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Projet : Rocfou

Projet : Rocfou

Projet : Rocfou

J’ai déjà évoqué en quelques mots le nouveau projet qui occupe mon esprit littéraire en cette année 2019.

Comme toujours, il m’a fallu mûrir et digérer nombre d’influences afin de parvenir à une idée suffisamment claire pour savoir ce que je voulais vraiment exprimer. Cette digestion a commencé il y a des années, et elle continue son œuvre même maintenant, alors que je pose enfin les briques de ce que sera Rocfou. C’est un travail qui se fait pour une large part dans l’ombre, dans des impressions, des idées qui surgissent sans crier gare, des intuitions sur ce qui pourrait bien faire corps avec le reste de la recette, sur des envies et des coups de cœur.

Comme tout travail de créativité, ses détours sont sinueux et surprenants.

Et c’est parce que j’ai toujours aimé découvrir les coulisses de cette créativité, un peu comme les making of du cinéma, que j’ai eu envie de vous parler aujourd’hui de la façon dont ce projet, Rocfou, évolue, grandit, régresse parfois pour mieux rebondir ensuite.

J’aime à penser qu’une œuvre, quelle qu’elle soit, possède une vie propre. Ce n’est certes pas une vie au sens premier du terme, encore que le concept me séduise grandement, mais tout comme un être vivant, la création se nourrit et croît. Elle peut aussi se voir empêchée par une affection, se développer plus rapidement grâce à de bons soins, elle peut se tromper de chemin parfois et trouver des raccourcis qui lui feront emprunter des sentiers plus ardus ou plus aisés.

C’est de quelques-uns de ces aspects pour Rocfou dont je voudrais vous parler aujourd’hui.

Au commencement était le jeu de rôle

La genèse du projet Rocfou commence il y a une bonne dizaine d’années, un soir chez Obi-Wan, en présence de Sixte et de Phil. Nous évoquons les univers de jeu de rôle que nous aimerions explorer, et la fantasy vient naturellement.

À cette époque, nous avions envie d’une sorte de fantasy légère, et l’idée d’un groupe de trois antihéros émergea assez naturellement. Deux personnages seraient frères, l’un fragile, fantasque et intellectuel, devenu moine bien malgré lui, et le deuxième une sorte de colosse chevalier sans trop de subtilité, mais héritier du titre de noblesse de la famille. Le troisième larron serait l’écuyer du colosse, une sorte d’aventurier cynique volontiers filou à ses heures.

Ainsi naquirent Étienne et Eustâche, les deux rejetons de la lignée mal famée des Rocfou, et Béric, leur compagnon d’aventure.

Autour d’un verre, nous avons rapidement brossé les traits de ce que devrait être le monde dans lequel ils évolueraient, des piliers qui sont encore aujourd’hui à la base de mon projet.

  • Une époque ressemblant un peu à l’Europe mérovingienne, sous l’influence de la chanson de Roland et des légendes celtiques.
  • Une magie rare et peu puissante, d’autant plus crainte qu’elle n’est plus qu’un souvenir dans l’esprit des gens, une vague superstition, une rumeur de sorcellerie.
  • Une religion monothéiste peinant à se frayer un chemin dans des croyances bien plus anciennes et très ancrées dans la population.

Sixte nous a concocté un premier scénario. Son frère Phil s’est entiché de Béric, Obi-Wan a donné corps à Eustâche, pendant que je me suis glissé dans la peau d’Étienne, le frangin érudit et un peu magicien sur les bords, soupçonné d’avoir du sang féérique, et moine défroqué venant arracher son aîné à ses obligations de Seigneur de Rocfou pour partir à l’aventure.

Le trio d’antihéros en a ainsi vécu quelques unes, d’aventures, de joutes en tournois, d’intrigues de palais en mystères ruraux, jusqu’à ce que le temps fasse son effet et que nous passions à autre chose.

Entre temps, nous avions développé leur histoire, compris quelle était l’origine du nom des Rocfou, et les trois personnages sont restés dans nos esprits, un peu comme d’anciens camarades que l’on a perdu de vue depuis longtemps, mais dont on aime à se rappeler les noms et les souvenirs qui nous lient à eux.

Le temps a passé.

La fantasy a été marquée par Game of Thrones avec le succès de la série, et je me suis pris à imaginer ce que l’on pourrait montrer différemment. Comment une saga de fantasy avec des intrigues politiques, des dragons, des dangers, une magie ancienne et oubliée pourrait susciter une autre ambiance.

Et puis j’ai découvert Symbaroum, grâce à Jérôme, l’un des nouveaux compagnons de notre table de jeu.

Ce fut une révélation. Il ne manquait à Rocfou qu’une touche de dark fantasy pour devenir une histoire véritablement marquante. Cela changeait un peu la tonalité d’origine, résolument légère, presque parodique, «à la Willow».

Mais cela me permettrait de développer certaines idées qui me sont chères depuis longtemps, et qui dormaient dans un coin de mon esprit. Un peuple des Fées plus conforme à la tradition celte : étrange et inquiétant, imprévisible et cruel, même dans ses bienfaits. Le prix de la magie. Le prix des légendes, de la connaissance comme de l’ignorance. Et la gémellité, cette obsession qui me suit depuis ma tendre enfance, ce mystère qui me fascine alors que je ne l’ai jamais vécu puisque je n’ai pas de jumeau.

Il sera donc question de tout cela dans Rocfou, mais d’autres choses encore qui me sont apparu au fil du temps.

Tout cela grâce, au départ, à un univers de jeu de rôle…

La construction d’un monde

Toute histoire commence par la création d’un monde. Même celles se déroulant dans notre réalité impliquent de concevoir le monde intérieur des personnages, comme leur environnement immédiat, leurs relations, leurs désirs. Le travail est juste plus vaste lorsque l’on décide de raconter une histoire se déroulant dans un monde imaginaire.

J’avais déjà de bonnes bases en reprenant ce que le groupe de jeu avait construit au fil des années, et que j’avais moi-même enrichi pour mon plaisir, mais le propos de départ ayant changé, le monde ne pouvait pas être repris à l’identique. Il avait tout autant besoin d’être approfondi et harmonisé afin que sa cohérence interne en soit renforcée.

Je suis donc pratiquement reparti du début, en gardant à l’esprit les principes exposés plus haut.

Pour cela, j’écris ce que les scénaristes de séries télévisées appellent une bible. Il s’agit d’un document qui sert de référence constante et qui détaille l’univers dans lequel l’intrigue va évoluer.

Cette bible se constitue d’abord par des notes jetées en vrac dans un carnet, qui dans mon cas est numérique, ce qui me permet de retraiter chaque note dans différents environnements de travail (carte heuristique, liste, etc.) sans avoir à tout ré-écrire à chaque fois.

J’approfondis chaque note par un texte explicatif, parfois relié à d’autres points, et pour cela j’utilise Scrivener. Sa faculté à créer des liens internes et à organiser des dossiers et fichiers hiérarchisés m’aide énormément. En plus, j’ai la bible constamment à portée de main quand je rédige, et cela me fait gagner un temps fou.

J’organise certaines notes entre elles avec une architecture visuelle en carte heuristique avec Scapple, surtout lors de la conception de l’intrigue.

Et pendant tout ce travail, je visualise le monde physique dans lequel vont évoluer mes personnages en recherchant des images qui pourront soutenir mes descriptions, et surtout en le cartographiant. Car depuis longtemps on sait qu’on ne connaît bien un monde que si on est capable de s’y orienter. Depuis le périple d’Ulysse, puis les cartes du tendre du XVIIe siècle jusqu’à la Terre du Millieu de Tolkien, il n’est pas de monde imaginaire ou légendaire qui ne se construise en fixant des côtes, des cités, des montagnes et des mers. Même lorsque ces cartes ne sont ensuite pas livrées au public pour plonger le lecteur dans une époque où ce que l’on savait du monde était parcellaire et rapporté par d’autres, l’auteur doit les tracer pour devenir un véritable démiurge.

C’est ainsi que la construction du monde de Rocfou se fait pas à pas.

Bien entendu, tout n’est pas fixé d’emblée, et il reste de nombreuses zones inconnues, même pour moi. Je ne fais au départ que tracer les grandes lignes de ce qui sera le cadre de l’intrigue. Comme tous les rôlistes le savent, il vaut mieux partir de ce qui est le plus proche des protagonistes, et agrandir le cadre au fur et à mesure, si l’on excepte les grands principes qui dirigent le monde lui-même, comme la nature de la magie, la religion, la culture des peuples. Même si tout cela est brossé un peu grossièrement.

Les détails prendront place naturellement durant la rédaction, ou plus tard même, avec les besoins.

Je m’assure juste que chaque détail rajouté soit cohérent avec le reste, et c’est pour cela que la bible est si utile.

Exemple d’article de la bible : la magie dans le monde de Rocfou

Voici à quoi peut ressembler une note décrivant certains principes du monde.

Celle-ci s’occupe de la place de la magie dans Rocfou.

La magie dans Rocfou

Les contes et les légendes d’autrefois contiennent tous leur dose de magie, y compris en Grande Terre. De nos jours, les superstitions et les croyances ont remplacé les certitudes de jadis, et le Don des Ombres et des Lumières, s’il est encore synonyme d’un respect craintif et d’une grande méfiance, est surtout vu comme un feu éteint avec les dernières lueurs de l’Ancienne Foi. Les prêtres du Dieu Lumineux enseignent en effet que les seuls véritables prodiges sont l’œuvre des saints et que le reste n’est que maléfices et sorcellerie inspirée par les démons Fomori.

Le nom, cependant, est resté, et il arrive tout de même que l’on attribue certaines merveilles à des êtres touchés par les Ombres et les Lumières.

