Constantine, ou l’Enfer pavé de bonnes intentions

Constantine, ou l’Enfer pavé de bonnes intentions

Constantine, ou l’Enfer pavé de bonnes intentions

Les univers de superhéros sont parfois de vrais capharnaüms. On y trouve aussi bien des mutants (Les X-Men, ou Captain America chez Marvel, Flash chez DC) que des humains ayant développé des capacités extraordinaires à cause d’une histoire dramatique (Black Window chez Marvel, Green Arrow chez DC), ou encore des extraterrestres (Guardians of the Galaxy pour Marvel, Superman chez DC).

Assez singulièrement, le monde de l’occulte occupe une place un peu plus marginale dans les deux univers principaux des comics.
Le Docteur Strange dans celui de Marvel, dont Benedict Cumberbatch va bientôt être l’incarnation cinématographique.
Et John Constantine pour l’univers de DC Comics, qui vient de voir se terminer l’unique saison d’une série télévisée qui lui est dédiée.

Comme tous les superhéros, John Constantine possède un don fantastique, et une faiblesse fondamentale.

Gamin des rues venu de Liverpool, en Angleterre, il entre dans le monde de l’occulte très tôt, par attrait du danger. Il devient rapidement un maître dans les arcanes magiques, et se lance dans la pratique de l’exorcisme. Mais l’un d’entre eux tourne très mal, et l’âme de Constantine est vouée à la damnation éternelle à cause des actes perpétrés lors de cette séance catastrophique. Survivant néanmoins à l’épreuve, il tente de se racheter en combattant les forces du Mal venues des Enfers partout là où cela est nécessaire, n’hésitant pas à risquer sa vie comme celle de ses comparses Zed et Chas, ou de ses anciens associés. Damné mais Élu en même temps, il est plus ou moins guidé par un ange mystérieux, Manny, dont les motivations sont troubles. Ce petit groupe affronte ensemble une menace sourde nommée la Levée des Ténèbres, fomentée par une organisation secrète très ancienne, la Brujeria, à travers de nombreuses affaires sataniques faisant surface dans tout le territoire des États-Unis.

Zed est une médium très puissante, et Chas semble avoir plusieurs vies, mais ce sont surtout les immenses connaissances, l’audace suicidaire et le talent fabuleux teinté de désinvolture crâne de John Constantine qui leur permet de survivre et de contrecarrer les plans de la Brujeria.

Ce n’est pas la première fois que le magicien désinvolte et damné est porté à l’écran, si l’on se souvient de la tentative ratée du film des années 2000 avec Keanu Reeves dans le rôle-titre.

La direction prise par la série est cependant assez différente de son aîné.

L’univers, tout d’abord, est beaucoup moins centré sur une base judéo-chrétienne. Si dans le film l’Archange Gabriel et Lucifer étaient les références de chaque côté de l’affrontement, le champ est considérablement plus ouvert dans la série, avec des démons égyptiens ou assyriens, des exorcismes en langue vaudou, en sanskrit, en quechua, même. C’est d’ailleurs à la fois une qualité, et un défaut.

Élargir le champ de bataille pour l’ouvrir à d’autres traditions magiques permet de faire varier les points de vue, de donner plus de couleurs aux rituels magiques accomplis dans la série que les simples symboles judéo-chrétiens, rapidement évoqués dans les deux adaptations (la croix, l’eau bénite, les prières en latin, utilisées seules, pourraient sans doute paraître réductrices et répétitives). Cela donne aussi l’impression que le Mal est universel et que chaque tradition occulte dans le monde et au fil du temps a trouvé des parades originales et complémentaires pour lutter contre lui.

Mais le revers de la médaille est de perdre en cohérence, et de ne rester qu’à la surface des choses.

Les arts magiques occidentaux (et donc judéo-chrétiens) ne se limitent pas aux rituels de la Sainte Église Apostolique et Romaine et à un remake de l’Exorciste. On aurait pu plonger dans les traditions hermétiques alchimiques ou kabbalistiques juives comme chrétiennes, se servir de la diversité des récits bibliques plus encore, intégrer quelques idées venues de l’Apocalypse, voire approfondir les origines anglaises du personnage et le rattacher aux mages élisabéthains célèbres comme John Dee, ou à Aleister Crowley. Cela demandait peut-être de fouiller dans les arts occultes historiques et de faire quelques recherches pour rendre tout cela cohérent avec l’univers du comic book, mais au vu des recherches linguistiques pour faire entendre de véritables mots de vaudou, d’égyptien antique ou de sanskrit, cela ne me paraît pas un problème.

