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Making of a book, partie 2 : à livre ouvert, la maquette intérieure

par Fév 24, 2018L'encre & la plume, Les Pixe-Ailes du Phœnix0 commentaires

Dans cette triple série d’articles, Making of a bookCréer un livre électronique au format ePub3, et Making of an (audio)book, je vous propose le résultat de mes recherches, de mes essais et de mes explorations diverses et variées sur la façon de produire un livre, respectivement en format papier, en format électronique, et en format audio. Ces articles ont vocation à évoluer dans le temps, aussi n’hésitez pas à vous inscrire à la Newsletter d’écaille & de plume qui vous avertira de toute mise à jour.

Depuis quelques siècles, les livres prennent d’abord la forme d’un livre papier. Si les raisons de s’autoéditer n’ont jamais été aussi nombreuses dans les années 2020, il n’en reste pas moins que concevoir un livre papier implique de se poser quelques questions et d’y répondre précisément. Voyons ensemble comment résoudre chacune et réaliser ainsi une maquette de livre papier pas à pas.

Version

2.0

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Mise à jour

24/01/2021

Changement des versions
24/01/2021
  • Mise en avant d’Affinity Publisher et suppression d’InDesign que je n’utilise plus.
  • Précisions sur l’importation des styles.
  • Détail de la création d’une table des matières avec Affinity Publisher.
  • Mise en avant de Books on Demand et suppression des détails concernant la publication vers Amazon KDP.

Les outils

Si LibreOffice, Word, ou Pages sont capables de faire une mise en page correcte, j’ai pour ma part préféré un logiciel plus spécialisé, essentiellement parce que la gestion des images dans les traitements de texte me semble très primitive et que je voulais également placer des en-têtes et des pieds de page un peu particuliers. J’avais besoin d’un logiciel capable de gérer à la fois une typographie fine et pointilleuse, et une mise en page un peu inhabituelle, avec des automatismes avancés me permettant de gagner du temps sur les opérations de mise en page répétitives.

Je ne suis pas favorable au modèle des abonnements pour utiliser un logiciel, aussi ai-je écarté InDesign alors que c’était le choix le plus logique. En effet, il est utilisé de façon professionnelle dans l’industrie du livre et une première prise en main avait montré qu’il pourrait remplir le cahier des charges. Il m’a en effet permis de réaliser la première édition du Choix des Anges.

Et puis, à force d’attendre une alternative, elle a fini par émerger.

Affinity Publisher est enfin sorti.

Je l’ai acheté (car il s’agit d’une licence classique, sans abonnement) pour une cinquantaine d’euros. Un investissement que je ne regrette pas, car il sait faire tout ce que réalise InDesign, sans avoir besoin de passer à la caisse tous les mois. J’ai pu reprendre la maquette du Choix des Anges et l’améliorer facilement pour une deuxième édition.

Les étapes de la fabrication de notre maquette seront donc réalisées avec ce logiciel, très ergonomique, et surtout très puissant. Vous pouvez d’ailleurs, si vous voulez aller plus loin que cet article de découverte, vous procurer le manuel (en anglais seulement, hélas) qui vient de sortir.

Même pour un auteur autoédité qui ne sort qu’un livre par an, l’investissement est extrêmement rentable.

Quand la taille importe vraiment : le format du livre

Si vous regardez dans votre bibliothèque, vous serez peut-être surpris de remarquer que les dimensions des livres sont très disparates entre les éditeurs, et même entre chaque collection chez un même éditeur. Ainsi vos livres sont plus ou moins hauts, plus ou moins larges, plus ou moins épais.

Théoriquement, on peut grouper les dimensions des livres suivant trois grandes catégories.

Les livres de poche, plutôt peu hauts et peu larges, mais parfois très épais, sont très populaires depuis quelques dizaines d’années. Ils sont caractérisés par une mise en page peu aérée afin de faire tenir le texte dans un espace restreint. Leur confort de lecture, parfois, s’en ressent.

Les livres plus classiques assez hauts et larges, parfois encore plus épais car possédant souvent un papier de meilleure qualité, ont la plupart du temps une mise en page plus aérée, et un confort de lecture plus grand. Mais ce dernier point n’est, hélas, pas une règle absolue.

Les « beaux livres » sont très hauts et très larges et sont souvent des éditions luxueuses où le texte est mis en valeur de manière plus soignée encore. Il arrive même que la tranche soit dorée, que la reliure soit cousue et recouverte de cuir.

