
De l’art de présenter un jeu de rôle, suite de la discussion en 2025
De l’art de présenter un jeu de rôle, suite de la discussion en 2025
De la suite dans les idées…
Il y a dix ans, en 2015, j’ai fait le constat amer de ne pas trouver de scénario ou de campagne de jeu de rôle écrite ou présentée de façon à faciliter l’appropriation par le Meneur de jeu. J’en avais tiré un article, publié sur ce site, où je tentais de résoudre l’équation impossible qui consiste à montrer les embranchements essentiels d’un scénario de jeu de rôle (puisque tout ne peut être prédit, les nœuds fondamentaux de l’intrigue, eux, doivent être signalés de façon claire) sous la forme d’une mindmap ou carte heuristique.
Je vous renvoie à la lecture de ce premier article, qui vous sera utile pour la suite, car je vais reprendre le fil de mes réflexions sans revenir en arrière.
J’étais resté quelque temps sur le logiciel MindNode, puis j’ai découvert Scapple, l’application Mac créée par les concepteurs de Scrivener. Vous savez quelle admiration je voue à Scrivener, qui me sert pour quasiment tout ce que j’écris, donc cela ne vous surprendra pas de savoir que je me suis rué sur Scapple et que j’en ai usé et abusé pour beaucoup de choses, depuis la conception des intrigues de mes romans jusqu’à celle de mon réseau informatique domestique. Et bien sûr, en passant par mes scénarios de jeu de rôle. Qu’ils soient les miens ou ceux que je voulais prendre en main pour les maîtriser à mes camarades de jeu, d’ailleurs.
Je vous en glisse quelques exemples ici.
PDF
n’était pas chose aisée.
Et puis, bien évidemment, depuis une certaine pandémie virale, les rôlistes comme les autres personnes se sont mis à faire leurs activités via internet. Nous avons donc assisté à l’explosion des plateformes de jeu de rôle en ligne du type Roll20, Let’s Rôle, ou FoundryVTT. Or, ces plateformes ne se contentent pas de vous proposer un moyen d’interagir à distance le temps d’un scénario. Elles ont aussi peu à peu fait entrer des mécaniques de jeux vidéo dans leurs possibilités, à savoir : la gestion des personnages et de leurs caractéristiques chiffrées, puis, plus tard, et cerise sur le gâteau, la constitution de réels environnements (des scènes) avec des fichiers PDF
pouvant être partagés avec les joueurs pour expliquer un contexte.
Pourtant, si les plateformes de jeu en ligne sont attirantes, elles restent un peu prisonnières d’une configuration précise (monde, système, scénario) et d’une connexion à internet. Il leur manque également la capacité à créer une réelle carte mentale.
Or, depuis trois ans, j’ai découvert une application nommée :
Obsidian
Obsidian est une application multiplateforme de gestion de notes, capable de constituer ce que l’on appelle un réseau de savoir, ou réseau de connaissances (personal knowledge manager en anglais, ou PKM). Son principe est tout bête : dans un coffre (donc, un dossier informatique), l’application met en relation par des liens hypertextes que vous créez vous-même des fichiers textuels contenant des notes écrites ou des médias divers (images, sons, vidéos), à la manière d’un Wiki. Cependant, sa puissance va bien au-delà d’un Wiki.
Obsidian est capable de gérer les métadonnées de ces notes, dont des tags, de générer des notes journalières, et même de… créer une mindmap avec vos notes…
Si vous voulez lire quelque chose de bien plus approfondi sur le sujet, allez lire l’article de Lionel Davoust, et suivez ce qu’il va écrire à partir de maintenant sur cette application et la façon de s’en servir, car je pense que ce sera une mine d’informations cruciales. Puisque c’est grâce à Lionel que j’ai découvert Obsidian, il n’est que justice de vous le conseiller.
Des tas de gens l’utilisent pour garder trace de leurs notes personnelles, de leurs réflexions, de leur journal intime, voire pour concevoir l’intrigue de romans de fantasy, comme Lionel Davoust. Il y a même des gens qui s’en servent pour le jeu de rôle depuis bien longtemps… mais c’est surtout pour gérer leurs parties comme sur une plateforme du genre de Roll20.
