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Une seconde édition pour Le Choix des Anges

Une seconde édition pour Le Choix des Anges

Une seconde édition pour Le Choix des Anges

Il est rare de voir des réalisauteurs proposer une réédition de leurs œuvres, alors que la pratique est courante dans le milieu de l’édition traditionnelle. C’est sans doute que nos textes, une fois écrits, commencent une vie propre dans le vaste monde, et que leurs parents les laissent libres de grandir sans les gêner. Sans doute aussi ont-ils en tête les préoccupations des autres rejetons qui demandent eux aussi à surgir du néant.

Pourtant, être un parent bienveillant exige de toujours garder un œil sur sa progéniture, et ce jusqu’à parfois intervenir dans son existence.

Le Choix des Anges est mon deuxième roman, mais c’est le premier que j’ai édité moi-même. Nouveau père, j’ai fait de mon mieux en suivant les conseils que l’on prodiguait autour de moi. Comme presque tous, je me suis tourné vers le sein nourricier prometteur des Amazon. Pourtant, la façon dont mon enfant grandissait me donna peu à peu quelques migraines. Je me suis trouvé rapidement en désaccord avec le modèle éducatif prôné par la vierge guerrière tout autant que je me voyais frustré de ne pouvoir ouvrir les portes de certains milieux à mon livre. Pour couronner le tout, sa forme brochée, si elle le laissait propre et bien élevé, ne me semblait pas à la hauteur.

Alors comme j’ai le pouvoir de changer cela, contrairement à son aîné, Poker d’Étoiles, condamné à vivre sous le joug d’une politique éditoriale que je ne puis renverser, j’ai décidé d’agir.

Le Choix des Anges vient donc de renaître.

Le même texte, à quelque chose près

La fidélité à soi-même est une valeur fondamentale.

Je ne suis pas le même que lorsque j’avais vingt ans, et je ne serai certainement plus le même lorsque j’en aurai soixante, si je vis jusque là. Pourtant, je ne renie pas ce que j’ai été, ni ce que je serai, si je reste fidèle à ce que je crois juste, au moment où je crée.

Je n’ai donc apporté que des corrections mineures au texte achevé en 2018.

J’ai essentiellement changé quelques tournures un peu lourdes au début. J’ai également modifié la forme des dialogues pour leur donner une typographie plus classique, en utilisant les guillemets français et non pas seulement les tirets cadratin. Sur la typographie, j’ai également beaucoup travaillé les espaces fines pour rendre un peu plus harmonieuse la mise en page.

Et surtout, j’ai traqué les coquilles qui restaient.

Il est toujours possible qu’il en reste, car elles ont le don étrange de se dissimuler aux yeux inquisiteurs pour réapparaître sournoisement dès que ceux d’une lectrice ou d’un lecteur se posent sur eux. Malgré mes efforts donc, pardonnez-moi si certaines m’ont échappé une fois de plus.

Un nouvel écrin

Ce qui a changé, par contre, c’est la forme.

La maquette intérieure est basée sur le même principe que j’avais beaucoup travaillé à l’époque, et qui convient parfaitement à l’esthétique que je désire développer dans mes réalisations. Une page aérée, avec des marges confortables, même au prix d’un plus grand nombre de pages. Des en-têtes et pieds de page un peu particuliers, car déportés sur les côtés extérieurs des pages. Une première phrase mise en exergue par un changement de fonte.

Pourtant, j’ai choisi de changer de fonte principale pour le corps de texte, en troquant Sorts Mill Goudy (pour laquelle j’ai toujours une affection sincère) pour Paciencia, dont je trouve les formes plus élégantes, notamment le a. C’est mineur, mais cela permet aussi d’avoir une lisibilité meilleure, même si le nombre de lignes est le même et la taille de police similaire. Cela est dû aussi en partie à la qualité supérieure de l’impression.

J’ai également poussé le vice jusqu’à intégrer des lettrines en début de chapitre et à en modifier la décoration des premières pages avec la figure de l’ouroboros.

Mais les plus grosses métamorphoses sont ailleurs.

D’abord le papier. Crème et non plus blanc, plus doux, presque velouté. Il bave moins, beaucoup moins que le papier d’Amazon, ce qui rend les lettres beaucoup plus nettes, et je crois que le confort de lecture en est transformé.

Et puis, le plus visible, la couverture.

Redessinée pour l’occasion, plus sobre tout en gardant l’essentiel c’est-à-dire l’illustration inspirée de Gustave Doré et la fonte du titre (Aphasia BT), elle est surtout maintenant rigide et non plus souple. La reliure est toujours collée car la couture fait bondir le prix de revient de façon prohibitive, mais, petite attention qui me semble appréciable, un signet blanc permet de retrouver ses marques si on le désire.

Le produit final dégage une impression de solidité et de qualité. Il a la forme d’un ouvrage plus précieux qu’un livre d’imaginaire «classique», ce qui me convient parfaitement.

Cela permet de se démarquer un peu. De souligner le soin pris à l’écriture comme à la réalisation matérielle de l’objet.

Car je crois que l’objet livre aide à entrer dans l’histoire, même si le texte est bien l’essentiel.

Un objet comme une clef vers mes univers

Mais le caractère unique de cette seconde édition papier ne tient pas seulement à son esthétique.

Je l’ai en effet pensé comme une clef.

En me servant de la technologie des QR Codes que l’on voit fleurir partout, j’ai d’abord un peu «dépoussiéré» le principe de la bibliographie, en permettant à celles et ceux qui le désireront de se rendre directement sur la page d’écaille & de plume où est décrit chacun de mes ouvrages. Il suffit donc d’un téléphone pour découvrir chaque titre.

Plus intéressant, je propose là encore à travers un QR Code, de dévoiler les coulisses de l’histoire en ouvrant la porte d’une page cachée du site où l’on peut télécharger une chronologie et des notes d’écriture.

Car si chacune des histoires que j’ai en tête peut s’incarner dans un livre, chaque livre peut devenir une clef vers l’univers plus vaste de mon imaginaire, que je vous propose d’explorer œuvre après œuvre.

Sortir du piège Amazon

La motivation principale de ce changement était cependant de sortir du système d’Amazon, que je trouve délétère.

Malgré sa place de pionnière dans le domaine de l’auto-édition, la société américaine a dévoyé ses propres principes, selon moi. La toute-puissance des algorithmes me déplait fortement, et je crois qu’elle a cessé d’aider les petits auteurs indépendants pour devenir le terrain de jeu de ceux qui peuvent se payer de la publicité ciblée. D’autre part, la politique générale d’Amazon ne rencontre pas mes valeurs de vie.

Sans compter que sur le simple choix de réalisation des livres, et sur leur qualité, on trouve beaucoup mieux ailleurs.

J’ai donc choisi de rapatrier la fabrication de mes livres en Europe, en optant pour Books on Demand, une société allemande qui a pourtant une adresse à Paris. La qualité des livres est supérieure à celle d’Amazon. La qualité de la relation l’est infiniment plus encore. Avec BoD, j’ai le suivi d’une personne unique, à laquelle je peux parler au téléphone si besoin. Je garde toute liberté sur mes choix. Leur système de soumission des fichiers est très simple.

Leur seul problème est la demande très importante et les contraintes sanitaires liées à la pandémie actuelle qui rallongent les délais de fabrication.

Cerise sur le gâteau, travailler avec BoD permet à mes livres d’être disponibles sur les catalogues professionnels des librairies de France et de Navarre. Vous pouvez donc tout à fait commander Le Choix des Anges chez votre libraire préféré, en lui indiquant l’ISBN de cette deuxième édition.

Ainsi, nous soutenons ensemble les libraires passionnés.