Et pourtant, il n’existe aucun standard de taille et chaque éditeur a conçu ses livres de poche dans des dimensions légèrement différentes.

Chacun choisit donc le format et les proportions qu’il désire.

Vous en aurez une autre preuve lorsque vous examinerez comme moi les formats acceptés à la fabrication par deux des prestataires les plus fréquemment mandatés par les auteurs autoédités : Amazon et Lulu. Vous remarquerez avec moi qu’il y a peu de formats qui correspondent exactement entre les deux.

Vous allez donc devoir faire votre choix selon plusieurs critères.

  • Nature du livre
  • Encombrement désiré du livre
  • Épaisseur désirée du livre
  • Taille des marges du texte
  • Longueur du texte
  • Existence de plusieurs tomes
  • Identité de collection ou d’édition
  • Coût de fabrication du livre et prix final de l’ouvrage

Pour ma part, j’ai commencé par avoir envie d’un format assez haut et assez large, afin d’obtenir un confort de lecture le plus grand possible et une épaisseur modérée, mon texte étant relativement court (un peu plus de 78 300 mots), mais au prix d’un encombrement assez important. Je ne sais pas pour vous, mais si j’adore lire des livres de poche parce qu’ils sont transportables partout, je déteste cette sensation physique très rapide d’avoir les pouces qui ne savent plus où se mettre parce que le texte est collé au bord des pages et que l’épaisseur du livre rend la force déployée pour laisser le livre ouvert très désagréable. Je finis par ne plus savoir comment tenir le livre et changer régulièrement de position : main gauche ou droite en haut de la reliure, ou chaque main tenant les bords extérieurs du livre, pouce droit ou gauche sur le bas de la reliure. Bref, je suis un lecteur difficile, physiquement parlant. J’avais donc pensé qu’un livre haut et large, mais non pas carré, serait bien plus agréable. De plus, j’avais envie d’une proportion qui se rapproche un peu de l’écran d’un iPad. J’avais également dans l’idée de proposer une maquette intérieure qui soit basée sur une identité visuelle ainsi qu’un format assez haut de gamme en choisissant une mise en page dite « demi-luxe » (nous en reparlerons plus tard).

Cependant, le coût de fabrication du livre était important, ce qui bien sûr en faisait monter le prix final. Et mes conseillers (car j’en ai), m’ont fait remarquer qu’un roman qui se lit, se lit de nos jours dans le métro, dans le train, en vacances, dès que l’on a un moment, et que les formats de petite taille sont bien plus pratiques pour cela.

J’ai donc fait un compromis et opté pour un format A5 (148 mm x 210 mm) assez grand pour mettre en place une mise en page aérée et ne pas être trop épais, mais assez petit pour tenir facilement dans un sac.

C’est un format qui est proposé facilement par les prestataires européens d’impression à la demande, dont Books on Demand, que j’ai choisi, le format A5 est en effet assez naturel, puisqu’il fait partie des standards de dimension.

Pour ce qui est des prestataires américains, comme Lulu ou Amazon, je fais le choix de ne plus en parler ici, car il existe de nombreuses ressources sur la Toile, et car j’ai envie de privilégier des moyens plus locaux et éthiques de publier un livre.

Mise en page

Cependant, la question de la taille du livre ne peut s’envisager qu’en prévoyant aussi le type de mise en page que l’on souhaite, car c’est aussi un point important pour le confort de lecture comme pour l’identité visuelle que vous désirez offrir à l’ouvrage.

Un livre, c’est donc du texte mis en forme. Encore faut-il savoir comment.

D’abord, il y a les marges, encore appelées blancs, qui vont nous demander un peu de vocabulaire.

On appelle blanc de tête et blanc de pied les blancs situés respectivement en haut et en bas de la page.

On appelle grand fond le blanc situé à l’extérieur de la page, et petit fond le blanc à l’intérieur de la page près de la reliure.

La façon dont ces marges sont agencées, aussi appelée empagement, va avoir une influence sur la disposition du texte et donc sur la façon de lire. On considère en effet qu’il est plus agréable d’avoir de la place pour poser les doigts sans gêner la lecture si les marges extérieures du livre sont assez larges, voire plus larges que les marges intérieures. D’où les noms de grand fond et petit fond. Il est d’ailleurs étonnant que nombre de sites, à commencer par Amazon, continuent à recommander de faire l’inverse. Une autre raison d’abandonner définitivement le mastodonte américain.

