Mémoires rôlistes d’un vieux briscard, chapitre 1 : Jeux & univers fétiches
Pourtant, plus de trente ans après, ma tribu de rôlistes (ainsi nous nommons-nous nous-mêmes) est devenue banale, voire sexy. Une série à succès prend même des geeks dans mon genre comme héros et fait du jeu de rôle une base de son intrigue, à savoir Stranger Things, qui tourne autour de monstres dignes de Donjons & Dragons.
Les ados des années 1980 sont devenus parents, et ont fait infuser la culture de leurs histoires de trolls et d’elfes dans toute la société. Ils ont même partagé cette culture avec leurs épouses, leurs enfants.
De plus jeunes rôlistes sont nés.
Et je suis devenu, comme tous ceux de ma génération, un vieux de la vieille. Un vieux briscard des tables de jeu. Presque un grognard de la Grande Armée de D&D.
Durant toutes ces années, j’ai évolué avec des jeux différents, exploré des univers variés, incarné des personnages divers.
J’avais envie de parler de certains d’entre eux, des souvenirs que j’en ai, et de ce que nous pouvons en faire aujourd’hui, dans les années 2020. Cette série d’articles est donc à la fois une biographie ludique et une incitation à découvrir ou revisiter des pépites vintages.
Dans ce premier chapitre, je vais parler de ces jeux qui sont restés dans mon panthéon personnel. De ces univers qui méritent qu’on s’y attarde, qu’on les explore, qu’on y revienne. Bref, je vais vous parler de mes jeux fétiches.
RuneQuest/Glorantha
Quand on commence le jeu de rôle, on le fait souvent dans un univers médiéval teinté de magie qui s’inspire beaucoup du Seigneur des Anneaux, cette œuvre monumentale qui est désormais bien connue, même des moins geeks d’entre nous. Et l’écrasante majorité des univers de jeu de rôle médiévaux fantastiques sont des variations de cette même base. À tel point qu’on peut parfois les trouver interchangeables. Il y a la Quête, le méchant nécromancien, les elfes scintillants et les buveurs nains, le hobbit au pied léger et à la bonhommie simple, le vieux magicien et le guerrier solide. Le prêtre est plus un templier qu’un curé de campagne, et fait souvent office de guérisseur. Bref, tout ça est très archétypal. Un peu trop, parfois.
Voilà pourquoi l’univers de Glorantha sort du lot. Il est totalement différent, tout en ayant un vocabulaire commun.
Ici, il est plutôt question d’un monde antique-fantastique, et non plus médiéval-fantastique.
Glorantha est un monde fouillé, riche, et très complet, qui peut parfois faire peur tant il est développé. On y plonge non pas dans des civilisations basées sur notre moyen âge, mais plutôt au cœur de notre antiquité : grecque, romaine, égyptienne, mésopotamienne, celte, scandinave, voire indienne d’Inde, ou encore néolithique. Mais cette ambiance n’est pas la seule différence. Le véritable changement est dans le parti-pris d’un monde sacré, imprégné de la magie des mythes. Dans Glorantha, les Déesses et les Dieux ont forgé la réalité par leurs actes mythiques, et les Mortels vivent dans un monde dont la trame elle-même est fondée sur ces mythes. Chaque culture révère ses propres divinités dans une vision différente mais complémentaire de cette puissante création magique, et le monde en est constitué littéralement. Ainsi, vénérer un dieu, c’est endosser son rôle, c’est prolonger ses actions dans le monde qu’il a construit, c’est maîtriser les Runes qui lui confèrent ses pouvoirs, et en agissant en harmonie avec les valeurs qu’il porte, c’est accéder à une fraction de ses capacités pour maintenir la création ou en changer le cours.
Il est ici question de jouer des personnages qui sont ou seront des Héros, au sens grec du terme : des porte-étendards de leur peuple, des instruments de leurs divinités, et par là même des hérauts au service de certaines valeurs. Si les anciennes versions du jeu donnaient naissance à des personnages un peu faibles lorsqu’on mettait en route les mécaniques des lancers de dés, la nouvelle édition, assez récente, permet vraiment d’incarner ces puissants demi-dieux qui étaient, j’en suis certain, le véritable objectif de Greg Stafford lorsqu’il imagina ce monde.