Une version numérique également mise à jour

Il n’était pas question de ne penser qu’au papier. Le fichier numérique a donc lui aussi été mis à jour. Le travail y a été également fondamental puisque, après avoir réimporté le nouveau texte corrigé de ses coquilles, j’ai veillé à faire en sorte de coder les espaces fines et les espaces insécables de façon efficace, pour rendre là aussi la typographie la plus impeccable possible.

J’ai repris le code CSS, intégré là aussi les clefs permettant à mes lectrices et mes lecteurs de suivre les liens vers les pages cachées du site.

La nouvelle version numérique est donc un reflet sinon exact du moins fidèle à l’esprit de sa sœur de papier.

Vous pourrez la trouver sur toutes les grandes librairies en ligne à partir du 14/02/2021.

Avant une nouvelle incarnation… vocale

Je rêve que la période difficile que nous vivons puisse devenir le terreau d’un foisonnement créatif semblable à celui que nos aïeux ont vécu il y a une centaine d’années après la Grande Guerre, durant les «années folles». Beaucoup d’autrices et d’auteurs, beaucoup de dramaturges, beaucoup de musiciennes, de musiciens et de cinéastes ont composé, écrit, produit durant l’année maudite que nous venons de vivre.

Ce fut mon cas aussi puisque j’ai achevé le premier jet d’une nouvelle histoire, Fæe du Logis (que j’espère vous pourrez lire dans l’été).

Mais cela a aussi été pour moi l’occasion de trouver à marier l’écriture avec une autre passion — le jeu d’acteur, le cinéma, la technique — grâce à l’idée de réaliser mes propres livres audio.

Alors à tout seigneur tout honneur, c’est au Choix des Anges d’ouvrir le bal.

J’ai commencé l’enregistrement. Le premier chapitre est dans la boîte. Il me reste à en terminer le montage et le mixage, pour voir ce que cela donne. Je voudrais vous présenter cela dans quelques mois. Le temps de parfaire ma technique et de m’assurer que là aussi, l’écrin fait honneur au texte dont je suis fier, et à l’univers qui lui a donné vie. Il s’agit cette fois de rendre une ambiance non plus seulement avec des mots mais avec des sons. Et cela promet d’être passionnant.

Nous en reparlerons très certainement.

Gagnez un exemplaire

Alors pour fêter cette renaissance du Choix des Anges, je vous propose d’en gagner un exemplaire dédicacé, en jouant avec les mots, bien entendu.

Pour cela, il vous suffira de faire deux choses.

Jusqu’au 01/03/2021, rejoignez le Phœnix de la tribu ptérophidienne de mes abonnés en vous inscrivant à la lettre d’écaille & de plume et répondez au premier message avec un texte de 10 000 à 15 000 signes (soit 2 000 à 3 000 mots environ) sur ce que vous inspirent les concepts d’Anges, de Choix et de Destin.

Vous pourrez lire les productions des autres Ptérophidiens & Ptérophidiennes sur un espace de partage privé.

Le meilleur texte permettra de remporter le prix.

Alors à vos plumes, apprentis phœnix ou oiseaux confirmés.Et inscrivez-vous ici.

Version papier

  • Date de publication 2018 (1ère édition), 2021 (2e édition)
  • Urban fantasy
  • 292 pages
  • Format A5, couverture rigide à signet
  • ISBN 9791093734033
  • Prix : 24€
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Version numérique

Date de publication

2018 (1ere édition), 2021 (2e édition)

ISBN

979-10-93734-02-6

Format de fichier

ePub

5,99 

Acheter

Version livre audio

  • À paraître en 2021 (texte de la 2e édition)
  • Lu par l'auteur
  • Urban fantasy
  • Formats .mp3, .m4b
  • 40 Mo
  • Prix : 14€
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Le Choix des Anges disponible en version papier et numérique

Le Choix des Anges disponible en version papier et numérique

Le Choix des Anges disponible en version papier et numérique

Le grand jour est arrivé !

Après de nombreuses années d’efforts souvent entrecoupés hélas par les vicissitudes de la vie, je suis arrivé au bout de l’écriture de ce deuxième roman, puis au bout de sa préparation pour une publication en autoédition.

Le Choix des Anges est donc disponible à la vente tant dans sa version papier (livre broché de 296 pages en format A5, au prix de 12,66 €) que dans sa version numérique (format ePub, au prix de lancement de 2,99 €).

La version Kindle est retardée par le système de validation de KDP mais sera je l’espère disponible très vite.

Vos commentaires et vos partages sont bien entendu les bienvenus.

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Version papier

  • Date de publication 2018 (1ère édition), 2021 (2e édition)
  • Urban fantasy
  • 292 pages
  • Format A5, couverture rigide à signet
  • ISBN 9791093734033
  • Prix : 24€
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Version numérique

Date de publication

2018 (1ere édition), 2021 (2e édition)

ISBN

979-10-93734-02-6

Format de fichier

ePub

5,99 

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  • À paraître en 2021 (texte de la 2e édition)
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Le Choix des Anges disponible en version papier et numérique

Le Choix des Anges en précommande

Le Choix des Anges en précommande

Tout est dans le titre, ou presque.

Après de nombreuses années d’efforts souvent entrecoupés hélas par les vicissitudes de la vie, je suis arrivé au bout de l’écriture de ce deuxième roman, puis au bout de sa préparation pour une publication en autoédition.

Le Choix des Anges est donc disponible en précommande tant dans sa version papier (livre broché de 296 pages en format A5, au prix de 12,66 €) que dans sa version numérique (format ePub, au prix de lancement de 2,99 €). Il sortira officiellement le 20 mars 2018, date à laquelle vous pourrez le lire véritablement. La version Kindle est en préparation et sera disponible le 20 mars également.

Vos commentaires et vos partages sont bien entendu les bienvenus.

Quant à moi, après avoir bouclé un mémoire professionnel qui attend une relecture depuis 2 mois, je vais pouvoir lancer un nouveau projet : Fée du Logis, dont l’écriture est tout juste entamée.

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Version papier

  • Date de publication 2018 (1ère édition), 2021 (2e édition)
  • Urban fantasy
  • 292 pages
  • Format A5, couverture rigide à signet
  • ISBN 9791093734033
  • Prix : 24€
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Version numérique

Date de publication

2018 (1ere édition), 2021 (2e édition)

ISBN

979-10-93734-02-6

Format de fichier

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  • À paraître en 2021 (texte de la 2e édition)
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Making of a book, partie 1 : outils pour écrivain

Making of a book, partie 1 : outils pour écrivain

Making of a book, partie 1 : outils pour écrivain

Dans cette triple série d’articles, Making of a bookCréer un livre électronique au format ePub3, et Making of an (audio)book, je vous propose le résultat de mes recherches, de mes essais et de mes explorations diverses et variées sur la façon de produire un livre, respectivement en format papier, en format électronique, et en format audio. Ces articles ont vocation à évoluer dans le temps, aussi n’hésitez pas à vous inscrire à la Newsletter d’écaille & de plume qui vous avertira de toute mise à jour.

Publier un livre, c’est d’abord l’écrire, bien sûr.

Je n’ai pas la prétention de donner des cours d’écriture, car j’en serais incapable. D’autres font ça bien mieux que je ne le pourrais. Par contre je peux partager avec vous dans ce premier article quelques outils que j’ai adoptés pour moi-même. Je peux aussi vous livrer ma méthode, qui reste perfectible, personnelle, mais qui peut-être pourra vous donner quelques idées pour trouver ou peaufiner la vôtre.

Pour ce qui est de trouver l’idée première, l’amorce, l’étincelle créatrice, seule votre imagination saura vous guider.

Mais à partir de là, de ce mystère qui peut partir d’une impression, d’un sentiment, d’une vague sensation, parfois même seulement d’une couleur, d’une ambiance ou d’une simple phrase, il s’agit souvent d’apprivoiser le chaos, de l’organiser sans trop le brider, de sectionner des branches et d’en privilégier d’autres.

