre, de 1 à 10. Ce serait la variabilité que l’algorithme pourrait s’autoriser afin de faire des recommandations hors champ de mes goûts stricts.

On peut aussi garder une certaine couche de recommandations sociales (car les meilleurs influenceurs, ce sont souvent les vrais amis qui ont les mêmes goûts que nous) comme on peut déjà le faire avec Goodreads.

Des recommandations idéales

Bref, mon système idéal serait basé sur trois listes de recommandations.

  • Une liste algorithmique pure extraite des lectures qui m’ont touchées et construite d’après l’analyse des adjectifs utilisés par d’autres lecteurs pour chroniquer ou critiquer le livre.
  • Une liste de recommandations «surprises» basée sur une variabilité suivant des critères que je fixerais librement (genre littéraire, longueur du texte, sujets, etc.).
  • Une liste de recommandations sociales issues des chroniques de lecteurs que je suivrais (booktubeuses, blogueuses littéraires, contacts sur Goodreads).

Tout ceci n’existe pas encore, hélas.

Mais si certains d’entre vous s’y connaissent en algorithmique, en exploitation des big datas et en programmation, je suis disponible pour créer une startup… 😉

Ma ligne de conduite : comment je fais pour vivre sans donner de note

En attendant ce système (qui aura certainement des défauts lui aussi), j’ai donc résolu de ne plus noter de façon chiffrée les livres que je lis, les séries ou les films que je vois.

Je ne désire pas entretenir l’habitude que nous avons tous prise de noter tout et n’importe quoi à tout bout de champ. Je ne donne donc plus aucune note.

Et si j’ai un avis tranché, je l’écris en bon français, et j’en fais profiter l’auteur ou l’autrice d’abord, et mes camarades ensuite.

Car de mon point de vue, les algorithmes actuellement en place n’ont aucune valeur, et je ne désire pas cautionner leur fonctionnement en entrant dans le moule. Je suis conscient de fausser ainsi les choses, de façon marginale car je ne suis pas un grand influenceur, mais peut-être suffisamment pour que d’autres suivent mon exemple, ou peut-être – qui sait ? – pour que d’autres systèmes de recommandation soient créés.

La réalisation de livre (problématique de « l’autoédition »)

Reste un problème majeur dans cette posture que j’ai décidé d’adopter : ne plus noter les livres dits autoédités, c’est faire perdre de la visibilité à mes camarades qui ne disposent que du système de notation d’Amazon pour se faire connaître et toucher leur lectorat.

Nombreux sont en effet mes pairs à dépendre du système de notation pour être mis en avant par la plateforme et être proposés dans les recommandations faites à des lecteurs qui ne les connaissaient pas auparavant.

Ne plus noter, c’est leur faire perdre des chances.

Que faire alors, si je ne veux pas cautionner le système tout en essayant d’aider ces auteurs et autrices à trouver leur public ?

Mettre systématiquement la note maximale.

Là encore, je sors du cadre de référence, sciemment, en faussant la note globale en faveur de l’auteur, et en montrant que le système est basé sur une incohérence. Et je donne un coup de pouce à celui ou celle qui s’est démené pour écrire son bouquin. Il se peut même que ma note maximale ne soit pas en accord avec ce que j’ai pensé du livre. Qu’à cela ne tienne : je rédige un avis qui éclairera ma critique, mais je laisse le nombre d’étoiles maximal, la note maximale, pour que le livre gagne en visibilité.

Ainsi, je ne pénalise pas les réalisateurs et réalisatrices de livres.

La Société des Lectures Analogiques

Si vous trouvez une certaine résonnance entre vos propres valeurs et ce que je viens d’exposer, alors vous êtes prêts à entrer dans la Société des Lectures Analogiques, qui défend la liberté d’apprécier un monde qui parle avant tout en mots, et non en chiffres.

Les inscriptions sont ouvertes sous les commentaires !

Bientôt, nous serons le monde.

Bientôt…

J’espère…

Vous êtes là ?

Ouh ouh ?

Il y a quelqu’un ?…

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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Lettre vivante

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Lettre vivante

C’est donc fait, je me lance dans la publication d’une lettre d’information, une newsletter comme disent les anglophones.

Mais ce n’est pas pour faire comme les autres.

Nous sommes tous de plus en plus inondés de mails commerciaux qui ne servent qu’à nous faire consommer toujours plus. Certains sites marchands n’hésitent pas à en envoyer quotidiennement.

Comme toi, j’en suis écœuré.

Comme toi, peut-être, j’ai fait un tri drastique et je me suis désabonné de nombreuses listes de diffusion.

Alors si je me lance à mon tour, ce n’est pas pour commettre les mêmes forfaits que ce que je déplore chez les autres.

Je me lasse des réseaux sociaux et de leur cacophonie trop souvent commerciale ou délétère. Ces derniers temps, la publicité sur Instagram, les insultes, les invectives et les polémiques sur Twitter, les scandales à répétition sur les bafouements de la vie privée des utilisateurs sur Facebook, m’ont poussé à prendre mes distances et à réfléchir à une autre manière d’entrer en contact avec ceux qui me suivent comme avec ceux que je suis.

Dans la lignée de plusieurs autres, j’ai remis en marche le vieux système des flux RSS pour m’affranchir des filtres des réseaux sociaux et chercher l’information directement à la source, sans les algorithmes aux directives obscures d’une quelconque société de la Silicon Valley.

J’ai même décidé de remettre au goût du jour grâce à ces flux RSS un concept qui semble remonter aux origines du web et qui comme tel va sembler un brin anachronique : la liste de liens amis, la blogroll des années 2000. Ainsi, vous pourrez trouver sur ce site des liens vers ceux que j’ai envie de vous faire partager via leurs flux RSS.

Et de temps à autre j’écrirai encore des articles sous la catégorie Vers l’infini et au-delà, mettant plus particulièrement en lumière certains sites.