Car Glorantha est un monde d’exploits mythiques, pas de petites escroqueries mesquines. Même le vol d’un troupeau de vaches prend là des allures de geste légendaire, car ce troupeau est le symbole d’une alliance entre les déesses de la Terre et les Mortels, et sa disparition peut donc contrarier une puissante divinité, mettre en péril les récoltes, faire dépérir le bétail restant, ouvrir la porte aux maladies. Qu’on pense seulement aux exploits de héros comme Cúchulainn l’Irlandais : toute la légende tourne autour d’un bœuf sacré qui offre la prospérité au peuple qui la possède, et par là offre la légitimité au souverain qui le dirige.
Les enjeux dans Glorantha sont ni plus ni moins que la trame même de la réalité.
Et les Héros sont vraiment des héros. Bigger than life, mais en même temps si humains, comme dans les légendes, les vraies, de notre propre monde.
Greg Stafford était un auteur prolifique, mais aussi un homme engagé spirituellement dans le chamanisme. Et cet animisme a quelque résonance en moi.
Voir le monde comme un tissu de mythes, c’est le réenchanter, c’est donc lui donner une valeur en dehors de notre seule Humanité, c’est remettre notre espèce à sa juste place : un maillon d’une chaîne plus vaste, bien plus vaste.
C’est aussi une part de l’attrait de ce monde, pour moi.
Le défaut du jeu ? Un système lourd, surtout pour les combats, qui à mon sens fait perdre beaucoup du dynamisme que l’on serait en droit d’attendre d’un tel univers héroïque.
Mais il existe des alternatives de ce côté-là, notamment avec Cœur de Runes, une mécanique beaucoup plus narrative qui en plus colle vraiment aux fondements du monde de Glorantha. J’en parlerai d’ailleurs plus en détail bientôt.
Pendragon
Pour qui pratique le jeu de rôle et apprécie la geste arthurienne, connait Excalibur et les légendes celtes, Pendragon est un vrai trésor ludique autant qu’une compilation érudite. Greg Stafford, encore lui, y mit tout son cœur en ciselant un cadre cohérent puisant aux différentes sources littéraires, celtes et médiévales, qui ont forgé cet autre mythe fondateur de notre propre civilisation.
Dans Pendragon, on incarne des chevaliers qui pourraient très bien après moult aventures, se retrouver à siéger à la Table Ronde avec le Roi Arthur, qui rêvent de se mesurer en tournoi avec Sire Lancelot du Lac, ou de se battre pour les couleurs d’une Dame dont la magie n’a d’égale que sa beauté. On peut aussi jouer un enchanteur, ou mieux, une enchanteresse, comme ce fut mon cas.
Là encore, il ne s’agit pas d’un cadre médiéval lambda, mais bien de la geste arthurienne, avec tout ce que cela comporte.
Et les mécaniques du jeu sont taillées pour. D’abord, ce système des passions et des valeurs, précurseur en son temps, qui permet de s’intéresser aux valeurs défendues par le chevalier qu’on incarne. Sera-t-il chaste comme Galaad ou plus séducteur comme Gauvain ? Sera-t-il inspiré par l’Amour courtois qu’il porte à la Dame dont il porte fièrement les couleurs pour accomplir des exploits chantés par les troubadours, ou bien en sera-t-il indigne et devra-t-il se racheter ?
Ensuite, le système des réussites critiques et des scores héroïques fonctionne très bien.
Enfin, pour qui choisit de jouer un «magicien», le jeu a une saveur qui rappellera de façon amusante les répliques de Merlin dans le film Excalibur de John Boorman.
Le défaut du jeu ? Je n’en vois pas.
Rêve de Dragon
Pourtant, les Anglais n’ont pas été les seuls à proposer des univers ludiques exceptionnels. L’un des plus beaux est sans conteste français. Rêve de Dragon, créé par Denis Gerfaud, est un bijou unique.
Dans ce jeu, le monde, médiéval fantastique, n’est, littéralement, qu’un rêve de dragons.
Les personnages sont juste des songes, comme tout le reste de la réalité qui les entoure. Quant aux magiciens, leur seule (mais fondamentale) différence, est d’être conscients d’être des songes, et d’avoir acquis la capacité de contrôler en partie les rêves du Dragon qui leur donne vie. Cela leur offre le pouvoir d’influencer le rêveur, donc de modeler certains aspects de la réalité, mais les expose aux dangers terribles des cauchemars, voire du réveil, qui sonnerait leur propre mort. Une mort cependant toute relative, car comme nous, un Dragon qui se rendort a une chance de se souvenir en partie de ses rêves précédents, et donc de rêver de la même créature… en un peu différent. Ainsi, un personnage qui meurt dans Rêve de Dragon va renaître lors du scénario suivant, mais avec un autre métier, avec d’autres talents, d’autres pouvoirs, et pas toujours tous ses souvenirs.