Le traitement est donc volontaire. On y retrouve la façon qu’ont les Américains de voir leurs cousins d’outre-Atlantique, et leur difficulté à penser l’histoire longue et complexe du Vieux Continent autrement que comme une sorte d’exotisme rafraîchissant.

Autre caractéristique de la série, un penchant pour la caricature très marqué, qui heureusement s’atténue quelque peu au fil des derniers épisodes.

Non seulement le personnage de John Constantine est-il taillé à la serpe dans les premiers épisodes, mais encore son évolution est-elle très lente. Sa culpabilité n’est que très légèrement effleurée à la fin de la saison, et son arrogance, sa désinvolture, sont beaucoup trop appuyées. Même pour quelqu’un qui apprécie les poncifs attachés aux personnages arrogants (de Han Solo à Cobra en passant par James Bond), la coupe est très rapidement emplie à ras bord. Le personnage en devient parfois agaçant, et l’identification s’en trouve amoindrie. On n’espère qu’une chose : qu’il en prenne plein la figure pour enfin perdre de sa superbe et redescendre sur terre.

Cela change il est vrai de l’interprétation monocorde de Keanu Reeves avec son talent inégalé pour ne faire apparaître sur son visage que le même masque dénué d’expression dans toutes les situations du film.

Le choix également d’escamoter le cancer du poumon et l’urgence que vivait le personnage dans le film sur la fin imminente de son existence et la confrontation inévitable avec son Destin, change considérablement la portée de sa damnation.

Les personnages secondaires de Zed et de Chas sont plus intéressants, mais la caricature n’est pas non plus absente. Zed est bien évidemment une plantureuse créature qui joue de séduction avec Constantine tout en traînant un passé lourd et complexe que la série n’a pas le temps d’explorer, tant son rythme est lent. Chas est le plus humain, finalement, bien qu’il n’apparaisse pendant toute la première moitié de la série que comme un faire-valoir étrange.

Même Papa Midnite, le sorcier vaudou, ni ennemi, ni allié de Constantine, est d’abord présenté comme un guignol, avant de prendre plus de profondeur ensuite.

Quant à Manny, son rôle ambigu aux côtés de Constantine et son rapport avec les Mortels ne sont qu’esquissés, et trop tardivement également.

La série a été interrompue après la fin de la première saison. Trop chère à produire (le nombre d’effets spéciaux par épisode est exponentiel), pour un succès probablement mitigé. Certainement que son mauvais positionnement sur le ton et l’ambiance, sur le rythme de l’intrigue générale, sur son propos, a joué un grand rôle dans cet échec.

C’est bien dommage, car au-delà de ces défauts, les derniers épisodes devenaient plus prometteurs, et la trame commençait à prendre une tournure moins manichéenne, avec le twist final.

Restent de très bonnes idées dans certains épisodes, comme dans le troisième, The Devil’s Vinyl, où un disque portant la voix du Diable devient l’enjeu.

Et malgré tout un certain attachement aux personnages et à l’univers.

https://youtu.be/CNPIG40KcbU

Projet : Le Choix des Anges

Projet : Le Choix des Anges

Projet : Le Choix des Anges

Plusieurs projets m’occupent depuis quelques années.

Commencer par vous présenter le plus ambitieux me semble judicieux car c’est celui qui serait le plus proche de se concrétiser, du moins sous l’une de ses formes, la forme écrite.

Au départ en effet, il n’était pas vraiment question d’écriture, mais plutôt de réaliser mon troisième film.

J’avais envie cette fois-ci de rendre à l’image un morceau de mon univers personnel en mêlant fantastique, mythologie, ambiance de film noir et vieilles pierres tout en explorant un peu le thème du choix qui traverse le genre noir. J’avais aussi l’ambition de montrer qu’il était possible d’adapter les codes du genre noir, né en Amérique, à notre vieille Europe et de l’enrichir de quelques nouvelles trouvailles.