On calcule chaque blanc suivant une proportion, qui a pu varier à travers les époques. Vous en trouverez ici plusieurs exemples.

Connaissant mon attrait pour le nombre d’or, j’aurais pu me laisser tenter, mais c’est finalement vers une proportion différente que je me suis tourné, après avoir fait quelques essais. C’est la règle des 4, 5, 6 et 7/10 e.

Pour l’obtenir, il est nécessaire de calculer l’empagement, c’est-à-dire la place qu’occupe le texte dans la largeur de la page. Classiquement, on retient trois tendances d’empagement.

  • Empagement « demi-luxe » : le texte (aussi appelé justification) occupe les ⅔ de la largeur de la page. La justification est donc de 98 mm pour une page A5 dans ce choix d’empagement.
  • Empagement courant : le texte occupe les ¾ de la largeur de la page. La justification est de 111 mm pour une page A5 dans ce choix d’empagement.
  • Empagement « luxe » : le texte occupe les ⅝ de la largeur de la page. La justification est de 92,5 mm pour une page A5 dans ce choix d’empagement.

L’empagement détermine donc ce que l’on appelle le blanc total, soit la proportion de la largeur de la page qui reste blanche.

Dans mon cas, sur une page A5 de largeur 148 mm, en choisissant un empagement demi-luxe, le blanc total est de 50 mm. Il ne reste plus qu’à calculer les blancs :

  • Blanc de tête : 5/10 e du blanc total (soit 25 mm dans mon cas)
  • Blanc de pied : 7/10 e du blanc total (soit 35 mm dans mon cas)
  • Petit fond : 4/10 e du blanc total (soit 20 mm dans mon cas)
  • Grand fond : 6/10 e du blanc total (soit 30 mm dans mon cas)

Concrètement, avec Affinity Publisher, on commence par créer un document en pages vis-à-vis, et à indiquer la taille du papier comme les dimensions des marges (Fichier > Nouveau). On active ensuite la grille (Affichage > Gestionnaire de grille et d’axe...) et son magnétisme (Affichage > Gestionnaire de magnétisme...) afin de positionner correctement tous les éléments sur la page.

Le tout donne une impression, me semble-t-il, assez harmonieuse.

Vous voilà prêts à commencer votre maquette.

En-têtes et pieds de page

Vous aurez remarqué depuis bien longtemps que les blancs d’un livre sont souvent utilisés pour y inscrire des indications qui n’ont rien à voir avec le texte lui-même, mais qui permettent au lecteur de se repérer. Le numéro de la page par exemple, est une information précieuse.

On appelle ces zones les en-têtes (donc, placées dans le blanc de tête) et les pieds de page (placés dans le blanc de pied, merci, Monsieur de La Palice).

Affinity Publisher fonctionne avec le principe des cadres. On crée des cadres que l’on remplit ensuite d’un contenu. Ce peut être une image (cadre d’image), du texte (cadre de… texte) ou autre chose encore (mais pour la mise en page d’un roman, nous ne nous en servirons pas).

Il nous suffit de sélectionner l’outil de création d’un cadre de texte et de le créer à l’endroit qui nous sied en se servant de la grille, mais aussi de quelques repères, comme par exemple les marges de notre page, qui sont bien visibles.

Ensuite, nous remplissons le cadre. Si vous désirez que le numéro de la page soit automatiquement ajouté, vous sélectionnez l’option Texte > Insérer > Champs > Numéro de page. Pour les autres informations, il est d’usage d’indiquer le nom de l’auteur (mais est-ce bien nécessaire ?), le titre du livre, le titre du chapitre en cours. À vous de voir ce que vous désirez faire.

Pour ma part, vous le verrez, ma maquette est plus atypique. J’ai eu envie de positionner mes numéros de page sur les deux grands fonds, et le titre du livre comme le titre du chapitre en cours sur le grand fond de la page de gauche seulement.

Les gabarits

Je ne vous apprendrai rien en vous faisant remarquer qu’un livre a souvent des pages de gauche différentes de ses pages de droite. C’est encore plus vrai quand les marges intérieures et extérieures sont différentes entre elles. C’est évident quand on remarque que les en-têtes et les pieds de page sont différents à droite et à gauche. Enfin, pour enfoncer le clou, la convention veut qu’en Occident les chapitres débutent toujours sur une page de droite sans en-tête ni pied de page, et souvent même sans être numérotés (sans folio, dit-on dans le jargon).