Rêve de Dragon installe donc une ambiance, une façon de jouer. On se retrouve facilement à entrer dans des quêtes un peu surréalistes, comme retrouver la recette d’un gâteau si succulent qu’il est capable de provoquer un rêve particulier chez les dragons, et donc de créer une magie puissante. Tout y est plein de poésie, et souvent d’humour. Les monstres y ont des noms amusants, comme le darquoine (dark one) ou la quilleurbist (killer beast), les livres des érudits ont des titres à base de jeux de mots. Le second degré et la bienveillance sont inscrites dans les gènes de l’univers. Et ça fait du bien.
Le défaut du jeu ? Là encore, un système très lourd, beaucoup trop lourd. Je ne comprends d’ailleurs pas l’obstination de Denis Gerfaud à exiger le maintien de ce système beaucoup trop simulationniste lors de la réédition qui a été faire il y a 2–3 ans. Cela, à mon sens, dessert complètement le propos, car si le fond de l’univers est novateur, la forme du système est vraiment ancrée dans une façon de jouer qui n’est plus du tout actuelle. Mais il est possible qu’un jour je publie mon adaptation de FATE à cet univers… si vous êtes nombreux à le demander…
Néphilim
Le deuxième jeu français qui entre dans la courte liste de mes jeux fétiches est là encore une affaire d’ambiance. Néphilim est le premier jeu d’occulte contemporain à avoir vraiment posé le genre. Il s’agit de jouer non pas des humains, mais des êtres élémentaires qui ont été, depuis des millénaires, forcés de s’incarner dans des êtres humains après la chute de l’Atlantide. Constitués de cinq énergies magiques, les Kâ-Éléments, ces êtres qui ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes sont obligés de vivre en parasites au fil des siècles dans différents corps, qui deviennent des réceptacles de leur puissance résiduelle. D’ailleurs, ces êtres immortels mais fragiles essaient parfois de créer une symbiose avec leur hôte humain. Pourtant, ils sont chassés par des sociétés secrètes humaines qui les combattent depuis des temps immémoriaux, et dont la plus connue est celle des Templiers.
Quelque part entre Highlander le film (et la série), et le Da Vinci Code…
Ça vous paraît déjà riche ? Sachez que je n’ai brossé là qu’une infime partie de la complexité de ce monde où les références historiques, artistiques, ésotériques, philosophiques sont innombrables et arrangées dans une mythologie cohérente. On y retrouve une magie qui me paraît être la plus évocatrice, la plus poétique et la plus réaliste qu’il m’ait été donné de lire dans un jeu de rôle, basée sur les traditions et les systèmes réels de l’occultisme. Par exemple, la kabbale, qui est une tradition ésotérique réelle prenant sa source dans les textes bibliques du judaïsme, est ici la science de l’invocation de créatures magiques élémentaires. Ces invocations sont par exemple : Ceux qui rampent et qui grignotent, ou bien Les papillons de noirceur, interstices du puits sans fin. Quant aux formules de l’alchimie, elles peuvent être La calcination des souvenirs vaporeux, ou La rectification des certitudes du somnambule.
Au fil des éditions, la toile de fond du jeu a évolué, pour suivre les évolutions de notre société et l’intrigue globale prend en compte des problématiques très variées. De plus, Néphilim est le seul jeu de ma connaissance où la progression des personnages se fait sur leur recherche spirituelle, leur quête de sens, leurs découvertes sur leur être profond. Le but ultime des Néphilims étant une forme de transcendance vers un retour à leur forme originelle, le jeu n’est pas qu’une quête de pouvoir, mais bien un chemin dramatique beaucoup plus riche de potentialités.
Le défaut du jeu ? Être intimidant pour les novices qui voudraient s’y frotter. Mais franchement, ça vaut l’effort.
Vous pouvez d’ailleurs télécharger ici une fiche PDF
modifiable que j’ai conçue à partir de l’officielle, avec l’accord des auteurs.
Vampire : The Masquerade
Si l’on parle de jeux contemporains dans lesquels on n’incarne pas des humains, il est impossible de ne pas penser à Vampire : The Masquerade. Le jeu de Mark Rein-Hagen était vendu au départ comme un jeu d’horreur intérieure, je le qualifierais plutôt de jeu philosophique. Bien entendu, comme tous les jeux de rôle, il a son lot de combats contre des monstres et certains de ses adeptes font surtout étalage des pouvoirs de destruction de leurs vampires préférés. Mais pour moi c’est surtout la tentative ludique d’adapter les dilemmes du vampire Lestat d’Anne Rice.