Version

2.2

}

Mise à jour

10/01/2021

Changement des versions
10/01/2021
  • Liste des styles nécessaires à l’édition.
06/01/2021
  • Changement d’images pour illustrer Scapple.
04/01/2021
  • Mise en avant de Scapple et suppression de MindNode que je n’utilise plus.
  • Mise en avant d’Affinity Publisher et suppression de Scribus que je n’utilise plus.
  • Correction de fautes et coquilles.

Order out of chaos, here comes the Mindmap again

Je vous ai déjà parlé de ma manie de faire des cartes heuristiques, des mindmaps, dans la conception des scénarios de jeu de rôle. Cette habitude s’est naturellement étendue à l’écriture littéraire comme elle a pu le faire dans ma vie quotidienne ou dans ma vie professionnelle pour structurer, ordonner, développer. Surtout développer. Car à partir de l’idée de base, de l’amorce de mon projet, je commence d’abord par creuser en notant tout ce que cela m’évoque.

J’ai d’abord utilisé un logiciel qui comprenait une version mobile, car je voulais noter mes idées n’importe où, dès que je les avais à l’esprit, ou revenir sur un canevas même quand j’étais loin de mon ordinateur.

Mais je me suis rendu compte que le travail sur une carte heuristique me demandait une concentration qui n’était pas compatible avec un iPhone, et que je n’étais jamais vraiment loin d’un poste de travail. Car je confondais la prise de notes avec leur organisation en carte heuristique.

Pour la prise de notes et être sûr de les fixer à un endroit où je les retrouverai toujours, je n’ai pas encore trouvé mon bonheur et on en discutera certainement dans un autre article.

Mais pour organiser mes idées, puisque j’ai besoin d’un logiciel qui me laisse toute créativité dans les liens et dans leur organisation, et je n’ai pas trouvé mieux que Scapple.

Quant à la méthode, une fois que j’ai jeté toutes les idées qui dérivent de l’originelle, un peu partout sur le canevas de Scapple, tout ce que m’inspire cette amorce, je commence à organiser en les reliant entre elles, en les regroupant, et souvent ces groupes engendrent d’autres idées qui en développent le concept. Je pousse la logique de chaque concept le plus loin possible et j’essaie de les expliquer les uns par rapport aux autres.

Je structure ainsi le début d’histoire entre l’intrigue, les personnages, les lieux et les éléments fondateurs.

J’utilise une sorte de code de présentation pour m’y retrouver facilement au premier coup d’œil. Les personnages, par exemple, sont entourés d’un cartouche vert, les concepts d’un cartouche rose, les dates d’un carré. Je vous livre mon fichier de base avec les styles qui correspondent en fin d’article.

Réalisme, recherches et crédibilité

Une histoire ne peut être crédible que si elle s’appuie sur une base solide qui en constituera le réalisme, ou mieux, la vraisemblance. Il est donc nécessaire de rechercher à chaque étape une cohérence dans l’intrigue, mais aussi dans l’univers décrit par l’histoire. Que ce soit pour un space opera poétique comme dans Poker d’Étoiles ou un monde rétrofuturiste comme pour Le Choix des Anges, ou plus encore dans une histoire censée se dérouler entre la Renaissance et nos jours dans des lieux comme Toulouse, Paris, ou Sarajevo comme le sera Fæe du Logis, il faut construire ou reconstruire pour soi comme pour le lecteur un monde, un environnement dans lequel prendra place l’intrigue elle-même.

Jusque là ma méthode restait archaïque : bouts de papier, marque-page dans mon navigateur internet, fichier texte.

Et puis, j’ai fini par adopter Scrivener. Comme il est mon outil également pour la phase d’écriture elle-même, je vous en parlerai plus en détail plus loin, mais la phase préparatoire de recherche peut aussi bénéficier des outils de Scrivener.

Le plus intéressant pour moi reste la faculté du logiciel à intégrer les pages internet que l’on glisse-dépose dans son interface. Il y crée instantanément une archive web consultable à tout moment lors de la rédaction.

Je prends également des notes en cours de rédaction, sur les points qui me semblent à approfondir ou à améliorer, les recherches à faire pour en développer d’autres, ou les liens à faire avec d’autres chapitres.

Je me sers également beaucoup des fiches de personnage et de lieu dont je vous ai déjà livré les fichiers pour construire peu à peu une cohérence dans mon histoire.

De la même manière, il est impératif de ne pas se contredire soi-même dans un livre qui se veut crédible, et ce notamment sur la chronologie. Vous savez bien que le temps est une donnée fondamentale pour moi, mais dans un livre de fiction, c’est plus encore le cas.

J’utilise donc Aeon Timeline qui permet de garder à l’esprit les dates importantes et de calculer automatiquement les âges des protagonistes à un moment donné de l’intrigue, tout comme la trace des événements passés et futurs afin de ne pas créer de paradoxes temporels qui pourraient anéantir votre si beau roman avant même qu’il ne soit né.

Et si je reviens dans le passé pour m’empêcher de faire ce rêve, est-ce que Fæe du Logis disparaîtra ?

Pensée terrifiante.

Aeon Timeline est même prévu pour s’interfacer avec Scrivener, ce qui permet de tenir l’intrigue à jour en même temps que les changements de chronologie et vice-versa.

Le travail à ce moment-là est un incessant va-et-vient entre Scapple, Scrivener et Aeon Timeline. Surtout pendant la phase de rédaction.

La plume du phœnix

J’ai écrit Le Choix des Anges de façon classique, avec un traitement de texte, LibreOffice, plus tard avec Pages.

Mais je me suis rendu compte que le processus d’écriture que j’avais mis en place rendait difficile le simple fait de retrouver un moment particulier de mon histoire pour le modifier. J’étais obligé de dérouler ou d’enrouler en permanence le fichier pour trouver deux endroits à corriger l’un par rapport à l’autre, pour vérifier leur cohérence ou leur tonalité. Et l’un comme l’autre devenaient lourds et lents au fur et à mesure que la rédaction avançait.

Je me suis donc tourné vers Scrivener et sa logique totalement différente qui permet de considérer chaque partie du texte comme un fichier séparé, organisé de façon fluide dans une sorte de chronologie narrative. Chaque morceau a son résumé, ses notes, parfois même des sauvegardes autonomes. On peut organiser chaque section avec des mots-clefs avec une liberté étonnante et un peu déroutante au début.

Il y a quantité de tutoriels sur Scrivener sur la Toile, notamment sur le site officiel de Littérature & latte. Vous pourrez en découvrir l’extrême versatilité et l’adaptabilité à tous les types de projets d’écriture.

Et à ma modeste échelle, je commets parfois quelques articles d’astuces que vous pouvez retrouver sur d’écaille & de plume.

Maison de Corrections

Vous avez envie d’écrire, c’est louable. Vous avez sans doute beaucoup de talent. Mais de grâce, soignez votre orthographe ! Il n’est rien de plus irritant, pour un lecteur, de bloquer sur un mot mal orthographié, sur une coquille oubliée, sur une tournure de phrase mal pensée. Pour ma part, une telle chose me gâche mon plaisir.

La Forme est sans doute aussi importante que le Fond, surtout pour un lecteur, ou même un relecteur ou un correcteur. Pour un éditeur c’est indispensable.

Et malgré toutes les dictées que ma mère m’a infligées (pour mon bien) dans mon enfance, tous les articles du Bescherelle que j’ai pu apprendre (et croyez-moi, j’avais intérêt à les savoir par cœur !), toutes les listes de mots que je devais connaître, il m’arrive à moi aussi de me tromper. Surtout sur un clavier d’ordinateur.

Corriger votre texte est donc incontournable.

Mais il existe plusieurs niveaux de corrections, que vous allez enchaîner voire superposer les uns aux autres.

