Nephilim Quintessence, nouvelle incarnation

Nephilim Quintessence, nouvelle incarnation

Nephilim Quintessence, nouvelle incarnation

En ces temps-là, quand les hommes se multipliaient après qu’Adam eut quitté le Paradis, les Nephilim marchaient sur la terre.

Genèse 6:4

Dans mon panthéon personnel des jeux de rôle, Nephilim occupe une place à part.

Publié pour la première fois dans les années 1990 alors que je m’enhardissais à rejoindre un groupe de joueurs inconnus dans une association dont plusieurs devinrent des amis, il a incontestablement ce petit goût de madeleine de Proust qui me ramène à mes premières années d’étudiant. Je le concède volontiers.

Mais Nephilim est surtout une chimère vraiment réussie entre un univers fantastique contemporain plein de mystères et une ambiance occulte et poétique presque mystique dont les références sont ancrées dans la culture européenne, et française en particulier. Une rareté absolue à l’époque, où la production était très largement dominée (pour ne pas dire écrasée) par des univers d’inspiration anglo-saxonne. Seuls deux autres jeux avaient pu entrer dans cette catégorie des pépites poétiques : Maléfices, et Rêve de Dragon.

Comme le premier, il traite de créatures fantastiques, de sortilèges et de malédictions, d’alchimie et de combats occultes, et comme le dernier, il pousse les joueurs à se poser la question de l’aspect symbolique du personnage que l’on incarne.

D’alchimie, il en est vraiment question quand on se penche sur ce jeu atypique et presque inclassable, tant les ingrédients qui le composent ont été dosés avec précision et surtout tant la cohérence obtenue est extraordinaire quand on songe au syncrétisme dont elle résulte.

Jugez-en plutôt : si on mélange récits bibliques, créatures fantastiques, magie, guerres secrètes, quêtes ésotériques, légendes arthuriennes, occultisme du XIXe siècle, Nostradamus, Akhénaton, dinosaures, Atlantide, templiers, et esprits incarnés dans des humains dans un même creuset, on peut aussi bien obtenir une chose informe comme le Da Vinci Code que la magnifique trame de Nephilim.

D’alchimie, il en est encore question quand on aborde cet univers foisonnant, parfois complexe au point d’en rebuter le profane. C’est ainsi que Nephilim a une réputation de jeu complexe, presque autant que le monde de Glorantha pour Runequest.

Et pourtant, le pitch est assez simple.

Il peut être résumé en une phrase, en quelques mots, en un paragraphe ou en une page, comme dans la cinquième édition qui vient de paraître grâce à un financement participatif. Je trouve d’ailleurs que le bon compromis, c’est le paragraphe. Je le reproduis ici pour vous donner un petit aperçu.

Dans Nephilim Légende, le jeu de rôle de l’occulte contemporain, vous jouez un Nephilim, un esprit antédiluvien, composé d’un Pentacle de Feu, d’Air, de Terre, d’Eau et de Lune. Inspiré par la connaissance ésotérique des mystères du monde, votre Nephilim pratique les Sciences occultes comme la Magie, la Kabbale ou l’Alchimie. Vous recherchez l’harmonie suprême que certains Nephilim appellent l’Agartha. Depuis la catastrophe du Déluge, vous vous êtes incarné épisodiquement dans des êtres humains, vos Simulacres. Vous gardez jusqu’à aujourd’hui une mémoire partielle de ces époques passées. Depuis les années 90, vous et vos frères vous êtes réincarnés massivement. Entre les Grands Plans des sociétés secrètes, vos ennemies jurées, l’Apocalypse ou l’émergence d’Arcadia, une cité occulte universelle, il y a de multiples raisons à cela. Votre Nephilim devra poursuivre son initiation selon les symbolismes attachés à son élément dominant. Vous pourrez aussi vous intéresser aux jeux subtils des Arcanes Majeurs, ces familles Nephilim qui cherchent à vous adopter afin de vous initier à un chemin particulier vers l’Agartha. Quelle sera votre position vis-à-vis des humains ? Simples corps à manipuler ou, au contraire, profanes à initier aux beautés du monde magique ? Avez-vous fondé au cours des siècles, avec d’autres Nephilim, une fraternité occulte détentrice d’un des nombreux secrets majeurs du monde ésotérique ? Est-ce pour trouver le trésor des Templiers ? La Toison d’or, le Graal, le message secret des tableaux de Léonard de Vinci, le Sidh légendaire des Celtes, le Dragon des Nibelungen, les Pommes d’or du jardin des Hespérides ou surtout découvrir la vérité sur Arcadia ? Lutterez-vous contre les sombres complots des mortels Templiers ou des subtils Rose+Croix ? Préférerez-vous devenir un expert de la Kabbale ou de l’Alchimie ? Parcourrez-vous le monde à la recherche du royaume caché de la Cité des Vertiges et de ses prétendus douze sages blancs ? À vous de décider de cela et de bien d’autres choses avec Nephilim Légende !