Car ainsi est appelée la magie, même si le terme magie ne convient peut-être pas tout à fait. Il s’agit bien de tordre ou violer les lois de la physique et de la biologie, mais d’une façon généralement très discrète. Les prodiges stupéfiants de boules de feu, de châteaux édifiés en une nuit ou autres réalisations d’importance ont toujours été l’apanage des races aînées : les Fées, les Dieux, les Démons, et bien évidemment, les Dragons, qui sont connus pour avoir été l’âme même de la magie. Leur disparition est d’ailleurs généralement considérée comme la cause de l’affaiblissement progressif de la magie, et des prodiges que cette dernière permet de nos jours.

On explique cela par le fait que les Dragons étaient constitués de l’essence même du monde. Leur magie était donc capable de modeler la réalité aussi simplement que de bouger une patte.

Chaque peuple a appris des Dragons une magie différente, adaptée à sa propre existence, mais de moindre importance.

Seuls les Fomori, les noirs démons jadis vaincus par les Dieux, possédaient leur propre et mortelle sorcellerie.

Les Puissances, les Dieux, régissent un domaine particulier de la vie sur la Grande Terre, et les miracles dont ils sont capables sont tous contraints par ce domaine en particulier. Mais avec leur retrait hors du temps, peu de miracles ont été vus depuis plus de mille ans.

Les Fées, eux, ont une magie plus subtile et en un sens plus libre. Ils peuvent altérer la réalité grâce à des illusions, nommées enchantements, qui sont si réalistes qu’elles peuvent supplanter la véritable texture du monde, s’ils consentent à un sacrifice. Ce sacrifice est généralement coûteux et cruel, et plus l’enchantement est grand ou puissant, plus le sacrifice est vicieux et cruel. Cependant, la règle subtile et dangereuse dont les humains ne connaissent pas forcément l’existence est que ce sacrifice doit être consenti par la personne qui désire l’enchantement, pas par le magicien. De nombreux humains ont ainsi été piégés par les Fées. Néanmoins, tous ceux qui sont encore au fait des anciennes traditions savent que la magie des fées à une faiblesse, nommée geiss. Un geiss est une condition très particulière que doit respecter chaque Fée, en permanence, sous peine de perdre à la fois ses pouvoirs et sa très grande longévité. Certaine Fée ne pourra mentir aux enfants, une autre devra boire seulement du lait, etc. Découvrir le geiss d’une Fée et parvenir à le lui faire enfreindre est la seule façon de détruire la magie d’un tel être.

Bien évidemment, plus aucune Fée n’a été vue dans tous les Royaumes de la Grande Terre depuis près de sept siècles.

Enfin, le Don des Ombres et des Lumières est la forme de magie que les Fées et certains Dragons apprirent aux humains dans les premiers temps de l’Histoire. C’est une forme affaiblie de la magie des Fées, l’art des illusions et des enchantements, qui cependant peuvent prendre réalité durablement si l’on consent à un sacrifice, mais, à cause de la nature des humains, ce sacrifice doit être fait par le magicien lui-même, ce qui freine considérablement les velléités de changement définitif dans la trame du monde. Sans ce sacrifice, l’enchantement ne supplante la réalité qu’un temps assez court, généralement jusqu’à ce que le soleil ou la lune se couche.

Pratiquer ce Don est très rare. En effet, il se trouve que seuls les humains jumeaux peuvent développer cette capacité. Et comme il est dans la nature de la magie de toujours avoir un prix, les humains nés avec ce talent souffrent également d’une tare physique ou psychique, d’une maladie ou d’une infirmité quelconque, qui rend leur existence précaire au mieux, dangereuse à tout le moins.

Ainsi sont craints tous ceux qui souffrent d’une affection chronique, et on les soupçonne très vite d’être des magiciens, ou, pire, des sorciers voués aux forces maléfiques.

Exemple de cartographie

En gardant à l’esprit le principe de détailler d’abord ce qui sera le plus proche des personnages, puis d’agrandir le périmètre au fur et à mesure des besoins, il revient tout de même au démiurge de voir un peu au-delà. C’est pourquoi le tracé des côtes de la Grande Terre est si vaste par rapport à la région de Rocfou, un petit coin perdu du Royaume de Miliath, le Royaume du Miel, au nord-ouest, près de la grande chaîne des Montagnes des Dragons.

L’histoire prenant ses racines loin dans le passé, à l’époque où les derniers Dragons vivaient encore, il était aussi nécessaire de regarder l’évolution de certains paramètres. Ainsi, sur le tracé des côtes, j’ai gribouillé plusieurs cartes décrivant, par exemple, l’aire de répartition des différents peuples (première carte) et les divisions politiques actuelles (deuxième carte), même si certaines ne sont pas totalement figées et si je ne sais même pas encore quels noms auront les territoires concernés, ni s’ils auront une importante quelconque dans le récit.

Il est essentiel de se laisser des pans entiers à découvrir soi-même au fil de l’écriture, de laisser la place à des idées actuelles de se développer, ou à des idées futures d’émerger et de prendre toute l’ampleur qu’elles méritent.

Dans mon fonctionnement, l’écrivain structural et l’écrivain jardinier cohabitent véritablement, même si j’ai tendance à incarner plus facilement le premier que le second.

La conception d’une intrigue

L’étape de l’intrigue est entremêlée avec celle du monde, car l’une et l’autre se nourrissent mutuellement. Un détail dans l’univers va donner une idée d’événement, un événement va prendre place dans un décor spécifique et faire naître une particularité de l’univers.

Je procède là encore par notes diverses, reliées dans une carte heuristique.

La pensée créative est une pensée analogique : elle va établir des liens entre plusieurs idées, plusieurs concepts. Des liens qui sont logiques et d’autres moins. Il peut s’agir d’impressions, d’ambiances, d’images, de sons. Et ces liens font émerger à leur tour une idée ou un concept qui seront parfois très éloignés des sensations premières. Par exemple si l’évocation d’une symphonie et d’un soir de pluie pouvait donner naissance à l’idée d’une scène où un personnage découvre le secret de sa naissance.

C’est ainsi que mes notes sont des phrases ou des bouts de phrases, reliées à des mots qui décrivent plus précisément mes impressions. Et ensuite, j’essaie de visualiser le tout comme une scène, ou dans une scène déjà «découverte» dans mon plan.

C’est dans cette phase que je structure un peu les événements. J’essaie de suivre le chemin de l’histoire, de façon grossière, comme on le ferait à grands pas, sans se préoccuper des détails. Je survole la carte heuristique, et je la vois de très haut, pour n’en distinguer que les contours les plus importants, les nœuds réellement les plus forts. Ce n’est qu’ensuite, lorsque je vais rédiger, que je reprends ce chemin, à pied cette fois, en m’autorisant à explorer des endroits que je n’avais pas prévus en premier lieu, en musardant, furetant, en m’attardant sur des détails qui peuvent ensuite se révéler être de véritables détours ou des pans entiers de l’histoire qui m’étaient inconnus jusque là.

Je reprendrai ensuite chacun de ces détours, chacun de ces nouveaux pans de l’intrigue, pour les relier le plus harmonieusement possible au reste, et que le tout prenne une forme et un fond qui me satisfassent.

J’en suis actuellement au tout début, à l’étape où chaque note se déploie indépendamment des autres, pour être reliée ensuite à tout le reste. J’explore.

C’est une phase déroutante, car on n’écrit pas encore, mais passionnante parce qu’on défriche, et frustrante parce qu’on ne voit pas encore vraiment où tout cela mènera.

L’envie d’une autre fantasy

Comme souvent chez moi, deux désirs presque opposés coexistent.

D’abord écrire une saga de fantasy, de «vraie» fantasy, avec des Dragons. Avec des légendes. Avec des héros et un monde qui change, se trouve bouleversé par des combats épiques, des mythes qui se créent.

Et puis écrire une fresque plus fantastique et personnelle qu’héroïque, sans manichéisme, mais avec des nuances de gris, avec cette ambiance mystérieuse que donne la magie diffuse, cruelle, sacrificielle. Un mélange de low fantasy et de dark fantasy, où les seuls êtres non humains sont disparus ou presque (pas d’elfes élancés ni de nains trapus, pas de gobelins, de trolls ou d’orques) où les rares êtres Fées sont des créatures étranges, incompréhensibles et dangereuses, où le plus grand danger vient souvent de soi-même, où les Dragons ne sont plus présents que dans des chuchotements multiséculaires qui résonnent encore aux oreilles de rares personnes aussi maudites que bénites.

La gageure est simple : donner corps à ce mélange. Et lui donner corps dans un alliage aussi beau que solide.

Autant dire que je ne suis pas encore sorti de l’auberge (où comme il se doit dans tout bon module de l’ancêtre D&D un mystérieux commanditaire m’a confié ma mission ?).

Un bel objet

Enfin, un livre, c’est aussi un objet.

Et avec Rocfou j’ai envie d’aller plus loin dans la conception d’un bel objet, car pour moi le beau est dans le signifiant du texte, mais aussi dans sa présentation.

Qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse, me diront certains.

Et bien non. Traitez-moi de vil esthète si cela vous chante, mais pour moi le flacon a aussi son importance dans l’ivresse. Et je l’assume. Jusque dans les livres que j’écris. Car un livre peut être un bel objet, un de ceux qui marquent, par son contenu autant que par lui-même.