Ici, on joue des vampires, qui ont entre quelques années et quelques millénaires d’existence, avec des pouvoirs surnaturels, mais surtout aux prises avec deux très très gros problèmes : d’abord leur Bête intérieure qui les pousse à boire du sang humain pour non-vivre et qui peut leur faire commettre des atrocités et leur faire perdre leur Humanité, ensuite une guerre secrète qui oppose depuis des éons les plus anciens parmi les anciens vampires, devenus des monstruosités, et les plus jeunes d’entre eux, ayant encore conservé une certaine connexion avec le monde des humains. On joue ici des Highlanders qui doivent voir leurs proches mourir mais en plus peuvent eux-mêmes être la cause de leur destruction par la faute de leur Soif inextinguible.
Et des complots séculaires s’emboîtent dans des complots millénaires. Peu à peu, les vampires perdent la mesure de ce qui est bien ou mal. Ils sacrifient leurs proches, sacrifient leur âme, morceau par morceau. Le temps qui passe, leur mort lente qui se dissout dans leur non-vie perverse.
C’est parfait pour jouer des intrigues de palais, mais aussi des drames, le tout enveloppé de légendes noires.
J’ai beaucoup, beaucoup joué à Vampire, et franchement c’est un vrai bonheur.
Le défaut du jeu ? Il y en a deux : le système, là encore un peu lourd et daté, qui force à lancer des brouettes de dés pour chaque action un peu tendue. Et surtout le background officiel qui est souvent un peu «too much» mais aussi un carcan très difficile à voir dans sa globalité, car dispersé dans des centaines (je n’exagère qu’à peine) de suppléments qu’il faut soi-même recouper. C’est sans doute très sympa quand on a 25 ans, ça l’est moins quand on en a le double…
Werewolf: The Apocalypse
Mais il y a un second jeu du World of Darkness des années 1990 qui vaut largement le coup de se pencher dessus, et c’est le petit frère de Vampire : Werewolf. On y incarne les ennemis jurés des vampires, les loups-garous. On pourrait croire qu’on joue les gentils de l’histoire, mais c’est plus compliqué que ça. Les Garous sont eux aussi des êtres inhumains, même s’ils sont plus près des mortels. Déjà, ils ne sont pas éternels. Ensuite, ils ont eux aussi deux gros problèmes. D’abord leur propre bête intérieure, qui exacerbe leurs passions. Ils sont en quelque sorte «plus humains que les humains». Ils ressentent plus fortement les émotions, ont du mal à gérer la frustration, et cette colère qui gronde en eux lorsqu’ils voient les dégâts infligés à la Nature au sens large. Ensuite, ce sont des êtres perdus entre deux mondes. Entre le monde animal des loups et le monde humain, entre le monde matériel et le monde des esprits, entre l’harmonie et la violence.
C’est parfait pour jouer des quêtes spirituelles, pour explorer des drames humains, pour questionner les travers intérieurs comme ceux de la société. Le côté tribal de la société garou peut aussi donner lieu à des intrigues politiques, très différentes de celles de Vampire. Et une campagne mêlant les deux côtés, avec chaque joueur incarnant un Vampire et un Garou, serait carrément géniale.
Le défaut du jeu ? D’abord le système puisque c’est le même que celui de Vampire. Puis le background trop éclaté, même si c’est beaucoup moins prégnant pour les Garous que pour leurs ennemis à canines pointues.
FATE
Il y a quelques années, je découvrais par hasard le système FATE. Je vous en ai déjà parlé, car c’est le système qui m’a permis de faire vivre une campagne de jeu basée sur un paradigme de sérié télé américaine, The Lost Tribe. Vous y retrouverez d’ailleurs mon goût pour les loups-garous, puisque 4 des 5 PJ étaient des Garous, la cinquième étant une chamane qui s’ignore.
FATE n’est pas vraiment un univers, c’est un système générique.
Pendant longtemps, j’ai peu goûté les systèmes génériques. Les BASIC et autres GURPS me semblaient faire l’impasse sur un principe fort : system matters. Par cet aphorisme anglo-saxon, il faut comprendre que les mécaniques de jeu influencent en grande partie la façon de jouer, et qu’un bon système est celui qui prend en compte les particularités de l’univers pour les faire entrer dans son horlogerie interne. Un exemple flagrant est Qin, avec ses dés : un dé Yin, un dé Yang, les deux étant en équilibre quand les chiffres indiqués par chacun d’eux sont les mêmes, ce qui indique un momentum et provoque des résultats narratifs comme ludiques. Un système générique, par nature, ne peut avoir une telle adéquation avec son univers.