Pour ne pas avoir à créer à chaque fois les marges des pages, ou à noter les numéros des pages par exemple, on peut créer des gabarits de pages. Les gabarits (appelés maquettes et planches dans Affinity Publisher) sont des modèles qui seront utilisés par le logiciel chaque fois que vous en aurez besoin. Tous les éléments présents sur un gabarit seront automatiquement répercutés sur toutes les pages de votre livre qui utilisent ce même gabarit. C’est très utile pour inscrire le numéro des pages et pour les en-têtes et les pieds de page, mais aussi pour les pages liminaires ou les premières pages de chapitre, qui ne sont jamais numérotées si l’on suit les règles admises.

Ces gabarits seront très pratiques par la suite, car ils permettent de gagner énormément de temps dans la réalisation de la maquette, mais aussi parce qu’ils vous permettent de créer une unité visuelle d’ouvrage en ouvrage. Vous pouvez ainsi décider d’une mise en page qui sera réutilisée pour vos livres ultérieurs.

C’est pour cela qu’en plus des gabarits évidents que sont les pages droite de texte et gauche de texte, je me suis créé d’autres modèles, comme ceux des premières pages de chapitre, ceux des pages de titre de chapitre, ou même des pages avec des textes ou des images qui se répèteront toujours au même endroit. Nous verrons plus loin quelles sont les pages qui méritent de créer un gabarit.

Pour le moment, de façon pratique, comment créer un gabarit ?

Tout simplement dans le panneau de gauche d’Affinty Publisher, onglet Pages, section Maquettes. Le logiciel a déjà créé une maquette appelée Planche de type A, qui correspond aux pages de droite et de gauche standard, vides, en vis-à-vis. En double-cliquant dessus, le logiciel vous les affiche. Vous pouvez les modifier à loisir et chaque changement sera répercuté sur toutes les pages qui utilisent ce gabarit. Vous pouvez aussi cliquer sur l’icône symbolisant une page stylisée pour ajouter une nouvelle maquette, Planche de type B, que vous pouvez renommer facilement.

Pour appliquer un gabarit, vous sélectionnez une page dans votre « chemin de fer » et vous glissez-déposez le gabarit voulu dessus. Rien de plus simple.

Toujours une question de styles

Nous avons déjà longuement parlé des styles et de leur utilité dans un traitement de texte ou même dans Scrivener, que ce soit pour créer un livre papier ou un livre électronique.

Les styles sont également essentiels dans la conception de la maquette.

Ils vont sans doute vous prendre du temps pour les créer, les peaufiner, les bichonner, mais une fois définis, ils vont vous simplifier la vie d’une façon incroyable, car ils possèdent un pouvoir rare dans le monde de l’informatique : ils sont interopérables.

Mon flux

En effet, mon flux de travail est essentiellement basé sur deux piliers.

Le premier est le format de texte RTF (rich text format), qui est reconnu et lu par tous les logiciels de traitement de texte comme par Scrivener ou Affinity Publisher.

Le deuxième est l’utilisation de styles qui sont inscrits, engrammés dans le fichier RTF, et que chaque logiciel sait reconnaître.

Un texte marqué avec un nom de style particulier dans Scrivener (ou dans Word ou dans LibreOffice) gardera attaché le nom de ce style si on l’exporte en format RTF.

Ainsi, comme nous l’avons vu dans la première partie de cette série, j’ai créé un style dans Scrivener qui me permet de marquer les portions de texte qui sont vues par un autre angle, ou qui désignent une scène décalée temporellement ou spatialement, des flashbacks.

Lorsque j’aurai compilé le texte, les portions marquées de ce style seront reconnues par Affinity Publisher, ce qui me permettra d’appliquer le style définitif propre au livre papier.

Mais mieux encore (et nous le verrons dans l’épisode 3 de la série Créer un EPUB), la compilation de Scrivener peut marquer le texte stylé pour le lier à la feuille de style CSS.

Il n’est donc besoin que ne marquer une seule fois le texte original, pour y appliquer ensuite les styles propres à chaque canal de diffusion : livre papier dans Affinity Publisher, livre électronique dans Brackets ou Sigil.