Il y a bien des fans anglophones qui ont transformé Obsidian en un véritable gestionnaire de partie de jeu de rôle, mais c’est seulement pour D&D, forcément… ce qui n’est pas mon propos. Mon objectif est simplement d’écrire et de présenter un scénario de manière non linéaire, pas de gérer les aspects techniques d’une partie.
J’ai moi-même adopté Obsidian pour consigner mes notes de joueur lors des parties que j’ai suivies depuis un an.
J’ai donc, lorsque la fonction canva
d’Obsidian est apparue, su qu’il fallait qu’un jour j’expérimente la préparation d’un scénario en me servant de ce logiciel, que j’avais déjà adopté pour gérer mes notes personnelles.
C’est ce que j’ai fait.
Et, franchement, je crois que j’ai trouvé un Graal.
Alors, comme toujours, je partage avec vous.
Le seul prérequis est que vous vous soyez familiarisé avec Obsidian lui-même, c’est-à-dire avec :
- La syntaxe Markdown, ou là en français,
- L’utilisation des liens entre des notes,
- Les conseils de Lionel Davoust,
- L’utilisation des propriétés (les métadonnées),
- Et c’est tout…
Une fois que vous aurez expérimenté, trafiqué, joué avec tout cela, vous pouvez embarquer avec moi. Je vous récompenserai en partageant avec vous un coffre-kit contenant tout ce qui, à mon avis, est nécessaire pour écrire ou présenter un scénario de jeu de rôle grâce à Obsidian.
Obsidian pour un scénario, mise en place
Maintenant, trêve d’explications. Si vous avez suivi mes conseils un peu plus haut et que vous avez un peu pris en main Obsidian, vous devez déjà être à moitié convaincu de faire l’essai sur un scénario. Alors voilà comment, personnellement, je me sers de l’engin.
Un coffre par scénario ou campagne
Pour ne pas mélanger les genres, je vous conseille de créer un coffre spécifique pour chaque scénario ou chaque campagne, ainsi, vous garderez un coffre peu chargé, ce qui permettra de le partager plus facilement avec celles & ceux qui seront intéressés pour faire jouer ce scénario ou cette campagne précise, vous évitant de devoir trier ce que vous transmettrez.
Nous verrons plus loin que vous pourrez transférer ou copier les notes de comptes-rendus des sessions dans votre coffre personnel pour en garder trace. Vous pouvez d’ailleurs faire de même avec tout le scénario si vous gardez à l’esprit une règle simple :
Paramétrer le coffre du scénario de façon à être compatible avec la structure et les métadonnées de votre coffre principal.
Les quelques réglages qui suivent peuvent vous y aider.
Cependant, ils sont surtout là pour optimiser les outils intégrés à Obsidian (recherche, liens, etc.).
Les plugins
Voici les plugins
(ou modules
dans la langue de Molière) que je vous recommande d’activer.
Les modules de base :
Aperçus de page
: vous pourrez directement voir une note en restant sur la précédente, c’est très utile en cours de jeu,Canvas
: c’est la fonction qui permet à Obsidian de remplacer Scapple,Compositeur de note
: utile en préparation, surtout,Espaces de travail
: pour enregistrer la disposition de vos divisions de fenêtre,Importateur de fichiers Markdown
: c’est surtout utile en préparation, pour importer des notes déjà prises ailleurs,Modèles
: pour rapidement créer des notes correspondant à une présentation particulière (pour les personnages, par exemple),Notes quotidiennes
: pour enregistrer les sessions de jeu dans des notes que vous pourrez suivre facilement par date,Palette de commandes
: très pratique en préparation comme en jeu,Rechercher
: bien évidemment, ça vous fera gagner un temps très précieux en cours de jeu.
Les modules communautaires :
Dataview
: ce module est une pierre angulaire du coffre, car il vous offre la possibilité de créer des tableaux et des listes de notes suivant des critères bien précis, et grâce à une petite syntaxe de code très simple à apprendre (un peu comme le Markdown).Note Refactor
: pour scinder ou condenser vos notes à volonté.QuickAdd
: pour créer une note de façon encore plus rapide, avec le modèle adéquat et dans le dossier que vous aurez décidé à l’avance.Tag Wrangler
: pour démultiplier les possibilités des tags en les imbriquant (par exemple#blessé/gravement
ou#blessé/légèrement
).Templater
: pour démultiplier les possibilités des modèles de notes.Clone Vault
: qui me sert à créer un coffre vierge (mais avec tous mes réglages, les modèles et la structure de fichiers déjà en place) pour créer un nouveau scénario.