Un nouveau Simulacre pour les règles

Qui dit nouveau jeu dit souvent nouveau système de jeu.

Car un jeu de rôle gagne souvent sa saveur grâce à la façon dont ses règles permettent de déterminer échecs et réussites, rebondissements et complications dans le cours de la narration. C’est en tous les cas comme cela que je vois les règles d’un jeu de rôle au moment où je rédige ces lignes, ce qui n’était pas forcément le cas dans mes plus jeunes années.

Sur ce plan, Nephilim change sans vraiment changer.

Nous retrouvons les dés de pourcentage, le cœur du système.

Mais il n’y a plus vraiment de compétences, qui ont été remplacées par des Vécus, regroupant des domaines variés d’actions et de connaissances.

Les Sciences occultes, qui font tout le charme du jeu (ah ! Les noms si évocateurs des Invocations de Kabbale, comme Ceux qui rampent et qui grignotent ou les Formules alchimiques telles le Navigateur des Lions écarlates…), changent également, même si leur habillage reste le même.

On reste en terrain connu. Mais quelques petits ajustements nous rappellent que nous sommes dans une nouvelle incarnation. L’Effet Rosenkreutz, par exemple, vient compliquer la tâche des plus puissants Nephilim, ou des plus imprudents.

Le système est donc sensiblement le même, un système classique, bien éprouvé. Il paraîtra peut-être un peu trop classique à ceux qui ont découvert les systèmes dits narratifs plus récents, comme FATE ou Dungeon World/Apocalypse.

Mais il marche bien, il est facile à prendre en main. Il ne demande pas de savants calculs ni de jeter des brouettes de dés.

Le petit bémol que je puis émettre concerne l’adaptation des anciens personnages.

Pour jouer votre Nephilim fétiche dans Quintessence, vous allez devoir faire quelques choix, notamment entre le nombre d’incarnations (et les époques d’incarnation elles-mêmes), et la puissance de ses Kâ-Éléments. En effet, le système de choix des incarnations passées de cette cinquième édition, parfait pour créer de nouveaux personnages, est sensiblement différent des précédents. Plus simple et plus complexe à la fois, il implique de créer une toute nouvelle enveloppe pour votre alter ego de papier. Car il est impossible de recréer un Nephilim ayant eu de nombreuses incarnations et un fort Kâ-Élément en même temps, ce qui était par contre faisable dans la quatrième édition.

La création d’un nouveau personnage est donc longue, la recréation d’un ancien est encore plus longue car il faut bien étudier toutes les possibilités pour respecter l’esprit du personnage ancienne mouture.

L’âme progressant vers l’Agartha

Nephilim est donc né dans les années 1990, mais il a su évoluer.

D’abord, comme vous avez pu le constater, cette cinquième édition (baptisée Légende ou Quintessence, c’est selon) met un peu plus l’accent que les autres sur l’accessibilité aux nouveaux venus dans l’univers du jeu. Les concepts principaux sont bien expliqués, et on entre pas à pas dans la richesse du monde occulte fictif, un peu à la manière d’une initiation. Les pitchs du jeu en une phrase, un paragraphe, une page, sont véritablement là pour ça. Mais tout au long du livre, les divers concepts sont abordés de façon à ne pas rebuter les néophytes. Même si tout cela foisonne de détails.