Ce peut être un objet numérique, auquel je trouve l’on ne prend pas assez soin du détail. Même si le support échappe complètement aux mains de l’auteur (je ne pourrai pas décider sur quelle marque de liseuse ou de tablette, voire de smartphone ou d’ordinateur vous lirez mes productions), je pense sincèrement qu’un simple fichier ePub peut apporter au plaisir de lire s’il répond à trois critères :

  • Un confort de lecture qui s’adapte aux particularités et envies de chacun. C’est d’ailleurs la grande force du livre électronique sur le livre physique que cette adaptabilité, rendant possible la lecture même aux personnes souffrant de difficultés visuelles.
  • Une mise en cohérence de la forme avec le fond du texte. Il ne faut pas oublier que la typographie peut être elle-même signifiante et que certaines mises en forme peuvent avoir un impact sur l’immersion du lecteur dans l’histoire. Au même titre que la réalisation, la lumière, les éclairages, la photographie et parfois les effets spéciaux peuvent apporter quelque chose au cinéma ou en série télévisée (je pense aux textos visualisés directement dans certains épisodes de la série Sherlock de la BBC), je suis convaincu que la typographie peut rendre certains passages plus immersifs dans un écrit (dans le même exemple des textos, pour n’en prendre qu’un).
  • Une esthétique globale dans une identité éditoriale. Pour qu’un fichier soit plus qu’un bête agencement de code informatique et donc qu’un texte soit plus qu’un simple affichage de caractères sur un écran, il est nécessaire de lui donner… du caractère, si je puis dire sans mauvais jeu de mots. Donc de penser la mise en forme pour que cette esthétique soit la plus identifiable possible. Qu’elle type l’œuvre, l’auteur, ou la collection.

Mais un livre c’est aussi, plus traditionnellement, un objet physique, un agencement de feuilles de papier savamment reliées, avec sa forme, mais aussi son toucher. La matérialité a encore de quoi séduire. Et dans ce domaine également, j’ai envie de changer un peu.

Cela fait quelques années que nous nous côtoyons sur cet espace virtuel, et que régulièrement je parle de l’impression à la demande et des opportunités qu’elle a offertes à la réalisation de livre (ce que d’aucuns appellent l’auto-édition). J’ai même commis un ou deux articles expliquant comment s’y prendre avec le poids lourd du marché, Amazon.

Mais outre que le modèle économique et social du géant américain ne me convient pas vraiment (mais c’est un autre débat, que nous aurons sans doute un jour), la finition de l’objet livre par Amazon, pour être à la hauteur de standards professionnels, est limitée.

Il n’existe pas de reliure cousue chez Amazon, et pas même chez son concurrent le plus direct, lulu.

On ne peut pas choisir la matière de la couverture (ou bien si, seulement entre souple et dure).

Or, c’est aussi avec des détails comme ceux-là que l’on crée un bel objet. J’aimerais une reliure cousue pour les deux ou trois tomes de la série que devrait devenir Rocfou, parce que c’est plus solide, parce que c’est plus beau aussi. J’aimerais une couverture dure, également. Je me penche sur la lisibilité de la maquette, la police de caractère, le papier.

Bref, je veux renouer avec le plaisir simple de posséder une œuvre précieuse, non pas forcément par son coût, mais parce que quelqu’un a pris le temps de la réaliser pour moi.

Encore une fois : le contenu et le contenant peuvent se répondre.

Time will tell

Tout cela fait beaucoup, devez-vous penser.

Je suis bien d’accord. Il me reste du chemin à parcourir avant de livrer Rocfou entre vos mains et à vos yeux ébahis.

Mais pour le moment mon plan se déroule sans accroc majeur (et vous savez combien j’adore qu’un plan se déroule sans accroc) et la rédaction du premier tome devrait débuter avec l’été, au mois de juin probablement.

Ce premier tome dont le titre est déjà tout trouvé : Les Héritiers du Dragon.

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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Altered Carbon, la déclinaison à en perdre son latin

Altered Carbon, la déclinaison à en perdre son latin

Altered Carbon, la déclinaison à en perdre son latin

J’ai découvert Altered Carbon et son univers comme beaucoup grâce à la série produite par Netflix, une série bien ficelée comme le sont en général les productions originales de la société américaine, bien réalisée, et un univers noir comme je les aime, qui réussi le pari de transposer une ambiance de polar dans un futur technologiquement très différent du nôtre.

Cette transposition n’est pas si neuve, puisque l’on peut y rattacher Blade Runner ainsi que 2049, mais aussi toute la mouvance du cyberpunk, ce courant littéraire puis cinématographique né dans les années 1980–1990 dont l’un des points centraux est la rupture technologique et son effet sur la société dans son ensemble.

Mais la grande idée d’Altered Carbon, c’est de développer dans un univers cyberpunk l’idée de transhumanisme, et d’en explorer concrètement les conséquences en poussant au maximum un postulat de base dont nous discutions ici il y a quelques années : cloner la conscience humaine sur un support informatique.

Bien sûr, cette idée n’est pas neuve. Transcendance récemment en décrivait la découverte. Matrix est plus ou moins basé sur la même idée. Mais à ma connaissance c’est la première fois que l’on évacue l’idée d’une Intelligence Artificielle créée à partir de données informatiques pour s’intéresser plus profondément à la psyché humaine elle-même copiée dans un fichier, c’est-à-dire le mouvement inverse.

Le pitch

Dans un futur lointain, l’Humanité a découvert dans l’espace les preuves qu’une civilisation extra-terrestre a un jour existé, puis s’est éteinte. Cette découverte est allée de pair avec celle d’une technologie plus avancée, notamment le carbone modifié, qui donne son titre à l’univers et qui permet de contenir sous forme informatique toute la personnalité et la conscience humaine dans une sorte de dispositif de stockage, une grosse clef USB.

Rapidement, l’Humanité a changé. Chaque individu, quelques mois après sa naissance, se voit implanter sa pile corticale, en carbone modifié, contenant les données de sa conscience. À sa mort, pour peu que la pile corticale soit intacte, elle peut être replacée dans un nouveau corps, une enveloppe.

La mort a été vaincue, les humains sont virtuellement immortels. Sauf si l’on détruit leur pile corticale, ce que l’on appelle une Vraie Mort. Et si l’on détruit également les éventuelles sauvegardes de cette pile corticale. Car comme la pile contient des données informatiques, comme tout fichier elle peut être sauvegardée, dupliquée, piratée.

Laurens Bancroft, richissime «Mathusalem» (un homme ayant déjà vécu plusieurs centaines d’années en changeant d’enveloppe à volonté), sort Takeshi Kovacz, un ancien membre des Corps Diplomatiques (sorte de corps d’élite servant de bras armé aux Nations Unies devenues le gouvernement mondial) de son emprisonnement afin d’enquêter sur sa propre mort. Tout indique qu’il s’agissait d’un suicide, mais Bancroft est persuadé qu’il a été assassiné. Réenveloppé grâce à une sauvegarde de sa propre conscience faite quarante-huit heures avant le drame, il ne garde aucun souvenir de ce que son ancienne personnalité a pu faire durant ce laps de temps.

L’enquête de Kovacz va le mener dans les profondeurs de son propre passé comme dans celles de l’existence hors-norme de son commanditaire, à travers les noirceurs et les lueurs de l’âme humaine prolongée pour l’éternité. Et comme chacun le sait, l’éternité, c’est long, surtout vers la fin…

Rosa, rosa, rosam…

Comme en latin, l’univers d’Altered Carbon est un concept qui se décline.

D’abord, ce fut un roman de SF, écrit par Richard Morgan (lien partenaire) avec un style percutant, mais qui dévoile aussi un univers très riche par petites touches. On peut parfois être un peu perdu, mais avoir vu la série m’a grandement aidé, tout comme ma familiarité avec les univers du cyberpunk et du noir. Le roman en effet reprend les poncifs du roman noir, comme une bonne partie des personnages et de l’intrigue. La femme fatale : Mme Bancroft. Le détective privé désabusé : Takeshi Kovacz. Le richissime pervers : Bancroft lui-même. Les maniaques et autres détraqués. La fille au grand cœur cabossée par la vie : le lieutenant de police Ortega

La série suit la même intrigue, mais introduit des éléments des autres romans de la trilogie, en modifie quelques autres, change ou interverti des personnages. À mon goût elle est encore plus réussie. On met cependant un peu de temps à tout remettre dans l’ordre et à comprendre toutes les implications de cet univers si proche du nôtre qui est pourtant si différent à cause de ce simple postulat de la conscience humaine numérisée.

C’est d’ailleurs le plus passionnant dans l’histoire : découvrir à quel point la mort de l’être humain détermine toute notre société.

Et pour prolonger encore cette réflexion, on peut aisément trouver des jeux de rôles qui immergent leurs joueurs dans le même type de paradigme, afin de leur occasionner de bonnes migraines non seulement à penser à qui est vraiment dans quelle enveloppe, mais aussi qui ils sont eux-mêmes.

Je pense à Eclipse Phase, le premier en date sur ce sujet, mais aussi à un jeu bien français, écrit par Kobayashi, Into the Dark, que mes compagnons de jeu et moi-même avons essayé très récemment.

Crise d’identité

Un postulat simple, donc, mais de multiples implications avec d’innombrables conséquences sur l’existence humaine telle que nous la concevons tous. Au point que l’on peut vraiment comprendre ce transhumanisme-là comme un changement radical, une rupture profonde dans le sens du mot Humanité.

Essayons d’en balayer quelques-unes des plus prégnantes, quelques-unes qui m’ont le plus marqué.

Réfléchissons pour savoir si, à titre individuel et collectif, nous voudrions d’un tel bouleversement et surtout de ses conséquences concrètes.

Chacune de ces conséquences peut être, dans un jeu de rôle, une question centrale, un moteur, une idée de scénario, comme dans la réalité une source de questionnement existentiel.

Le réenveloppement : soi pour l’éternité, ou une infinité d’autres soi ?

Changer de corps en gardant son esprit intact semble à première vue une sorte de miracle de la technologie.

Cela permettrait d’atteindre l’un des plus vieux rêves de l’Humanité depuis Gilgamesh : l’immortalité.

Cependant, à y regarder de plus près, il semble que ce ne soit pas si simple.