Et pour débuter, je pense que c’est bien suffisant.
Vous pouvez aussi avoir envie d’essayer :
Leaflet
: pour créer des cartes géographiques ou des images interactives. Je ne l’ai pour le moment pas essayé.
Les dossiers
La structure des dossiers de votre coffre est une question majeure. Elle va en effet guider la façon dont vous allez gérer, catégoriser, donc retrouver visuellement vos notes dans une arborescence dont nous avons tous & toutes l’habitude depuis des dizaines d’années avec l’informatique moderne.
D’ailleurs, cela me fait penser qu’un jour, il faudrait que je vous parle de la façon dont Obsidian a aussi chamboulé cette organisation sur mon système informatique au sens large. Mais ce sera pour un futur article.
Revenons à nos moutons… et à nos dossiers.
Comme il est facile de se perdre dans trente niveaux de dossiers imbriqués (je suis sûr que vous savez de quoi je parle, si vous allez fouiller dans votre propre ordinateur, vous allez retrouver un dossier qui contient cinq dossiers dont chacun en contient trois autres au moins, dont chacun aura quatre subdivisions, et ainsi de suite, jusqu’au vertige…), la ligne de conduite est de commencer par une structure la plus simple et générique possible.
Celle que je propose pour votre coffre scénaristique est inspirée par le modèle ACE, que promeut une figure très connue de la mouvance Obsidian, Nick Milo. Si vous suivez le lien, vous tomberez sur l’article où Nick explique le concept du classement ACE, mais je vais résumer à très gros traits ici, pour aller à l’essentiel.
ACE est l’acronyme pour Atlas (des notes permettant de trouver d’autres notes grâce à une recherche spatiale, depuis l’échelle symbolique d’un continent jusqu’à celle d’un brin d’herbe), Calendrier (des notes permettant de trouver d’autres notes grâce à une recherche temporelle, donc suivant des dates), Efforts (des notes permettant de regrouper des notes sur des domaines où vous concentrez beaucoup des efforts de votre vie). On y adjoint le dossier «+» pour entreposer les notes que l’on ne sait pas encore classer, et le dossier «X», pour Extra, où l’on entrepose les notes de «soutien» aux autres notes (les images, les documents sources, les templates).
Dans le cas d’un coffre scénaristique, nous allons plutôt parler de :
- + : Tout ce qui regroupe les comptes-rendus de partie, scindés en autant de groupes avec lesquels vous avez joué le scénario au fil du temps,
- Acteurs : tout ce qui concerne des protagonistes, que ce soit des personnes physiques ou des organisations
- Chronologie : tout ce qui permet de gérer ce qui arrive dans l’univers de jeu, comme les scènes, les faits passés, etc.
- Éléments : tout ce qui fait le décor de votre univers, comme les lieux et les objets.
- X : tout ce qui est support des autres notes, comme vos modèles, les images, etc.
J’ai hésité à créer une structure de dossiers plutôt inspirée par une plateforme de jeu en ligne, notamment FoundryVTT, puisque c’est celle qui est la plus geek, et surtout celle que mon groupe de jeu utilise. Mais ma structure me semble plus simple et plus lisible (la catégorie Journaux de FoundryVTT regroupe à la fois des Éléments et des comptes-rendus de session de jeu) et, si nous le voulons vraiment, il existe des plugins
de part et d’autre (donc certains pour Obsidian et d’autres pour FoundryVTT), de manière à faire se synchroniser les deux, quelle que soit la structure. Pour ma part, je n’en vois pas encore le besoin. Mais cela viendra peut-être, qui sait ?
Les propriétés
Les propriétés des notes d’Obsidian sont en fait des métadonnées, qui caractérisent le fichier texte sur le sujet dont il traite. Elles permettent ensuite de raffiner les recherches que vous pourrez faire, soit sur le moment, soit à l’aide du plugin
Dataview, et de créer des tables et des listes automatiquement.