Les styles nécessaires à un livre papier

Pour un livre papier, vous allez avoir besoin de créer quelques styles en plus de ceux déjà pensés pour le texte lui-même et que nous avons déjà vu dans l’épisode 1 de cette série d’articles. Il y aura donc :

  • Le style des en-têtes et des pieds de page (numéros de page, notamment).
  • Le style du titre du livre.
  • Le style de la table des matières.

Les styles de Scrivener ne servent donc que pour marquer le texte sans véritablement lui donner une identité, tandis que cette dernière est définie dans les styles conçus dans Affinity Pulisher qui permettent de créer l’habillage véritable du livre.

Il faut bien distinguer styles de paragraphes (qui s’appliquent donc à l’ensemble d’un paragraphe et en modifient toute la structure et l’apparence : est-il centré, justifié à droite, à gauche, aligné à droite ou à gauche, avec quel retrait de première ligne, quel retrait tout court, etc.) et styles de caractères qui s’appliquent seulement à certaines parties d’un paragraphe par exemple (italique, avec quelle fonte, avec des ligatures, etc.).

Par exemple, mon corps de texte est défini par un style de paragraphe justifié, sans retrait global mais avec un retrait de première ligne de 3 mm, et un style de caractère de fonte Paciencia normal de corps 10 pixels avec un interlignage de 13 pixels, des ligatures communes et discrétionnaires activées.

Je vous conseille fortement de faire table rase des styles qui sont embarqués dans Affinity Publisher, car ils risquent de faire doublon et de vous perturber ensuite. Pour cela, cliquez sur Texte > Styles de texte > Détacher et supprimer tous les styles. Il ne restera plus que les ceux nommés [Aucun style] dans les styles de caractères comme dans les styles de paragraphes.

Le texte brut : compiler depuis Scrivener

Les phases préparatoires étant terminées, il est temps d’intégrer le texte dans la maquette. Pour cela il faut tout d’abord exporter celui-ci depuis Scrivener, ou, selon le terme qui convient le mieux, le compiler. Cette opération est un paramétrage qui mérite qu’on s’y attarde un peu, et je l’ai donc détaillée dans une autre série d’articles, dont le premier vous aidera à mieux vous y retrouver.

L’objectif est d’obtenir un fichier RTF reprenant l’intégralité du texte, celui de l’œuvre comme celui des pages liminaires, en un flux continu comportant aussi les styles utilisés.

Vous pouvez utiliser le format de compilation que j’ai créé spécialement pour cette opération. Il est téléchargeable librement, et vous pouvez le modifier selon vos propres besoins. Pour l’utiliser tel quel :

Il vous suffit de cliquer sur Fichier > Compiler et une fenêtre s’ouvre par-dessus votre projet.

Trois vérifications s’imposent.

Sélectionnez bien le format de compilation nommé Publication dans la partie de gauche (1).

Vérifiez que le format de sortie du texte compilé soit bien RTF dans la barre du haut, même si pour l’importation dans Affinity Publisher, le format DOCX fonctionne tout aussi bien (2).

Et surtout, veillez à ce que toutes les portions de votre texte soient incluses dans la compilation dans la liste de droite (3). Au besoin, cochez ou décochez ce dont vous avez besoin ou pas.

Après quelques secondes, vous trouverez sur votre bureau un fichier RTF contenant tout votre texte.

Petite incursion dans le format de compilation de Scrivener

Pour ceux que ça intéresse, il est temps de se pencher sur le format de compilation que j’ai créé dans Scrivener dans l’optique de mon flux de travail. Nous nous intéresserons seulement ici à la partie RTF et nous verrons dans un autre article la partie EPUB.

L’objectif du format est de sortir un texte simple dont les styles sont préservés.

Pour entrer dans son mécanisme, faites un clic droit et sélectionnez Modifier.

Vous pourrez l’explorer en détail vous-mêmes mais en voici les principaux points.

En sélectionnant l’option RTF, vous allez voir que les sections de texte seul sont très peu formatées. Les sections des titres de chapitre sont agencées de façon à ce que la compilation écrive « Chapitre » puis un saut de ligne et le numéro du chapitre en incrémentant à chaque fois. Les styles importants sont indiqués et les noms qu’ils vont porter dans le fichier également (c’est capital pour pouvoir ensuite changer vos styles en un clic).

Le texte n’est pas mis en page.

Les autres options n’ont pas été utiles donc je ne les détaille pas.

Intégrer le texte dans Affinity Publisher

Une fois en possession de votre texte compilé par Scrivener, vous pouvez revenir dans Affinity Publisher.

La partie la plus excitante de la fabrication du livre commence.