Les corrections de fond, la « bêta-lecture »

Tout d’abord, il y a la correction la plus fondamentale, celle de la vraisemblance, de la cohérence et du réalisme de l’ouvrage. Si vous avez correctement pensé votre livre, il devrait y en avoir assez peu. Mais même l’intrigue la mieux pensée, même le personnage le plus travaillé psychologiquement peut se trouver dans une situation dont la vraisemblance peut être mise en doute à une lecture plus attentive. Et qui vous assure que vous n’avez pas dit que Tartampion avait les cheveux blonds au chapitre 4 et bruns au chapitre 5 ?

Chaque acte d’un personnage doit en outre être cohérent avec d’une part l’univers que vous avez construit, avec sa psychologie propre, et avec les réactions que sa psychologie lui autorisera lorsqu’il sera confronté à la situation que vous avez créée.

Vérifier que tout cela ne cloche pas est un travail difficile, car il faut prendre du recul avec le texte, avec les personnages, avec l’histoire.

C’est pour cela que je n’y vois que deux solutions : soit prendre deux ans de recul sans toucher le texte (à ce rythme-là, je n’accoucherais personnellement que d’un roman tous les 50 ans…), soit demander à quelqu’un d’autre de lire et de critiquer votre travail. C’est bien entendu la deuxième solution qui me paraît la plus intéressante, car elle permet aussi de confronter le point de vue d’un premier lecteur, ou même de plusieurs, avec celui de l’auteur. Souvent de la discussion naît la lumière, et cette situation ne fait pas exception à la règle.

Il faut bien sûr se trouver une ou plusieurs personnes de confiance, quelqu’un qui comprendra votre univers, qui sera suffisamment proche de vous pour l’apprécier et surtout pour vous faire des retours structurés, organisés, et des critiques constructives. Il n’est pas question de se limiter à un simple « oui c’est super génial » ou à un « je n’aime pas ». Il faut argumenter, développer, discuter. Pour l’auteur, cela demande un peu d’humilité, car il n’est pas toujours facile d’entendre que l’on n’a pas tout réussi du premier coup. Pour le bêta-lecteur, cela demande du doigté et de la diplomatie.

Ces corrections sont celles où l’auteur peut aussi « défendre son bout de gras », et argumenter lui aussi face à son bêta-lecteur. S’il pense que telle action du personnage est justifiée, il peut la garder, mais peut-être mieux l’expliquer.

La forme, une question de style

Une fois le fond stabilisé, il est maintenant temps de s’occuper de la forme.

Vos phrases sont-elles trop longues, trop courtes ? Y a-t-il des répétitions qui alourdissent le style, des fautes de syntaxe, un manque de concordance des temps ?

Je me sers de deux sources dans ce moment critique.

Tout d’abord Antidote, le logiciel de correction orthographique. Il a la particularité de repérer très facilement les répétitions ou les syntaxes discutables.

Ensuite et surtout, d’autres correcteurs ou correctrices humaines.

Là encore, vous seul jugerez si les corrections suggérées doivent être appliquées ou pas. Antidote n’est pas un logiciel parfait, il lui arrive de se tromper (assez souvent) ou d’être trop strict. Vos correcteurs auront sans doute aussi cette qualité. Mais même si Antidote réclame une correction pour l’emploi d’un mot familier, vous pouvez décider de le garder tout de même, car le personnage qui l’emploie possède un registre de langage familier, ou parce que vous désirez que votre style soit familier dans cette partie-là de votre livre. Vous pouvez décider de garder une répétition pour créer de l’emphase, pour donner un rythme à votre phrase comme en poésie ou en rhétorique.

Bref, là encore vous devrez faire des choix.

L’esprit et la lettre

Par contre, vous en aurez moins dans la troisième phase des corrections, la phase orthographique et grammaticale.

Là encore j’utilise deux sources (en plus de mes propres relectures) : Antidote et mes correctrices.

Antidote fera des suggestions de corrections basées sur les paramètres que vous lui aurez indiqués auparavant : voulez-vous écrire selon l’orthographe traditionnelle, ou la réforme simplifiée des années 1990 ? En fonction de ce choix, les graphies correctes ne seront pas les mêmes. Et Antidote vous les explique.

Cela simplifie le dialogue avec mes correctrices, qui ont parfois autant de doutes que moi sur une orthographe. Mais les yeux aguerris des humains peuvent parfois trouver des coquilles que le logiciel a laissé passer, car les mots n’étaient pas incorrects, même s’ils changent complètement le sens de la phrase (mère et mer, par exemple).

Un défaut actuel d’Antidote (même si Druide, la société éditrice, m’a assuré qu’elle y travaillait) est qu’il ne sait pas gérer l’accord de proximité.

L’art délicat de la typographie

Une fois l’orthographe corrigée, il faut s’occuper de la typographie, c’est-à-dire de la façon correcte d’enchaîner les signes de l’écriture, notamment (mais pas seulement) la ponctuation, de manière à ce que le texte ait une forme agréable pour le lecteur.

La typographie est essentiellement (mais pas seulement), l’art de savoir placer les espaces.

Les espaces fines, sécables, insécables. Car oui, en typographie on dit une espace et pas un espace. Antidote vous guidera pour savoir quels espaces utiliser : après les points et jamais avant, les espaces avant et après les deux points, les espaces avant et après les points d’interrogation ou d’exclamation. Les espaces entre les chiffres.

Cependant, vous apprendrez aussi à mettre en forme les dialogues, l’importance des tirets cadratin et semi cadratin, des apostrophes et virgules courbes, des guillemets français et de leur différence avec les anglais.

C’est Antidote qui me sert de guide, là aussi, en complément avec l’excellente série d’articles de Lionel Davoust qui expliquent tout cela de façon claire et illustrée. Et franchement, là, je les écoute toujours.

Existe-t-il un autre style ?

Cependant, comme vous pouvez le lire dans le premier volet de la série Créer un livre électronique au format ePub3, il est important de structurer le manuscrit final pour obtenir une base de texte qui sera mise en forme séparément. Une seule structure qui sera utilisée pour construire la forme de votre livre papier, et celle de la version électronique du même ouvrage.

On obtient cette structure grâce à l’emploi des styles de paragraphes ou des styles de caractères (voir le chapitre plus détaillé) dans les traitements de texte classiques comme LibreOffice, Pages ou Word.

Pour Scrivener, la philosophie est légèrement différente.

Le texte qui est dans le logiciel est un texte brut, peu mis en forme. Une fois écrit, il est nécessaire de le compiler, c’est-à-dire de l’exporter comme un fichier plus classique, dans l’ordre que vous aurez décidé. Par exemple, si vous désirez mettre le contenu du chapitre 11 avant celui du chapitre 7, pour quelque raison que ce soit (une sortie papier de correction permettant de mettre les deux chapitres en parallèle ?) vous indiquez simplement au logiciel qu’il doit organiser le manuscrit de sortie dans cet ordre-là, et abracadabra !

La phase de compilation (j’ai d’ailleurs écrit un article à ce sujet) est donc celle qui permet vraiment de donner une structure au texte, mais vous devrez sans doute auparavant distinguer dans votre rédaction les zones de texte qui différeront de votre texte principal, là encore avec des styles de paragraphes et des styles de caractère. Je vous en donne un exemple avec le premier chapitre du Choix des Anges, construit comme un montage de cinéma qui entrelace différents moments dans la narration faite par Armand. Pour distinguer les phases de flashback et celles de la narration normale, j’ai utilisé un style différent, que j’ai indiqué à Scrivener dès la rédaction. Ainsi, lorsque je vais compiler mon texte, les paramètres tiendront compte de ce style particulier.

La liste des styles utiles

Voici les styles que vous aurez certainement besoin de créer ou d’utiliser dans votre projet de livre.