D’abord, la tendance actuelle en neuroscience est de considérer que les processus cognitifs sont avant tout déterminés par la façon dont les réseaux neuronaux cérébraux, mais aussi d’autres centres nerveux intègrent des informations venues de l’extérieur (notre environnement, donc nos cinq sens principaux), mais aussi de l’intérieur (nos autres sens comme la kinesthésie, le sens qui nous permet de savoir dans quelle position sont placés nos membres).

Or, si nous changeons les afférences, les processus cognitifs doivent s’adapter au mieux, changer au pire.

Un corps différent de celui dans lequel nous avons vécu jusque là (un homme enveloppé dans le corps d’une femme) peut donc changer la façon dont nous ressentons et donc dont nous évoluons cognitivement. Et le roman de Richard Morgan le montre bien : Takeshi Kovacz se bat pendant toute la durée de l’intrigue contre une enveloppe qui a appartenu à un fumeur invétéré. Il doit sans cesse se débattre dans l’addiction au tabac et dans le manque.

S’il restait dans ce corps un temps très long, en serait-il changé ?

C’est un peu le pendant modernisé de la métaphore du navire de Thésée, ce navire gardé par les Athéniens anciens comme relique du retour de Thésée de son aventure dans le Labyrinthe de Dédale, après qu’il ait vaincu le Minotaure.

Ce fameux navire, un symbole pour les gens d’Athènes, était entretenu soigneusement, et un homme était chargé, de père en fils, de le réparer lorsque c’était nécessaire : un cordage effiloché, une planche vermoulue, une voile déchirée.

Les Athéniens gardèrent le vaisseau si longtemps, près de 500 ans je crois, qu’au bout du compte, de planche changée en clou remplacé, plus rien ne restait du bateau d’origine. Tout avait été remplacé.

Et certains de se poser la question : le navire était-il toujours celui de Thésée bien qu’aucun élément ne fût plus celui du bateau d’origine ?

Qu’est-ce qui fait que l’on est toujours soi ?

Si l’on garde toujours la même enveloppe au fil du temps, ou du moins un clone biologique qui soit toujours le même, il n’est plus vraiment question d’immortalité, mais d’éternité. Car le fait de rester bloqué dans un corps qui ne vieillirait plus vraiment reviendrait à nous figer. Mettons que l’on change de corps une fois arrivé à 50 ans pour se retrouver dans un corps de 45 ans, puis que tous les 5 ans l’on retrouve un corps de 45 ans, comment appréhenderions-nous le temps ? La personnalité continuerait-elle d’évoluer avec la somme des expériences, donc à «vieillir», alors que le corps resterait jeune ? Ou bien serions-nous figés aussi dans notre développement neuronal, ne pouvant pas évoluer biologiquement parlant ?

Allons plus loin.

Qu’est-ce que soi ? Qu’est-ce que la sensation d’être qui l’on est ?

Est-ce seulement notre esprit, notre vécu, notre mémoire ?

N’est-ce pas aussi la façon dont nous nous percevons nous-mêmes ?

Si l’on en croit les troubles psychologiques profonds qui peuvent accompagner les changements physiques radicaux comme la perte massive de poids ou une greffe de visage, on peut penser que le changement de corps n’est pas si anodin que cela. Le sentiment d’identité fait aussi référence, profondément, à notre identité physique.

Ce qui veut dire que changer de corps change aussi qui l’on est.

Et donc que l’immortalité promise n’en est pas vraiment une. Au lieu d’un soi infini, je vois cela plutôt comme une succession de ruptures traumatiques, de changements radicaux de la psyché. Donc comme une infinité de sois toujours accomplie dans la douleur.

Je ne sais pas vous, mais moi, ça ne me fait pas vraiment envie…

Encore moins lorsque l’on songe aussi que comme nous ne mourrons pas, nous devons toujours occuper une place dans la société. Mais laquelle ? Toujours celle d’un actif, travaillant pour gagner sa vie ? Ou d’un retraité ? Mais à partir de quel «âge» ? Ou de quelle enveloppe ?

Et si l’on est l’enfant d’un parent, nous pouvons rester à jamais leur enfant, ou le parent de nos enfants. Notre place dans la société serait figée elle aussi.

C’est ce que l’on voit dans la série entre Laurens Bancroft et son fils. Ce dernier n’a jamais l’occasion de prendre la succession de son père, de devenir vraiment adulte, car comment hériter de quelqu’un d’immortel ? Il reste sans cesse sous la coupe tyrannique de ses parents, et reste à jamais un enfant, avec en plus la rancœur qui peut s’accumuler contre eux, sans jamais de barrière.

Quand je vous disais que l’éternité, c’est long…

La sauvegarde : qui suis-je ?

Si l’on part du postulat que ce qui fonde la personnalité est l’ensemble de nos expériences et de nos façons d’y réagir, de nos apprentissages, bref, la somme de ce que nous avons vécu, la possibilité de sauvegarder notre mémoire afin de la réinjecter dans un nouveau corps en cas de décès pose une question cruciale.

Cette question est : si ma dernière sauvegarde remonte à deux jours avant mon décès, comme c’est le cas pour Laurens Bancroft dans Altered Carbon, la version de moi-même qui sera réinjectée dans un nouveau corps sera-t-elle la même que la version de moi-même morte avec deux jours de souvenirs en plus ?

La réponse dans ce cas est à la fois oui et non.

Laurens Bancroft a plusieurs centaines d’années d’expériences. Deux jours manquants, pour frustrants qu’ils peuvent être (et cette frustration est à l’origine du moteur de l’intrigue, donc partons du principe qu’elle est grande) ont peu de chance de bouleverser les fondements de la personnalité même du Mathusalem. Il a pu certes vivre dans ces deux jours des expériences fortes, mais il est plus que probable qu’elles n’aient changé sa façon de voir qu’à la marge, même si, sans dévoiler l’intrigue, ces deux jours manquants sont bien à l’origine d’un nœud dramatique fort.

Mais si le délai entre la dernière sauvegarde disponible et le décès est plus grand, mettons dix ans, la réponse pourrait être bien différente.

Quel que soit notre âge, chers lecteurs, nous avons la possibilité vous et moi de nous imaginer avec dix années de moins, et de comparer notre personnalité actuelle avec l’ancienne.

Si vous faîtes l’expérience ne serait-ce qu’en y pensant deux minutes, vous allez certainement vous rendre compte que vous avez beaucoup changé en dix ans. Parfois avec un certain vertige, d’ailleurs.

Vous n’êtes plus le même, plus la même, à chaque jour qui passe.

Plus le même ni plus la même à chaque instant qui file.

Ce que les Grecs anciens exprimaient par la phrase : «il est impossible de se baigner deux fois dans le même fleuve». Car la deuxième fois, l’eau ne sera plus la même, comme le baigneur aura lui-même changé, évolué.

La sauvegarde, pour qu’il n’y ait pas de rupture dans l’identité, devrait donc être instantanée, permanente, et fidèle.

Trois conditions rarement réunies en même temps, même avec beaucoup de moyens financiers et de pouvoir.

Même Laurens Bancroft n’a pas ces moyens-là, dans le roman, et il fait partie des humains les plus riches et les plus puissants de la galaxie.

Idée de scénario

Gageons que, comme Richard Morgan dans son roman, un scénariste de jeu de rôle saisira ces failles dans le système pour construire des intrigues particulièrement vicieuses à faire vivre à ces joueurs.

Par exemple, une vieille avocate désabusée qui a trempé dans des affaires louches se fait assassiner, et il se trouve que sa dernière sauvegarde disponible est une très vieille sauvegarde, lorsqu’elle avait dix ans de moins et qu’elle était une jeune activiste de défense des droits civiques idéaliste et pure… Son nouveau moi risque de juger assez sévèrement la conduite de celle qu’elle était dix ans plus tard !

Et encore, si la sauvegarde en question date de vingt ou trente ans… ce pourrait être une adolescente rebelle ou une gamine…

La duplication : moi & moi sont dans un bateau

Si notre conscience n’est qu’un fichier, on peut imaginer en faire des copies.

On peut aussi imaginer que notre conscience soit injectée dans deux corps distincts.

Richard Morgan prévoit bien la chose, au point que l’univers d’Altered Carbon punisse cet enveloppement multiple. Et deux protagonistes de l’intrigue y ont recours à un moment ou à un autre.

Dans ce cas, le dilemme est le suivant : les deux clones vont évoluer différemment, acquérir des souvenirs différents, en un mot, diverger. Et la personnalité qui était au départ une personnalité unique, va rapidement se scinder en deux individus distincts qui auront tous les deux droit à la même identité.

Mais alors, lequel de ces deux clones est moi ?

Les deux.

Mais aucun également.

Le roman comme la série règlent ce problème de façon assez élégante lorsqu’il se pose à l’un des protagonistes. Mais cela doit rarement être le cas.

Idée de scénario

Un scénario qui pourrait être assez drôle à mener : deux des joueurs incarnent la même personnalité double enveloppée dans un but précis. Ils ont au départ les mêmes mémoires, les mêmes caractéristiques mentales. Et peu à peu, ils divergent, au fil de l’intrigue.

Et au final, la mission remplie, ils vont devoir décider lequel sera «gardé» et lequel sera «jeté»…

Le piratage : contrôle de l’esprit et voie vers la folie

Notre époque ne le sait que trop bien : un fichier, ça se pirate.

Nous savons bien ce que cela peut vouloir dire de se faire pirater notre compte Facebook (pour ceux qui en ont un). Imaginez ce que cela doit être de se faire pirater sa conscience…

D’abord, le pirate peut y accéder, tout simplement.

Le hacker peut tout apprendre de vous. Tout. Vos plus intimes souvenirs. Votre façon unique de soupirer, ce qui vous fait le plus plaisir ou le plus horreur. Il peut regarder votre âme, vous mettre à nu. C’est un viol absolu.