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Lettre vivante

C’est donc fait, je me lance dans la publication d’une lettre d’information, une newsletter comme disent les anglophones.
Mais ce n’est pas pour faire comme les autres.

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Pourquoi une newsletter

Et puis j’ai regardé autrement le bon vieux mail.

Par son principe même, le même que celui du courrier papier, le mail nous renvoie à une relation plus privée, plus intime. Le courrier n’est pas un objet public par essence, contrairement à un post Instagram, à un tweet ou à une publication sur Facebook. On peut le partager si on le souhaite, comme si l’on faisait lire un message à un ami en qui l’on a absolument confiance, mais il est rare que l’on publie dans le journal sa correspondance. Correspondre est un acte volontairement intime.

Ces deux mots sont pour moi centraux.

La volonté, la tienne comme la mienne, est une base fondatrice de cette relation. Tu me suis si tu le désires, tu es libre d’arrêter de le faire. Je ne te relancerai pas. Je considérerai que tu as choisi de rompre cette relation, car elle ne te convient plus.

L’intimité en sera la clef de voûte. Cette correspondance est pour moi une véritable relation. Tu pourras donc me répondre par mail si tu le souhaites et ces échanges seront couverts par le pacte que nous avons conclu ensemble lorsque tu as choisi de t’inscrire sur cette liste.

Ce pacte est le suivant : je vais écrire quatre fois par an sur les coulisses de mes productions, mais aussi sur ce que j’ai découvert, aimé ou détesté. Peut-être vais-je lancer quelques idées d’articles qui se concrétiseront plus tard, plus en longueur, sur mon espace public. Je partagerai aussi des astuces sur les sujets qui me tiennent à cœur, à savoir la réalisation d’histoires et de livres. Il m’arrivera de proposer des liens vers des sites que j’aurai beaucoup appréciés, mais jamais, jamais de liens commerciaux, si ce n’est, de temps à autre, quelques cadeaux sur mes propres œuvres, sous forme de réductions ou de contenus exclusifs.

En retour, tu es libre de me répondre. Je serais même honoré si tu le faisais et t’y encourage vraiment.

Tu es libre d’être d’accord ou pas d’accord et de me le faire savoir, comme si l’on discutait posément à la terrasse d’un café en sirotant chacun notre breuvage préféré. Nous pourrons être du même avis ou d’avis divergents, cela sera aussi bien, car la différence des points de vue est une richesse, si les deux parties sont sincères et respectueuses l’une de l’autre.

C’est la seule chose que je demanderai, la seule condition à cette relation.

Le respect, que je m’engage aussi à te témoigner.

L’étape d’après

Parce que la newsletter n’est qu’une première étape, la suivante sera la mise en adéquation entre mon désir de calme et de respect et mes usages en général.

Cela implique tout d’abord, je ne sais pas si tu l’as remarqué, une modification subtile de quelques détails sur ce site. En commençant par la raréfaction des boutons de partage des articles, qui ne sont plus situés que sur le coin gauche de l’écran, et un choix drastique dans les réseaux disponibles pour effectuer ce partage. Il ne reste plus que Twitter et Pinterest, pour le moment du moins. Exit Instagram et Facebook. Je considère que permettre le partage de mes propres articles sur ces réseaux serait une hypocrisie de ma part.

Beaucoup vont me rétorquer que ce faisant je me tire une balle dans le pied, que mes articles déjà confidentiels n’auront pas l’audience que pourraient leur apporter des réseaux si puissants que Facebook ou Instagram. On va peut-être penser que je suis jusqu’au-boutiste, extrémiste.

Non. J’assume pleinement ce que je pense de l’avenir de ces réseaux.

Je pense qu’ils ont tendance à flatter nos comportements les plus irrespectueux.

Je fais le pari que d’ici quelques années, la nébuleuse Facebook va se décomposer, entraînée par des scandales de plus en plus intenables. Je fais le pari que l’audience la plus intéressante pour moi, celle avec laquelle il est possible de discuter, celle qui cherche avec sincérité à faire société et pas à invectiver, insulter ou convaincre à tout prix l’autre, va se détourner des réseaux dits improprement «sociaux».

Comme tout pari, il existe un risque de perdre.

Je prends ce risque.

D’autant plus facilement que mes articles sont déjà faiblement partagés. Je ne perds pas grand-chose, en fait.

D’autres pourront aussi me questionner sur la présence des deux derniers boutons de partage, Twitter et Pinterest.

Twitter n’est pas moins délétère que Facebook. Les gens s’y insultent, bloquent, dénigrent, harcèlent, caricaturent autant que sur le Livre des Figures. Pourtant, j’y ai trouvé des personnes vraiment intéressantes, découvert de véritables talents. J’ai encore du mal à couper le sifflet de l’oiseau bleu parce que certaines de ces personnes n’ont pas de site et que les garder dans mon champ de vision ne peut se faire qu’à travers leurs tweets. Pour le moment.

Quant à Pinterest, l’absence de texte suffit à couper la chique aux haineux et autres trolls. Je le considère donc comme un grand capharnaüm plutôt que comme un réseau social.

Pour ne pas rester lettre morte

Cette newsletter va mieux refléter ma façon d’être que les réseaux «sociaux».

Elle a déjà sa propre identité visuelle, son propre vocabulaire, son propre paradigme.

Elle met en scène Amergin, l’Esprit Guetteur de l’antre du Serpent à Plume. C’est Amergin qui t’apportera chaque message.

Il pourra se faire Quetzal si tu cherches simplement à ce que chaque article te soit signalé dans la boîte aux lettres par un résumé rapide que tu seras libre de lire en totalité directement sur le site si tu le souhaites.

Il pourra se faire Phœnix si tu veux suivre la lettre d’information elle-même, celle où je m’étendrai plus longuement sur les coulisses de mes projets et de mes trouvailles, quatre fois par an, à chaque fête du calendrier celtique.