Créez un cadre de texte sur la première page, puis allez dans Fichier > Insérer..., sélectionnez le fichier RTF que Scrivener a compilé pour vous.

Le texte est alors automatiquement ajouté dans le cadre de texte, mais comme ce dernier est trop petit, le logiciel le tronque et affiche un petit symbole en forme de triangle rouge en face d’un œil barré pour vous signaler qu’il le fait.

Créer un gabarit avec des cadres de textes liés

En double-cliquant sur la Planche de type A dans l’onglet Maquettes du volet de gauche d’Affinity Publisher, le logiciel va vous ouvrir le gabarit de vos pages de texte.

Avec un outil Cadre de texte, vous pouvez insérer sur la page de gauche une zone où prendra place votre texte. Et vous faites la même chose pour le cadre de droite. Cliquez ensuite sur l’icône en forme de triangle blanc qui se trouve en bas à droite du cadre de gauche. Votre pointeur s’accompagnera d’une icône symbolisant une chaîne et quand vous le dirigerez vers le cadre de droite, celui-ci se trouvera sélectionné. Cliquez dans le cadre de texte de droite.

Vous venez de lier les deux cadres de textes.

Ainsi, quand un texte sera inséré dans le cadre de gauche, s’il est trop long pour y être contenu tout entier, il « coulera » jusque dans le cadre de droite.

Voici les deux pages de droite et de gauche de base de votre livre toutes prêtes à recevoir votre flux de texte.

Le Chemin de fer

C’est ainsi que l’on nomme la suite des pages de votre livre, sous la forme d’une liste de pages en vis-à-vis dont la première est toujours une page de droite, et la dernière une page de gauche.

Afin que votre livre soit correctement imprimé, vous devrez toujours vérifier que le nombre total de pages soit un multiple de 4. En effet, un livre n’est rien d’autre qu’une série de feuilles pliées en deux associées entre elles, ce qui crée obligatoirement 4 faces à chaque feuille. Vous serez donc peut-être obligés de rajouter une, deux ou trois pages blanches à la fin de votre ouvrage pour obtenir ce multiple de 4.

Cliquez alors sur la Page 1 de votre Chemin de fer dans l’onglet Pages.

Rajoutez des pages en cliquant sur l’icône en forme de page vierge. Affinity Publisher vous demande combien de pages vous désirez rajouter, avant ou après votre première page (après me semble plus approprié, non ?), et quelle maquette (donc quel gabarit) utiliser. Répondez 3 pages (pour obtenir un nombre de pages total qui soit multiple de 4, bien sûr), après la page 1, et selon la Planche de type A.

Il ne vous reste plus qu’à lier le cadre de texte de la première page avec celui de la page de gauche suivante, pour que le texte se mette à « s’écouler » de page en page… votre livre prend forme devant vous.

Les styles importés

Comme vous avez auparavant pris soin de faire table rase des styles par défaut d’Affinity Publisher, vous n’allez retrouver que vos propres styles, ceux qui ont été importés depuis Scrivener, plus les styles Normal, créé par Scrivener lors de la compilation pour marquer le corps du texte, et les [Aucun style] en paragraphe et en caractère.

Pourtant, l’affichage est un peu mensonger, et je vous conseille de demander à Affinity Publisher de Réinitialiser le formatage du texte, c’est-à-dire d’enlever toutes les mises en forme qui ne sont pas prévues par les styles. Cela peut se faire assez facilement en cliquant sur l’icône en forme de T englobé dans un cercle inachevé sur la droite du volet des styles, après avoir préalablement sélectionné tout votre texte (raccourci clavier Command+A).

Vous pouvez constater la différence.

À partir de là, votre travail va être de détailler style par style la mise en forme que vous décidez de leur appliquer. Espacements, fontes, taille, tabulations, justification, typographie, etc.

Si vous avez déjà créé des styles qui vous conviennent dans un précédent fichier d’Affinity Publisher, vous pouvez les importer. Cela vous fera gagner du temps. Il suffit de cliquer sur Texte > Styles de texte > Importer des styles de texte... et de choisir un fichier dont les styles portent exactement les mêmes noms que ceux de votre fichier actuel. Le logiciel ouvre une fenêtre modale qui vous demande ce que vous voulez faire des styles qui portent le même nom. Si votre fichier précédent avait une mise en forme qui vous convenait, le tour est joué en un clic…

Affiner la mise en page

Une fois le texte intégré dans le nombre de pages nécessaire et les styles bien fixés, vous allez devoir soigner quelques détails.