Ces propriétés auront deux rôles fondamentaux :
- Permettre une intégration facile dans votre coffre personnel si besoin (c’est-à-dire, comme nous le verrons plus loin, de garder une trace de vos sessions de jeu avec vos camarades ou même de transférer tout le coffre du scénario dans le vôtre),
- Permettre le fonctionnement correct des requêtes faites avec Dataview sur des notes récapitulatives (par exemple sur la note qui répertorie la liste des membres d’une faction parmi vos PNJ).
Je vous propose d’utiliser les propriétés suivantes :
domaine
: la valeur que je propose pour toutes vos notes dans le coffre du scénario estjeu de rôle
.type
: les valeurs utiles serontchapitre
,événement
,chronologie
,personnage
,organisation
,lieu
,objet
,session
.univers
: vous y indiquerez, par exemple, Mythe de Cthulhu, ou Pendragon, ou médiéval fantastique.système
: le système de jeu que vous utilisez.Campagne
: le nom de votre Campagne.tabledejeu
: le nom de votre groupe de jeu actuel (celui avec lequel vous jouez le scénario actuellement).joueurs
: les noms des joueurs.meneur
: le nom du Meneur (a priori c’est vous).- date : la date de création de la note. Ça peut être utile dans certains cas.
dateSession
: dans les journaux de parties.numSession
: dans les journaux, là aussi.scénario
: le nom du scénario, bien évidemment. C’est surtout utile si vous voulez transférer les notes dans votre coffre principal ensuite.appartenance
: permet de suivre les allégeances d’un personnage.propriétaire
actuel
: pour tenir compte du propriétaire d’un objet ou d’un lieu.localisation actuelle
: pour tenir le compte de la localisation d’un personnage ou d’un objet.lieuxliés
: pour lister les lieux où la scène pourra se dérouler.scènesliées
: pour avoir une idée des scènes qui peuvent mener à celle-ci, ou de celles qui peuvent suivre.personnages
: pour avoir sous la main les protagonistes qui pourront intervenir dans la scène ou dans le lieu.
Il pourra y en avoir d’autres, selon vos besoins. Ceux-ci sont à mon avis les essentiels.
Les tags
Par le passé, j’ai été un grand amateur de tags. Je les utilisais pour catégoriser mes idées suivant des domaines de savoir (exemple : tout ce qui touche à l’immunologie devenait #immunologie
, ou, en jeu de rôle, #jdr
, tout ce qui est une machination, #machination
, un complot, #complot
, un personnage, #personnage
).
Mais j’ai bien vite découvert un grave défaut chez eux : leur tendance à se multiplier de façon incontrôlée. Si bien qu’au bout d’un moment, vous vous retrouvez avec pas moins de 5 (cinq !) tags pour exprimer la même idée (#machination
et #complot
, déjà, c’est un peu déroutant, lequel utiliser ?), et que, finalement, ils ne vous permettent plus d’étiqueter clairement, facilement, et efficacement une note. En effet, j’avais des tags pour chaque domaine, et, comme ils se recoupaient, je ne parvenais pas à savoir où les classer et je ne les retrouvais pas lorsque j’en avais besoin.
J’ai donc pris une décision drastique :
Les tags sont réservés à des états d’un fichier, d’une note, comme lorsqu’on décide qu’une recette est #ratée, ou #réussie, ou qu’un plat est #trop cuit, ou que le texte d’un roman est #en cours de correction ou bien #achevé.
En jeu de rôle, les tags seront utilisés de la même façon, pour marquer l’état d’un concept (#décédé
, #empoisonn
é, par exemple pour les personnages, ou #détruit
, #à découvrir
, pour les lieux, les objets).
Pour les autres catégorisations, il y a les propriétés
d’Obsidian, c’est-à-dire les autres métadonnées. Qui sont, finalement, des catégories différentes de tags.
Et là, miracle, ça fonctionne ! Pour moi en tous les cas, il se peut que, pour vous, ce soit moins clair, car nous sommes tous différents, et nos cerveaux n’ont pas forcément la même façon de penser. C’est en tous les cas la manière la plus simple et la plus efficace (les deux étant souvent liées) que j’ai trouvée pour moi, à ce jour.
Les modèles
Comme je vous l’ai dit plus haut, il est intéressant de se servir de modèles de notes, ce que les Anglais appellent des templates. Cela fait gagner beaucoup de temps, et permet de retrouver plus facilement la note dont vous aurez besoin au moment où vous en aurez besoin.
Vous devrez créer un modèle de note pour chaque type.