Ensuite, une fois en possession du fichier, le hacker peut en faire ce qu’il veut.

Le vendre. Vous vendre.

Le dupliquer, voire l’envelopper, le double-envelopper. Et une copie de vous peut circuler librement, peut-être conditionnée par le pirate pour accomplir quelque méfait, par exemple braquer une banque à sa place. Bien tranquillement assis derrière son écran, il regardera aux informations le portrait robot du cambrioleur s’afficher dans le monde entier : votre portrait robot. Bon courage pour prouver que vous n’y étiez pour rien. Techniquement, c’est vous qui avez fait le coup.

Et puis, encore plus pervers, le hacker peut modifier le fichier.

Y injecter de faux souvenirs, de nouvelles idées, de nouvelles aversions, des qualités et des défauts.

Y instiller un virus.

Un virus qui pourrait ouvrir le contrôle de votre esprit, de votre cerveau, de votre corps, de vos émotions.

Un virus qui pourrait vous tuer à distance. Ou à retardement.

De telles armes ont été imaginées par Richard Morgan, et l’on apprend que Takeshi Kovacz y a été confronté dans son passé. Bien sûr ces armes ont été mises hors la loi par l’ONU. Mais on sait que les lois peuvent être bafouées par les Mathusalems, qui ont le temps d’ourdir des complots sur plusieurs vies, et qui se jouent des règles qui régissent les simples mortels.

Les inégalités sociales

Car bien entendu, le remplacement de corps, le réenveloppement, coûte très cher. La majorité des gens économisent toute une vie dans l’espoir d’acquérir une nouvelle enveloppe, s’endettent, triment. Quand il n’y a plus de retraite, mais simplement un rêve d’accéder à une autre vie, bien matérielle, que ne ferait-on pas ?

Ainsi tout le monde ne peut pas s’offrir un nouveau corps. Tout le monde n’a pas les moyens de s’offrir une sauvegarde de sa pile corticale.

Ceux qui ont ces moyens gagnent vite plus de pouvoir sur les autres. Les riches deviennent de plus en plus riches et les puissants de plus en plus puissants, car le temps et la mort n’ont plus de prise sur eux, n’étendent plus leur main de justice pour renvoyer chacun à sa finitude.

La plus grande égalité est celle-ci : tous, riches ou pauvres, puissants ou vauriens, nous mourrons un jour. Les riches ne peuvent acheter la mort, les puissants ne peuvent la dominer. Les pires dictateurs finissent tous par succomber à la Faucheuse. Les pires ordures sont un jour rattrapées par le trépas.

Mais dans un monde où les puissants et les riches, qui sont souvent les mêmes personnes, peuvent échapper à la mort, plus aucune limite ne vient sanctionner leurs écarts, leurs crimes, leurs abus.

Ils deviennent fatalement plus riches et plus puissants, de façon exponentielle.

Et les pauvres n’ont plus de salut à attendre. Placés sous le joug de forces qui n’ont plus de fin, ils sont condamnés à rester tels qu’ils sont pour l’éternité, dans un esclavage figé.

Chacun a sa place. Et aucune place ne peut s’échanger, hors accident.

Les chances qu’un tel accident se produise sont faibles. Seule une révolution pourrait le permettre.

C’est ce que comprend Quell, personnage important dans le passé de Takeshi Kovacz, la fondatrice d’une pensée radicale.

Les relations interpersonnelles

Si entre les classes sociales l’affaire est entendue et assez simple, entre les individus les choses sont beaucoup plus complexes.

Dans les couches les plus défavorisées de la société, travailler dur pour espérer s’offrir un réenveloppement à sa mort biologique impose une course à la compétitivité. Probablement en exacerbant la compétition entre individus.

Et pour les enfants de ceux qui n’ont pas réussi à amasser suffisamment d’argent, il y a la dette passée de leurs propres parents. Soit ils choisissent de continuer à payer pour eux, au détriment de leur propre réenveloppement futur, soit ils gardent la pile corticale de leurs parents, comme les statuettes des ancêtres dans les cultes animistes.

On peut ainsi assister à l’une des scènes les plus émouvantes et les plus troublantes, et en même temps si drôle, de la série, lorsque la mère, mexicaine, du lieutenant Ortega est réenveloppée temporairement pour fêter El Dia de los Muertes avec sa famille, retrouvant ses enfants et ses petits enfants pour une unique nuit. Cela résonne comme les mythes de la Nuit de Samhain, d’Halloween, de Walpurgis, où les morts sont censés rejoindre les vivants.

Et au fil du temps, que faire de tous ces ancêtres qui encombrent l’autel familial ?

Vont-ils jouer le rôle d’esprits bienveillants, de guides de la famille, réenveloppés à tour de rôle, suivant leur hiérarchie dans la famille, pour aider celle-ci dans les périodes difficiles ou assister aux fêtes importantes ?

Vont-ils un beau jour avoir envie de revenir eux aussi parmi les vivants, définitivement, et ainsi devenir maléfiques ?

Tout cela me fait vraiment penser aux sociétés archaïques, aux cultes des ancêtres, aux légendes des mauvais esprits et des totems, des guides.

Pour ce qui est des Mathusalems, par contre, tout est très différent.

Lorsque vous êtes immortel et que tous vos proches le sont aussi, vos relations peuvent-elles rester figées ?

Nos savons tous que l’une des raisons invoquées pour l’explosion des taux de divorces dans nos sociétés est l’augmentation de l’espérance de vie. Lorsque l’on vit 40 ans en moyenne, passer 20 ans avec la même personne semble possible. Lorsque l’on en vit 80, le bail vient brusquement de monter à 60 ans. Cela augmente forcément les risques de mésentente, de dispute, de désamour. Également ceux de rencontrer d’autres personnes, d’être attiré, de tromper. D’accumuler de petites rancunes pour en concevoir de grandes haines.

D’autant plus que la psyché qui s’étire durant des centaines d’années peut avoir tendance à devenir réactionnaire, frileuse, conservatrice. Comme lorsqu’on vieillit.

Le conflit des générations peut s’amplifier. Avec cette particularité que jamais il ne finira, car la génération précédente de cède pas le terrain à la suivante.

Comment donc évoluent les sentiments, les émotions, sur plusieurs centaines d’années ?

J’ai peur qu’elles ne se fanent. Au mieux.

L’ennui

Vient également une donnée importante pour ces Mathusalems. Une donnée fondamentale. Que faire de sa vie ? Que faire d’autant de temps ?

Au début, on peut être tenté d’expérimenter un autre métier. Puis un autre, et un autre. De découvrir des loisirs, des passions. De se jeter à corps perdu dans une activité, puis une autre, et encore une autre. De s’immerger dans une relation, puis de changer pour une autre, et une autre, sans d’ailleurs que personne ne disparaisse, car tous seront immortels. Mais au fil du temps, un certain désintérêt doit s’installer.

Un sentiment d’être désabusé, blasé, fatigué, peut-être. Tout doit paraître terne.

Et pourtant, on accumule les petites trahisons, les rancœurs, les ruptures, les adultères, les coups bas, les insultes, les blessures.

Alors peut-être est-on poussé à chercher un pouvoir plus grand. Plus sur les individus, mais sur la société. On cherche à manipuler les gens, à s’offrir de nouvelles sensations. À s’amuser comme on peut. On ourdit des complots contre ceux que l’on s’est mis à haïr. On cherche à conquérir ce que l’on n’a pas encore, voire ce que les autres possèdent. On se met à utiliser le pouvoir sans limites que donne l’immortalité, le temps, pour planifier des projets sur plusieurs années, plusieurs décennies, plusieurs siècles.

Les autres n’apparaissent que comme des pions à bouger. Ou des prix à conquérir.

Mais en même temps, si l’on conquiert tout, si l’on manipule tout, sans coup férir, l’intérêt s’émousse.

Il faut des adversaires à sa taille.

Il faut leur faire mal, mais pas les tuer. Il serait dommage de perdre son partenaire de jeu, et de se retrouver seul, en proie au terrible prix de l’immortalité : l’ennui.

Who wants to live forever ? chantait Queen

La valeur de la vie

Au final, c’est la façon même dont on perçoit l’existence qui change.

La vie n’a plus la même valeur lorsqu’elle n’est plus contrebalancée par notre mort.

Il doit falloir une éthique forte, un code d’honneur exceptionnel, une force de caractère extraordinaire pour ne pas se penser au-dessus des lois humaines et divines. L’hubris guette.

J’imagine bien ces nouvelles divinités devenir pour certaines sanguinaires, maléfiques, assoiffées. Pour d’autres, peut-être, obnubilées par certains aspects de l’existence. Au prix de ce qui finalement fait la beauté du fait d’être humain : pouvoir embrasser le monde dans son ensemble, en percevoir chaque partie avec la même acuité. De telles créatures ne seraient plus humaines, pas plus que transhumaines. De telles créatures seraient des monstres.

De la fiction à la réalité

C’est un peu ce qui me fait peur avec le transhumanisme : le manque de discernement de ses promoteurs.

Je ne suis pas le penseur le plus fin qui soit. Mes intuitions ne sont pas fulgurantes. Je n’ai que peu de pouvoir de prospective. Mais ce que je comprends d’un univers tel qu’Altered Carbon me glace les sangs.

Et je ne parviens donc pas à comprendre que des gens soient tentés de le faire devenir réalité.

Car s’il est un excellent cadre de jeu de rôle, un magnifique écrin pour des intrigues noires de Science Fiction, du pain béni pour des scénaristes, il serait aussi un vrai cauchemar sans fin s’il s’incarnait véritablement dans notre monde.

Dans la mémoire du Serpent à Plumes

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Post Librum Blues

Post Librum Blues

Post Librum Blues

Le Choix des Anges est né il y a maintenant pratiquement quatre mois.