Cela commence bientôt, puisque les feux de Beltaine sont déjà en préparation.

T’inscrire sur la liste de diffusion de l’une ou l’autre de ces créatures te conférera le titre (envié bientôt, j’en suis sûr), de Ptérophidien ou de Ptérophidienne, mais aussi le passe qui te permettra d’accéder à la section du site où j’ai rassemblé les quelques petits outils informatiques que j’ai créés pour me faciliter la vie dans mes travaux d’écriture ou de mise en page.

Je serai heureux de les partager avec toi, s’ils peuvent t’être d’une quelconque aide.

Alors je l’espère à bientôt, sur des chemins numériques ou réels.

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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Ce délicat moment de transition entre deux instants

Ce délicat moment de transition entre deux instants

Ce délicat moment de transition entre deux instants

J’ai depuis toujours été fasciné par le moment de bascule, celui qui acte le changement. Fasciné par cet instant qui restera à jamais non mesurable, imperceptible, presque inimaginable, cette singularité du temps presque aussi mystérieuse que l’étincelle originelle de la naissance de l’Univers. Fasciné par le moment précis où, décidé, le changement a lieu.

Un instant nous sommes seuls au monde, nous nous sentons abandonnés, ou tristes, et l’instant d’après nous tombons amoureux, nous sommes presque soulevés de terre par une force incroyable.

Un instant nous sommes en bonne santé, emplis d’optimisme et d’énergie, et celui d’après la maladie nous saisit, un malaise provoque notre chute. Un instant avant nous étions nos deux pieds au sol, celui d’après notre équilibre s’effondre comme notre corps et l’attraction fait s’écrouler jusqu’à notre monde même.

Un instant nous cherchons avec angoisse une solution à un problème complexe, nous cherchons depuis des jours, des semaines, des mois, des années peut-être, et l’instant d’après nous oublions de chercher, et à cet instant précis, cette fraction de seconde là, si infime, si incommunicable, si fragile, l’idée jaillit comme un arc électrique et surgit sans crier gare. Elle apparaît sans aucunes prémices apparentes, elle naît d’une matrice invisible et impensable comme si c’était hors du néant lui-même.

Un instant nous sommes en 2018, et une fraction de temps plus tard nous fait basculer en 2019.

Je suis fasciné, comme attiré et repoussé à la fois.

Est-ce pour cela que le changement m’est parfois si difficile ?

Est-ce pour cette raison que l’acte, le faire, est si précieux pour moi ?

Est-ce pour cela que j’ai choisi un métier où la décision qui tranche deux instants entre l’incertitude et la réalité, entre le virtuel et le concret, est le centre de gravité de tout ?

Est-ce pour cela que j’ai pour passion de faire sortir ce moment de création pure, ce moment de bascule du rêve vers la matière, de l’idée vers les mots, de la pensée vers le discours, du texte vers le jeu, de la mise en scène vers la représentation ?

Est-ce pour cela que j’aime voir ces changements plus subtils les uns que les autres dans de petites choses tout en gardant la nostalgie des choses qui ne sont plus comme elles étaient auparavant ?

Est-ce pour cela que l’art de provoquer le changement me fait tant vibrer ?

Qu’est-ce qui fait que quelque chose bouge, change ?

Quand a lieu ce prodige ?

Bien sûr, on pourra vous expliquer que le changement n’est qu’un continuum, une ligne ininterrompue d’instants de changements permanents et si subtils que vous ne les remarquez pas. Que toute vie est elle-même un changement né d’innombrables changements plus volatils et plus impalpables au cœur de chaque cellule de l’organisme. Que même les atomes changent. Que même les électrons changent de sens de rotation, tout le temps. Que le changement est partout, qu’il est paradoxalement la seule chose immuable dans ce monde, si bien que la seule chose qui ne changera jamais c’est que tout change et tout le temps.

Il n’empêche que quelque part, il faut bien passer d’un état à un autre. Il faut bien qu’il existe une bascule, un point où le déséquilibre s’équilibre avant de se précipiter de l’autre côté. Une singulière singularité où le mobile devient immobile, l’espace d’un infime souffle de l’Univers, pour bouger à nouveau. Et que ce point d’équilibre soit atteint et dépassé un nombre incalculable de fois pour chaque particule, chaque objet, chaque être, en permanence, n’en est pas moins fascinant.

Peut-on imaginer un rythme unique dans cette respiration entre l’équilibre et le déséquilibre ? Un cycle commun à toutes les choses qui battrait la mesure d’une musique des sphères bien plus puissante que celle à laquelle croyaient nos ancêtres. Une même fréquence qui serait la pulsation unificatrice, telle la Force, l’Éther, le fluide cosmique maintenant la réalité en un tout cohérent et vivant.

Ou peut-on imaginer que chaque chose possède son propre rythme, sa propre pulsation ? Tout s’harmoniserait suivant une partition improvisée, chaque fréquence battrait suivant un point d’équilibre différent, un déséquilibre différent, et la diversité des fréquences engendrerait un grand déséquilibre universel dont la musique naîtrait justement de la réunion de toutes ces différences.

Peut-on simplement constater que tout change, tout suit une mesure et un rythme, et que la musique de ce rythme berce nos existences même quand nous n’en sommes pas conscients ?

Lorsque le changement m’est difficile, c’est cette pensée qui me vient.

Lorsque l’immobilité m’est insupportable, c’est vers elle que je me tourne.

Lorsque les événements se bousculent, je tente d’en trouver le rythme, même si bien souvent je suis plus doué pour m’épuiser à ramer à contre-courant, cherchant un âge d’or aussi inatteignable qu’illusoire.

Et lorsque le cours du fleuve ne me convient plus, je provoque moi-même des changements en expérimentant ma propre musique, en essayant de trouver comment jouer ma partition personnelle, comment la composer pour qu’elle sonne juste.