Tout d’abord, par convention, un chapitre débute toujours sur une page de droite. Si par hasard vous aviez un chapitre qui commençait sur une page de gauche, il vous suffirait d’insérer une nouvelle page blanche, sans en-tête ni pied de page, avant cette page-là, sans lier le cadre de texte. Vous allez ainsi décaler automatiquement le début du chapitre sur une page de droite et retomberez sur vos pieds.

C’est le moment de vérifier si les styles choisis pour certains passages de texte sont harmonieux, si vous n’avez pas trop de veuves et d’orphelines. Je ne veux pas parler ici de votre rôle de soutien de famille, mais bien de lignes qui appartiennent à des paragraphes et qui se retrouvent isolées en bas de page (les veuves) ou en début de page suivante (les orphelines). Personnellement je préfère en laisser plutôt que de déséquilibrer la symétrie des deux pages, mais c’est un choix non académique que j’assume. Par contre, évitez à tout prix de vous retrouver avec une orpheline sur la dernière page du chapitre (voire du livre), cela serait assez disgracieux (à mon goût, bien sûr). Au besoin, jouez avec un saut de ligne ou avec la valeur de l’interligne.

Les pages liminaires

Un livre, c’est le corps du texte, mais pas seulement.

Dans un essai, il peut y avoir une préface, un index, une bibliographie.

Dans un roman, il peut même y avoir un index des protagonistes (ce serait une bonne idée pour Game of Thrones, par exemple, et certaines éditions le font pour les œuvres de Tolkien), des appendices pour expliquer certains détails propres à l’univers (là encore, le Seigneur des Anneaux en regorge).

Mais il y a aussi toute une série de pages auxquelles on ne pense pas spontanément mais qui font aussi qu’un livre est entier.

Outre les pages de garde (vierges) situées au tout début du livre imprimé, on trouve :

La page de faux-titre.

La page de titre.

À son verso le colophon, sur lequel, généralement en bas de page sera apposé votre copyright (ou la mention d’une éventuelle licence Creative Commons), l’ISBN de l’édition, et l’année de l’édition, la raison sociale de l’éditeur, parfois le nom de l’imprimeur.

La table des matières, qui recense les chapitres, leurs numéros et leurs noms éventuels, et le numéro de la page où ils débutent, mais aussi le numéro des pages des éventuelles annexes.

La bibliographie de l’auteur peut également apparaître, généralement sur la page de gauche qui fait suite à la page de titre. Y sont listés les ouvrages déjà publiés dans les différentes maisons d’édition.

Toutes ces pages peuvent facilement être composées dans Affinity Publisher à partir d’un gabarit.

Les images

Les images éventuelles que vous allez intégrer dans votre maquette intérieure doivent répondre à certains critères pour être imprimées ensuite avec une qualité satisfaisante.

Tout d’abord, veillez à ce qu’elles soient d’une résolution suffisante, d’au moins 300 dpi/ppp/ppi c’est-à-dire 300 pixels par pouce. C’est le standard professionnel qui vous garantira que l’image ne sera pas pixellisée et illisible, ou pire, dégradée, lors de l’impression. Pour cela, utilisez si besoin est Affinity Photo, le concurrent beaucoup plus abordable de Photoshop (et sans abonnement, vous m’avez compris).

Ensuite, leur format est important. Privilégiez les formats lourds mais très fidèles que sont le TIFF, le PSD, le BMP, ou le PNG, voire le PDF.

Enfin, leur intégration doit les mettre en valeur. Traditionnellement, dans un roman, elles sont placées sur la page de gauche qui précède un titre de chapitre. Dans certaines œuvres décrivant des univers fantasmés comme la fantasy ou la science-fiction, des cartes sont même intégrées pour aider le lecteur à suivre la géographie, la politique, le périple des héros, et ces cartes se placent la plupart du temps en début d’ouvrage.

La table des matières

Scrivener est capable de créer une table des matières lors de la compilation, mais elle ne servirait à rien dans mon flux de travail, puisque la pagination va complètement changer lors de la mise en page dans Affinity Publisher. C’est donc à ce dernier qu’est dévolue la charge de construire l’indispensable repère destiné au lecteur.

Et vous allez voir, la chose est assez aisée à construire.