Des styles de caractères :

  • Un style de mise en évidence pour les mots importants. On utilise en général une mise en italique.
  • Un style d’accentuation forte pour être encore plus marquant. On utilise la plupart du temps une mise en gras.
  • Un style mixte, pour combiner la mise en évidence et la mise en gras.
  • Un style mise en évidence dans un texte en italique, qui permet de renverser la mise en italique si besoin.
  • Un style de Première phrase de chapitre si vous voulez changer la casse de vos débuts de chapitre par exemple (on peut le faire autrement dans Scrivener, mais la solution d’un style est plus interopérable avec les autres logiciels comme les traitements de texte).

Des styles de paragraphes :

  • Un style de corps de texte, la base de votre texte.
  • Un style de titre de chapitre, pouvant être ensuite décliné pour la façon dont vous allez numéroter les chapitres.
  • Un style de titre de parties, si vous en avez dans votre texte, pouvant là aussi être décliné pour la façon dont vous voudriez numéroter les parties.
  • Des styles de scènes, vous permettant de distinguer autrement qu’avec les signes typographiques de changement de scène deux moments différents dans une même séquence, comme des analepses ou des prolepses (flashbacks et flashforwards).
  • Un style de dédicace, qui marque déjà le texte sur la page adéquate.
  • Un style de mentions légales qui marque lui aussi le texte sur la page dédiée.
  • Un style de titre de scène ou de division de scène.
  • Un style ou des styles pour vos entêtes et vos pieds de page.

Un seul texte, plusieurs vies

Une fois que le long et lent processus d’écriture est terminé, et même pendant, vous aurez besoin de mettre en forme le texte suivant vos besoins.

Or, un même texte peut être envoyé à vos bêta-lecteurs pour correction, ou au logiciel de mise en page pour obtenir un PDF nécessaire à la fabrication du livre papier, ou au logiciel qui créera le fichier électronique à intégrer dans une liseuse.

C’est là que la philosophie de Scrivener est à mon avis un énorme avantage. Le texte ne change pas. Vous n’avez rien à faire dessus. Seules sa forme et le format du fichier de sortie vont changer. Et cela peut se décider en quelques clics pour peu que vous sachiez exactement ce que vous voulez.

Il faut d’abord connaître vos propres besoins.

Pour ma part, j’ai décidé de concevoir trois mises en forme seulement, en fonction de ce que le texte va devenir et aussi des étapes nécessaires. Je vous résume tout cela dans une petite carte heuristique (ça faisait longtemps).

  • Une mise en forme qui aura pour but de donner le texte à mes correctrices, selon deux modalités qui restent leur choix : un fichier PDF à imprimer ou un fichier plus classique à corriger dans un traitement de texte. J’utilise aussi ce format pour mes propres corrections et pour y porter des annotations afin d’enregistrer la version audio du livre.
  • Une mise en forme de publication destinée au livre papier, essentiellement sous un format RTF qui sera importé dans un logiciel de mise en page comme Affinity Publisher, qui est celui que j’utilise personnellement.
  • Une mise en forme de publication destinée au livre électronique, comme un format EPUB natif que je corrigerai ensuite selon mes desiderata plus précis.

Pour chacune, j’ai décidé de ce que je voulais : des en-têtes sur la page, et lesquels, jusqu’aux marges, en passant par l’incorporation des styles ou non.

Et j’ai construit deux formats de compilation pour Scrivener. Un format dit « épreuve » et un format dit « publication » qui servira pour la suite du travail de production, tant en papier qu’en numérique.

Je détaillerai avec vous les étapes qui ont mené à la conception de ces formats de compilation dans plusieurs articles.

Maîtriser la compilation dans Scrivener, partie 1

Pour aller plus loin sur la compilation dans Scrivener.

La naissance de Janus

La suite de la vie du texte sera différente suivant que l’on désire fabriquer le livre papier, sa version électronique, ou encore sa version audio. Nous verrons cela dans trois séries d’articles complémentaires.

Au début de chacun d’eux, je passerai en revue avec vous les outils complémentaires qui sont les miens, et nous progresserons ensemble vers la réalisation de chaque incarnation de votre œuvre.

Les présents d’Héphaïstos

Tout comme le dieu forgeron le fit pour de célèbres Héros de la mythologie grecque, le Serpent à Plume a fait éclore dans son nid de flammes des armes magiques qui vous permettront de vaincre vos ennemis, mais surtout de surmonter les obstacles de la compilation avec Scrivener.

Voici donc :

  • Un fichier d’exemple Scapple pour mes codes de présentation sur les cartes heuristiques.
  • Un modèle générique pour un roman (celui que j’utilise), et mes formats de compilation pour la correction, et pour la publication papier et numérique. Nous les utiliserons pour les prochaines étapes de la fabrication du livre dans sa version papier, mais également dans ses versions numérique ou audio.

Vous pouvez les télécharger en devenant membre de la Tribu des Ptérophidiens & Ptérophidiennes, à travers la lettre d’écaille & de plume.

Libre à vous des les utiliser ou de les modifier selon vos propres besoins, ils sont juste une base, certainement perfectibles.

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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Le Choix des Anges, les 3000 premiers mots

Le Choix des Anges, les 3000 premiers mots

Le Choix des Anges, les 3000 premiers mots

Malgré les difficultés et les obstacles que la vie pose sur son chemin, mon deuxième roman avance peu à peu. Il atteint actuellement la barre fatidique des cinquante mille mots, la dépasse même quelque peu. Il fera certainement dans les soixante dix mille une fois terminé.

Mais la gestation est longue, elle est parfois frustrante. Car je ne peux pas passer autant de temps que je le voudrais dans l’écriture. La fatigue physique qui me guettait depuis deux ans comme un félin pervers à l’affût m’a rattrapé il y a peu et a planté ses griffes dans ma chair. Comme tous les félins pervers (pléonasme ?), cette bête-là joue avec moi. Je dois donc ralentir mon rythme d’écriture, quand je voudrais tant l’augmenter. Mais les exigences de la vie font que d’autres priorités viennent percuter mes envies profondes.

La bonne nouvelle est que cet état aura une fin, une fin prévisible, même, puisque les ajustements professionnels qui sont à l’origine de mon épuisement seront enfin passés, digérés, résorbés, métabolisés d’ici l’été. Je prévois donc une accalmie à la rentrée, et si le plan se déroule sans accroc, Le Choix des Anges devrait sortir de la matrice au début de l’automne.

Mes bêta-lecteurs (qui sont loin d’être des lecteurs bêtas) seront alors les premiers à poser leurs yeux sur l’aventure noire et surnaturelle d’Armand et de Marianne. Une fois leurs retours intégrés et les inévitables corrections faites, le livre devrait sortir avant la fin de l’année.

Il prendra deux formes : une incarnation de papier bien concret, et une incarnation numérique, puisqu’il est juste que l’océan des données informatiques mondial puisse lui aussi s’en nourrir. Après tout, les algorithmes aussi ont le droit de s’évader en lisant un bon bouquin !

Je voulais cependant partager avec vous ce qui semblerait être devenu les premières pages du livre, après la refonte totale que j’ai entamée en septembre dernier. Il se pourrait que ce soit cette fois le véritable début de la narration, même si je ne peux garantir que mon choix soit définitif. Comme dirait un petit bonhomme vert de ma connaissance « toujours en mouvement est l’avenir ».

Je vous livre donc un peu plus des premiers mille quatre cents mots du livre. Une introduction in media res.

Et si vous voulez en savoir plus sur la genèse du Choix des Anges, vous pouvez aussi lire les articles que j’y ai déjà consacrés.

Un commencement est une chose fragile, délicate, précieuse.

Car au commencement, il n’y a pas vraiment la lumière. Mais bien l’ombre. L’ombre contient en elle-même tout ce qui n’est pas encore réalisé, et cependant qui pourrait l’être.