D’ailleurs, les auteurs ont eu la bonne idée de faire un petit historique du jeu depuis sa première édition, afin de placer l’actuelle dans son contexte.

Et si les profanes qui voudraient découvrir le jeu sont guidés, les vieux Initiés comme moi y trouvent aussi leur compte.

Car l’évolution du monde occulte est sensible. Beaucoup de choses changent pour les Nephilim, et leurs repères sont bouleversés au point que même les grands connaisseurs du jeu vont avoir à redécouvrir une ambiance très différente.

Les années 2020 qui sont le théâtre du jeu sont marquées par la technologie et son empreinte sur l’existence des créatures millénaires que sont les Nephilim, sur leurs luttes entre eux et contre les sociétés secrètes humaines qui cherchent à les contrôler ou à les détruire, et surtout sur la texture même du monde magique. Le ressort déjà utilisé dans les précédentes éditions du décalage entre la magie qui constitue l’essence même d’un Nephilim et le monde moderne, profane et incrédule, prend une nouvelle dimension dans notre époque où se côtoient fake news et platistes, sceptiques et complotistes. Ce fossé grandissant, celui de l’enchantement, du désenchantement, ou du réenchantement du monde, est un thème qui m’est particulièrement cher. Il traverse beaucoup de mes univers préférés de jeu (depuis Pendragon jusqu’à Rêve de Dragon, Vampire, Mage, Nephilim, ou même Runequest), mais aussi mes propres écrits et mon monde intérieur. Il trouve une nouvelle vie dans la façon dont Nephilim s’empare du phénomène. La technologie et l’hyperinformation brident la magie, le mysticisme, les créatures fantastiques, mais il se produit aussi un mouvement inverse où des bribes d’un Autre Monde aux accents celtiques se créent en marge (la mystérieuse cité d’Arcadia, dans le jeu).

Le thème de l’initiation, de la progression, des personnages, prend dans Nephilim une dimension plus psychologique que dans les autres jeux de rôle où chaque gain d’expérience ou de niveau est simplement une occasion de devenir plus puissant, plus fort, plus compétent.

Ici, il est surtout question de la compréhension intime par les Nephilim de leur nature profonde, de celle du monde, de la magie. Ils deviennent peu à peu qui ils sont, ou qui ils étaient avant la Chute (oui, il faut quand même que la Bible s’en mêle) de leur royaume originel atlante (parce que quand même, la Bible c’est bien, mais l’Atlantide, ça en jette).

Il s’agit d’une façon d’envisager l’évolution des personnages sous un angle différent.

Une véritable progression, dans le sens de progrès, mais non uniquement un progrès technique.

Plutôt un progrès initiatique. De la meilleure harmonie que les Nephilim peuvent trouver en eux et dans le monde.

En ce sens, comme Rêve de Dragon, j’ai la conviction que Nephilim est un jeu qui pousse ceux qui y entrent à s’interroger sur le sens de l’utopie.

J’y vois une sorte de résistance artistique et fictionnelle à cette mode des dystopies qui inonde les imaginaires de notre société depuis maintenant une vingtaine d’années.

Les dystopies, qui décrivent des mondes toujours sous le joug d’une tyrannie quelconque, ont pu servir à dénoncer les travers de notre société, à les exposer dans toute leur cruauté, à nous faire prendre conscience de ce qui pourrait nous arriver, ou de ce qui nous arrive déjà.

Mais il existe dans Nephilim cette idée que la “réalité” se rebiffe. Que la vie trouve toujours un chemin, comme dirait un célèbre acteur dans un film de dinosaures.

Notre monde, le monde réel, est fait de contradictions permanentes, de paradoxes et d’oxymores. Nephilim reflète cela jusque dans son monde fictif, l’intègre et le pousse plus loin.