Il est maintenant un enfant dont il faut encore guider les premiers pas, prometteurs mais hésitants.

Les retours sont très encourageants, venant de personnes qui me connaissent parfaitement, très bien, bien, moyennement, ou même pas du tout. Le livre est parvenu à toucher des gens au-delà de mon cercle amical, et parfois à les toucher profondément. Certaines personnes m’ont même contacté pour me parler de leur ressenti. Des personnes que je ne connaissais pas auparavant.

Une nouvelle phase commence pour le livre, en même temps qu’une s’achève pour l’écrivain, son géniteur.

Car la gestation a duré six ans.

Six années à vivre avec les mêmes protagonistes, avec leurs interrogations, leurs obsessions, leurs désirs, leurs doutes, leurs souffrances. Six années à mettre en place l’intrigue, à mettre en mots la narration, à mettre en scène les réactions.

Vint enfin l’accouchement.

Il s’est fait dans la douleur, malgré l’autohypnose, la maîtrise de la respiration, le soutien de l’entourage, et l’obstination.

La pression de délivrer un produit le plus professionnel possible malgré mon inexpérience a dépassé mes récentes capacités à apaiser mon anxiété naturelle. J’ai portant passé les différentes épreuves avec assez d’aisance, malgré les accrocs inévitables.

Si tout s’est parfaitement passé pour la version papier, la version électronique Kindle reste bloquée chez Amazon, malgré mes efforts et ceux d’Immatériel, la plateforme de distribution que j’ai choisie. Je suis donc privé du principal canal de distribution électronique qu’est le Kindle… Heureusement, les versions ePub, elles, sont disponibles sur de nombreuses autres librairies en ligne, notamment 7switch.

Je commence à diffuser la version papier de façon plus traditionnelle, chez des libraires spécialisés.

Mais les hormones de la délivrance ont vu leur taux sanguin brutalement chuter.

L’écrivain en moi s’est retrouvé dans la phase délicate de l’après.

Cette phase où le vide provoqué par la fin d’un projet laisse tout loisir aux diverses angoisses de se déchaîner.

Et si je ne savais plus rien raconter d’autre ?

Et si mes différents projets, pourtant si nombreux, étaient complètement inintéressants, creux, banals, comme de simples redites sans rien d’original ?

Et si ma vision n’était finalement qu’une vacuité, ou pire, une fatuité ?

Cette phase où toutes les idées se bousculent et où l’esprit est incapable de les organiser, de les hiérarchiser, de les choisir.

Cette phase où le cerveau peine à se projeter vers une autre aventure, non parce qu’il n’en a plus envie, mais parce qu’il ne sait plus où regarder.

J’ai redécouvert ce qu’en référence à la dépression du post-partum j’ai nommé le Post Librum Blues, cette sensation désagréable d’avoir des neurones en compote et une tristesse floue, un vague à l’âme tenace et une estime de soi en berne.

Je ne savais même plus de quoi j’avais envie de parler dans la prochaine aventure, et même si une prochaine aventure serait possible.

Pourtant, les idées bouillonnaient dans ma tête.

Les images, les bouts d’intrigue, s’entrechoquaient dans des collisions désordonnées.

Mon esprit était vide de sens mais pas vide d’activité.

Le chaos s’y était installé.

Penser à chacun de mes projets mis patiemment de côté pendant des années m’était intolérable. Car je ne parvenais pas à en mener un au bout de sa logique.

Fée du logis ? Rocfou ? Sur les genoux d’Isis ? Tarot ? La tribu perdue ? Grande Armada ?

L’envie elle-même m’avait déserté. Je ne savais plus quoi choisir ni comment le choisir. Toutes les potentialités se mélangeaient. Les loups-garous se perdaient en Égypte ancienne pendant que Napoléon rencontrait Élisabeth I et des dragons… L’alliage ainsi présenté aurait pu avoir lui-même un sens si mes pensées ne s’étaient pas senties paralysées à la seule évocation des multiples choix nécessaires à la construction d’un monde et d’une intrigue cohérentes.

Cela fait quatre mois.

Cela vient de prendre fin.

Je sais enfin vers quoi j’ai envie de me projeter pendant plusieurs mois, peut-être plusieurs années.

Et je vous en parlerai ici de temps à autre, au fil de l’avancée du projet.

Ce nouvel enfant va changer complètement d’ambiance, de paradigme.

Plus de narration à la première personne, mais plusieurs points de vue entremêlés.

Plus d’atmosphère rétrofuturiste mais une époque inspirée des temps mérovingiens et carolingiens.

Plus d’ésotérisme mais un monde où la magie est un lointain passé, une réminiscence mystérieuse, où les légendes tenaces racontent une époque héroïque.

Une histoire de fraternités et d’amours contrariés. Une histoire d’amitiés brisées et retrouvées.

Une histoire d’anciens dragons et d’antiques passages secrets sous les montagnes.

Une forêt profonde où des tribus barbares adorent encore des dieux oubliés, des raids sanglants, des guerres saintes, des tournois et des espions dans de grandes cités aux murailles épaisses.

Des monstres humains et d’autres qui le deviennent de moins en moins.

Une aventure, une quête, aussi bien intérieure qu’héroïque.

Un projet qui a un nom hérité d’un monde né d’un jeu de rôle.

Le fou du roc.

Rocfou.

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Les Lames du Cardinal : un jeu de rôle de cartes & d’épée

Les Lames du Cardinal : un jeu de rôle de cartes & d’épée

Les Lames du Cardinal : un jeu de rôle de cartes & d’épée

L’univers des romans de Pierre Pevel avait tout pour faire un excellent jeu de rôle : un cadre historique qui éveille la nostalgie des films de cape & d’épée, celui du siècle de Louis XIII et du Roi Soleil, le mélange avec une fantasy bien dosée associant sorcellerie, dragons, intrigues ésotériques et magiques, et un groupe de personnages hauts en couleur, stéréotypés, mais attachants et parfois complexes, les Lames du Cardinal, dans un renversement des rôles traditionnels où les méchants d’alors deviennent les héros d’aujourd’hui.

De plus, le monde assez dense et riche de la trilogie originale de Pierre Pevel, même s’il manque parfois de souffle et à quelques reprises d’une plus grande dextérité de plume (ce que l’auteur corrigera ensuite dans la trilogie d’Ambremer) se voit complété par d’autres qui ont repris le flambeau, à la manière d’un Vingt ans après ou d’un Vicomte de Bragelonne.

J’ai pour ma part eu des difficultés avec l’écriture qui me semblait trop rapide de ces romans, car n’est pas Alexandre Dumas qui veut, mais je dois admettre que les aventures des Lames sont à la hauteur de ce qu’enfant j’avais pu fantasmer à la lecture de celles des Mousquetaires ou à la vision des films où Jean Marais exécutait bottes et feintes avec le panache qu’on lui connaissait.

Ce qui devait donc arriver arriva, et les éditions Sans Détour ont commis un jeu complet en 2014 (qui n’est hélas plus disponible), reprenant tous ces ingrédients et les amalgamant en une recette que nous avions déjà, mes compagnons de jeu et moi, testée à l’époque, mais que nous avions abandonné momentanément (si si, 4 ans, ce n’est qu’un moment dans une vie…) pour d’autres aventures déjà en cours.

Nous en avons cependant repris récemment le fil avec d’autres personnages, ce qui me donne l’occasion de vous en parler.

Le cadre de jeu

Le livret décrivant l’univers des Lames du Cardinal est dense, mais pas trop pour donner la nausée.

Il s’attache d’abord à décrire les ennemis des Lames, les Dragons, de manière à ce que les différences majeures ou subtiles d’avec le XVIIe siècle réel soient plus perceptibles pour le lecteur, qu’il soit joueur ou meneur. L’histoire draconique ainsi présentée permet d’avoir une bonne idée également de la toile de fond qui sous-tend les intrigues et les manigances des espions que les Lames vont devoir affronter. Il est sans doute plus intéressant que ce chapitre soit censuré par le meneur pour laisser un certain mystère à ses Lames.

D’ailleurs, peut-être par souci de laisser le champ libre aux lecteurs et aux joueurs, le jeu prend place après les événements dramatiques du troisième tome des aventures écrites par Pierre Pevel, Le dragon des Arcanes. Dix ans plus tard pour être précis, au moment où le Cardinal cité dans le titre n’est plus Richelieu, mais Mazarin. C’est ce dernier qui parvient à mener à bien le projet de son prédécesseur de reformer le cercle d’élite après les catastrophes produites et évitées par les exploits des premières Lames, celles de Richelieu.

Les personnages que vont incarner les joueurs sont donc des héritiers des héros des romans de Pevel.

Une position intéressante qui évite les écueils trop souvent rencontrés de la redite des œuvres connues, de la discussion sur ce qui est canon ou pas dans les écrits de l’auteur des romans, etc.

Ici, l’on part d’une base commune que sont les événements de la trilogie originelle.

Cela permet aussi de varier un peu le cadre du jeu par rapport à ce que décrivent les romans.

La partie décrivant l’Europe en 1643 est assez synthétique pour que l’on ait une bonne idée des intrigues de cour qui peuvent s’entremêler entre la France, l’Espagne, l’Angleterre, la Suède, les Pays-Bas, le Saint-Empire, les cités d’Italie, la Papauté. C’est un vivier d’idées.

On peut d’ailleurs noter que les encarts nombreux, notamment en marge du texte principal, aident beaucoup dans ce livret, à la compréhension des choses. Ce ne sera pas le cas, comme nous le verrons plus tard, pour ce qui est du livret de règles.

Puis dans un mouvement de zoom continu, le livret présente la situation politique du royaume de France, puis enfin le cadre de vie principal des Lames, Paris, en 1643.