Je vous conseille :
- Chapitre (scène majeure)
- Événement (scène mineure)
- Personnage
- Organisation
- Lieu
- Objet
- Session
Pour l’exemple, voici ce que comporte une note de type personnage et un modèle d’événement.
Vous remarquerez l’utilisation dans ces modèles de listes de tâches. Je crois que c’est le système le plus utile pour être certain de se souvenir de faits marquants à utiliser en jeu. C’est avec cela que je gère les Aspects narratifs des jeux comme FATE.
Ma pratique : la préparation du scénario
Alors voilà, tout est prêt dans Obsidian. Maintenant, il s’agit soit d’écrire votre scénario, soit de préparer votre prochaine session de jeu avec vos camarades.
Personnellement, voici comme je m’y prends.
Créer les notes
C’est évident, mais ça va mieux en le disant : tout part de la création de vos notes.
Une note par personnage, une note par objet, par lieu, par scène, par événement…
Une note doit symboliser une pièce du jeu, et chaque pièce du jeu doit être portée par une note et une seule.
Quel que soit votre point de départ, je crois qu’une bonne façon de faire est d’écrire vos propres notes, avec vos propres mots, c’est-à-dire sans copier-coller le texte de ce scénario que vous avez trouvé si cool dans le commerce et dont vous avez acquis le PDF
.
Pourquoi ?
Parce que c’est ainsi que vous retiendrez le mieux les éléments dont il est question. Votre cerveau aura lui-même synthétisé et produit la note, il aura donc déjà fait le chemin neuronal pour se l’approprier.
Il existe bien sûr des exceptions.
En pratique :
- Je me sers beaucoup du module QuickAdd, qui facilite la création d’une note précise selon son type.
- Je crée, dès que je le peux, des liens entre les différentes notes (par exemple, un personnage possède un objet important pour l’intrigue, alors je crée déjà un lien depuis la note du personnage vers cet objet, même si la note de l’objet n’existe pas encore. Il me suffira de cliquer sur le lien pour créer la note plus tard).
- Sur les notes créées à partir d’autres notes, comme je viens de le décrire, j’utilise le module d’insertion de modèle.
Les cartes mentales du scénario
Mais, me direz-vous, jusqu’à présent, on ne parle que de texte, jamais de cartes mentales. Tu nous as baladés, hein, Germain !
Pas vraiment.
C’est que, dans ma façon de voir les choses, la carte mentale a besoin des notes écrites, et vice-versa.
Il est donc utile de construire la carte mentale en même temps que l’on rédige ses notes.
C’est là qu’interviennent les Canvas d’Obsidian.
Le principe est simple : un tableau blanc infini, sur lequel vous pouvez accrocher une note (au hasard : une scène) que vous allez ensuite relier à l’autre note (une autre scène ? Un personnage qui intervient dans la première ? Un objet ou un indice que l’on peut y trouver ?).
Une véritable carte mentale, avec en prime l’avantage de pouvoir accéder à chaque note soit en la survolant (c’est là que le plugin
Aperçu de page est très utile), soit en cliquant dessus pour l’ouvrir dans un nouvel onglet. Ou dans une division de la fenêtre principale, juste à côté ou en dessous, c’est encore mieux.
En préparant le scénario, vous pouvez donc visualiser chaque nœud important de l’intrigue, placer les éléments essentiels à ne pas oublier.
Je vous conseille également d’adopter un code de couleurs pour différencier au premier coup d’œil un personnage d’un événement, d’un objet ou d’une scène. Personnellement, j’ai recyclé les couleurs que j’avais configurées pour Scapple, à savoir :
- Personnage : vert,
- Chapitre ou événement : bleu,
- Objet : jaune,
- Lieu : orange,
- Question à trancher : violet.
N’hésitez surtout pas à modifier et remodifier ces cartes lorsque vous relirez ensuite le scénario. Parfois, des liens vont vous apparaître évidents lors d’une relecture, que vous n’aurez pas vus lors de votre découverte. De toute façon, cette carte est amenée à être modifiée à nouveau lors du déroulement du jeu.
Ma pratique : se servir d’Obsidian durant le jeu
Oui, la plus grande utilité d’Obsidian est là : pendant le jeu, il sera votre allié pour à la fois gérer le déroulement de façon fluide et prendre des notes, qui à leur tour, pourront influencer le déroulement futur.