Car oui, le monde est pourri. Mais il ne suffit pas de le dénoncer pour que cela change. Dans un monde qui ressemble de plus en plus à un mauvais remake de Blade Runner, abreuvés que nous sommes de toutes ces œuvres qui nous mettent en garde, depuis Hunger Games jusqu’à Altered Carbon, nous aurions eu largement de quoi réagir. Mais nous ne l’avons pas fait.

Pourquoi ?

Parce que dénoncer ne mène pas à grand chose.

Ce n’est pas suffisant.

Il faut savoir vers quoi nous voulons aller.

Et c’est là que les utopies sont utiles.

Je crois même profondément que nous en avons besoin. Plus encore à notre époque.

Réenchanter le monde, c’est penser ce qui pourrait remplacer la dystopie que nous vivons. Penser à ce que nous voulons plutôt qu’à ce que nous ne voulons pas ou plus.

C’est un peu ce que propose Nephilim dans son univers. Les créatures magiques que sont les personnages incarnés par les joueurs sont empêtrées dans le monde tel qu’il est devenu. Leurs sortilèges attirent l’attention, leur être même (les transformations physiques de leur métamorphe élémentaire) peut être un danger pour leur sécurité, ils sont pourchassés. Et pourtant, une chose extraordinaire se produit. Dans le monde, au sein des mégalopoles des humains, certaines rues, certains quartiers, parfois de simples parcelles de bâtiments, se transforment en des sanctuaires où tout redevient possible pour eux, où la technologie ne peut les atteindre, où leur magie retrouve sa splendeur des millénaires passés. Et ces petits morceaux de villes se connectent les uns aux autres pour former une Cité mystique. Arcadia.

Il y a là de quoi reprendre espoir et cette seule lueur dirige leurs efforts vers un idéal.

Comme tout idéal, il est appelé sans doute à être moins ou plus que ce qu’ils avaient imaginé.

En tous les cas à être autre.

Mais il est porteur d’un changement.

Chacune des cinq incarnations de Nephilim pousse ce concept de la Quête, de l’avancée spirituelle, de la progression vers une plus grande réalisation de soi, vers un Idéal. Il y a le Grand Réveil, l’Apocalypse, la Révélation. Il y a maintenant Arcadia.

Je trouve un grand plaisir à me lancer dans un imaginaire où il peut encore exister un espoir.

Cela m’aide peut-être à progresser moi-même dans la construction de ma propre utopie quotidienne, de ma propre Quête vers l’Agartha, celle de mon Humanité.

Le Secret caché au cœur du Labyrinthe du Serpent à Plume

Comme dans toute Quête, il vient enfin un moment où l’on trouve l’Illumination.

Parfois même ce n’est pas l’Illumination que l’on cherchait au début. Ou pas celle-ci, précisément. Souvent, on trouve ce que l’on ne cherchait pas. Et l’on découvre que c’était pourtant ce que l’on cherchait depuis le début.

Ce genre d’épiphanie survient à des moments particuliers dans l’année.

Les traditions ésotériques sont pleines de calculs permettant de choisir la date et l’heure précise qui sera le bon moment pour entreprendre une opération magique ou une quête.

Vous avez de la chance.

Car sur d’écaille & de plume, en cette période du Solstice d’Hiver, vous pouvez prétendre à découvrir un véritable Trésor de Sapience.

Avec l’accord des Grands Commandeurs Élémentaires, les Écrivains de Sable et de Voiles, Souverains de Mnémos, j’ai le plaisir de vous offrir une feuille de personnage au format pdf modifiable de Nephilim Légende.

Un jour, peut-être, je vous présenterai mon personnage fétiche, Sekhmet, Nephilim de la Terre au métamorphe de Sphinx.

Vous pouvez donc créer facilement vos personnages sur ces fiches réalisées à partir des pdf originaux du livre de règles en remplissant les cases sur votre ordinateur ou votre tablette. Et imprimer ce dont vous aurez ensuite besoin.

Ne me remerciez pas, c’est mon Pentacle élémentaire qui a tout fait.

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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