On peut noter qu’une très belle carte de Paris accompagne le tout, qui aide à se représenter un peu mieux les choses.

De manière générale, un effort d’immersion est sensible pour permettre de se représenter l’époque, les lieux, que ce soit historiquement ou même dans ce qu’il y a de plus romanesque.

Car il ne faut pas oublier que les Lames est un univers de roman, un univers fantastique où les Dragons utilisent les ruses de la diplomatie, les assassinats, le poison, l’espionnage, mais aussi la magie ou l’alchimie. Et où nos héros vont devoir faire preuve de panache pour se hisser au niveau de leurs aînés que furent La Fargue, Laincourt, ou Saint Lucq, mais aussi d’autres personnages que sont Athos, Porthos, Aramis et d’Artagnan

Les règles

Depuis quelques années déjà, vous le savez si vous me suivez depuis l’ouverture de ce nid numérique, je ne taris pas d’éloges envers certains systèmes de jeu légers et génériques, aisément adaptables, dont la principale qualité est de laisser les joueurs et le meneur décrire leurs actions, pour simplement les faire rebondir à chaque fois que c’est nécessaire (ou pas, d’ailleurs).

Je suis donc sceptique, et c’est le moins qu’on puisse dire, quant à l’adage rôliste qui veut que “system do matter” (“le système est essentiel”, en langue de Molière), un aphorisme stipulant que les règles de jeu sont une pierre angulaire de l’ambiance d’un jeu, car elles influent sur la façon dont on joue).

Pourtant, je dois le confesser, le système des Lames du Cardinal est l’un des rares qui comptent pour beaucoup dans l’ambiance de leurs cadres de jeu (un autre étant celui de Qin, mais ce sera peut-être pour un autre article).

J’ai même pris beaucoup de plaisir à m’amuser avec elles. C’est chose rare me concernant.

Cependant, il est à noter une chose importante : le livret des règles est une horreur en termes d’organisation et de mise en page. Sous prétexte d’être didactique pendant la création du personnage, il sépare les informations dans des chapitres classiques qui sont répertoriés dans la table des matières, et des encarts qui présentent des points de règle importants, mais dispersés au fil de la lecture et surtout sans référence dans la table des matières

Retrouver une information en cours de jeu est donc très pénible.

La création des personnages

La création des personnages est une étape clef dans un jeu de rôle. Selon ses envies et le système de jeu que l’on utilise, on peut passer de 3 minutes à 3 heures à faire émerger un alter ego de papier, ce qui en dit long sur la capacité dudit système à synthétiser et laisser sa place à l’imagination, ou au contraire à détailler à l’envi des dizaines de points qui seront autant de guides (de carcans ?) pour l’interprétation future.

Vous l’aurez compris, je préfère actuellement (car il n’en fut pas de même dans mes jeunes années de rôliste) une création de personnages fluide et rapide, laissant place à un certain flou pour mieux adapter le personnage à l’ambiance du groupe lors des sessions de jeu elles-mêmes, plutôt que de trop figer ce qui ensuite aura l’air incohérent ou rigide.

Les Lames font partie de la première catégorie.

Il ne faut, je pense, pas plus de 10 minutes pour créer un personnage en répartissant les points de caractéristiques, choisissant ou tirant au sort deux Archétypes, et choisir un style d’escrime puis des feintes et des bottes associées.

Caractéristiques et style du personnage

Basées sur une échelle de 1 à 5, les caractéristiques sont quatre, associées chacune à une couleur d’un jeu de cartes (nous en discuterons plus loin). Chacune est également associée à une liste de compétences notées de 0 à 7 semble-t-il, mais il n’est pas fait explicitement mention d’un maximum dans les règles, ce qui laisse planer un doute ma foi assez gênant. J’aime bien quand les choses sont claires et nettes. La (dés) organisation du livret de règles est peut-être là encore en cause.

Il suffit dans un premier temps de noter les caractéristiques (Puissant, Vif, Galant, Fin) de son personnage en leur allouant des points. C’est assez commun et plutôt facile, car on obtient rapidement une ébauche de style. Un personnage Fin et Vif, mais peu Puissant est un archétype assez répandu, tout comme le fameux personnage Puissant et Vif, mais assez peu Galant et Fin.

C’est clair et simple. On obtient rapidement un premier trait de crayon du personnage que l’on va incarner.

Les Archétypes

Les compétences, elles, sont déterminées par un système de professions, comme dans beaucoup d’autres jeux.

Ici, il s’agit des professions occupées par le personnage avant de devenir une Lame.

Et l’idée est de piocher deux professions dans une liste (en utilisant un paquet de cartes spécial) dont chacune va permettre d’allouer des points dans des compétences particulières.

Un Mousquetaire, par exemple, aura 3 points à rajouter en Escrime, et 1 en Érudition.

Si auparavant il a été Libertin, il pourra encore rajouter 3 points en Escrime, ce qui lui en fera 6 au total en commençant le jeu, et 2 en Érudition, ce qui fera un total de 3 points dans cette compétence au début de ses aventures avec les Lames.

On peut choisir de construire un personnage que l’on a en tête (un Noble devenu Espion dans une cour étrangère par exemple), ou bien laisser le hasard choisir et trouver a posteriori une histoire qui explique un choix de carrière parfois étonnant.

Les Arcanes

L’univers des Lames étant magique, tout au moins fantastique, les Arcanes sont des cartes de tarot un peu modifiées qui servent surtout à apporter dans le jeu une sorte de couche “mystique” à la création et plus tard à l’interprétation des personnages.

Chaque personnage peut tirer au sort de 0 à 2 cartes dans ces Arcanes. Chaque carte donne un bonus à une compétence, mais marque aussi le personnage d’un destin et d’un défaut particulier. Elles serviront plus tard également à accéder à des réussites fulgurantes ou des échecs mémorables. Elles introduisent un peu plus de piment et de rebondissement dans l’action.

Je n’ai pour le moment pas vraiment pu observer leur intérêt réel, mais elles sont une bonne idée.

Sans être une sorte de point de destin ou d’héroïsme, chers à d’autres jeux, elles permettent d’introduire une dose (minime) de narration aléatoire dans le déroulement des événements, puisqu’elles seront susceptibles d’être tirées et activées à tout moment dans le cours du jeu.

L’Escrime

Comme nous sommes dans un jeu de cape & d’épée, il est naturel que l’art de l’escrime soit une donnée à part dans la création du personnage.

Au départ, tous les personnages des joueurs étant des Lames, on considère donc que, roturiers ou nobles, gens de lettres ou de cour, ils maîtrisent suffisamment l’escrime pour être de fins bretteurs.

Il est donc rare qu’un personnage commence avec moins de 5 ou 6 en Escrime.

Plus encore, chaque personnage peut choisir une école d’escrime parmi celles qui étaient en vogue à l’époque. Chaque école (germanique, française, italienne et espagnole) étant là encore associée à une couleur d’un jeu de cartes.

Suivant l’école choisie, le personnage aura à cœur un style particulier (offensif pour les écoles germanique et française par exemple) en rapport avec la couleur de la carte symbolisant également la caractéristique associée. L’école germanique est associée à la Griffe et donc à la caractéristique Puissant, on comprendra donc que le style de ses pratiquants soit offensif et brutal, et que les Feintes et les Bottes que le personnage peut apprendre soient tournées vers des effets de cette nature.

Car oui, bien évidemment, tout comme la fameuse Botte de Nevers décrite par Paul Féval dans Le Bossu, les personnages sont des épéistes assez entraînés pour connaître et pratiquer eux aussi des coups mortels ou des ruses particulières.

Nous sommes dans un jeu de duels et de combats où les Lames vont devoir ferrailler autant que séduire pour parvenir à sauver la France des machinations des Dragons. Il était donc important que cet aspect soit bien développé, et nous verrons plus tard comment le système des cartes y participe grandement.

Pour l’heure, le personnage peut choisir un certain nombre de Feintes et de Bottes dans la liste que son style d’escrime lui propose.

Les cartes

Le personnage créé, il faut le mettre en mouvement.

Le système ne sert finalement qu’à cela : résoudre les conflits et obstacles dramatiques que nos Lames rencontreront sur leur chemin et qu’ils devront surmonter pour accomplir leur mission au service de Son Éminence le Cardinal Mazarin.

Le cœur de ce système n’est pas un lancer de dés, mais un jeu de cartes.

Les quatre couleurs classiques y ont cependant été remplacées par des couleurs plus évocatrices de l’univers des Dragons des Lames du Cardinal. Le pique devient griffe, le cœur devient sang, le trèfle devient souffle et le carreau devient écaille. Chaque carte représente sa valeur contre d’autres cartes. Ainsi un as sera-t-il plus faible qu’un sept. Et à la traditionnelle trilogie valet-dame-roi se substitue en haut de l’échelle de valeurs la tétralogie des figures vyvernecavalierdameroi. La vyverne est l’équivalent du cavalier dans le tarot classique, mais, couleur locale oblige, il s’agit là d’une monture draconique.

Avant de savoir comment résoudre une action, il faut appuyer sur le fait que les règles insistent sur ce qu’elles appellent la réussite automatique : qu’une action soit automatiquement réussie lorsque le personnage qui l’entreprend possède une compétence adéquate deux fois plus forte que le niveau de difficulté requis par le meneur de jeu pour la mener à son terme.

C’est une disposition qui à mon sens devrait être plus mise en avant dans ce jeu comme dans d’autres.

Lorsque cependant il est nécessaire de savoir si une action a pu réussir ou échouer et que l’on est dans l’incertitude, le système de résolution est très simple.