Je n’y parviens pas toujours. Il est difficile de jouer certaines notes. Et parfois on ne maîtrise pas vraiment l’instrument. On apprend tous les jours à jouer de nouvelles notes, de nouvelles techniques. Et certaines resteront hors de notre portée.

Nous nous trouvons à un tel point d’équilibre, un point de déséquilibre où le changement est indispensable, inéluctable, souhaitable, même s’il est parfois extrêmement dur. Tous, individuellement, un jour ou l’autre. Tous, collectivement, à certains moments dans l’histoire de notre espèce, comme actuellement.

Je me trouve à un tel point, moi aussi. Comme chaque année à la même époque. Comme à chaque cycle. Comme à chaque mue.

Cette fois, cependant, je vous propose de convoquer la magie de l’imagination, cette magie qui nous permet de suspendre le temps, son cours et sa chute, pour regarder un peu en arrière, et regarder un peu en avant, pour regarder avant de plonger dans un nouveau cycle et un nouveau changement.

Un (dernier ?) regard vers le passé

L’année qui vient de s’écouler comme un torrent de montagne m’a fait vivre beaucoup d’émotions.

Je n’aime pas m’épancher, aussi ce regard vers le passé va-t-il emprunter la voie de petits moments marquants, comme des cailloux semés par le gamin qui ne veut surtout pas perdre son chemin dans la forêt sombre.

La musique de 2018

Les paroles se suffisent à elles-mêmes, ainsi que le timbre si reconnaissable de Skye.

puis, bien sûr, la voix de Lisa.

Les images de 2018

Ce seront des images d’ailleurs, des images de landes et de collines, de falaises et d’océan.

Derrière la caméra, il y a aussi les images que j’emporte dans mes yeux et mon esprit. Des images d’amitié et d’amour. Des images de rires, de moments partagés et de découvertes faites ensemble.

Ce seront aussi des images d’un autre temps qui refait surface, de l’Après-guerre revécu en 2018. Avec là encore des fous rires, des moments de partage et d’amitié.

Enfin, ce sera cette image de Gustave Doré qui m’a accompagnée durant 6 ans lors de l’écriture du Choix des Anges, et qui m’a guidée jusqu’à sa sortie au jour, enfin possible.

Le jeu de 2018

Grâce à mes compagnons de jeu, et notamment Jérôme, j’ai découvert Symbaroum. J’ai pris énormément de plaisir à arpenter Davokar, la forêt obscure aux secrets maléfiques. Et il semblerait que nous n’ayons pas fini de dévoiler toutes ses horreurs d’un autre temps, si les Elfes du Pacte de Fer nous en laissent l’opportunité, et si la maladie insidieuse qui court dans les ramures et les racines ne s’infiltre pas dans nos cœurs de Troll, Gobelin et pauvre Humain.

Le goût de 2018

Si le goût fort du haggis écossais a plutôt surpris agréablement mes papilles, c’est un goût plus amer qui reste dans ma bouche, et pas vraiment celui de la bière.

Cette amertume qui s’installe lorsque j’évoque la façon dont mon métier a évolué cette année.

Me battre contre la maladie et la mort sans vaincre, j’y suis habitué, c’est la règle du jeu, et je sais qu’ainsi va la vie. Ce sont des combats que l’on ne peut que perdre à la fin.

Soigner des petits maux sans importance qui n’auraient même pas mérité de consulter un médecin, c’est aussi mon quotidien, et c’est l’occasion de (tenter de) faire un peu d’éducation à la santé. Même si, je dois l’avouer, je commence à m’impatienter quand des patients que je connais depuis presque dix ans continuent à penser que s’ils viennent après 24 heures d’évolution d’un rhume c’est mieux, malgré tout ce que j’ai pu leur expliquer pendant ces dix longues années…

Mais devoir faire face à la tyrannie du «tout, tout de suite» généralisé, au manque de civisme, de politesse et de simple bon sens, c’est difficile, à la longue.

Mais devoir me battre pour me justifier de faire mon travail auprès de ceux que je tente d’aider, c’est plus dur. C’était la première fois que cela m’arrivait en 18 années d’exercice, mais cela s’est produit deux fois à une semaine d’intervalle.
Mais devoir regarder le système de santé être vendu à la découpe par des charognards qui sont ceux-là mêmes qui devraient en prendre soin, c’est insupportable.

Mais devoir supporter les remontrances injustes d’un jeune freluquet qui rêve de me voir travailler jusqu’à 22 heures chaque jour pour une bouchée de pain, et qui finit de déconsidérer ce que je tente d’apprendre à mes patients (éviter d’être impulsif et consulter de façon raisonnée) en trois phrases, c’était trop.

C’est qu’on ne trouve plus de médecins hors de l’hôpital en fin de journée ou tôt le matin et parfois pour une raison financière : c’est qu’on n’a pas besoin de faire l’avance de frais.

Les urgences non vitales doivent donc pouvoir être prises en charge en ville par les professionnels organisés dans leur communauté professionnelle, en lien avec leur hôpital de proximité, ils devront s’organiser collectivement pour assurer une permanence de soins non programmés de jour, tous les jours jusqu’à 20 h.

Initialement, moi j’étais pour dire jusqu’à 22 h, mais on m’a dit que j’ouvrais une guerre absolument impossible si on disait jusqu’à 22 h, donc je suis raisonnable et j’ai dit 20 h, mais ce serait formidable si on pouvait trouver un accord jusqu’à 22 h sincèrement. [Rires dans l’assistance] Parce que quand on regarde les chiffres des urgences, il y en a énormément entre 20 h et 22 h, donc j’ai fait confiance à la ministre, au directeur de la CNAM, à l’ensemble des professionnels qui auront cette négociation à conduire, je suis persuadé qu’on peut trouver une solution intelligente jusqu’à 22 h. Mais j’ai dit jusqu’à 20 h aujourd’hui.