Voici comment je m’y prends.
Un espace de travail dédié
Le plugin
Espaces de travail permet d’enregistrer des dispositions particulières des divisions de la fenêtre de l’application, et de les appeler lorsque vous en avez besoin. Car l’organisation spatiale des informations me semble primordiale pour être efficace dans la préparation du scénario, mais aussi dans son déroulé. Et ce ne sont pas forcément des dispositions similaires.
Quand je conçois ou prépare un scénario, j’ai besoin d’accéder à la liste des fichiers/notes, puis d’un grand espace pour placer mon tableau de carte mentale, et enfin d’un plus petit panneau pour y envoyer les notes que je regarde plus attentivement.
Par contre, lors de la session elle-même, je n’ai pas forcément besoin d’un accès à l’arborescence des notes. Je préfère avoir plus de place pour ma carte mentale et la visualisation des notes elles-mêmes, et d’y ajouter un endroit où prendre mes notes en cours de partie.
Il me faut donc deux espaces de travail distincts, que je peux rappeler quand j’en ai envie.
Prendre des notes tout en maîtrisant
Pendant longtemps, comme je suis né à une époque où les ordinateurs étaient peu répandus (euphémisme), j’ai préféré prendre mes notes de parties de jeu de rôle (mais pas que celles-là) à la main avec un simple stylo ou un crayon à papier.
Mais il serait dommage de ne pas profiter de la puissance d’Obsidian pour lui confier aussi cette tâche-là.
J’ai donc, depuis deux ou trois ans environ, commencé à prendre mes notes de joueur au clavier.
C’est moins agréable sur le moment, mais cela me permet d’être plus rapide et plus précis.
J’ai donc décidé de faire de même pour mes notes de meneur de jeu.
Le plus important, dans ces cas-là, pour moi, c’est de tenir le compte des faits marquants qui vont avoir un impact sur le reste de l’histoire.
Un coup d’avance : déjà préparer la session d’après
Voilà pourquoi je me sers des listes de tâches d’Obsidian et de quelques requêtes dataview
pour répercuter celles qui n’ont pas encore été purgées, d’une séance à l’autre. Ainsi, je ne crains pas d’oublier quelque chose de fondamental, même si nous rejouons six mois plus tard.
Ma pratique : garder une trace des sessions
Je vous ai déjà dit combien j’aime garder trace des histoires de jeu de rôle qui m’ont marqué.
Il n’y a pas de raisons que cela change avec l’âge et j’ai donc prévu d’intégrer au moins les notes que j’ai prises durant la session de jeu dans mon coffre Obsidian principal.
C’est d’une simplicité enfantine : il suffit de copier les fichiers sources, qui ne sont que des fichiers texte avec une extension en .md
, dans le coffre de destination, et le tour est joué.
Le Journal du MJ
D’ailleurs, il y a un fichier spécialement dédié à l’enregistrement de tout ce qui s’est déroulé durant le scénario. Je l’appelle, le Journal du MJ. Il compile tous les événements que j’aurai consignés dans les notes de sessions, pour peu que j’aie renseigné le champ «tabledejeu
» des propriétés de chacune. En effet, il peut arriver que nous fassions jouer un même scénario à plusieurs tables de jeu, à plusieurs groupes. Cela m’arrivait beaucoup lorsque j’avais plus de temps pour jouer. J’avais deux ou parfois trois tables de jeu, avec des personnes différentes. Bien sûr, depuis maintenant quelques années, je n’en ai plus qu’une. Cependant, il est plaisant de consigner mes aventures avec le reste de mes camarades. C’est pour cela que j’ai prévu de copier ces fichiers dans mon coffre Obsidian personnel après chaque conclusion.
Le coffre personnel pour les archives
Car, comme je vous l’ai dit au début de cet article, Obsidian n’est pas seulement un moyen de présenter des scénarios de jeu de rôle, même s’il y excelle. C’est avant tout un réseau de notes pouvant se rapporter à… à tout ce que vous voulez.
Pour moi, c’est donc à la fois un incubateur d’idées (pour la plupart ayant trait à la création artistique, mais aussi au jeu de rôle lui-même), l’endroit où je garde des références de la vie de tous les jours (comme celles des cartouches de mon imprimante, ou ma correction de vue), un journal de bord sur mes réunions professionnelles, et un réseau de savoir et de connaissances où j’entrepose des notions et concepts touchant à beaucoup de domaines.