Un film comme Angel Heart avec Robert De Niro et Mickey Rourke, a déjà réussi ce tour de force en mélangeant avec brio un folklore carribéen et vaudou à une intrigue typique du noir.

C’est d’ailleurs sur cette base que j’ai commencé à travailler l’intrigue, pendant plusieurs mois, aidé et aiguilloné régulièrement par les deux sœurs R (qu’elles en soient ici remerciées tout comme Mlle N qui tout comme elles suit l’aventure en corrigeant le manuscrit).

L’histoire de départ se concentrait donc sur la figure emblématique du détective privé, et sur le triangle amoureux dominé par la femme fatale (adultère) et le mari richissime et corrompu. J’ai griffonné de longues heures des pages et des pages de croquis, de schémas heuristiques et de notes diverses pour tenter de trouver une intrigue qui pourrait également intégrer le fantastique, sous les traits du Diable tentateur, et la problématique des différentes alternatives d’un choix cornélien.

Las.

Loin de progresser, j’ai piétiné pendant de longs mois, cherchant à concocter des motivations crédibles pour les personnages, à travailler leurs caractères, à trouver des situations classiques du noir qui pourraient être ré-interprétées de façon intéressante. Je me suis rendu compte que l’écriture sous la forme très codifiée d’un scénario de cinéma n’était vraiment pas une chose dans laquelle j’étais doué.

Alors j’ai eu un déclic soudain et j’ai décidé de revenir à ce que je savais faire le mieux : une écriture littéraire.

Tout s’est débloqué très rapidement et les décors comme les personnages se sont posés assez naturellement sur une intrigue qui épouse plus encore mon univers personnel.

Le Choix des Anges, le pitch

Armand de Saint Ange est un talentueux compagnon luthier le jour et un boxeur acharné la nuit qui s’entraine dur pour participer au célèbre tournoi des Initiés de Saint Gilles. Alors que son maître et lui vont livrer au Comte Charles de Flamarens un instrument très particulier, la fille du riche mécène, Marianne, fait irruption un révolver à la main, bien décidée à tuer son propre père. Les événements qui s’ensuivent vont précipiter le luthier dans un monde mystérieux où l’ombre de l’inquiétant Lucian et l’amour qui va peu à peu l’unir à Marianne seront ses seuls repères au milieu du tourbillon de violence, de corruption et de trahison qui va se déchaîner autour de lui. Survivre à la découverte de la face cachée de son existence exigera de lui renoncements et compromis, avant de le conduire à un choix impossible entre ses valeurs et lui-même.

Le Choix des Anges, en littérature

Ce qui devait être une façon pour moi de construire l’intrigue d’un film a fini par devenir un manuscrit dont la troisième révision comporte maintenant plus de 30.000 mots. L’histoire se développe à chaque nouveau round de corrections, les personnages gagnent en épaisseur et le projet devient de plus en plus autonome.

Au point que l’objectif est désormais clairement de parvenir d’abord à un résultat littéraire digne d’être publié avant d’écrire un scénario de film.

Mon travail porte donc désormais autant sur le style, sur la qualité évocatrice, sur le rendu de l’ambiance, la vraisemblance des caractères et les sonorités de la langue que sur le déroulement dramatique.

J’ai choisi un récit à la première personne pour coller aux romans noirs.

Le Choix des Anges, le film

Après l’expérience d’Ultima Necat, je connais bien les difficultés que l’on doit surmonter pour réaliser et produire un film avec des moyens limités, et l’histoire du Choix des Anges telle que j’ai fini par l’imaginer pourrait sembler trop ambitieuse dans ce cadre-là. Mais je reste persuadé que la seule véritable épreuve c’est de bien s’entourer, et que cet obstacle dépassé, tout reste possible.

Pour moi l’utopie n’interdit pas d’être réaliste, parfois, et je sais que réunir une équipe à même de porter le projet d’un film moyen ou long métrage avec moi sera une très longue marche, sans doute sur une période de plus de dix ans.

L’ambition sera de tourner dans un format d’image cinémascope numérique dans une résolution HD au minimum, 4K dans l’idéal, des plans préparés au maximum, storyboardés, avec une esthétique qui demandera un travail sur les costumes, les décors, les accessoires… et avec des acteurs professionnels pour porter les personnages…

Quand je vous disais que c’était un projet ambitieux…