Discours du 18/09/2018 (à 44:06 dans la vidéo disponible sur le site de l’Élysée).

Comme la célèbre goutte qui parvient à faire déborder le vase, à provoquer le déséquilibre, le changement, ces quelques mots ont suffi à me mettre dans une colère noire.

Pourquoi croit-il qu’on ne trouve plus de médecins ? Parce qu’ils sont en vacances aux Bahamas ? Ou bien plutôt parce que les patients consultent trop souvent pour des motifs sans raison médicale, parfois par impatience, parce qu’ils consultent beaucoup trop souvent pour des burn-out provoqués par le management maltraitant qui les broie à longueur de temps, parce qu’il n’y a pas assez de médecins et parce que ceux qui restent sont déjà débordés ?

Il croit sincèrement qu’on a encore assez d’énergie pour consulter jusqu’à 22 heures quand on en est déjà à 30 patients dans une journée où l’on finit à 19 heures 30, qu’on ne peut pas aller chercher ses gamins à l’école, qu’on n’a pas de temps pour accomplir les démarches administratives parce qu’il faut aller les effectuer avant 16 heures, et qu’on est épuisés ?

Il croit sincèrement que les médecins généralistes libéraux vont accepter de se faire traiter implicitement de branleurs alors qu’ils portent déjà à bout de bras une population qui n’en peut plus, et qu’eux-mêmes sont au bord de la rupture physique et mentale ?

Il croit sincèrement que la réponse c’est «toujours plus de consultations» alors que la seule solution c’est «éduquer la population à la santé», parce que la majorité des consultations de 20 heures à 22 heures sont des consultations qui peuvent être reportées le lendemain sur des horaires normaux (je tiens à sa disposition les motifs de consultation de mes dernières gardes de soirée) ?

Et il croit sincèrement que les médecins peuvent recevoir sans sourciller 40, 50 ou 60 patients par jour et accueillir la souffrance réelle et parfois extrême sans eux-mêmes sombrer ?

Une colère noire.

Une colère salvatrice, littéralement.

Une colère qui m’a fait réagir, comme d’autres avant moi.

Ce métier n’est plus fait pour moi. J’en prends acte. Ma reconversion est en cours.

Les mots de 2018

Mon Dieu, donne-moi le courage de changer les choses que je peux changer, la sérénité d’accepter celles que je ne peux pas changer, et la sagesse de distinguer entre les deux.

La lecture de 2018

Elle n’est pas encore achevée tant elle est dense, mais ma lecture marquante de 2018 n’est pas un roman, ni de l’imaginaire, ni même de la fiction, et ça fait bien longtemps que cela ne m’était pas arrivé.

Il s’agit de Qu’est-ce que l’hypnose ? de François Roustang. Un livre d’une grande acuité, même s’il n’est pas toujours facile d’abord.

La série de 2018

Le choix est plus difficile cette année. Il y a eu American gods, La casa de papel, Altered carbon, la saison 3 de The Expanse, la saison 3 de Daredevil, et les saisons 2 et 3 de This is us, surtout. Mais c’est vraiment la saison 7 d’Homeland qui m’a scotché cette année. Cette série est aiguisée, montre un regard très juste sur l’actualité, un cynisme hélas réaliste dans le fonctionnement de notre monde (notamment des relations entre la Russie et les États-Unis) et un véritable travail sur les personnages (la bipolarité de Carrie) comme sur le scénario.

Le lien de 2018

Pour tous ceux qui veulent écrire, et notamment ceux qui veulent écrire des œuvres de l’imaginaire, il existe une ressource indispensable que je n’ai découverte que cette année, mais dont j’ai dévoré les 2 premières saisons, j’ai nommé Procrastination, le podcast de Mélanie Fazi, Laurent Genefort et Lionel Davoust. En à peu près 15 minutes, un sujet traité avec humour et érudition, pour nous aider à progresser.

Un (premier ?) regard vers le futur

«Toujours en mouvement est l’avenir», dirait un petit homme vert de ma connaissance, aussi est-il difficile de savoir précisément ce que réserve 2019. De plus, lorsque je me risque à faire des prédictions sur ce que je vais poster l’année qui vient, je me trompe à chaque fois. Soit le sujet prévu ne me parle plus tant que ça, soit il est subordonné à une expérience qui n’est pas concluante, soit j’ai d’autres choses à écrire qui prennent sa place, bref, je ne suis qu’un piètre Nostradamus, y compris pour mes propres productions.

Je vais me contenter de me donner quelques pistes, sur des choses que j’aimerais vraiment réaliser en 2019. Des choses que vous pourriez ou non trouver ensuite sur cet espace virtuel.

Le projet

Plusieurs projets occupent mon esprit et donc mon temps actuellement, et j’espère que l’un d’entre eux au moins verra le jour cette année.

Rocfou, d’abord. Je mets en place à la fois le monde et l’intrigue, mais la maturation est longue, comme à chaque fois. J’ai cependant une idée de plus en plus précise de ce que je veux, et de ce que je ne veux pas. Je pense débuter vraiment la rédaction en milieu d’année. Pour la suite, je ne maîtrise pas vraiment le planning. Nous verrons bien.

De vieilles idées ont fini par trouver leur place avec de nouvelles, et mon vieux Tarot va renaître de ses cendres, plus tard, lorsque le manuscrit de Rocfou sera achevé, sous une autre forme.

Ce sera bien suffisant, car je compte aussi continuer à écrire ici de temps à autre, avec certes moins de régularité que les premières années, mais toujours avec plaisir et passion.

Les expériences

Réaliser une carte pour fixer l’univers de Rocfou m’a donné envie d’apprendre un peu plus les bases du dessin. Je n’ai jamais été doué pour tenir un crayon, mais j’aimerais apprendre à être un peu moins gauche avec. D’autant que depuis mes essais d’adolescent, j’ai quand même touché à quelques notions sur le cadrage et la lumière.