C’est un choix qui fait sortir la lumière hors de l’ombre. L’étincelle divine qui scinde l’incréé.

Alors la Création se déploie. Chaque acte, chaque mot, chaque idée, tout naît de cette étincelle primordiale qui désormais donne naissance à mille rayons de feu sans cesse renouvelés à chaque moment de notre existence.

Nous prenons à cet instant-là un chemin qui se déroule au fur et à mesure que nous le parcourons. Des lignes de lumière émergent de nos choix en permanence, pour l’éclairer et nous guider.

Parfois, on peut se demander comment cet enchaînement de choix et de conséquences nous a conduits là où nous en sommes. En se retournant sur son chemin, il est vertigineux de se rendre compte de l’improbabilité de ses méandres.

C’est le lot de chaque être vivant doué de conscience en ce monde.

C’était mon lot comme c’est le vôtre.

Si j’en avais vraiment eu l’occasion, j’aurais pu m’étonner ou rire intérieurement de la position dans laquelle je m’étais enferré lorsque tout cela a vraiment commencé. Outre que je n’en avais pas le loisir, maintenu par une poigne d’acier et frappé en tous sens, j’aurais peut-être déjà aperçu un pan de la vérité. Déjà, à ce moment-là, les lignes de mes avenirs n’étaient plus aussi claires. Elles avaient entamé leur métamorphose. Elles étaient plus floues, et se chevauchaient les unes les autres, se recoupant même à différents points précis. À dire vrai, définir le moment exact du commencement était déjà impossible. Je le sais maintenant.

Même alors, quand la douleur me vrillait la chair et que la volonté de survivre occupait toutes mes pensées, je pus confusément sentir la présence de ces lignes de lumière qui s’entremêlaient si bien que mon existence se déployait non pas de façon linéaire, mais selon différentes strates d’une seule réalité.

Des fragments de sons, d’images, de sensations, me percutaient avec autant de violence que les coups assénés sur mon corps. Les phrases se mélangèrent. Les contours de la réalité se firent plus imprécis, les visages se substituèrent à d’autres. Les odeurs se confondirent les unes aux autres. Ma tête se fit lourde et bascula. J’entendis à peine le Comte de Flamarens cracher son mépris.

— Je suis déçu de votre réponse, mon ami.

Le coup de poing ganté fit exploser la peau de ma pommette gauche avec un bruit mat, ébranlant l’une de mes dents et faisant jaillir une nouvelle gerbe de sang dans la nuit. Le goût âcre de métal s’insinua dans ma bouche, sur ma langue déjà gonflée. Je finis par renifler bruyamment et cracher à terre.

— Si c’est tout ce dont votre chien de chasse est capable, vous feriez mieux d’en changer, Monsieur le Comte.

Mon ton était plus bravache encore que je ne l’avais voulu. La sanction ne se fit pas attendre et un nouveau coup atteignit ma tempe.

— Qui tu traites de chien, face de rat ? Quand j’en aurai fini avec toi, tu regretteras d’avoir encore une gueule, et tu me supplieras de t’achever. Et je sais pas si je le ferai.

Serge avait mieux ajusté, cette fois. Mais il commençait à perdre patience. Ce n’était qu’une question de temps avant qu’une ouverture ne se présente.

Le sourire goguenard du Comte de Flamarens vint interrompre mes pensées. Sa figure aristocratique me toisait avec dédain, mais intérêt. À ce moment-là, je ne pouvais savoir pourquoi.

— J’admire vraiment votre pugnacité, Monsieur de Saint Ange. Mais elle est totalement inutile en l’occurrence. Quant à vous, Monsieur de Saint Amans, je veux vous confesser quelque chose, en guise de bonne volonté.

Le ton mielleux contenait une menace délibérée qui lui donnait une résonance macabre. Pierre, ficelé à un pilier de granit moussu tout comme moi, son verre de lunettes droit fendillé et ses vêtements déchirés par la lutte qui nous avait opposés à nos adversaires, regardait le Comte de Flamarens avec un courage teinté de fatalisme.

— Je vous l’ai dit, Monsieur le Comte, nous n’avons parlé à personne de ce projet, depuis le jour où vous nous avez envoyé votre commande jusqu’à ce soir. Les plans de l’instrument sont restés enfermés dans un coffre de l’atelier, nos données numériques ont été cryptées avec l’algorithme que vous nous avez fourni, nous avons brûlé le reste, et personne n’a été admis à entrer dans l’atelier lorsque nous y avons travaillé, tous volets clos. Depuis un an, nous n’avons pas accepté d’autre commande, et l’atelier est resté fermé tout ce temps. Vous pouvez me croire, Monsieur le Comte. Nous avons le plus grand respect pour vous et nous avons fait selon vos volontés depuis le début…

Flamarens le coupa.

— Voyez-vous, plus encore que la pugnacité de votre élève, j’admire les personnes capables de confiance. C’est si difficile à gagner, mais surtout à garder, la confiance. Si difficile que je ne suis pas loin de la considérer comme le trésor le plus précieux qui soit dans la vie. Car lorsque l’on peut se reposer sur cette certitude qui prend racine dans la relation entre deux personnes, la vie semble vous rendre les choses plus faciles. On possède une foi capable de soulever les montagnes. Le sommeil est plus facile à trouver, quand vient la nuit. Nul besoin de regarder sans cesse derrière son épaule pour surveiller ses arrières. Ceux qui ont cette capacité à faire confiance sont bénis des dieux, ne croyez-vous pas ?

La question était toute rhétorique, bien entendu, mais il la posa tout de même. Si le discours était adressé à Pierre, il était en réalité destiné à Marianne, la propre fille de Flamarens, dont la lèvre était coupée et meurtrie presque autant que la mienne. Elle était fermement maintenue par Renaud, l’autre sbire de son père, au milieu des ruines d’une vieille église gothique, seulement éclairées par les puissantes lampes qu’ils avaient rapidement déposées çà et là. Elle ne quittait pas son père des yeux, si perçants et si beaux, pourtant acérés et meurtriers à ce moment-là. Sa mise étudiée de jeune femme de bonne famille était ruinée par les traces qui maculaient son bustier, les déchirures de sa robe, les branches qui l’avaient décoiffée.

— J’aimerais être ce genre d’homme. Vraiment. Et j’ai essayé, vous pouvez me croire. J’ai essayé aussi fort que je le pouvais. Mais hélas, trois fois hélas, il se trouve que j’en suis incapable. Je ne sais pas. Je ne peux pas. Avec le temps, j’ai fini par penser que je n’étais tout simplement pas destiné à l’être. Voilà pourquoi je ne suis pas convaincu par votre réponse. Vous m’en voyez tellement désolé.

Comme si cette simple phrase avait été un signe ardemment guetté, Serge frappa à nouveau. Mon foie. Il savait où porter le coup pour obtenir une douleur maximale. L’onde de choc mit quelques fractions de seconde à m’atteindre. J’eus l’impression que ma cage thoracique explosait.

— Je crains fort de devoir pousser votre élève dans ses retranchements pour être vraiment sûr que vous ne me cachez rien. Vous comprenez sans doute que je doive m’assurer que vous n’avez parlé à personne de notre arrangement et que toutes les règles que j’avais exigées ont été respectées. C’est d’une importance vitale pour mes projets.

— Vous êtes un vrai malade, Flamarens.

Serge me fit taire à nouveau, puis il se recula, mit sa main dans sa poche de pantalon et en ressortit un petit objet métallique qu’il ouvrit d’un bruit clair. À travers le rideau de sang qui me recouvrait en partie les yeux, je vis le reflet d’une lame.