Tout d’abord, vous devez indiquer au logiciel quelles sont les différentes sections de votre livre : parties, chapitres, sous-chapitres, bref, les grands repères que vous voulez donner au lecteur. Pour ce faire, dans l’onglet Pages du volet de droite d’Affinity Publisher, cliquez sur l’icône en forme de signet, le Gestionnaire de sections. Par défaut, il vous présente une section qui englobe la totalité de votre ouvrage. Sur votre chemin de fer, double-cliquez sur la première page que vous désirez marquer, celle du premier repère que vous voulez indiquer. Puis dans le Gestionnaire de sections, cliquez sur l’icône en bas à gauche qui représente une page planche cornée. Vous venez de créer une nouvelle section. Vous pouvez lui donner son titre, par exemple, là, elle va pour moi s’appeler Première partie. Vous ferez de même pour le premier chapitre de cette première partie, etc. Jusqu’à ce que toutes les sections de votre ouvrage soient marquées.

Veillez bien à ce que dans toutes les sections, vos titres (ici Livre premier et La tour brisée) soient dotés de styles correspondants et hiérarchiquement ordonnés. C’est-à-dire que les grandes sections (ici les parties du livre) seront dotées d’un titre de hiérarchie header1, les plus petites d’un titre header2 (ici les chapitres du livre), les suivantes d’un titre header3 (ce pourraient être les sous-chapitres). C’est très important pour la cohérence de votre table des matières et pour l’automatisation de sa stylisation ensuite.

Sur une page avant votre premier chapitre, dans un cadre de texte, cliquez pour insérer du texte.

Puis allez dans la partie Table des matières dans le volet de gauche, cliquez sur l’icône en forme de plusieurs pages intitulée Insérer. Le logiciel crée un texte qui dit « aucune entrée de TDM trouvée », mais il a créé une première table des matières, nommée TDM1, que vous pouvez maintenant paramétrer. Si vous cochez Header1 et Header2 dans les cases des noms de styles d’entrée, la table des matières se met automatiquement à jour et vous voyez apparaître les titres des sections et leurs numéros de pages.

Il ne vous reste plus qu’à modifier les styles de la table des matières, regroupés sous les dossiers TDM : Entrée et TDM : Numéro, pour que votre table des matières soit parfaite. Par exemple en donnant une taille décroissante aux diverses entrées en fonction de leur hiérarchie.

La création du PDF

Une fois tous les éléments de votre maquette positionnés, toutes les pages correctement remplies de texte, tout le corps de votre texte parfaitement placé dans les cadres adéquats, le nombre de pages vérifié, les images de bonne qualité intégrées, il ne reste que la dernière étape, celle qui va produire le document final, l’exportation dans un format stable et lisible par tous.

Ce format standard de l’industrie est le PDF.

Cependant, n’importe quel PDF ne fera pas l’affaire. Vous devez vous assurer de plusieurs critères.

Tout d’abord les fontes (ou polices de caractères) doivent être incorporées dans le PDF, de manière à ce que les caractères soient bien imprimés. Affinity Publisher fait ça très bien, automatiquement, sans même que vous ayez à le préciser.

Ensuite, il faut veiller à fournir un fichier aux normes demandées par votre service d’impression à la demande. Faut-il des traits de coupe, des repères ? Ou bien, au contraire, faut-il veiller à ce qu’il n’y en ait surtout pas ? Vous devrez vérifier cela dans Fichier > Configuration du document..., onglet Fond perdu.

Pour Books on Demand, vous devez aussi fournir un fichier PDF feuille à feuille, c’est-à-dire que la vue en double page que vous avez utilisée jusque là pour la mise en page, si elle est très pratique, n’est pas du tout adaptée. Il faut décocher dans Fichier > Configuration du document..., onglet Disposition l’option Doubles pages. Cela va prendre quelques minutes mais Affinity Publisher changera tout le fichier de manière à ce que chaque page soit présentée séparée des autres.

Vous êtes prêt à créer votre PDF grâce à Fichier > Exporter..., onglet PDF, préréglage PDF (pour impression). La résolution des images tramées sera bien de 300, comme nous en avons parlé plus tôt.

En cliquant sur Exporter, vous obtenez un très beau fichier de la maquette intérieure de votre livre, qui est prêt pour partir à l’impression…

Ah, peut-être pas, parce qu’il manque un très léger détail qui a pourtant une importance capitale : une couverture.

Et c’est ce que nous verrons dans le prochain épisode.

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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