Je ne suis cependant pas assez fou pour penser que je pourrai être suffisamment aguerri pour réaliser moi-même la couverture de Rocfou. Cette fois-ci, l’illustration sera faite par quelqu’un de beaucoup plus doué et expérimenté que moi. J’ai quelques idées, mais je préfère avancer dans l’écriture du projet avant d’en parler.

Le changement

Je devrais mettre le titre au pluriel.

Car il va y en avoir quelques-uns.

J’y reviendrai peut-être dans un article de fond, mais les soignants ont tous ou presque un gros problème : ils ne prennent pas beaucoup soin d’eux-mêmes. J’ai décidé de devenir une exception.

Je commence très simplement par réduire mon temps de travail au lieu de l’augmenter, puisque n’en déplaise à certains au plus haut sommet de l’État, je ne suis pas un robot taillable et corvéable à merci. Je ne prends plus de nouveaux patients en charge. Ce n’est d’ailleurs que le début d’une évolution mûrement réfléchie et préparée qui me conduira à ne plus exercer la médecine générale si mon plan se déroule sans accroc. Dans mon petit coin d’Occitanie, il reste encore suffisamment de médecins généralistes. Et dans le cas contraire, arrêter ne me pose plus aucun problème philosophique après l’automne que je viens de vivre. Que la société récolte enfin ce qu’elle sème depuis très longtemps, après tout. Qui suis-je pour vouloir infléchir à moi tout seul le cours des choses ? Je ne suis pas responsable d’autre chose que de mes propres choix. Et je compte bien exercer ces choix en toute liberté. Cela laissera ceux qui les ont inspirés dicter à leur guise l’évolution d’un système dont je serai dès lors totalement détaché. Pour mon plus grand bien-être.

J’ai décidé également de bannir Google de ma vie, le plus possible. J’utilise Qwant dans mes requêtes sur internet, j’ai fermé mon compte G+, mon adresse Gmail. Et j’ai décidé de me passer des statistiques fournies par Google pour administrer ce site. Vous ne serez donc plus suivis par Google Analytics en naviguant ici. Je ne peux pas empêcher Google d’indexer le site, mais pour tout le reste, bye bye…

Comme sur le bord de l’abîme

Sur le bord de l’abîme, on peut sentir comme un vent qui tourbillonne et un vertige qui saisit à la gorge comme aux tripes. On ressent l’inquiétude de ce qui va se passer ensuite, l’appréhension de l’inconnu, la tentation de reculer. Après tout, changer est-il si nécessaire ? Sauter peut être dangereux. Mais sauter peut aussi être salvateur.

Le saut se fera de toute façon, que nous l’acceptions ou pas. La bascule est inéluctable. Un instant succède à l’autre et tout est changeant, à chaque instant. 2019 succédera à 2018.

Nous pouvons parfois déterminer comment nous voulons sauter, vers quelle direction nous voulons basculer.

Sur le bord de l’abîme, juste avant de nous laisser tomber de l’autre côté du miroir, de l’autre côté de cette frontière du temps, nous pouvons garder à l’esprit ce que nous voulons, ce que nous ne voulons plus.

Se tenir en équilibre précaire, comme sur un fil, pendant quelques fugitifs moments, se souvenir de tout ce qui a déjà changé et de tout se qui changera encore, dans un état précédent, dans tous les états précédents.

Tout un monde existe entre l’avant et l’après, sur la pointe fragile, juste avant la bascule inévitable.

J’essaie d’apprivoiser ce monde.

J’essaie de vivre.

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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Jeu de Rôle

Je ne suis pas un auteur autoédité, je suis un réalisauteur, un réalisateur de livre

Je ne suis pas un auteur autoédité, je suis un réalisauteur, un réalisateur de livre

Je ne suis pas un auteur autoédité, je suis un réalisauteur, un réalisateur de livre

Writer is coming…

C’est le slogan qui à mon sens pourrait résumer la période que nous vivons. Une époque où les moyens de production artistique, notamment des écrits, sont devenus si accessibles que le nombre de personnes qui se lancent dans l’aventure comme on se jette à l’eau est exponentiel.

Plus encore, à l’image des bouleversements qui sont annoncés dans le monde de Westeros par le retour d’un hiver permanent et celui, concomitant, des Marcheurs blancs, l’apparition de cette horde d’auteurs qui ne dépendent plus du système de l’édition classique pour trouver des lecteurs est en train de faire exploser la politique si familière des Royaumes éditoriaux.

Alors oui, Writer is coming.

Pourtant, la révolution ne sera véritablement accomplie que lorsque ceux-là mêmes qui la font ne se définiront pas en référence au vieux système. Pour le moment, nous nous nommons en effet nous-mêmes “auteurs autoédités”, faisant nôtre une définition qui n’est finalement qu’une survivance d’un paradigme que nous avons refusé de suivre.

Pour véritablement être nous-mêmes, il faut nous nommer.

Le mot est notre domaine. Le nom, le Nom, ont un pouvoir que les écrivains comprennent sans doute mieux que quiconque dans notre société. Nommer une chose, s’est se donner un pouvoir dessus.

Alors, nommons-nous.

Mais de quel mot ?

Puisqu’il ne saurait être question de se dire simplement éditeurs, puisque ce nom ne définit pas la réalité de ce que nous sommes, même si nous endossons la fonction de l’éditeur, ni même indépendants, puisque tous ceux qui ont refusé le système de l’édition classique n’ont pas tous le même modèle de production et que nombre d’entre nous font appel à des prestataires comme Amazon ou d’autres plateformes, numériques ou non, il faut trouver autre chose, quelque chose qui a trait à l’essence même de ce que nous faisons.

Alors quoi ? Écrivains, romanciers, nouvellistes ?

Non. Chacun de ces mots porte une réduction en lui-même.

Nous ne faisons pas qu’écrire nos histoires. Nous les habillons en maquettes, nous en choisissons la couverture, le papier, la mise en page, la mise en forme. Nous les promouvons.