Les coffres de mes scénarios sont donc conçus comme des unités fractales, un peu sur le modèle de ce que fait FATE avec des concepts de jeu imbriqués les uns dans les autres : ils reflètent à une échelle plus basse l’organisation de mon coffre principal.
Le principal avantage à raisonner ainsi est facile à comprendre : une unité fractale peut être intégrée dans son modèle supérieur. Il m’est ainsi trivial de copier non seulement les notes de mes sessions dans mon coffre principal, mais également tout le contenu du coffre du scénario, pour servir d’archive.
Je peux aussi décider de laisser le coffre comme il est, c’est vrai.
Mais l’intérêt de l’intégrer dans le réseau principal est d’y faire référence si d’aventure une idée de scénario connexe, soit dans le même univers, soit partageant des mécaniques de jeu similaires, soit des thèmes proches, venait à naître dans mon esprit malade. Il pourrait même arriver que cela nourrisse un autre domaine de mes centres d’intérêt.
Qui parmi vous n’a jamais été inspiré par un film ou un livre afin d’écrire un scénario de jeu de rôle ? Obsidian ne créera pas à votre place (et c’est heureux, car le plaisir de la création est dans le geste de créer lui-même, pas forcément dans le résultat), mais il pourra largement contribuer à faire émerger les idées que vous pourriez avoir envie de développer !
Alors, on essaie ?
Je ne sais si cette petite présentation aura su vous convaincre de tenter l’aventure, ou, à défaut, titiller votre curiosité pour l’outil. J’espère au moins avoir réussi à vous interroger sur la manière dont vous, vous préparez vos scénarios. Est-ce que votre méthode vous satisfait pleinement ? Est-ce que vous pensez à l’améliorer ? Est-ce que vous en restez à la bonne vieille solution du stabilo sur du papier (et si elle vous convient, c’est parfait, parce que je reconnais qu’on n’a pas trouvé plus simple) ?
Bref, ça m’intéresserait de savoir.
Et pour appuyer mon propos, rien de tel que de vous proposer d’essayer vous-même Obsidian, et donc de partager avec vous deux coffres de scénario : un coffre vierge (mais formaté selon les conseils que je vous donne dans cet article) et un coffre basé sur le scénario Whiplash que j’avais écrit il y a quelques années pour Star Cowboy, mon univers à base d’un mix de Cowboy Bebop et Mass Effect. Vous verrez que je laisse volontairement des liens non créés dans ce scénario (la note concernant L’Anneau, l’une des deux organisations criminelles que les PJ doivent affronter, est presque vierge, et d’autres liens attendent juste que vous leur offriez une note), et que les cartes mentales ne sont pas exhaustives. Cela pour vous inciter à créer vos propres liens et à prendre en main le scénario vous-mêmes, voire à broder pour votre interprétation de la Campagne.
Là encore, n’hésitez pas à revenir ici pour témoigner sur votre expérience qu’elle soit bonne ou mauvaise… ou entre les deux, comme c’est souvent le cas dans la vie.
Les trésors cachés de la Tribu Ptérophidienne
Si le Serpent à Plume existe, il n’est pas le seul de son espèce. D’autres l’ont rejoint. Ensemble, ils forment la Tribu Ptérophidienne, une communauté d’écaille & de plume, réunie autour d’une lettre électronique trimestrielle, la lettre d’écaille & de plume, ainsi que des trésors que je cache dans la Caverne du Dragon. Il s’agit d’aides pour faciliter l’écriture de textes, ou d’aides de jeu pour des univers de jeu de rôle – les miens comme ceux des autres d’ailleurs – voire des scénarios entiers.
Vous pouvez vous aussi devenir Ptérophidien ou Ptérophidienne en ouvrant les yeux de l’Esprit Guetteur, un animal merveilleux. Mais comme toutes les créatures fantastiques, il faut l’apprivoiser d’abord. Vous avez de la chance, ce spécimen se contentera de votre adresse de messagerie électronique, pour venir vous remettre à chaque saison la lettre exclusive des Ptéophidiens. Bien évidemment, votre adresse ne sera jamais cédée à des tiers.