— C’est une intéressante hypothèse, mon cher ami. Et je suppose qu’elle n’est pas dénuée de vérité. La méfiance est sans doute une maladie, après tout. Mais je ne connais qu’une seule façon d’y remédier.

Serge prit ma main gauche et la lame commença à piquer ma peau.

— On va y aller tout doux, mon beau. D’abord une phalange, puis une autre, et une autre. Puis j’attaquerai la main elle-même, et pour varier les plaisirs, j’enfoncerai juste la pointe de quelques centimètres dans les plaies déjà ouvertes, et je tournerai. Dans un sens, puis dans l’autre. On va bien s’amuser, tu vas voir…

Le tranchant entama la peau de mon petit doigt. Doucement, lentement. Comme lorsqu’on prend le temps de peaufiner la taille d’une éclisse de violon. Je m’efforçais de ne pas crier, supportant chaque vague de souffrance comme on aborde un nouvel adversaire sur le ring. Je soufflais, expirais, inspirais, rapidement, bruyamment.

— Arrête, Charles ! Tu vois bien qu’ils n’ont rien dit ! Laisse-les partir !

Serge s’arrêta, le métal encore hésitant entre le muscle et le tendon.

Flamarens se retourna vers sa fille, une rage visible déformant son visage en une caricature pathétique. Il écumait mais continua de s’adresser à Pierre.

— Savez-vous ce que ça fait, Monsieur de Saint Amans, de ne pas atteindre le but qu’on s’est fixé, malgré tous les efforts que l’on a pu faire ?

Il planta ses yeux dans ceux de sa fille. Ils soutinrent leur duel muet de longs instants. Puis le père continua à parler sans briser l’affrontement.

— On se sent trahi. On se sent déçu. Profondément. De confiance, il ne peut plus en être question. On voit soudain toute la réalité des choses, dans leur entière cruauté, dans leur nudité crue. On est seul, Monsieur de Saint Amans. Irrémédiablement seul. C’est en prenant conscience de cette vérité première, cependant, qu’on se libère vraiment. Et que l’on fait ce qui doit l’être pour accomplir son véritable destin.

Il dirigea le révolver vers Marianne.

— M’empêcher de nuire, c’est bien ce que tu veux ? Et dis-moi, ma fille, qui a bien pu nuire à l’autre durant toutes ces années ? Je ne te demandais pas grand-chose à part respecter le nom que tu portes. Même ça, tu n’en as pas été capable. J’ai passé l’éponge sur toutes tes frasques, j’ai même accepté tes fréquentations et je ne t’ai pas punie lorsque tu as délibérément mis notre famille en danger pour me nuire. Oui, me nuire, à moi, ton père ! Mais ça, ma fille, je ne peux pas te le pardonner. Tu ne te mettras pas en travers de mon chemin. Et d’ailleurs, tu pensais vraiment que j’étais aussi faible que ça ? Qu’il suffisait de me pointer une arme dessus pour que je m’effondre en pleurant ? Tu penses que tu pourrais être capable de me tuer, simplement ? Comme ça ?

Le coup de feu prit tout le monde de court. Encore aujourd’hui il retentit dans ma tête, mêlé au cri d’horreur que poussa Marianne. Quand après une fraction de seconde j’ai compris que ce n’était pas sur sa fille que Flamarens avait tiré, et que j’ai vu la tâche écarlate s’étaler sur la chemise blanche de Pierre, le monde a soudain basculé. Pierre était avec René ma seule famille, le seul repère dans ma vie depuis aussi longtemps que je m’en souvenais. L’univers s’est contracté autour de lui. Il respira soudain si difficilement, ses traits déformés par la douleur, son souffle court, et ses mains s’agitèrent pour trouver la force de chaque battement de cœur. Je ne pouvais pas y croire. Tout le reste devint brumeux et me parvint avec décalage. Ma tête résonnait encore de l’explosion. Je ne percevais plus rien d’autre que la douleur de Pierre, sa lutte pour survivre. Cependant, même à cet instant, il était déjà évident pour moi qu’il ne tarderait pas à perdre ce combat-là. Marianne se dégagea de la poigne de Renaud pour se ruer vers le corps de Pierre qui glissait déjà à terre. Elle chercha à comprimer la plaie par laquelle s’épanchait un sang trop noir avec un morceau de tissu arraché à sa robe. Même dans la lumière incertaine et crue des lampes, il me fut facile de comprendre que le flot ne cessa pas vraiment. Les vêtements de Pierre devenaient peu à peu plus poisseux et pourpres. La vie voulait sortir de son corps, et chaque flot épais en charriait plus que la terre ne pouvait en boire avidement. Tant et tant qu’une flaque plus sombre commençait déjà à se former près de lui, qui teintait les lichens et les pierres. Il voulut parler mais ne put prononcer la moindre parole. À chaque effort son visage devenait plus pâle, ses membres se faisaient plus lourds, ses doigts plus gourds. Puis tout à coup son regard se figea, sa respiration se suspendit à l’infini, son cœur s’arrêta. J’ai senti le mien se serrer.

Flamarens s’était rapproché. Il était tout à côté de nous maintenant.

Il tenait la cithare entre ses mains. Celle que Pierre et moi avions mis une année entière à fabriquer selon ses plans.

Une cithare, une simple cithare. Un instrument vieux comme le monde, utilisé par les Hébreux et les antiques Chinois. Sa forme, cependant, se rapprochait plus du dessin organique d’une feuille d’érable que de la simple géométrie d’un instrument classique. Ses dix cordes de longueurs différentes étaient placées non pas de façon parallèle mais suivant un agencement qui paraissait défier toute logique. Aucun musicien de ma connaissance n’aurait cru possible d’en sortir un son.

Car Charles de Flamarens n’avait pas désiré une cithare banale. Descendant en ligne directe d’un seigneur médiéval dont la légende vantait la cruauté, il avait presque réussi à éclipser l’aura de son aïeul. Il détenait une fortune colossale qui lui assurait un pouvoir incontournable sur la région et qui lui servait entre autres à corrompre les autorités locales pour satisfaire ses excentricités. Il était connu pour être un grand amateur d’art, de ceux qui ne reculent devant rien pour arriver à leurs fins. Pour parfaire le tableau, sa réputation voulait qu’il s’intéresse également à l’occulte. De sombres histoires courraient à son sujet, qui ne se murmuraient que dans le secret des alcôves. Des histoires de chair et de sang.

Dans le sang qui s’étalait désormais à nos pieds, le sang de Pierre qui emportait toute sa vie, il déposa avec soin la cithare. Le bois happa le liquide rouge. Il se teinta peu à peu, comme s’il changeait d’essence. Charles s’assura que l’instrument entier s’imprègne d’écarlate. Il ne souriait pas, soupira.

— C’était un mal nécessaire, hélas. Il manquait une chose, un élément essentiel à l’instrument que vous m’avez apporté ce soir. Afin qu’il soit complet, le bois doit être imbibé du sang de son créateur. Je n’avais donc d’autre choix que de sacrifier Pierre. J’en suis désolé. Il était un grand luthier.

J’ai à peine entendu ce qu’il était en train de dire. Je ne comprenais qu’une chose. Pierre venait de mourir sous mes yeux et c’était cet homme qui l’avait tué. De sang-froid. Je voyais son visage tout près du mien. Une fureur incontrôlable s’est emparée de moi.

Et apparemment aussi de Marianne.

Elle parvint à saisir, en jouant de l’effet de surprise, le révolver que tenait son père, et à l’en frapper de la crosse. Flamarens tomba à terre, et elle braqua aussitôt le calibre vers Serge.

— Libère-le, Serge. Maintenant.

Le couteau hésita encore, mais la jeune femme tenait son arme fermement et on ne pouvait douter de sa détermination. La lame trancha mes liens au lieu de trancher ma chair.

Mon poing droit vola instantanément, pour s’écraser en plein dans le visage couturé de Serge, qui partit à la renverse, couché pour le compte.