Nous n’écrivons pas tous des romans. Pas tous des nouvelles ou des novellas. Certains s’essaient dans plusieurs genres.

Non, je pense qu’il faut inventer un mot. Le faire naître lui aussi, comme nous faisons naître nos histoires.

On aurait pu remettre au goût du jour un vieux mot latin, grec ou sanskrit. Après tout, autor ou auctor, qui du latin ont donné auteur en français, aurait pu avoir un synonyme dans la langue de Cicéron. Editor, qui donna éditeur en français, lui aussi aurait pu avoir un lointain équivalent.

On aurait pu se servir de la langue dominante de notre époque, l’anglais. Puisqu’author et authoring ne désignent pas seulement l’auteur et son acte d’écriture, mais aussi une véritable création qui va au-delà du simple acte de trouver les mots.

Je pense que cela aussi aurait été réducteur, car le mot n’aurait pas véritablement recouvré toute la richesse de ce qui est désormais l’acte de créer soi-même un ouvrage depuis l’écriture jusqu’à la vente.

Aussi, il me semble intéressant de nous tourner vers un autre domaine de création pour nous inspirer.

Le cinéma.

Le réalisauteur, réalisateur de livre

Le cinéma, comme le théâtre, est par essence un domaine collaboratif et pluriel.

Un film naît rarement du travail d’une seule personne, mais peut porter la vision de celle qui est aux commandes, à travers tout le processus que l’on appelle la production, et qui va de la préproduction, à savoir la conception et l’écriture du scénario, la recherche et la fabrication des costumes, des décors, des accessoires, le casting des acteurs, le découpage des séquences, le story-board, jusqu’au tournage lui-même et enfin à la postproduction comme le choix des musiques, le mixage des sons, l’étalonnage et le choix des couleurs, les effets spéciaux.

La seule personne qui est aux commandes de bout en bout, véritablement en charge de l’aspect artistique du film, c’est le réalisateur.

Qu’il ait ou non le final cut n’est pas finalement le point essentiel. C’est lui l’artisan, même dans le cas où le producteur prend le pouvoir sur quelques décisions stratégiques.

Il n’est peut-être pas véritablement le scénariste, mais il n’est pas non plus le décorateur ou l’accessoiriste. Ou plutôt, il est le chef d’orchestre de tous ces instruments mis au service du film qu’il met au monde.

Un réalisauteur, un réalisateur de livre, conçoit son œuvre de la même façon.

La pré-production d’un livre

Lorsqu’une idée de film germe dans l’esprit d’un scénariste se déroule le même processus de création que dans celui d’un auteur écrivain. La forme du récit a beau être très différente, ils créent tous deux un monde, des décors, des accessoires, des personnages, une intrigue pour lier le tout. Ils cherchent des inspirations, de la documentation, font parfois appel à d’autres personnes, des spécialistes d’un domaine précis, pour les aider à déterminer la vraisemblance de telle ou telle action, de telle ou telle décision.

Dans la fabrique du cinéma, le réalisateur, même s’il n’est pas lui-même le scénariste, va être étroitement associé à ce processus. Il prendra même le dessus sur le scénariste lorsqu’il sera question de faire sortir l’histoire de son cadre de papier.

Il va donner des directives pour le casting, discuter des décors qui seront vus à l’écran et de ceux qui ne seront pas visibles, mais qui serviront la cohérence de l’histoire. Il va parfois retravailler les dialogues en répétition avec les acteurs comme un écrivain qui peaufine les siens pour les rendre plus fluides ou plus naturels, pour mieux évoquer le caractère du personnage qui les prononce ou pour rendre une ambiance particulière dans une scène.

Tout le travail de préproduction consiste à construire les éléments nécessaires à la mise en images d’un film.

Tout ce travail qu’un écrivain accomplit lorsqu’il prépare son intrigue, qu’il imagine ses décors, ses costumes, ses accessoires, ses personnages, lorsqu’il met en marche la mécanique bien huilée de sa trame narrative.

En choisissant d’écrire à la troisième personne ou à la première personne, en choisissant un seul point de vue omniscient ou une multiplicité de points de vue narratifs en fonction de plusieurs personnages, il place sa caméra, décide de la valeur de sa focale, de la valeur du plan, des mouvements de caméra.

Le story-board du réalisateur est aussi celui de l’écrivain.

Le tournage d’un livre

Une fois la préparation terminée, un réalisateur n’attend qu’une chose : tourner enfin son film. Le budget a été bouclé, tout a été prévu, anticipé, pour le garder sous contrôle. Pour éviter les accidents, pour recruter le personnel technique.

L’écrivain n’a habituellement pas de budget à gérer pour l’écriture d’un livre, ce qui lui laisse plus de marge de manœuvre, une immense liberté, et lui permet une débauche de moyens que seuls les plus grands réalisateurs peuvent se permettre de rêver posséder pour tourner un film.

Mais lui aussi est confronté à l’angoisse du tournage, de son tournage. La rédaction.

Car de la même manière qu’une foule d’imprévus vient toujours compliquer ou modifier une séquence tournée par la caméra par rapport à ce qui avait été anticipé en préproduction, la rédaction d’une scène peut parfois complètement changer ce qui avait été prévu en amont.

L’écrivain peut être confronté au caprice de ses acteurs (en comprenant que son personnage devrait agir d’une autre manière que ce qu’il avait imaginé au départ, par exemple), à des lumières ou des couleurs légèrement différentes de ce qu’il avait voulu au départ, à des sons différents.

De la même manière, un écrivain peut rédiger ses scènes dans le désordre, comme un réalisateur qui tournerait tous les plans dans un décor particulier, peu importe leur ordre dans la narration finale, avant de se concentrer sur un autre décor bien différent disponible seulement ensuite.