Sauf.
Sauf avec FATE.
Le principe de FATE (tiens, le SRD
version française) est d’être au croisement entre la narration et la simulation, les deux faces pour lesquelles des générations de rôlistes se sont déchirées depuis l’apparition de D&D. Son outil le plus central est l’Aspect, une phrase, une simple phrase, qui a valeur d’axiome ludique, et qui peut provoquer un effet dans la résolution d’une action.
Avec ce seul et simple mécanisme, il est possible de coller à n’importe quel univers, avec presque autant de pertinence qu’un système dédié.
Et la deuxième force du jeu est que sa mécanique est fractale. Un personnage est défini par des aspects, des compétences, des extras (des aspects souvent, qui modifient des points de règles). Mais tout, dans FATE, peut être défini exactement comme un personnage. Une épée, un manoir, un véhicule, un pouvoir. Tout. Il suffit donc de connaître très peu de règles pour ciseler un corpus qui colle parfaitement à un univers donné.
J’ai donc parfois adapté certains systèmes avec FATE. Notamment (c’est la deuxième fois que j’en parle dans l’article, je sais) Rêve de Dragon.
Le défaut du jeu ? Les dés FATE ont tendance à aplatir le résultat, qui tend souvent vers une moyenne. Mais il existe des variantes dont nous parlerons peut-être un jour dans un article dédié.
Sans règles
Au fil de mes expériences ludiques, et d’ailleurs assez tôt, j’ai été confronté, comme Meneur ou comme Joueur, à des scénarios qui étaient prévus pour se jouer sans règles de jeu, sans mécanique autre que la décision de metteur en scène du MJ sur la proposition des PJ. Nous parlerons plus en détail de ces scénarios dans le prochain épisode, mais il est tout de même important de savoir ce qu’implique le fait de jouer sans règle précise.
En fait, jouer sans règle n’existe pas. Car il en existe bien une. Une seule.
C’est à la Meneuse de décider si une action réussit ou non, et comment, en concertation avec les Joueurs, avec comme seul guide l’intérêt dramatique.
Le scénario qui se joue ainsi doit avoir bien borné son univers, ou au contraire l’avoir ouvert d’emblée. En général, il s’agit de huis clos, en one-shot, c’est-à-dire sans suite possible, et avec des personnages dont les capacités, les pouvoirs, les talents, sont plus ou moins détaillés dans le background, afin que chacun puisse savoir ce qu’il est capable ou non de faire.
Ensuite, cela implique une grande confiance réciproque entre les Joueurs et la Meneuse. D’un côté il s’agit de ne pas dénaturer le scénario (ce que les règles empêchent car elles limitent les actions possibles). De l’autre il s’agit de ne pas brider l’imagination des Joueurs, de leur laisser suffisamment de latitude pour faire vivre une histoire palpitante et amusante.
C’est un équilibre délicat. Mais quand il est atteint, il permet de vivre des parties inoubliables.
Personnellement, au moins deux de mes souvenirs les plus marquants de jeu de rôle sont liés à de tels scénarios.
Le point commun ?
Je me suis volontairement limité, car j’aurais pu parler de Qin, de Guildes, de l’Appel de Cthulhu, mais il me semblait plus intéressant de se concentrer sur le cœur du cœur. Cela montre d’ailleurs qu’il existe quelques ressemblances dans les jeux dont nous venons de parler.
D’abord des jeux qui posent un monde original, avec une mythologie riche. Et avec des règles qui servent l’immersion dans l’univers.
Ensuite, des jeux qui donnent naissance à des histoires dont le déroulement est plus important que les exploits, même si les exploits peuvent en faire partie.
Des jeux, enfin, qui permettent d’incarner des personnages atypiques, des marginaux, même s’ils sont souvent regroupés en familles, en castes, en tribus, en clans.
Ça tombe bien, c’est précisément le plan de cette trilogie d’articles.
Dans le prochain épisode
Je vous emmènerai donc à la découverte des histoires qui m’ont le plus marqué, que ce soit comme Joueur, souvent, ou comme Meneur. Je vous parlerai alors de ces émotions que certaines aventures ont pu faire vivre en moi. Pour vous donner envie, peut-être, d’interpréter à votre tour ces scénarios ou ces campagnes mythiques.
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L'originel, celui qu’on joue à plusieurs autour d'une table, réelle ou virtuelle, pas celui des jeux vidéos, qui n’a ni les mêmes objectifs, ni les mêmes techniques. ↩︎