Renaud tenta de dégainer son arme, mais Marianne surprit son geste et tira une sommation. Il resta pétrifié et laissa tomber le révolver.

Je me ruai vers Flamarens à terre, agrippant sa gorge dans une rage meurtrière. Il lutta faiblement mais il n’était pas de taille et j’ai commencé à serrer, serrer, serrer. Je n’avais qu’à peine conscience de ce que je faisais. Tout était rouge, tout était noir. Tout était violence et souffrance.

Une main se posa doucement sur mon bras. Je vis le visage de Marianne. Cela m’arrêta net, comme si le simple contact de sa main avait brisé mon aveuglement, comme si notre long tête à tête dans la voiture avait laissé des traces en moi. Une porte ouverte.

Renaud avait récupéré son arme et nous tenait en joue, mais n’osait pas agir par crainte de blesser son employeur.

Je compris que si je ne revenais pas à la raison, nous irions rejoindre Pierre dans un monde meilleur.

— Lâchez votre arme.

Je raffermis ma prise afin de montrer que je ne plaisantais pas. Mais je crois que mon expression était déjà suffisamment éloquente.

Marianne, voyant que le majordome obéissait, s’empressa de ramasser la cithare dont le bois couleur d’automne était maintenant luisant. Après un signe de sa part, je déroulais brusquement mon bras en lâchant ma prise et dans le même mouvement je lâchai un violent crochet du gauche qui envoya Charles de Flamarens valdinguer à travers les pierres. Lorsque son crâne heurta les restes d’une colonne, il s’immobilisa, sonné. Dans l’élan, Marianne et moi nous sommes mis à courir en direction de la voiture, à travers les ruines illuminées par la pleine lune.

Moins d’une centaine de mètres nous séparaient de la voiture noire qui était notre seule vraie chance de salut. Je crois n’avoir jamais couru aussi vite de mon existence. À chaque bond, je m’efforçais de garder les yeux fixés sur l’endroit où était posée la masse sombre de métal luisant. J’avais conscience de la présence de Marianne un peu derrière moi mais rien ne comptait plus que de se rapprocher du but.

Soudain, à une distance que je ne saurais estimer, une brutale impulsion éclata dans mon esprit. Je m’immobilisai, manquant de faire trébucher Marianne, et un son étrange, un mot que je ne connaissais pas jaillit de ma bouche.

Une image s’imposa d’elle-même.

L’image d’un homme d’âge mûr, la quarantaine robuste, dont le costume de soirée ne pouvait totalement dissimuler la carrure imposante. Cet homme qu’à peine une heure plus tôt j’avais croisé dans le jardin luxuriant qui servait d’écrin à la demeure du Comte de Flamarens.

Le souvenir de ce début de nuit revint à ma mémoire, syncopé, désordonné, et pourtant porteur d’un sens nouveau.

Le parc tout entier avait été éclairé par des milliers de bougies pour la Fête du Solstice. Les lueurs captives de lanternes de métal dansaient de façon mystérieuse sur les robes de soirée chatoyantes et dénudées des jeunes femmes ou sur les formes menaçantes ou grotesques des statues d’êtres mythologiques qui peuplaient l’endroit.

L’homme semblait être plongé dans la contemplation du reflet des étoiles et de la lune dans l’eau d’un bassin. Il portait une barbe bien taillée et aussi noire que la nuit. Machinalement, je tournai la tête dans sa direction. Presque au même instant, il se désintéressa de la surface liquide pour me regarder droit dans les yeux. Je fus capté par ce regard, aussi profond que le rêve le plus sombre. Quelques fugitives secondes, j’eus la sensation que mon environnement s’était rétréci pour se résumer à ce regard. Plus rien ne parvenait à attirer mon attention. Les bruits s’assourdirent. La lumière faiblit. Il a ostensiblement regardé le coffret que je portais dans mes bras. Puis quelque chose brisa le silence. J’eus la certitude que sans remuer ses lèvres, il m’avait chuchoté quelque chose. Une phrase dont je ne parvenais pas à saisir le sens et dont pourtant je savais qu’elle s’éclairerait au moment voulu, comme un jeu de mots ou un proverbe dont on comprend enfin, des années plus tard, le sens profond.

En pleine fuite dans la nuit, je venais juste de prononcer l’un de ces mots étranges, incompréhensibles mais lourds, que j’avais cru entendre dans le jardin de Flamarens. Presque aussitôt, un son étrange fit écho à celui que je venais de prononcer. Une note de musique d’une telle majesté qu’elle produisit en retour un silence plus complet que si le monde s’était arrêté de tourner, ou si la Création dans son ensemble avait retenu son souffle.

Un son véritablement divin. La cithare répondait.

Cela paraissait étrange, même à ce moment-là.

Ce son rappelait les autres, ceux de la Fête du Solstice au Manoir des Flamarens, que nous avions quitté quelque temps plus tôt. La plus courte nuit de l’année et son cortège de festivités débridées avaient toujours suscité chez moi une fascination proche de la ferveur religieuse, même si je n’ai jamais cru en un quelconque Dieu, ni en aucun de ses saints, et encore moins aux anges et aux démons. J’étais encore bien naïf à cette époque-là, même avec mes vingt-huit ans. Pourtant je sentais confusément que cette ambiance hors du temps naissait de quelque mystère ancien et cela me mettait à chaque fois dans un état d’esprit étrange.

Une heure plus tôt, autant dire une éternité, le coffret de bois laqué que je gardais dans mes bras n’était pas le seul à occuper mes pensées. Deux jours plus tard devait avoir lieu le combat pour lequel je me préparais depuis dix ans : le tournoi de Saint Gilles. Le remporter me conférerait le statut d’Initié de Saint Gilles, je deviendrais l’un des sept Maîtres de l’art de la boxe. Dix ans plus tôt, Yvain le Bel, le plus vieux et le plus respecté des Sept, avait fini par mourir, et les tournois de sélection pour trouver son successeur avaient débuté dans tout le pays. J’avais aussitôt désiré tenter ma chance. Je boxais depuis des années déjà, guidé et entraîné par René de Saint Antoine, un ancien élève d’Yvain. Il m’avait jugé prêt, il m’avait fait confiance, et j’avais entamé le long processus de sélection, enchaîné les combats durant dix longues années, pour me hisser jusqu’au tournoi final. Celui qui aurait lieu deux jours plus tard.

Dans la voiture noire de Pierre, je me sentais écartelé entre mon désir de gagner le combat des Initiés, et mon regret de quitter, si je le remportais, la douce routine de l’atelier de lutherie. Les gens s’étaient toujours étonnés de l’apparente dichotomie de ma vie, campée entre les gestes précis, méticuleux, doux et artistiques de la facture d’instruments, le contact chaud du bois, la faculté de créer, et les explosions brutales de force destructrice, la sueur, le sang et les cris, la rage de vaincre, les chocs, les craquements des os, les hématomes et la fureur des combats de boxe. Mais j’étais ainsi fait, et si l’on considère ce que je suis devenu, tout ceci entre dans un schéma cohérent qui témoigne de ce que pouvait être mon Destin. Créer et détruire ne sont pas des actes si éloignés l’un de l’autre si on les considère comme les deux faces d’une même pièce.

Mais les gens n’ont pas ce regard-là.

Pour l’heure, ma vie était donc divisée entre ces deux pôles apparemment contradictoires. Mon travail de Compagnon Luthier dans l’atelier réputé de Pierre de Saint Amans, le plus grand facteur d’instruments de tout le pays. L’entraînement éprouvant et les combats de boxe sous la houlette de René, dans l’espoir de devenir l’un des Sept.

Et ce soir-là, c’était ma vie de luthier qui avait décidé de mon Destin.

À suivre, dans quelques mois…

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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