L’acte de créer demande souvent des allers et retours entre différents moments, différents endroits, différentes ambiances. Il peut être plus inspirant pour l’écrivain de rédiger la fin de son livre avant le début, puis morceau par morceau dans un ordre complètement indépendant de son ordre narratif final.

Le tournage d’un livre prend fin lorsque la rédaction est terminée, mais le travail du réalisateur ne s’arrête pas là.

La post-production d’un livre

Au cinéma, le réalisateur supervise également les phases finales de la fabrication du film.

Il collabore au montage, quand il ne le fait pas lui même.

On a coutume de dire qu’il existe trois films : le film que l’on a imaginé, le film que l’on a tourné, et le film une fois monté dans l’ordre définitif de la narration des scènes, qui est parfois très différent de l’ordre prévu au départ. Pour un livre, le même aphorisme est sans doute valable. C’est bien d’ailleurs pour cela que les outils d’écriture comme Scrivener sont si essentiels : ils permettent de ré-arranger, de ré-organiser, de chambouler complètement l’ordre narratif, l’enchaînement des scènes, des séquences et des chapitres d’un livre comme un logiciel de montage est capable de le faire pour une vidéo ou un film.

Le montage peut même être vu comme une façon de corriger le film, de la même façon qu’un écrivain se relit et corrige ou fait corriger son manuscrit, en s’assurant qu’il n’y reste pas d’incohérence, de faute, de coquille.

Mais une fois le montage terminé, le film n’est pas encore prêt. Il manque des étapes essentielles comme le mixage du son ou les effets spéciaux. Dans un livre, par nature, ces étapes ont été souvent complétées lors du tournage.

Quant à la touche finale, l’étalonnage, c’est pour moi là que l’écrivain rejoint vraiment le réalisateur.

Étalonner un film signifie s’assurer de la cohérence des couleurs entre les plans d’une même séquence afin que, tournés à des moments différents, ils soient à l’écran comme une continuité narrative sans couture, mais aussi choisir les couleurs dominantes de l’ensemble du film en fonction des ambiances désirées, du style du film, des scènes elles-mêmes.

C’est véritablement l’habillage final du film, ce qui va lui donner son identité.

Pour un livre, si cette étape d’étalonnage peut se comprendre dans l’écriture elle-même, elle peut également se comprendre comme la mise en page du texte brut, comme sa mise en scène, sa coloration en un tout, en une œuvre cohérente. Les mots ici représentent bien l’image brute montée, et la page serait l’écrin de couleurs de ces images.

Ainsi, étalonner un livre serait pour moi l’équivalent du processus éditorial de création de la maquette, de choix des fontes, de choix du format du papier, de sa qualité, de la couverture. Ainsi, étalonner un livre numérique consisterait à créer le fichier ePub lui-même.

Lorsque le film sort du banc d’étalonnage, il est prêt à être visionné.

Lorsque le livre sort de cette étape ultime, il est prêt à être lu.

Production et collaborations

Le réalisateur est alors sollicité pour la dernière partie de la conception. En général c’est, avec les acteurs, pour en faire la promotion. Il est rare que lui-même plonge dans le travail de trouver un diffuseur, et c’est là que les rôles de l’auteur et du réalisateur peuvent bifurquer.

Car lorsque l’on choisit de se passer d’éditeur, c’est comme si l’on choisissait de se passer de producteur, et il faut alors soi-même remplir le rôle plus ingrat de celui qui gère les finances et rémunère les prestataires qui ont contribué à l’œuvre (figurants et acteurs, équipe technique, compositeur, sont généralement peu payés dans un livre, mais il se peut qu’il faille signer un chèque à l’illustrateur de la couverture, au correcteur, ou à d’autres encore).

On pourrait cependant arguer que certains réalisateurs mettent la main à la poche en plus de la mettre à la pâte et coproduisent leur œuvre.

Et c’est vrai.

Car finalement, la fabrication d’un livre comme celle d’un film n’est jamais, jamais, jamais, contrairement à ce que l’on peut penser, un acte solitaire.

La création comme une série de rôles et de fonctions

On parle de chaîne du livre pour une bonne raison.

Il est rare de maîtriser toutes les compétences qui peuvent faire naître un film (être un assez bon menuisier pour construire un décor, un assez bon couturier pour créer les costumes, un assez bon électricien pour gérer les machineries, un assez bon connaisseur des lois de l’optique pour gérer la profondeur de champ, un assez bon compositeur pour écrire la musique et un assez bon joueur de cornemuse, piano, cymbales et flûtiau pour l’interpréter ensuite).

Il est finalement assez rare de maîtriser toutes celles qui peuvent faire naître un livre. Car si nous savons écrire, si nous pouvons apprendre à nous servir de logiciels de mise en page, ou même de Photoshop pour concevoir une couverture, nous aurons rarement les compétences pour fabriquer notre papier. Et ce, même si nous apprenons à relier nos pages après les avoir assemblées. On peut également avoir envie, et non besoin, du regard d’un autre pour créer une couverture, pour s’assurer que le manuscrit “tient la route” tant par sa logique que par sa forme, par son orthographe et sa grammaire.

Je vois donc les choses comme un film où différentes fonctions, différents postes, sont à pourvoir.

Et où le réalisateur peut choisir de distribuer chacun de ces rôles à lui-même ou à d’autres.

Comme le réalisateur, l’auteur dit “autoédité” est le véritable créateur, car c’est celui qui a la vision d’ensemble, le seul qui du début jusqu’à la fin, donne le tempo, fait les choix stratégiques, et les assume.

Dans mon cas, je suis l’auteur, le correcteur, le maquettiste, le créateur de livre numérique, et l’éditeur. Je peux décider de m’entourer ou pas de bêta-lecteurs, de correcteurs, d’illustrateurs, d’imprimeur, de distributeur, de diffuseur.

Mais je reste le seul à décider in fine de chaque choix.

Je suis le réalisateur de mon livre.

Je suis réalisauteur.

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