Une action décrite par un personnage est testée suivant une compétence adéquate déterminée par le meneur en fonction de cette description. Le joueur tire donc un nombre de cartes égal à son score dans la compétence. Il compte ensuite le nombre de cartes de la couleur du signe associé à la compétence, et chacune d’elles lui rapporte un point, qu’il additionne afin de battre la difficulté de l’action qui avait été édictée par le meneur. S’il tire une figure du signe de la compétence, cette figure lui rapporte deux points.

Si mon personnage, Pierre Lamarque, désire débusquer d’éventuels assaillants dans une rue sombre de Paris à la nuit tombée, il doit battre une difficulté de 3 (considérée comme “très difficile”). Il possède une compétence de Vigilance (caractéristique Vif, associée au Souffle qui est une carte noire) de 5. Il ne peut donc pas réussir automatiquement (il aurait fallu avoir 6). Il tire donc cinq cartes. Il obtient trois cartes noires et deux cartes rouges. Les trois cartes noires lui rapportent donc 3 points, insuffisants pour battre la difficulté, car on se trouve sur une égalité. Mais si parmi ces trois cartes noires se trouvait une figure de Souffle (la Dame, par exemple), elle lui rapporterait 2 points et non 1 seul, ce qui porterait son total à 4, suffisant pour vaincre la difficulté et repérer les malandrins embusqués non loin de là.

Il existe aussi un système d’amélioration de réussite. Pour chaque point obtenu au-dessus de la difficulté demandée, on obtient un point de Panache, qui permet de choisir un effet supplémentaire.

Cependant, il ne s’agit pas là, et c’est bien dommage, d’un effet que le joueur peut librement décrire. Nous ne sommes pas, et encore une fois je le regrette, dans des règles narrativistes. Il ne s’agira ici que de diminuer le temps nécessaire à l’accomplissement de la tâche, ou de faire des dégâts supplémentaires.

À l’usage, les cartes sont extrêmement agréables à utiliser et donnent une ambiance réelle. Leur dessin n’y est pas pour rien, bien entendu.

Mais il faut souligner que le mécanisme qui permet de défausser un nombre de cartes égal ou inférieur au niveau de la caractéristique associée à la compétence que l’on doit tester permet aussi de jouer réellement avec le sort, de prendre des risques, de les calculer, de s’amuser avec le système de résolution autant qu’avec l’action elle-même.

L’épée

Cet aspect ludique est encore renforcé lorsque l’on s’intéresse à ce qui fait tout le sel d’un jeu de cape & d’épée : l’escrime et les combats à l’épée.

J’aimerais bien avoir l’avis de quelqu’un qui a approché l’escrime en tant que telle, voire qui la pratique ou l’a pratiquée. Parce qu’il me semble qu’une grande réussite des Lames soit la simulation de cette situation étonnante où l’un des assaillants prend le dessus sur l’autre et pousse son avantage pour que son adversaire soit acculé, en gardant ou laissant l’initiative.

Car dans la mécanique des Lames, tout est affaire d’initiative, de momentum.

Le principe est sensiblement le même que pour la résolution des actions simples, à ceci près que le temps est plus découpé, et que la valeur de la carte jouée en dernier par le personnage détermine s’il garde la main (l’initiative de l’attaque) pour la suite ou s’il la perd au profit de son ou ses adversaires.

Si l’on ajoute que les cartes noires ne servent qu’à attaquer et les cartes rouges à défendre, que l’on peut poser une suite de cartes de valeur décroissante pour enchaîner les coups ou s’en défendre, et que les figures peuvent déclencher des bottes avec des effets parfois dévastateurs (en attaque, en défense, et aussi en contre-attaque), on comprendra que la simplicité apparente du système cache en fait une grande potentialité de tactiques différentes.

J’ai donc eu l’impression de réellement pouvoir construire des assauts comme on les aime dans les films classiques, dans ces combats où les fers se croisaient et se paraient à l’envi, mais aussi où l’adresse et l’intelligence des duellistes pouvaient s’exprimer spectaculairement.

C’est là que les différents styles des écoles d’escrimes décrites dans le jeu peuvent donner une couleur vraiment unique à l’épéiste de papier que l’on peut incarner. Jouer un adepte de l’escrime italienne, par exemple, implique de beaucoup défendre pour espérer placer une contre-attaque fulgurante avec une botte imparable. Au contraire, si l’on incarne un duelliste de l’école germanique, on va prendre des risques et attaquer en force pour dépasser les défenses de l’adversaire par des assauts brutaux et dévastateurs.

Le système de combat possède quelques autres subtilités que je ne détaillerai pas, mais qui toutes vont dans le même sens.

Points d’Unité et de Jusquiame

Le modèle des aventures de cape & d’épée est sans conteste Les trois mousquetaires d’Alexandre Dumas, dont les Lames empruntent le côté romanesque, mais aussi et surtout les valeurs de loyauté et les liens tissés entre les héros.

La fameuse devise “Un pour tous et tous pour un” est ainsi reprise dans les règles mêmes du jeu, grâce aux Points d’Unité.

Ils symbolisent la complicité et les liens qui peuvent se nouer entre les héros au fil de leurs aventures.

Ils sont placés dans un pot commun alimenté par le meneur lorsque les actions concertées des personnages ont abouti à un succès. Les personnages peuvent les dépenser pour accomplir des exploits de groupe : transférer une ou plusieurs cartes à un autre personnage et donc lui permettre de placer une feinte ou une botte, coordonner des attaques, regagner des points de Ténacité (équivalent à l’endurance dans d’autres jeux), former un autre membre du groupe en lui apprenant une compétence qu’il possède à un niveau inférieur…

Le meneur, de son côté, dispose de Points de Jusquiame, qui servent également d’atouts pour les adversaires des Lames, et permettent d’équilibrer quelque peu la donne, ou de la corser si nécessaire.

La prise en main

Si l’on met de côté l’obstacle que représente la désorganisation du livret de règles dans l’apprentissage du système en cours de partie, la prise en main est assez rapide et facile.

Le côté ludique de la manipulation des cartes aide manifestement à intégrer les différents mécanismes et à les mémoriser. On se prend vite au jeu de la tactique, de l’union des Lames entre elles et de leur groupe qui vont ensemble vaincre les ennemis de la Couronne.

Il n’y a pas comme dans certains jeux, de calculs à effectuer pour connaître une difficulté ou une réussite, ce qui est un bon point quand on joue en soirée, voire dans la nuit.

On ne se retrouve pas non plus avec des brouettes de dés à jeter.

Le seul inconvénient est que l’on doit souvent mélanger le paquet de cartes, ce qui peut être lassant.

Mais c’est un défaut mineur.

L’impression en jeu est donc très bonne en ce qui concerne le système et sa capacité à produire une résolution fluide.

Qu’en est-il maintenant des aventures elles-mêmes ?

Le scénario

Incarnant Pierre Lamarque, un ancien notaire devenu espion à la cour d’Angleterre et recruté par Laincourt pour faire partie des nouvelles Lames du Cardinal, j’ai participé à l’aventure lors du scénario intitulé La Volte des Dupes.

Je ne dévoilerai pas l’intrigue ici, pour me concentrer plus sur mes impressions durant le jeu.

Les quatre joueurs du groupe ainsi que le meneur étions tous les cinq biberonnés depuis notre plus tendre enfance par les exploits de cape et d’épée, les mousquetaires et autres duellistes, il nous a donc été facile de nous projeter dans le Paris de 1643, d’arpenter les ruelles sombres, les cachots du Châtelet, les couloirs du Louvre, les antichambres d’un hôtel particulier, les bas-fonds de la Cour des Miracles ou même la tour désaffectée des vieux remparts de Philippe Auguste où le final eût lieu.

Le système a été simple et rapide à prendre en main, les réflexes se sont vite installés.

Nous avons été gênés par cette satanée absence d’organisation du livret des règles pour rechercher quelques points particuliers qui ne sont pas toujours clairs.

Cependant, l’attrait du système des cartes a fonctionné parfaitement.

À tel point que nous avons préparé une table virtuelle sur Roll20 pour continuer nos aventures.

À ce propos, Roll20 dispose, même en accès gratuit, d’une feuille de personnage en français parfaitement fonctionnelle pour jouer aux Lames du Cardinal. Il est cependant nécessaire de paramétrer soi-même un jeu de cartes pour que la simulation soit complète.

Alors chères futures Lames du Cardinal, vous savez ce qu’il vous reste à faire… la Couronne et son Éminence comptent sur vous ! Et pour vous mettre un peu dans l’ambiance, je ne saurai trop vous enjoindre de regarder l’excellente saison 1 de la série britannique The Musketeers. Les deux saisons suivantes sont plus décevantes.

https://youtu.be/pmDWE8Jy9EE

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Le grand jour est arrivé !

Après de nombreuses années d’efforts souvent entrecoupés hélas par les vicissitudes de la vie, je suis arrivé au bout de l’écriture de ce deuxième roman, puis au bout de sa préparation pour une publication en autoédition.

Le Choix des Anges est donc disponible à la vente tant dans sa version papier (livre broché de 296 pages en format A5, au prix de 12,66 €) que dans sa version numérique (format ePub, au prix de lancement de 2,99 €).

La version Kindle est retardée par le système de validation de KDP mais sera je l’espère disponible très vite.

Vos commentaires et vos partages sont bien entendu les bienvenus.

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Version papier

  • Date de publication 2018 (1ère édition), 2021 (2e édition)
  • Urban fantasy
  • 292 pages
  • Format A5, couverture rigide à signet
  • ISBN 9791093734033
  • Prix : 24€
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Version numérique

  • Date de publication 2018 (1ère édition), 2021 (2e édition)
  • Urban fantasy
  • Format ePub3 compatible ePub2 et Kobo
  • 1,4 Mo sans DRM
  • ISBN 9791093734026
  • Prix : 5,99€
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  • À paraître en 2021 (texte de la 2e édition)
  • Lu par l'auteur
  • Urban fantasy
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